Un constat s'impose d'évidence : le champ du social souffre d'un grave déficit démocratique.
Dans les domaines de l'action sanitaire et sociale, de la protection sociale et de l'emploi, l'évolution a été marquée au cours de la dernière décennie par la remise en cause progressive des conditions, pourtant restreintes, du débat, de l'expression et de l'intervention des salariés, des usagers et des professionnels concernés.
La sécurité sociale a été tout particulièrement touchée par cette évolution. Les assurés sociaux sont systématiquement mis à l'écart des orientations et des choix qui déterminent, au niveau tant local que national, leur couverture sociale et la gestion de cette couverture. Le fossé se creuse entre leurs aspirations, leurs besoins, dans des domaines aussi essentiels que l'accès aux soins, la compensation des charges familiales ou les retraites, et un système, une institution qui mettent en oeuvre dans ces secteurs des politiques de régression et d'abaissement des droits.
Le déficit démocratique apparaît bien comme le corollaire de la régression sociale. L'un ne va pas sans l'autre.
Le report, plusieurs fois renouvelé, des élections à la sécurité sociale et la succession simultanée des plans gouvernementaux ne sont évidemment pas le fait du hasard. Les mesures Balladur-Veil ont été assorties en 1994 d'une loi portant réforme de l'organisation administrative et financière de la sécurité sociale qui renforçait les pouvoirs de l'Etat et rétablissait le paritarisme dans la branche accidents du travail-maladies professionnelles.
Le plan Juppé étayait ses dispositifs de maîtrise comptable par de nouvelles mesures d'élagage de la démocratie : suppression des élections, réforme de la composition et du rôle des conseils d'administration, extension des prérogatives de l'Etat et du Parlement. Plus près de nous encore, la réforme de l'assurance maladie, en transformant les conseils d'administration en simple « conseils d'orientation », les a définitivement dépouillés de tout pouvoir.
L'exigence démocratique n'est pas l'exigence d'un supplément d'âme, le vernis humaniste d'une gestion par définition froide et austère de la sécurité sociale. C'est la condition d'une gestion efficace, proche des aspirations et des besoins de la population.
Il conviendrait que les dispositifs de gouvernance soient rééquilibrés au profit des conseils d'administration des caisses nationales de sécurité sociale, notamment en renforçant leurs prérogatives et en asseyant leur légitimité par le retour à l'élection de leurs représentants, c'est-à-dire les représentants des assurés sociaux et des allocataires.
La démocratie sociale doit avoir droit de cité dans notre pays. Elle représente les salariés et il faut revenir à des dispositions plus en rapport avec les attentes de ceux-ci. Or une telle réforme est cruellement absente de ce projet de loi organique. C'est pourquoi nous présentons cet amendement, qui tend à rétablir les élections à la sécurité sociale.