Soyons lucides : nous ne sommes pas préparés pour affronter un monde à 50 degrés !
Soyons lucides encore : la démocratie en santé, cruciale pour affronter les épidémies, ne guide toujours pas les politiques gouvernementales, comme l’ont tragiquement rappelé le covid-19 et la variole simienne.
Trop de personnes sont encore exclues des décisions prises concernant leur propre santé : des plus précaires aux jeunes migrants isolés, en passant par les personnes dépendantes aux drogues ou les travailleuses et travailleurs du sexe – tous ceux et toutes celles face auxquels on détourne si facilement les yeux.
Cela fait plus de quarante ans que le VIH-sida sévit ; or les pouvoirs publics n’ont toujours pas pris conscience des leçons de cette maladie qui a décimé et décime encore les plus discriminés d’entre nous. Malgré l’immense engagement des associations de lutte contre le sida pour obliger l’État à une prise de conscience, nous ne sommes toujours pas préparés à affronter les prochaines épidémies.
Enfin, alors que la population française vieillit, le nombre de soignantes et de soignants diminue, résultat de quarante années d’austérité et d’impréparation.
Partout en France, même à Paris, les soins deviennent inaccessibles. Ils le sont encore plus dans les territoires ruraux et pour les plus précaires, eux pour qui seul le recours à des professionnels conventionnés en secteur 1 est une option.
Cinquante-deux jours en moyenne pour obtenir un rendez-vous d’ophtalmologie, soixante et un pour la dermatologie ! Plus d’un quart des médecins généralistes ont plus de 60 ans. Disons-le clairement : sans changement majeur, les années qui viennent s’annoncent extrêmement difficiles.
Alors, que faire ?
Nous manquons d’une politique écologiste de santé qui construise des solutions depuis les territoires, qui prenne en compte les déterminants environnementaux de la santé – les facteurs non humains –, qui fabrique la santé de manière démocratique avec toutes et tous, notamment avec et pour les plus exclus.
Nous manquons de réflexion profonde sur notre système de santé et son financement.
Nous manquons d’une politique ambitieuse de santé environnementale et de prévention, de santé communautaire, de réduction des risques.
Nous manquons d’un effort national et massif pour revaloriser les métiers du soin, pour prévenir les effets des transformations planétaires et lutter contre les lobbies écocidaires, pour faire en sorte que notre système public de santé tienne le choc.
Mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui n’est pas à la hauteur de l’urgence, malgré ses qualités initiales. En se bornant à l’organisation des professionnels de santé, il manque son rendez-vous avec la lutte contre la désertification médicale et les besoins de nos territoires.
Cette proposition de loi comportait pourtant quelques dispositions qui allaient dans le bon sens : réforme de la démocratie sanitaire locale, élargissement des pouvoirs de délibération des conseils de surveillance des hôpitaux, régulation de l’installation des médecins.
Au cours du circuit législatif, trop de ces dispositions ont vu leur teneur amoindrie. Aujourd’hui, il nous faut trouver ensemble la manière de transformer ce texte pour qu’il permette d’améliorer véritablement l’accès aux soins. C’est possible, mais, pour changer la vie de nos concitoyennes et concitoyens – ce dont nous avons besoin –, nous devons quitter les postures partisanes. Il y a urgence !