Intervention de Olivier Véran

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 24 septembre 2020 à 10h00
Audition de M. Olivier Véran ministre des solidarités et de la santé

Olivier Véran, ministre :

Monsieur le sénateur Karoutchi, il y a eu 31 000 morts, et non 40 000. La France dispose des données de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) sur la surmortalité observée une année par rapport aux années précédentes. Il n'y a pas eu 10 000 morts cachés, ni à domicile ni à l'hôpital ! J'ajouterai même que toutes les personnes qui étaient porteuses du covid-19 et sont décédées ne pas nécessairement mortes du covid-19. Si nous avions dû, comme certains pays voisins - je pense à nos amis anglais -, ajouter du jour au lendemain 15 000 morts aux chiffres officiels, j'aurais été bien en peine de le justifier devant vous aujourd'hui.

Vous avez parfaitement raison, Monsieur le sénateur : 950 patients en réanimation, cela ne fait pas 19 % du nombre maximal de lits que nos hôpitaux peuvent armer, mais bien 19 % des lits actuellement armés. Je l'ai dit en préambule, et c'est fondamental : à chaque fois que vous armez un lit de réanimation, vous désarmez un bloc opératoire, vous annulez une opération de chirurgie cancérologique ou orthopédique, une greffe, une pose de stent coronarien, tous ces actes indispensables pour la santé de ceux de nos concitoyens qui n'ont pas le covid-19.

Ce n'est donc pas parce que je dis que nous serions capables, si la situation l'exigeait, d'augmenter fortement le nombre de lits disponibles que nous souhaitons le faire. Plus nous maintenons la pression contre le virus, moins nous prenons le risque de devoir recommencer à appeler des patients pour leur dire que nous ne pouvons pas nous occuper d'eux.

Le traitement qui fonctionne aujourd'hui, qui apporte en tout cas une plus-value, c'est la dexaméthasone, dérivé bien connu de la cortisone, d'utilisation courante dans tous les hôpitaux français, pas cher, pour lequel on dispose de stocks - attention : si j'ai 38 de fièvre et une petite toux, je n'ai pas de raison de prendre ce médicament ; en revanche, si je suis hospitalisé et si les équipes considèrent que mon état justifie ce traitement, il peut m'être administré. La dexaméthasone réduit le nombre de cas graves, donc la mortalité, et les durées de séjour en réanimation, ce qui permet, corrélativement, d'augmenter les capacités de réanimation.

L'autre traitement dont les réanimateurs nous disent aujourd'hui qu'ils l'utilisent couramment, c'est l'administration d'oxygène à très haut débit, 50 litres par minute, ce qui évite d'avoir à intuber les patients et à les placer en coma - l'intubation sur des poumons fragilisés par le virus crée des lésions respiratoires et des voies aériennes qui peuvent entraîner des séquelles et aggraver encore l'état du malade.

Ces traitements permettent de réduire le nombre de malades intubés et les durées de réanimation. En revanche, le recours aux lits d'hospitalisation conventionnels est plus important qu'au cours de la première vague : les gens vont moins en réanimation, mais vont à l'hôpital. Nous faisons donc très attention à éviter une pression trop forte sur nos capacités en lits conventionnels.

Concernant les vaccins, c'est la Commission européenne, avec des experts de tous les pays, en toute indépendance vis-à-vis des laboratoires, qui y travaille. Elle passe avec les laboratoires qui ont lancé des travaux en avance de phase des engagements de précommande, qui seront convertis en précommandes, elles-mêmes converties en commandes lorsque la situation le justifiera. La Commission européenne a ainsi précommandé 300 millions de doses au laboratoire AstraZeneca - j'en ai parlé. Faites le calcul : cela permettrait de couvrir les besoins.

Le travail est conduit de façon extrêmement attentive ; je pense qu'il doit se jouer à l'échelle européenne. Cela fait sens - vous en conviendrez -, et cela nous rend plus puissants au moment de contractualiser, s'agissant tant des négociations de prix que de notre capacité à garantir l'accès précoce du marché européen au vaccin.

Quant au laboratoire Johnson & Johnson, il fait partie des quelque dix-huit ou vingt laboratoires qui ont un candidat vaccin à l'étude ; il est très certainement en lien avec la Commission européenne, au même titre que n'importe quel autre laboratoire.

Le déni, Monsieur Henno, ni ma prédécesseure ni moi-même n'en avons fait preuve. Ayant pris mes fonctions un lundi à dix heures, j'ai immédiatement rencontré le Premier ministre, et nous avons beaucoup parlé de l'épidémie.

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