Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, le retour au respect de l’élu local dépend d’un contexte général favorable.
Une part de plus en plus importante de nos concitoyens n’a plus aucune raison d’estimer ni de craindre le policier, la justice ou l’élu, parce qu’ils sont affaiblis institutionnellement, juridiquement et matériellement.
Dès mon premier mandat de sénateur, j’avais déposé une proposition de loi visant à renforcer les peines encourues pour atteinte à un élu et à automatiser la protection fonctionnelle pour le maire et ses adjoints.
Vous avez attendu que 4 000 élus locaux, dont 1 300 maires, démissionnent depuis 2020 pour agir. Ce retard est regrettable, mais mieux vaut tard que jamais.
En 2022, 1 400 faits ont été recensés contre les seuls élus locaux. Selon le Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), un maire sur trois se dit victime de menaces.
Violences, insultes et harcèlement se multiplient et les maires des Bouches-du-Rhône n’échappent pas à ce fléau.
Puisque la crise de l’autorité est généralisée, aligner les sanctions encourues en cas de violence sur un élu sur celles qui sont encourues en cas de violence sur les forces de l’ordre aux termes de l’article 222-14-5 du code pénal est une solution législative cohérente.
Cet article prévoit une sanction de sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende en cas d’incapacité temporaire de travail (ITT) de huit jours et de cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende en cas d’ITT inférieure ou égale à huit jours.
Lorsque les faits sont accompagnés de circonstances aggravantes, les peines sont alourdies d’un tiers. Elles sont doublées dès lors que s’y ajoutent plusieurs circonstances aggravantes.
Le message est très clair. Encore faudra-t-il qu’il soit appliqué chaque fois qu’un élu sera victime de violences, quelle qu’en soit la forme.
Par ailleurs, puisque nous avançons enfin sur le volet pénal avec une certaine unanimité, notre assemblée devrait en profiter pour impulser le chantier, tout autre, visant à étendre les pouvoirs de nos polices municipales en rehaussant leur qualité judiciaire, en facilitant l’accès aux fichiers et à l’armement, en favorisant la mutualisation entre les communes ou encore par le reclassement des fonctionnaires en catégorie B.
Les policiers municipaux doivent pouvoir prévenir les agressions envers les élus. Nous ne pouvons limiter en permanence notre réponse aux mesures curatives ou à la sanction.
En tout état de cause, les policiers municipaux sont souvent les primo-intervenants. Ils incarnent, par leur présence et leur uniforme, le prolongement de l’autorité des élus.
Plus largement, les élus locaux, et particulièrement les élus communaux, doivent, pour être respectés, retrouver de l’autonomie et des compétences d’action dans un mouvement général de décentralisation.
La démocratie locale et nationale n’est pas viable si l’on accepte la hausse de l’insécurité comme une fatalité. L’insécurité n’est pas un mal sans cause. La première crise sécuritaire locale est une crise de l’autorité et de la confiance.
Le respect de l’autorité se suscite. C’est à l’État de montrer l’exemple. De ce côté-là, le chemin de la confiance est encore long.
Je ne voudrais pas moquer les efforts de proposition qui ont été faits par le Gouvernement. Cependant, proposer aux élus de porter un bouton d’alarme dans la poche pour alerter en cas d’agression relève davantage du gadget que d’une mesure sérieuse.
Prenons du recul. Cessons les solutions concoctées dans les cabinets de conseil.
Place à une vision politique. Pensons renforcement de la répression, mais aussi décentralisation, confiance, partage de l’autorité.