Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour l’examen du projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise, projet de loi adopté par l’Assemblée nationale le 29 juin dernier.
Permettez-moi avant tout, au nom du groupe du RDSE, de saluer le travail des organisations syndicales et patronales, qui ont conclu cet accord national interprofessionnel le 10 février 2023. En effet, nous sommes de fervents partisans d’une refonte du dialogue social visant à donner plus de poids aux partenaires sociaux dans la négociation de compromis sociaux, en amont du travail législatif.
Les protestations contre la loi du 14 avril dernier de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, réformant le système de retraite, ont révélé l’utilité d’une meilleure prise en considération des corps intermédiaires. Celle-ci doit même devenir un automatisme : c’est primordial pour retisser des liens de confiance entre les gouvernants et la population.
Nous examinons le présent texte en séance publique au lendemain d’une conférence sociale au Conseil économique, social et environnemental (Cese), pilotée par Mme la Première ministre. Cette journée de débats s’est conclue par trois annonces du Gouvernement : la refonte de l’index de l’égalité professionnelle, la création d’un haut conseil des rémunérations et l’ouverture d’une concertation portant sur la réforme du congé parental.
Monsieur le ministre, ces diverses pistes et le projet de loi relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise ont au moins un point commun : il n’y est jamais question des salaires.
Or, quand la plupart des Français vous parlent de partage de la valeur, ils évoquent l’augmentation des salaires et la revalorisation du Smic. Vous leur répondez par des primes ponctuelles, l’actionnariat salarié, la participation et l’intéressement.
Loin de nous l’idée de critiquer tout ce qui peut constituer un plus sur la fiche de paie des salariés. Mais, dans le contexte économique très incertain que nous connaissons, alors que l’inflation perdure depuis des mois, il serait légitime de se pencher sur la question de l’augmentation des salaires. En effet, le salaire, c’est la partie fixe de la rémunération. C’est ce qui permet de se projeter à moyen et long termes dans son épargne, ses dépenses du quotidien ou encore ses cotisations.
Ainsi – je le relève à mon tour –, cet accord national interprofessionnel a cinq objectifs, parmi lesquels les politiques de rémunération et de valorisation du travail ; le partage de la valeur au sein des entreprises et des branches professionnelles ; ou encore l’actionnariat salarié et l’épargne salariale.
Ces dispositifs nous paraissent contribuer à une meilleure association des salariés aux performances des entreprises, notamment dans les très petites entreprises et les petites et moyennes entreprises. Nous saluons en particulier le nouveau dispositif de partage de la valeur permettant d’intéresser les salariés à la valorisation de leur entreprise. Nous espérons qu’il pourra bénéficier au plus grand nombre d’entre eux.
Mes chers collègues, vous aurez compris la position des membres du RDSE sur ce texte : nous défendons l’ANI, en grande partie par respect pour le travail de qualité des organisations syndicales et patronales, tout en formulant le souhait que l’on puisse aller plus loin dans le partage de la valeur au sein de l’entreprise.
À cet effet, nous avons déposé plusieurs amendements pour être plus fidèles à l’ANI et aux désirs de nos concitoyens. Nous souhaitons notamment ajouter à l’obligation de négociation sur la révision des classifications celle sur les métiers repères, comme cela est précisé à l’article 4 de l’accord.
Le présent texte doit permettre une meilleure efficacité dans l’analyse des besoins de formation et de compétences des salariés, pour faciliter la mobilité professionnelle et les évolutions de carrière. Aussi, l’un de nos amendements tend à rendre automatique le versement d’un supplément de participation ou d’intéressement en cas de bénéfice exceptionnel. Cette notion d’automaticité nous paraît fondamentale, en particulier pour lutter contre le non-recours et les délais d’obtention démesurés.
Pour conclure, malgré les réserves que je viens de formuler, les élus du RDSE abordent ces discussions de manière constructive et voteront ce projet de loi.
À nos yeux, le présent texte constitue une première étape vers l’enrayement du phénomène des travailleurs pauvres et la reconquête du pouvoir de vivre de la population active du pays.