Intervention de Marc Noizet

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 28 juillet 2020 à 14h30
Table ronde de praticiens

Marc Noizet, chef de pôle urgences et du SAMU à l'hôpital Muller de Mulhouse :

Cette polémique entre les services de la sécurité civile et les SAMU dure en effet depuis très longtemps. Le rapport de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers dénonce certains points. Je n'ai pas été témoin de tout ce qui s'est passé sur l'ensemble du territoire national, mais je sais que ce que nous avons vécu était hors norme : pendant quatorze jours, dans le département du Haut-Rhin, nous avons transféré quotidiennement entre 12 et 20 patients en réanimation. Sans doute était-il possible de faire autrement, mais, en tous cas, au moment où nous avons été confrontés à cette situation, il n'y avait pas d'autre solution que de transférer des malades, à moins d'accepter d'en laisser mourir d'autres. Nous avions déjà mis en oeuvre le partenariat entre le public et le privé et doublé le nombre de nos lits de réanimation. À partir du 25 mars, trente lits de l'établissement militaire de réanimation ont été installés à proximité immédiate de l'hôpital de Mulhouse. Nous avions aussi des renforts de professionnels médicaux et paramédicaux, qui venaient de toutes les régions, notamment de la Nouvelle-Aquitaine, mais ces transferts étaient nécessaires en raison du grand nombre de patients en état très grave. Les patients transférés n'étaient pas de nouveaux patients, mais des malades qui avaient été pris en charge depuis quelques jours, dont l'état était stabilisé et auxquels un transfert ne faisait pas courir de risque.

Je ne sais pas si recourir au TGV était une bonne solution. Une étude est en cours au niveau national, pilotée par un organisme indépendant : elle nous montrera si la mortalité des patients concernés a été plus importante. En tous cas, à première vue, la mortalité semble ne pas avoir été supérieure.

Nous avons eu un partenariat très étroit avec les sapeurs-pompiers dans le Haut-Rhin, grâce à des échanges et à des relations humaines nouées de longue date, et nous avons pu utiliser leurs moyens à bon escient. La mission des sapeurs-pompiers n'est pas de réaliser des transferts secondaires : cette tâche nécessite des moyens médicalisés importants, notamment des équipements de réanimation, qu'ils n'ont pas. Leur mission première est le secours aux personnes dans des conditions d'urgence, en aucun cas le transport de patients d'un établissement à un autre, en dehors de circonstances exceptionnelles. Grâce au transfert de 330 patients hors du département, nous avons pu accueillir autant de nouveaux malades.

Sans doute pourrions-nous organiser les choses différemment, peut-être pourrait-on disposer, comme à Laval, d'un service susceptible d'être transformé rapidement en service de réanimation, mais, vu l'ampleur du phénomène, les transferts étaient nécessaires. Cette expérience a été bénéfique. Nous pouvons améliorer la coordination entre les territoires, entre les régions et au niveau national, et il conviendrait aussi de standardiser les procédures. Les patients étaient pris en charge, dans les TGV, par des équipes extérieures au département, ce qui maintenait notre capacité opérationnelle à continuer à traiter les autres patients.

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