Intervention de Roselyne Bachelot-Narquin

Commission d'enquête sur la grippe A — Réunion du 23 mars 2010 : 1ère réunion
Audition de Mme Roselyne Bachelot-narquin ministre de la santé et des sports

Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports :

a rappelé que la France disposait déjà, au moment des négociations, de deux contrats de préréservation de vaccins, signés en 2006 au moment de la préparation d'une éventuelle pandémie du virus H5N1, avec les laboratoires Novartis et Sanofi Pasteur. C'est d'ailleurs à la suite de la passation de ces contrats que le CCNE a préconisé une vaccination générale mais séquentielle de la population.

Une comparaison des stratégies de vaccination entre les différents pays européens fait apparaître plusieurs groupes distincts. Un premier groupe de dix Etats a choisi de vacciner l'ensemble de sa population avec deux doses de vaccin. Un deuxième groupe a choisi lui aussi la vaccination générale mais avec une seule dose. Un troisième groupe a choisi la vaccination d'un segment ciblé de sa population. Enfin, trois pays ont décidé de ne pas effectuer d'achat, la Pologne, la Lettonie et la Slovaquie.

La France se trouve dans une situation à part car elle a décidé de proposer la vaccination à l'ensemble de la population mais a tenu compte, au nom du principe de réalité, du fait que tous ne pourraient ou ne voudraient se faire vacciner. Un taux d'attrition a donc été calculé à partir de l'exemple des vaccinations obligatoires, auxquelles 35 % de la population ne se soumet pas. A également été pris en compte le taux de vaccination contre la méningite dans les zones frappées par cette maladie, qui est en moyenne de 75 % de la population. En conséquence, 47 millions de vaccins à deux doses ont été commandés.

Cette solution a été validée le 3 juillet en réunion interministérielle, de même que la stratégie d'achat. Dès lors, le directeur du cabinet de la ministre et le directeur général de la santé ont été mandatés pour nouer le plus tôt possible des contacts avec les industriels fournisseurs et négocier la préréservation de vaccins. Ces négociations étaient d'autant plus urgentes que la France ne disposait pas de contrat avec les laboratoires Glaxo-Smith-Kline (GSK) et Baxter qui apparaissaient comme les fournisseurs les plus prometteurs. C'est dans ce contexte que la ministre a adressé mi-mai des lettres d'intention aux industriels. En conséquence, GSK s'est engagé à fournir à la France 8,33 % de la capacité de production de son usine de Dresde. Baxter, qui s'était engagé à livrer 4 millions de doses de vaccin, a annulé son offre au cours de l'été pour des raisons de production. De même, Novartis a réduit son offre de 24 millions de doses à 16 millions. Les quantités qui seraient livrées étaient donc très incertaines au moment des négociations.

C'est l'établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) qui a conduit les véritables négociations avec les laboratoires, spécialement avec les sociétés GSK et Baxter, avec lesquelles aucun contrat n'avait été antérieurement conclu. Il est important, à cet égard, de conserver à l'esprit le contexte de l'époque : les laboratoires ne disposaient pas encore de la souche virale et ne connaissaient donc pas les conditions de production des vaccins. De plus, le déséquilibre entre l'offre et l'importance de la demande au niveau mondial plaçait les laboratoires en position de force. Ceux-ci privilégiaient les commandes fermes et définitives. Aucun laboratoire n'a accepté de s'engager sur un calendrier de livraison. La France a néanmoins obtenu la modification de la clause exonérant les laboratoires de toute responsabilité, ainsi que la fourniture de notices en français et d'étiquettes de lots qui n'était pas prévue au départ.

Enfin, les mêmes incertitudes découlaient de la possibilité pour les laboratoires d'obtenir rapidement une autorisation de mise sur le marché (AMM) de leurs vaccins.

L'absence de clause de sauvegarde découle du contexte des négociations, qui était défavorable à l'Etat. En mai 2009, les estimations de la capacité de production mondiale variaient entre 500 millions et moins d'un milliard de doses. Si le rendement de la souche virale était inférieur aux prévisions, la capacité de production pouvait même descendre à 250 millions de doses. La France a donc cherché à obtenir les meilleures conditions pour l'achat de ces vaccins, spécialement auprès du fournisseur le plus prometteur en raison de son expérience en matière de vaccins pandémiques : GSK.

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