Intervention de Bernard Vera

Réunion du 27 juillet 2007 à 22h45
Travail emploi et pouvoir d'achat — Intitulé du projet de loi

Photo de Bernard VeraBernard Vera :

Au terme de ces trois jours de débat, nous proposons un ultime amendement visant à intituler ce texte « projet de loi en faveur de la rentabilité financière, de la spéculation immobilière et de la restauration des privilèges » au lieu de « projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat ».

Quoi de plus noble a priori que de voter des lois qui permettent d'offrir du travail, de créer des emplois et d'améliorer le pouvoir d'achat ? Cela ferait d'ailleurs un beau sous-titre pour le projet de loi de finances pour 2008. Je crains cependant que le véritable sous-titre de la prochaine loi de finances ne soit « révision générale des politiques publiques et déclin de la dépense publique » !

En effet, la liberté que le Gouvernement prend de réduire ses recettes fiscales va se payer lourdement, dès l'an prochain, dans le cadre de la réduction des dépenses publiques !

Mais, à la vérité, le texte que vous nous avez présenté ne porte pas sur les sujets évoqués. Cela nous a été suffisamment dit et répété tout au long de ces trois jours : il s'agit non pas d'un texte social, mais d'un texte fiscal. Et, comme il est fiscal, il faut donc clairement le caractériser.

Si vous êtes PD-G d'une grande entreprise assujettie à l'ISF, que votre épouse et vos enfants sont détenteurs d'une part minoritaire du capital de votre entreprise, que vous disposez d'un patrimoine immobilier varié, alors cette loi est faite pour vous !

Vos salariés vont travailler plus et donc produire plus, pour le plus grand bien de la rentabilité de votre entreprise et des dividendes que vous tirez de vos actions.

Si l'un de vos enfants est étudiant, il pourra, dans le cadre du rattachement au foyer fiscal, vous permettre de bénéficier de 1 500 euros de remise d'impôts - une toute petite douceur dans votre cas ! -, mais il perdra peut-être la prime pour l'emploi qui va avec ses jobs d'été.

Si vos enfants sont majeurs et que vous souhaitez les aider à s'installer, vous pouvez, avec votre épouse, offrir à chacun de vos enfants un magnifique appartement d'une valeur de 300 000 euros sans avoir à payer le moindre droit.

Vous pouvez aussi doter vos enfants d'une partie du capital de votre entreprise.

Tout cela vous permettra de payer moins d'ISF, tout en maintenant le capital dans la famille.

Et puis, comme vous avez l'intention de mettre en oeuvre un plan de restructuration de votre entreprise, vous utiliserez votre ISF pour doter en capital une PME qui a été créée par un membre de votre famille et qui deviendra peut-être aussi sous-traitante de votre entreprise.

Tout cela est rendu possible grâce à ce projet de loi.

Je n'ai pas calculé le total des moins-values fiscales qui iront de pair avec les différents choix de gestion de patrimoine ici décrits, mais cela n'a rien à voir avec ce qui attend les salariés de cette entreprise !!

Ils travailleront plus, étant donné qu'ils sont payés sur une grille de rémunération qui commence sous le SMIC, ce qui n'est pas suffisant pour faire face aux dépenses de leur famille.

Certains perdront peut-être une grande partie de la prime pour l'emploi qui va avec la faible rémunération que vous lui versez.

Ils perdront peut-être aussi quelques-uns des allégements de taxe d'habitation qui compensent la modicité de leurs revenus. Mais que l'on se rassure, ils pourront peut-être décider d'accéder à la propriété et donc de s'endetter pour le faire !

Voilà ce à quoi va conduire, dans la vie quotidienne, le texte que vous nous avez présenté comme étant destiné à revaloriser le travail.

Le titre que nous proposons de lui donner nous semble, à la lumière de ce que nous venons de dire, bien plus adapté, car tout dans ce texte est fait pour favoriser la rentabilité financière, la spéculation immobilière et la restauration des privilèges !

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