Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite naturellement m’associer à l’hommage qui vient d’être rendu à Dominique Bernard, ainsi qu’à Samuel Paty, lâchement assassinés parce qu’ils défendaient les valeurs de la République.
Pour en revenir à l’ordre du jour, je suis très heureux d’être devant vous ce soir pour l’examen en nouvelle lecture du projet de loi de programmation des finances publiques (LPFP).
Le projet de LPFP est bien plus qu’un texte de méthode pour la gestion de nos finances publiques. Le Gouvernement a fait des choix clairs pour vous proposer une trajectoire qui concilie rétablissement de nos comptes publics et investissement dans l’avenir, à la fois pour nos services publics et pour la transition écologique.
La série d’amendements que le Gouvernement vous propose vise à mettre le texte en cohérence avec la vision que nous avons aujourd’hui de notre trajectoire économique et financière. Nous souhaitons ainsi rétablir le texte dans sa version adoptée par l’Assemblée nationale, sur laquelle le Gouvernement a engagé sa responsabilité le 27 septembre dernier.
Nous nous fixons un objectif de déficit plus ambitieux que dans le texte qui a été discuté l’an passé : le projet de loi initial prévoyait une réduction du déficit public à 2, 9 % du PIB en 2027 ; nous visons désormais un objectif de 2, 7 %. En cela, le Sénat a été écouté.
J’en ai bien conscience, la majorité sénatoriale souhaite que nous allions plus loin en matière de maîtrise des dépenses de l’État. Mais la trajectoire adoptée par la commission des finances du Sénat en nouvelle lecture ne nous paraît ni réaliste ni souhaitable. Je pense notamment à la réduction d’au moins 5 % du nombre d’agents publics de l’État et de ses opérateurs, qui n’est pas compatible avec le réarmement des services publics de première ligne ni avec l’investissement que les Français attendent pour la transition écologique.
Cette loi de programmation est un élément central de notre crédibilité. J’observe qu’une question préalable a été déposée par le groupe CRCE-Kanaky. Je formule le souhait qu’elle ne soit pas adoptée, dans la mesure où nous avons besoin de ce cadre pour les années à venir. C’est un enjeu de crédibilité pour notre pays.
Nous devons d’abord nous montrer crédibles vis-à-vis des Français, qui ont besoin et de connaître le chemin que nous allons emprunter, à savoir celui d’un retour à la normale après des années de crise, et de savoir comment nous allons financer, dans les années qui viennent, les services publics et l’investissement dans les priorités d’avenir.
Il s’agit également d’assurer notre crédibilité vis-à-vis de nos partenaires européens. À cette fin, nous traduisons les objectifs fixés dans le programme de stabilité. Parallèlement, il est essentiel que la France démontre sa capacité à se donner un cap, une trajectoire et un véritable cadre pour le redressement de ses finances publiques. Pouvons-nous nous permettre de ne pas avoir de loi de programmation des finances publiques ?
Deux versements du plan de relance européen sont en jeu : un premier de 10 milliards d’euros, qui doit intervenir cette année, et un second de 8 milliards d’euros l’année prochaine. Sans loi de programmation pluriannuelle, ces fonds ne nous seraient pas versés.
Il convient, enfin, d’asseoir notre crédibilité vis-à-vis des investisseurs qui achètent notre dette, dans un contexte de remontée des taux d’intérêt.
En quelques mois, nos taux d’emprunt sont passés d’une valeur proche de zéro à des niveaux supérieurs à 3 % sur nos obligations à dix ans.
En ce qui concerne notre crédibilité, permettez-moi de faire une remarque sur nos hypothèses de croissance, régulièrement qualifiées d’« optimistes ».
À court terme, nous prévoyons une croissance de 1, 4 %, après 1 % en 2023. C’est certes davantage que la prévision de la Banque de France à 0, 9 %, mais nous sommes en ligne avec les grands organismes internationaux : la Commission européenne et l’OCDE prévoient une croissance de 1, 2 %, tandis que le FMI l’estimait la semaine dernière à 1, 3 %.
Par ailleurs, notre estimation d’une croissance potentielle de 1, 35 % par an jusqu’en 2027 est également proche des prévisions établies par les instituts qui tiennent compte de nos réformes, comme le FMI ou l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).
Cette prévision de croissance potentielle s’appuie de fait sur les réformes structurelles que nous conduisons et allons poursuivre : la réforme des retraites, celle de l’assurance chômage, la réforme du lycée professionnel, le succès de l’apprentissage, l’application des plans d’investissement et la baisse des impôts de production, qui se poursuivra en 2024.
Je souhaite enfin revenir sur le rythme de rétablissement de nos finances publiques pour justifier devant vous la trajectoire que nous avons fixée.
La France a besoin de définir un cap pour ses finances publiques. La trajectoire que nous vous proposons d’intégrer à ce texte doit nous permettre de tenir nos comptes, aujourd’hui comme demain. Y parvenir suppose non seulement de partager un même sentiment de responsabilité, mais également de répartir l’effort entre l’ensemble des administrations publiques : l’État et ses opérateurs, la sécurité sociale et les collectivités territoriales.
Nous le savons, une consolidation trop rapide casserait la croissance et engendrerait plus de dépenses et moins de recettes qu’elle ne permettrait d’économies.
C’est pourquoi nous assumons une stratégie de réduction progressive du déficit, laquelle permet de poursuivre l’investissement dans les services publics et dans la transition écologique et de faire baisser les impôts.
Par rapport au texte qui vous a été présenté voilà un an, nous proposons une trajectoire légèrement plus rapide de retour sous les 3 % de déficit public : nous visons 2, 7 % en 2027, au lieu de 2, 9 % initialement. Pour y parvenir, nous comptons réduire fortement la part des dépenses publiques dans le PIB, même si elles continueront à croître en euros, et nous stabilisons à 44, 4 % la part des prélèvements obligatoires.
Cela implique de réaliser plus de 12 milliards d’euros d’économies à partir de 2025, réparties à parts égales entre l’État et ses opérateurs, d’une part, et la sécurité sociale, d’autre part.
Nous assumons le fait que ces économies doivent être documentées. Et nous souhaitons associer les parlementaires pour identifier les dispositifs de politique publique, qui, au vu des travaux parlementaires, mériteraient de faire l’objet d’une mission de revue de dépenses.