Il est indispensable que la France fasse de nouveau entendre cette voix, qu’elle la fasse résonner dans toute l’Europe.
Depuis trop d’années, l’Europe a fait sienne, à propos du conflit israélo-palestinien, la vieille maxime d’Henri Queuille selon laquelle « il n’est pas de problème dont une absence de solution ne finisse par venir à bout ». Symbole s’il en est de lâcheté politique, ce principe porte pourtant une signification trop souvent oubliée : l’absence de solution provoquera une résolution simpliste du problème, dans la douleur ou par la violence. Il serait déplorable que nous en arrivions là.
Depuis trop d’années, nous avons laissé prospérer le Hamas sur les ruines du processus de paix, anéanti par l’assassinat de Yitzhak Rabin, et sur celles de l’Autorité palestinienne, dévitalisée et démonétisée par l’usure du pouvoir, par la corruption, mais surtout par l’absence de toute perspective politique. Or, sans perspective politique, le choix du peuple palestinien se résume ainsi : suicide à petit feu ou explosion de violence.
Je n’ai pas le temps de reprendre le cours d’une histoire tumultueuse et complexe, de plus de sept décennies, mais nous faisons nôtre le propos tenu hier à la tribune de l’Assemblée nationale par M. Jean-Louis Bourlanges, président de la commission des affaires étrangères, ainsi que sa démonstration magistrale.
Il a tracé le chemin qui pourrait permettre à la classe politique, loin des polémiques, de parler d’une seule voix, en rappelant que le préalable à tout processus de paix est l’arrêt et le reflux de la colonisation illégale qui, depuis deux décennies, ghettoïse et démantèle la Cisjordanie.
Dans son annonce de reprise du processus de paix, le Président de la République semble partager ce constat. Nous le saluons, mais chat échaudé craignant l’eau froide, nous nous méfions de ses grands discours rarement suivis d’effet.
Aux promesses doivent succéder les actes, et ce sans tarder ; aussi demandons-nous au Président de la République de reconnaître l’État palestinien, comme l’ont déjà fait 138 pays dans le monde.
Pour construire la paix demain, il faudra un interlocuteur. Nous souhaitons que la France pèse de tout son poids pour organiser une transition démocratique à la tête de l’Autorité palestinienne.
Pour ce faire, il convient de plaider pour la libération des prisonniers politiques palestiniens, notamment de ceux qui seraient à même d’incarner cette transition. Nos pensées à ce sujet, que nous partageons avec Dominique de Villepin, vont en premier lieu vers Marwan Barghouti.
Si Israël et la communauté internationale étaient incapables d’accompagner une telle transition démocratique, alors ce serait toute la Cisjordanie qui menacerait de plonger dans le chaos à la mort de Mahmoud Abbas, occultant tout espoir de paix.
Il est encore temps d’agir avec force en jouant une partition différente de celle des États-Unis. Par son existence même, l’Union européenne fait la preuve que les ennemis irréductibles d’hier peuvent devenir les alliés de demain. L’Union doit jouer un rôle d’arbitre pour construire la paix, condition sine qua non de la sécurité d’Israël, et pour que cesse ce conflit qui, depuis trois quarts de siècle, a engendré tant de souffrances, tant d’humiliations, et emporté tant de vies.
Il est encore temps d’agir pour la paix, « une juste cause » qui « finira par triompher », comme le disait Yitzhak Rabin.