Il s’agit d’un amendement d’appel, car il n’est pas interdit au Gouvernement d’en déposer aussi !
Je ne comprends pas la trajectoire proposée par la commission concernant l’évolution des effectifs de la réserve opérationnelle militaire. Comment a-t-elle été calculée ? Sur quelle documentation et sur quels besoins en matière de ressources est-elle fondée ?
La trajectoire d’augmentation annuelle des effectifs des volontaires de la réserve proposée est linéaire. Or, il faut s’attendre à de nombreux aléas : il ne s’agit pas d’une politique salariale classique.
L’enrôlement dans la réserve est un engagement individuel. Il existe d’ailleurs une géographie de cet engagement. En outre, on note des différences selon qu’il s’agit des officiers et des sous-officiers ou des hommes du rang, de la marine nationale, de l’armée de terre ou de l’armée de l’air, des territoires d’outre-mer ou de l’Hexagone. J’ajoute que, si nous devions envisager les réserves uniquement sous l’angle purement militaire, il conviendrait de définir des priorités par unité plutôt que de fixer un chiffrage global. Ainsi, les besoins en réservistes sont très importants à la direction générale de l’armement et évidemment au service de santé des armées.
Je pose donc de nouveau la question : pourquoi la commission a-t-elle établi cette trajectoire ? Celle-ci ne me semble pas réaliste et surtout très éloignée des besoins militaires.
Pourquoi également avoir retenu une augmentation nette du nombre de volontaires de la réserve opérationnelle militaire de 25 000 ? Cela porterait ses effectifs à 65 000 volontaires en tout, alors que le projet initial fixait un objectif de 80 000 réservistes environ en 2030, puis 100 000 environ en 2035. Je dis « environ », car l’essentiel, dans le format d’armée, c’est le ratio entre le nombre de militaires d’active et le nombre de réservistes. Dès lors que notre armée comptera 200 000 soldats d’active, l’objectif est de disposer de 100 000 réservistes, pour un total de 300 000 militaires. Tel est l’esprit. Dès lors, peu importe que le nombre de réservistes s’élève à 95 000 ou à 105 000. J’y insiste, c’est le ratio qui compte.
En tout cas, la chronique proposée par la commission est plus faible que celle que le Gouvernement avait fixée. Je ne comprends pas pourquoi l’ambition est ainsi réduite. L’amendement du Gouvernement vise à rétablir la chronique initiale.
Si le Sénat souhaite néanmoins inscrire une chronique dans la loi, alors il convient que celle-ci soit indicative et non contraignante, car il ne s’agit pas d’une trajectoire capacitaire, définissant des matériels à acheter ni d’une trajectoire budgétaire, définissant des moyens disponibles. N’oublions pas la dimension fondamentalement humaine : toute démarche prescriptive serait détachée de la réalité de la vie de nos forces armées. On ne peut fixer en la matière que des objectifs « mous », bienveillants. À défaut, ils ne seraient pas compris.
Si le Sénat souhaite définir une chronique, je vous propose d’adopter celle qui suit, établie après avoir consulté l’état-major des armées : l’augmentation des effectifs de la réserve serait de 4 500 environ en 2024, de 9 000 en 2025, de 14 500 en 2026, de 22 000 en 2027, de 29 500 en 2028, de 36 000 en 2029 et de 40 000 en 2030.