Vous parlez avec la bonne foi de celui qui s'est démené comme personne - on l'a vu - pour faire face à une crise forte, inattendue, exceptionnelle, mais vous vous enfermez dans cette bonne foi et cette conviction. Or cette commission d'enquête a pour objectif d'éclairer les problèmes qui se sont posés pour les corriger. Le malaise, c'est que vous ne reconnaissez aucun problème, et que vous vous entêtez au sujet des masques. Vous ne vous êtes pas interrogé sur la question des masques grand public et vous êtes « abrité » derrière l'OMS. Cela vous arrangeait, puisqu'il n'y avait pas de masques. Une ministre est même venue nous expliquer qu'il était dangereux et contreproductif de porter un masque !
Tout le monde le sait aujourd'hui, c'est parce qu'il n'y avait pas de masques que l'on a expliqué qu'il n'en fallait pas. Aujourd'hui, on dit à tous de porter un masque, car cela réduit les risques. Dans les pays asiatiques, cette doctrine est installée depuis bien longtemps : on aurait pu se demander pourquoi ils le faisaient... Vous pourriez le reconnaître ! Cela pose un problème de confiance de l'ensemble des citoyens par rapport à la parole publique, dans le contexte d'une crise.
On nous a dit la semaine dernière qu'il y aurait un conseil de défense et que le Président de la République allait faire des annonces fortes. En effet, on voit bien que le virus circule et qu'il faut réagir fortement, et l'on sait qu'il y a une exponentielle depuis déjà une dizaine de jours. Et puis, il n'y a pas d'annonce, hormis celle que les préfets vont agir et prendre des mesures parce qu'il faut localiser celles-ci.
Hier, on apprend qu'un certain nombre de mesures sont prises, notamment à Marseille, à Paris, en Guadeloupe, etc. Vous dites : « On a concerté. » Non ! La maire de Paris a été appelée une heure avant. Or elle n'est pas d'accord avec ce qui est proposé, même si elle souhaite que des mesures soient prises. Ce doit être le même cas à Marseille.
Bien entendu, il faut des mesures. Mais il faut se concerter avec les élus locaux, avoir le souci de dire les choses telles quelles et trouver les bonnes mesures. C'est décousu : il n'y a aucune annonce du Président de la République ; on dit aux préfets que la concertation durera une semaine, mais on prévient des mesures une heure avant...
Fermer les bars à 22 heures, c'est porter atteinte du point de vue économique à une profession qui est déjà dans une situation catastrophique. Entre la situation dans laquelle il suffit de s'assoir à une terrasse pour ne plus porter le masque et ne plus respecter de distanciation sociale, d'où les attroupements énormes dans tous les cafés et les restaurants, et la fermeture, on pourrait prendre une mesure intermédiaire et dire : en dehors du moment où l'on boit, on doit porter le masque, y compris sur les terrasses. Cela, un élu pourrait vous le dire, à condition que vous écoutiez avant de faire des annonces. Tandis que la panique est en train de monter, la concertation est réduite à pas grand-chose.
Ma dernière question est aussi un conseil. Je pense qu'il est plus productif pour entraîner la Nation à affronter une telle crise de dire aux Français les choses telles qu'elles sont et telles qu'elles se posent à vous, qui devez prendre des décisions, plutôt que de les cacher.
Il est clair que vous êtes confronté à la question suivante : un virus circule de façon exponentielle et la situation ressemble à ce qui se passait au mois de mars. La mesure que vous avez prise alors, le confinement, était radicale. Vous savez que vous ne pouvez pas agir ainsi aujourd'hui sans mettre à bas l'économie. Vous pourriez dire aux Français que, pour sauvegarder les activités économiques, on va prendre un peu plus de risques, aller travailler, prendre des transports, laisser les écoles ouvertes. Dites-le, que c'est pour cela que vous ne reconfinez pas !
Quand il s'agit, non plus d'activités économiques, mais pour les gens de s'amuser, vous faites n'importe quoi : vous tapez. Les Français sentent cette incohérence. Dites les choses, et vous entraînerez la Nation !