La question n'est pas d'opposer des gouvernants qui seraient responsables de tout et un Parlement qui voudrait absolument mettre en cause leur responsabilité. Nous en sommes déjà à 40 000 morts ; les gouvernements précédents et le Parlement doivent assumer eux aussi la responsabilité de la réduction des moyens des hôpitaux et de la santé, et en tirer les conséquences pour la suite. Personne ne remet en cause votre implication, Monsieur le ministre.
L'opinion publique a peur parce que l'épidémie reprend, parce qu'il n'y a pas de traitement. Il faut à la fois la protéger, la responsabiliser et la rassurer ; pour le moment, le compte n'y est pas, même si vous faites des efforts.
Le débat médiatique est ce qu'il est ; tout le monde est devenu un expert et, comme les experts ne sont pas d'accord entre eux, la situation devient totalement anxiogène pour les Français. On ne sait plus où on en est, et la parole publique perd sa crédibilité. Je l'ai dit à Gérald Darmanin : il faudrait, pour traverser cette crise, une unité de la parole publique. Les ministres, aussi sympathiques soient-ils, ne peuvent pas tous venir sur les plateaux de télévision raconter leur vision de la crise sanitaire. Le ministre de la santé devrait être, comme c'est le cas dans d'autres pays, le seul chargé de s'exprimer et de faire des annonces en la matière. La dispersion de la parole publique et de la parole scientifique rend le climat extrêmement anxiogène.
Vous avez parlé de transparence. Vous avez dit avant-hier que, avec 950 personnes en réanimation, nous étions à 19 % de nos capacités actuelles. J'ai eu une discussion un peu vive avec les gens de l'ARS d'Île-de-France sur ce point. Je résume : il y avait 5 500 lits de réanimation au début de la crise ; une montée en puissance progressive a permis d'atteindre, nous dit-on, les 10 000 lits au mois de juillet, dont 2 300 environ en Île-de-France. Comment 19 % de 10 000 peuvent-ils faire 950 ? Dites-nous où on en est pour de bon ! Il faut que nous comprenions. Vous avez évoqué la possibilité de passer à 14 000 lits s'il était nécessaire d'accroître la mobilisation. Où en est-on réellement aujourd'hui ? Disposons-nous de capacités supplémentaires complètes - je ne parle pas de respirateurs d'appoint ? Si oui, la dramatisation n'a aucun sens là où il faudrait plutôt rassurer les gens...
Sur les traitements, par ailleurs, on entend tout et n'importe quoi. Certains responsables sanitaires affirment que le traitement des patients et la connaissance de la maladie se sont nettement améliorés. Où en est-on vraiment ? Le taux de mortalité que nous avons connu au printemps peut-il revenir ?
Un dernier point. Vous avez parlé des commandes de vaccins faites par la France et par la Commission européenne. Le groupe Johnson & Johnson annonce qu'il est en avance sur les autres groupes dans la mise au point du vaccin - dit-il vrai ? Je n'en sais rien. Ma question est la suivante : les Français pourront-ils se faire vacciner dès qu'un groupe, quel qu'il soit, aura trouvé un vaccin sûr, ou la France et l'Union européenne devront-elles attendre les vaccins des groupes auxquels elles ont passé commande, même s'ils sont en retard ?