Intervention de Olivier Véran

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 24 septembre 2020 à 10h00
Audition de M. Olivier Véran ministre des solidarités et de la santé

Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé :

Je souhaite rendre hommage à celles et ceux qui ont fait face à cette crise en première ligne, dans nos hôpitaux et dans nos établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), aux médecins de ville, sans oublier évidemment les professionnels du domicile et toutes celles et tous ceux qui ont permis à la France de résister au choc et de tenir.

Dans le contexte actuel, j'associe tout particulièrement à cet hommage l'ensemble des acteurs économiques qui ont pu ou peuvent voir leur activité professionnelle impactée par la gestion de crise. Je sais combien un certain nombre de mesures peuvent être difficiles à appréhender pour des personnes qui font des efforts depuis des semaines, voire des mois parce qu'elles font l'objet de mesures de gestion visant à protéger la population. Je veux leur redire que l'État est là pour elles ; il l'a été depuis le premier jour, et il le sera jusqu'à la fin de cette gestion de crise.

Je veux aussi rendre hommage et dire toute ma gratitude sincère à l'ensemble des agents des administrations centrales, des agences régionales de santé (ARS) et de tous les services de l'État. J'y associe aussi les pompiers, la réserve civique, la réserve sanitaire, mais également les agents des forces de l'ordre. Depuis le premier jour, policiers et gendarmes sont mobilisés pour faire respecter les règles dans des conditions difficiles. Leur engagement a été exceptionnel ; ils ont chaque jour forcé mon admiration.

J'ai été nommé ministre le 16 février dernier. Le virus circulait depuis peu, mais des personnes étaient infectées et des foyers identifiés. La menace était réelle, et en franchissant les portes de mon ministère, je n'ignorais pas le risque d'une déferlante épidémique.

Nous allons parler ensemble des choix difficiles, lourds et - je le reconnais - parfois pénibles qui ont été faits. Je viens devant vous avec humilité, parce que l'humilité est un vaccin efficace contre les prophéties hasardeuses et les jugements à l'emporte-pièce. Je ne viens pas partager une opinion ; je viens décrypter avec vous le chemin que nous avons emprunté depuis le premier jour, dans un contexte d'incertitude jamais égalée dans notre histoire contemporaine, afin d'apporter des réponses à des problèmes qui se sont présentés chaque jour devant nous.

Je n'ai jamais été dans la posture de celui qui fait des paris, ni de celui qui dit tout haut et sans filtre tout ce que la crise pourrait lui inspirer. Je me suis efforcé d'écouter les avis nombreux qui se sont exprimés. Faire le tri entre le bon grain et l'ivraie a été en quelque sorte mon sacerdoce, tandis qu'au même moment les Français attendaient légitimement des réponses fermes.

Dans une épidémie comme celle que nous traversons, le temps est un allié. Les connaissances d'aujourd'hui ne sont pas celles d'hier, et s'il peut être tentant de lire les stratégies prises hier à l'aune des connaissances d'aujourd'hui, je vous demande de bien vouloir tenir compte du caractère évolutif de ces connaissances.

De la même manière, le temps politique n'est pas le temps scientifique, et cette donnée ne doit pas échapper aux échanges que nous aurons. Nous nous attelons aujourd'hui à rechercher la vérité à la lumière des faits : je ne doute pas que cet exercice servira autant la justesse du regard que nous portons sur le passé récent que l'efficacité de l'action que nous menons aujourd'hui encore contre l'épidémie. En somme, ma mission est de gérer la crise aujourd'hui, elle sera de la gérer demain, mais devant vous, aujourd'hui, elle est aussi de la gérer hier.

Nous avons tous en tête les images de nos services de réanimation, des transferts sanitaires, d'un système de santé mis en tension comme jamais. Ces images ne sont pas de lointains souvenirs, et nous faisons aujourd'hui tout notre possible pour que de telles situations ne se reproduisent pas. L'épidémie n'est pas derrière nous, et je souhaite que nous gardions tous à l'esprit pendant cette audition que l'événement n'est pas passé, que des Français meurent toujours aujourd'hui du coronavirus. Comme je le répète tous les jours, la vigilance n'est pas une option. Faire la lumière sur les événements récents ne doit pas nous conduire à nous aveugler sur la prégnance et la persistance du risque.

Je suis les travaux de la commission d'enquête sénatoriale. J'ai lu un certain nombre de résumés d'auditions, mes journées étant hélas ! déjà bien trop remplies pour me permettre de les suivre en intégralité. Je tiens à vous remercier pour la qualité de vos interventions et de vos prises de position.

Ma situation est singulière, puisque je suis arrivé au moment où un point de non-retour avait déjà été atteint. Ce point de non-retour était celui de la circulation du virus, de la constitution de foyers épidémiques qui allaient devenir peu contrôlables et que nous n'étions pas alors en capacité de connaître. Rassurez-vous, je ne suis pas là pour me défausser sur qui que ce soit, je ne suis pas là pour vous dire que, somme toute, nous avons fait ce que nous avons pu avec les moyens du bord. Je suis là parce que nous devons toutes et tous apprendre d'une crise qui a placé la santé publique au coeur de nos préoccupations. Je suis devant vous parce que le Parlement doit être et est une force motrice dans les politiques de protection et de prévention. Je suis là parce que je suis le ministre des solidarités et de la santé. Depuis le premier jour à mon poste, j'ai toujours agi et parlé avec responsabilité et en toute transparence. Je ne choisirai évidemment pas une autre ligne aujourd'hui devant vous.

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