Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, avant d’entrer dans le vif du sujet, avec ce texte fondateur qui marquera notre politique de défense pour les prochaines années, j’aimerais m’adresser directement à nos soldats : « Vous êtes des femmes et des hommes d’exception, engagés en France et aux quatre coins du monde. Votre combativité est inégalable. Votre abnégation est un modèle pour tous. » Je veux leur dire, au nom du groupe RDPI, combien nous sommes fiers d’eux. Nous leur témoignons toute notre reconnaissance.
Je crois qu’au fond, dans cet hémicycle, nous défendons tous un objectif commun : protéger notre population et notre souveraineté. Pour ce faire, il importe d’accorder à nos armées les moyens adéquats. Nos visions des choses et les manières d’atteindre cet objectif sont multiples, mais, jusqu’à présent, nous avons toujours su avancer ensemble. Je forme le vœu que les débats de ces prochains jours se déroulent sereinement et qu’ils soient constructifs. J’espère que nos discussions nous permettront d’y voir plus clair, en particulier quant aux moyens budgétaires de cette programmation militaire.
Si, finalement, il y a lieu d’augmenter l’enveloppe budgétaire, nous en débattrons. Ce texte prévoit l’attribution progressive au budget des armées de moyens financiers considérables pour leur permettre de rattraper le retard d’investissement pris depuis trente ans, sans pour autant déséquilibrer le budget de la Nation ou réduire d’autres postes de dépenses nécessaires aux Français.
Si, en revanche, il y a lieu de maintenir la même enveloppe globale, ce débat sera l’occasion de comprendre où les coupes budgétaires doivent se faire pour compenser les nouvelles dépenses à intégrer.
En ce qui concerne le groupe RDPI, nous faisons le choix de la confiance en notre état-major, avec lequel ce projet de loi de programmation militaire a été minutieusement pensé et élaboré, et en notre ministre des armées.
Nous ne souhaitons pas rigidifier le travail de l’état-major. Il faut lui laisser la latitude nécessaire pour s’adapter à tous les défis.
Au cours de ces prochains jours, notre groupe vous proposera plusieurs amendements sur des sujets qui nous tiennent à cœur, par exemple pour compléter les missions de l’Office national des combattants et victimes de guerre, afin de le conforter dans son rôle de relais territorial de l’action mémorielle du ministère.
J’en profite pour saluer le travail de Mme la secrétaire d’État en charge des anciens combattants et de la mémoire, pleinement engagée aux côtés des anciens combattants et des blessés de guerre, notamment grâce au remarquable plan d’accompagnement des blessés 2023-2027, présenté le 10 mai dernier, ou encore à la disposition visant à exonérer certains étudiants, sur critères sociaux, du paiement des droits d’inscription dans les lycées de défense.
Dès 2017, le Président de la République a engagé une politique de rupture avec ses prédécesseurs afin de mettre un terme à plusieurs décennies de diminution de nos capacités militaires.
Dans le cadre de ce projet de loi de programmation militaire pour les années 2024 à 2030, il est essentiel que la France continue de renforcer ses moyens à la fois pour garantir son autonomie stratégique et assurer ses engagements en tant qu’alliée de l’Otan et membre de l’Union européenne. En somme, il s’agit d’être une puissance d’équilibre.
Avec cette nouvelle LPM, nous passons d’une première loi de réparation, sur la période 2019-2025, à une loi de transformation de nos capacités de défense, pour être plus efficaces et performants.
Outre le renouvellement des capacités opérationnelles, le ministère des armées a entrepris un effort de modernisation. Cette modernisation s’inscrit dans le cadre de la réforme de l’État et vise notamment à dégager des marges de manœuvre budgétaires pour adapter les capacités militaires, notamment en matière d’équipements, garantir les normes d’activité et d’entraînement et poursuivre l’amélioration des conditions de travail et de vie des personnels civils et militaires.
Le ministère des armées travaille avec dix grands groupes, 4 000 PME et ETI et 200 000 personnes. Près de 27 000 entreprises sont partenaires du ministère des armées.
Mes chers collègues, sur ces 413 milliards d’euros qui sont nécessaires pour garantir notre sécurité, 268 milliards vont principalement profiter à nos industries, soutenir l’emploi dans les territoires, préserver et développer les compétences. On sait que, pour un million d’euros d’investissement, on crée sept emplois directs et indirects.
Au cours des décennies écoulées, la France a principalement fondé sa politique de défense et de sécurité sur la dissuasion nucléaire et la notion d’autonomie stratégique à l’égard de l’Otan. Les menaces identifiées dans le Livre blanc de 2008 se sont amplifiées : terrorisme, cybermenace, prolifération nucléaire, pandémies. Dans un tel contexte, l’objectif d’une souveraineté maîtrisée concerne les domaines critiques de la dissuasion, l’accès à l’espace, la capacité d’entrer en premier, mais aussi le renseignement.
La dégradation du contexte géostratégique a entraîné l’émergence d’une idée d’autonomie stratégique européenne et doit conduire à prendre en compte le retour de la notion de guerre à haute intensité, comme on le voit en Ukraine. Ce conflit a rappelé la nécessité de disposer de solides systèmes de défense antimissiles et antiaériens en cas de conflit avec une puissance étrangère.
C’est pourquoi le Gouvernement a programmé pour la période 2023-2027 5 milliards d’euros pour la défense surface-air ; 4 milliards d’euros pour le cyber ; 5 milliards d’euros pour les drones et robots ; 16 milliards d’euros pour les stocks de munitions ; 10 milliards d’euros pour la fabrication d’un porte-avions de nouvelle génération. Ces éléments figurent parmi les priorités stratégiques de développement pour les armées françaises.
Néanmoins, cette programmation militaire ne se résume pas aux seuls investissements matériels. Elle comprend aussi un volet humain très important, avec un doublement de la réserve opérationnelle et plus de 6 400 créations de postes, 700 nouveaux postes étant ouverts dès 2024 et 2025. Cet objectif, s’il est réalisé, dépasserait les augmentations de postes obtenues grâce à l’actuelle LPM, selon les chiffres de la Cour des comptes.
Ce texte comprend aussi un plan Famille de 750 millions d’euros pour compenser les absences et les contraintes opérationnelles, ainsi qu’une politique de ressources humaines modernisée avec une gestion des carrières rénovée.
Dans l’Indo-Pacifique, face à une Chine qui ne cesse de multiplier ses démonstrations de puissance, cette programmation militaire permet à la France de tenir son rang grâce à son armée et à ses territoires d’outre-mer.
Un effort particulier sera fait sur les infrastructures en outre-mer, avec 13 milliards d’euros sur la période. Nos forces de souveraineté bénéficieront d’un effort généralisé sur le plan capacitaire – corvettes, avions de transport, drones, génie dual – et constitueront un premier échelon renforcé immédiatement disponible afin de décourager toute tentative de déstabilisation ou de prédation.
Elles disposeront par ailleurs de capacités de surveillance qui amélioreront la couverture de nos territoires outre-mer et de leurs zones économiques exclusives. Les capacités de commandement seront durcies de manière ciblée en fonction des enjeux régionaux.
Ces réformes et ce projet de loi de programmation envoient le signal clair que la France peut compter sur une armée moderne et totalement connectée à son époque pour atteindre, d’ici à 2030, un modèle complet et équilibré, apte à répondre à l’ensemble des menaces.