Intervention de Laure Darcos

Réunion du 10 octobre 2023 à 21h30
Sécurité des élus locaux et protection des maires — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Laure DarcosLaure Darcos :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les élections sénatoriales et la campagne électorale à laquelle elles ont donné lieu nous ont convaincus que l’insécurité figure parmi les premières préoccupations des élus locaux.

Les menaces verbales et les agressions physiques qu’ils subissent sont de plus en plus nombreuses. Elles ciblent aussi fréquemment leurs proches.

L’attaque inacceptable du domicile du maire de L’Haÿ-les-Roses, Vincent Jeanbrun, n’est que le dernier fait divers d’une litanie sans fin de violences sans retenue, qui bousculent notre société et, en particulier, ceux qui incarnent la République au quotidien.

Souvenons-nous également de l’incendie volontaire du domicile du maire de Saint-Brevin-les-Pins, alors que ce dernier s’y trouvait avec sa famille. Lorsqu’il fut reçu au Sénat par Joël Guerriau, Yannick Morez lui a livré un témoignage glaçant, comme tant d’autres, sur les intimidations et les menaces auxquelles font face les édiles locaux.

Cette violence a parfois des conséquences tragiques. Nous n’oublions pas la mort du maire de Signes, Jean-Mathieu Michel.

L’Essonne est, elle aussi, fortement touchée par ce fléau, qui n’épargne d’ailleurs aucune figure d’autorité. Je pense en particulier à mon ami Patrick Rauscher, maire de Saintry-sur-Seine, qui ne compte plus les menaces de mort proférées à son endroit ni le nombre de plaintes qu’il a déposées et qui n’aboutissent jamais.

Les violences s’ajoutent aux nombreuses difficultés d’exercice de la fonction de maire, comme la judiciarisation croissante de la vie publique locale.

Accumulées, elles expliquent en partie la vague de démission de nos élus locaux et sont très certainement à l’origine de la crise des vocations, qui n’est autre qu’une crise démocratique que nous devons traiter.

Notre législation doit être adaptée au contexte dans lequel s’exercent désormais les mandats locaux.

La proposition de loi de François-Noël Buffet m’apparaît comme une avancée importante pour les élus. Elle satisfait une attente forte et répond à un réel besoin de protection.

Les dispositions de cette proposition de loi constituent des améliorations bienvenues. Nous sommes particulièrement favorables au durcissement des peines encourues par les auteurs de violences, qu’elles soient verbales ou physiques.

De même, nous approuvons sans réserve les mesures envisagées contre les auteurs d’injures publiques ou de harcèlement en ligne. Elles permettent d’adapter la réponse pénale aux comportements injurieux et aux menaces proférées sur les réseaux sociaux.

L’article 3 prévoit que la protection fonctionnelle est accordée automatiquement aux maires et aux adjoints qui en font la demande. Celle-ci ouvre droit, comme vous le savez, au conseil juridique, à l’assistance psychologique et à la couverture des coûts résultant de l’obligation de protection à l’égard du maire et des élus.

La commission des lois a décidé, à juste titre, d’étendre le dispositif d’octroi automatique de la protection fonctionnelle aux conseillers départementaux et régionaux exerçant des fonctions exécutives, en cas de violences, de menaces ou d’outrages.

Avec la prise en charge par l’État du coût de la couverture assurantielle des élus des communes de moins de 10 000 habitants, prévue à l’article 4, et la prise en charge par la commune des dépassements d’honoraires en matière de soins médicaux et d’assistance psychologique, prévue à l’article 8, le législateur s’engage en faveur d’une protection renforcée des élus locaux.

Par ailleurs, le sujet de la protection des candidats aux élections nous paraît également important. Cette protection est l’une des réponses possibles au phénomène de désintérêt pour la vie politique locale et peut être de nature à favoriser l’engagement citoyen. Elle représente cependant un véritable défi mis à la charge de l’État.

Enfin, le texte vise à améliorer la sécurité de nos communes. Le maire en est un acteur incontournable. Nous soutenons donc les dispositions du texte qui procèdent de cette logique, notamment le renforcement de la présence du procureur de la République au sein des conseils locaux ou intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance.

De même, nous sommes particulièrement favorables aux dispositions permettant au maire d’être systématiquement informé des suites judiciaires données aux faits qu’il a lui-même signalés au parquet ou qui ont donné lieu à un dépôt de plainte.

Par ailleurs, il nous semble judicieux d’offrir aux procureurs de la République un espace de communication dans les magazines municipaux, afin que nos concitoyens soient mieux renseignés sur le niveau d’insécurité auquel ils sont exposés, ainsi que sur les mesures prises pour l’endiguer.

L’insécurité mine le quotidien de nos élus et de nos concitoyens. Elle porte atteinte à la cohésion de notre Nation. Pour autant, ce texte suffira-t-il à endiguer les incivilités et les violences, fruits de la montée des individualismes ? Je n’en suis pas totalement persuadée.

Nous voyons bien que la sanction, même exemplaire, reste insuffisante pour ceux qui défient les lois de la République ou qui n’acceptent pas de se soumettre aux règles de la vie en société, acceptées par chacun d’entre nous.

Réprimer plus sévèrement les comportements inciviques auxquels les élus sont confrontés est certes indispensable. Cependant, pour endiguer la crise des vocations, il faudra très certainement aller plus loin et instaurer un statut de l’élu réellement attractif.

Fort de cette conviction, le groupe Les Indépendants – République et Territoires soutiendra cette proposition de loi.

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