Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 27 juillet 2007 à 15h00
Travail emploi et pouvoir d'achat — Article 6, amendement 278

Christine Lagarde, ministre :

Monsieur le sénateur, vous avez parfaitement saisi l'esprit dans lequel a été décidée cette mesure. Vous avez raison de souligner qu'elle est importante, puisqu'elle permet à des redevables de l'ISF de s'exonérer de la dette qu'ils ont au titre cet impôt, à concurrence de 75 % de l'investissement dans le capital d'une petite ou moyenne entreprise, et, pour les 25 % restants, de prendre leurs risques, ce qui renforcera ce lien de proximité que nous souhaitons développer entre le contribuable et l'entreprise.

Votre amendement vise à étendre le bénéfice de la réduction de l'ISF pour l'investissement direct dans le capital de PME aux souscriptions non pas d'actions ou de parts dans le capital des PME elles-mêmes, mais de parts de fonds d'investissement de proximité, dont l'actif est constitué pour 50 % au moins en titres de société reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés créées depuis moins de cinq ans et éligibles à l'avantage fiscal en cas d'investissement direct.

Vous avez raison, il s'agit d'une forme de mutualisation, qui est en quelque sorte un facteur de garantie du risque que nous mettons en oeuvre au bénéfice du contribuable et du souscripteur.

Le Gouvernement partage votre souci d'orienter les investissements des contribuables qui se concentrent en direction des PME établies présentant un profil de risque relativement faible vers la zone très sensible des entreprises en création et à fort potentiel.

Nous savons aussi que les FIP prennent d'ores et déjà une part importante dans le financement des jeunes entreprises. Nous conviendrons sans doute ensemble qu'il est très possible d'accroître cette part, puisque, si les FIP fonctionnent aujourd'hui, ils pourraient sans doute avoir de bien meilleurs résultats encore.

Le Gouvernement émettra donc un avis favorable sur votre amendement, sous réserve cependant de l'adoption du sous-amendement n° 278, qui permet non seulement d'assouplir le dispositif, mais surtout de lui conférer une véritable constitutionnalité. C'est donc pour consolider cet amendement que le Gouvernement présente ce sous-amendement.

S'agissant de l'affectation de tout ou partie de l'ISF au financement des PME, vous prévoyez d'accorder aux souscripteurs de parts de FIP le même avantage que celui qui est accordé au titre de la souscription directe au capital d'une PME.

Cet alignement ne paraît pas justifié et fait courir un risque d'inconstitutionnalité, car les redevables ne supportent pas le même risque.

En effet, les investissements via des fonds d'investissement de proximité permettent une mutualisation et une forme de dilution du risque. D'une part, compte tenu du grand nombre d'entreprises qui composent l'actif des fonds, on répartit le risque sur davantage d'acteurs. D'autre part, on ouvre la possibilité aux FIP d'investir jusqu'à 40 % de leur actif dans des titres non risqués ou dans des actifs monétaires. Cette disposition, vous en conviendrez, diminue le degré de risque : un investissement en SICAV ou en obligations est moins risqué qu'une souscription au capital d'une PME, dont, par hypothèse, les titres ne seraient pas liquides.

Afin de répondre à cette objection, qui constitue un risque sérieux, et de sécuriser juridiquement le dispositif, le Gouvernement souhaite limiter le taux de l'imputation possible, donc de l'avantage fiscal en question. Je rappelle que celui-ci est de 75 % pour l'investissement direct dans les actions ou dans les parts d'une PME par hypothèse très peu liquide, donc avec un risque certain.

Le Gouvernement propose de limiter ce taux à 50 %, donc une décote de 25 % sur l'abattement autorisé au titre de l'investissement dans un FIP plutôt que directement dans le capital d'une petite et moyenne entreprise, et de plafonner le montant à 5 000 euros.

Cela étant, je suis prête à rectifier le sous-amendement afin de porter la part potentielle de l'investissement à 10 000 euros. Je vous ai en effet bien écouté, monsieur le sénateur, et j'ai parfaitement compris que votre objectif était de faire bénéficier les petites et moyennes entreprises de ces investissements. Toutefois, le taux plafond sera maintenu à 50 %, au lieu de 75 %. Cette mesure vise encore une fois à éviter le risque d'inconstitutionnalité.

Enfin, s'agissant de l'exonération d'ISF des parts du FIP, le Gouvernement propose de substituer à l'approche en termes de versement que vous avez retenue une photographie de l'actif du FIP au 1er janvier de chaque année. Ainsi, le principe de transparence trouvera à s'appliquer dans les mêmes conditions à l'ensemble des investissements intermédiés, qu'ils soient réalisés via une société holding, ce qui est prévu en l'état actuel du projet, ou via un FIP, ce qui permet à nouveau de maintenir l'égalité de traitement.

Votre dispositif ainsi assoupli, afin de lui permettre d'emporter l'adhésion tant des professionnels du capital que des épargnants, pourrait être à nouveau modifié, et ce sur deux points.

Tout d'abord, le quota d'investissement de 50 % de l'actif du FIP au capital de sociétés créées depuis moins de cinq ans paraît trop élevé. Votre amendement ferait en effet passer le quota d'investissement dans de jeunes entreprises de 10 % à 50 %, tout en ajoutant une contrainte supplémentaire sur la nature des titres éligibles à ce nouveau quota.

En effet, seuls seraient éligibles au nouveau quota de 50 % les titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital des sociétés et non plus les titres déjà existants acquis sur un marché secondaire. Afin d'élargir le dispositif, le Gouvernement propose de ramener le quota de 50 % à 20 %. Nous éliminerons ainsi une contrainte qui pèse actuellement sur le FIP.

Ensuite, votre amendement restreint le champ d'application de la mesure en limitant l'assiette de l'avantage fiscal. Les versements servant de base au calcul de l'avantage sont en effet retenus dans la limite des souscriptions réalisées par le FIP au capital des sociétés de moins de cinq ans.

Afin de renforcer le caractère incitatif de cette mesure, le Gouvernement souhaite élargir l'assiette de l'avantage fiscal en retenant les versements effectués par le redevable à hauteur des souscriptions réalisées par le FIP au capital non pas des sociétés créées depuis moins de cinq ans, mais des PME européennes au sens de la législation européenne, ces sociétés correspondant à l'objectif de l'article 6 du présent projet de loi. Ces sociétés n'ont donc pas besoin d'être seulement jeunes, il suffit qu'elles soient PME au sens de la réglementation européenne.

Nous élargissons donc l'assiette permettant de bénéficier de l'application de votre amendement dûment assorti du sous-amendement n° 278 rectifié.

Sous réserve de l'adoption du sous-amendement n° 278 que je rectifie, monsieur le président, le Gouvernement émettra un avis favorable sur cet amendement.

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