Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est la première fois que je m’exprime au sein de cette assemblée. J’y porterai, avec ma collègue Nathalie Goulet, les aspirations du département de l’Orne, territoire rural qui connaît, comme d’autres, une situation dramatique concernant l’accès aux soins de sa population.
Alors que la moyenne nationale est de 149 médecins généralistes pour 100 000 habitants, nous ne pouvons compter dans l’Orne que sur 60 médecins généralistes pour 100 000 habitants. Concrètement, il faudrait plus que doubler le nombre de généralistes ornais juste pour atteindre la moyenne nationale !
Par ailleurs, 43 % de nos médecins ont plus de 60 ans. Le pire est donc devant nous, alors que, déjà, aujourd’hui, près de 20 % des assurés sociaux ornais sont sans médecin traitant.
Si la situation ornaise est particulièrement grave, malgré l’engagement fort des collectivités locales, elle correspond à ce que vivent certains autres territoires. Cependant, les disparités territoriales sont énormes, et il est trompeur d’affirmer que, grosso modo, 87 % du territoire serait un désert médical : on agglomère ainsi des situations qui sont peu comparables dans leur intensité.
C’est la raison pour laquelle je regrette que notre commission soit revenue sur la création par ce texte d’un indicateur territorial de l’offre de soins, qui est aujourd’hui l’outil statistique qui nous manque pour objectiver ces disparités territoriales avec une méthodologie indiscutable. La connaissance précise et partagée de la situation est le préalable à l’affirmation d’une politique encore plus ambitieuse.
L’engagement n’a pas manqué ces dernières années : suppression du numerus clausus, recrutement de médecins salariés et d’assistants médicaux, création et développement des CPTS, développement de la télésanté, soutien aux centres de santé pluriprofessionnels, mesures incitatives à l’installation, bientôt le déploiement des médicobus et des délégations de tâches.
Pourtant, il va falloir aller plus loin pour faire face à l’aggravation à venir de nos difficultés. À cet égard, la présente proposition de loi contient des points positifs. Il faut les prendre sans attendre.
Je forme toutefois le vœu que nous puissions aussi débattre prochainement, de nouveau, de la question de la régulation de l’installation des médecins, une régulation concertée avec les professionnels concernés, selon un accord donnant-donnant, car nous préférerons toujours la négociation à la coercition. Si les négociations avec les médecins n’aboutissent pas, n’ayons pas peur de passer à une méthode plus directive. Observons ce qu’il a été possible de faire avec les kinés, les infirmiers et, plus récemment, avec les chirurgiens-dentistes, dont les deux principaux syndicats ont signé avec la Caisse nationale d’assurance maladie une convention le 21 juillet dernier. Parmi les mesures retenues par les parties figure le non-conventionnement par l’assurance maladie des dentistes qui s’installent dans des zones jugées non prioritaires.
Évidemment, une telle mesure appliquée aux médecins ne réglerait pas toutes les difficultés, tant s’en faut. Il y en aurait d’autres à adopter qui seraient tout aussi utiles, mais face à la gravité de la situation qui s’annonce, tous les leviers vont devoir effectivement être actionnés.