Intervention de David Assouline

Réunion du 24 mars 2005 à 22h00
Avenir de l'école — Vote sur l'ensemble

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Puisque M. Lagauche a déjà largement expliqué les raisons du vote de notre groupe, je ne dirai qu'une chose : ce projet de loi est un rendez-vous manqué.

C'est d'abord un rendez-vous manqué avec tous ceux sans lesquels on ne saurait réformer l'école.

Réformer l'école, tout le monde le sait, est une affaire complexe, mais, dans cette complexité, il y a au moins une certitude sur laquelle buteront tous les gouvernements qui voudront passer outre : on ne peut réformer l'école qu'avec la communauté éducative, c'est-à-dire avec, bien sûr, les enseignants, avec les personnels, avec les élèves - qui ont des choses à dire et qui les disent d'ailleurs -, enfin avec les parents.

Or, monsieur le ministre, vous n'avez pas voulu entendre ce que la quasi-unanimité des représentants et des organisations de cette communauté a essayé de vous dire. Vous êtes passé outre, un peu comme vous le faites quand vous tapez sur votre portable alors que nous parlons !

Sans doute pouvez-vous considérer que vous avez la majorité et continuer votre chemin, mais l'amertume que laissera ce rendez-vous manqué ne permettra pas à l'éducation nationale d'aller mieux.

Ne croyez pas non plus que vous aurez eu raison des lycéens qui se sont exprimés, lycéens combatifs mais qui devront bien retourner un jour en classe parce qu'ils doivent préparer le bac : ils se souviendront et ils ne seront jamais de ceux sur qui vous pourrez compter pour vos prochains projets, car vous leur avez en quelque sorte ouvert les yeux !

C'est encore un rendez-vous manqué parce vous n'avez pas laissé place aux vrais débats qui doivent « agiter » et qui ont d'ailleurs, d'une certaine façon, « agité » la communauté éducative au cours de la grande consultation qui a été engagée, notamment au débat sur le socle commun de connaissances minimum.

Comment donner aujourd'hui ce socle commun de connaissances aux élèves et, d'abord, de quelles connaissances composer ce socle minimum ? Certes, nous avons débattu ici de ces questions, mais ce débat, nous avons dû l'imposer.

M. Legendre vient de dire que de nombreuses heures avaient été consacrées à l'examen de ce texte au Sénat ; nous qui avons été présents tout au long de ces heures, nous savons au prix de quels efforts nous avons obtenu que l'on s'arrête à certaines questions !

Au moins cela nous a-t-il permis de constater que, dès que le débat prenait forme sur le fond, et notamment sur les questions pédagogiques, il pouvait se trouver ici une majorité qui n'était pas votre majorité politique habituelle, monsieur le ministre, et qui était capable de voter contre l'article relatif à ce socle commun que vous-même considériez comme formant le coeur de votre loi.

Oui, il s'est trouvé à un moment donné une majorité suffisante pour que Sénat rejette le coeur de votre loi ; ensuite, bien sûr, vous avez eu recours à des artifices de procédure pour revenir sur ce vote, mais il n'en reste pas moins révélateur et très symbolique.

Votre loi, monsieur le ministre, ne permet pas l'égalité des chances, car elle ne donne pas les moyens nécessaires pour assurer cette égalité des chances, notamment dans les territoires en difficulté et pour les élèves les plus défavorisés.

C'est un autre rendez-vous manqué puisque, sur cette question des moyens, nous en resterons où nous en sommes. Vous pouvez, monsieur le ministre, faire voter ce projet de loi d'orientation et en être fier, mais, demain, vous serez confrontés aux mêmes problèmes, comme vous l'avez d'ailleurs vous-même reconnu.

Par exemple, pour accomplir ce que M. Legendre vient de décrire comme une grande avancée, c'est-à-dire pour mettre au coeur de l'école l'apprentissage des langues étrangères - ce pour quoi il était d'ailleurs inutile de passer par la loi -, vous avez estimé que 2 milliards d'euros étaient nécessaires, mais vous ne nous avez toujours pas dit où vous les trouveriez !

Puisque la loi doit entrer en application dès la rentrée de 2005, elle s'appliquera dans le cadre du budget voté pour 2005, lequel ne prévoyait évidemment pas les moyens nécessaires à sa mise en oeuvre. La rentrée s'annonce donc catastrophique !

On estime déjà qu'il y a de 70 000 à 90 000 postes en moins depuis la rentrée 2002.

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