Le sujet dont nous discutons est grave et sérieux, sur le plan tant des principes que de leur mise en œuvre.
Le projet de loi prévoit d'abolir le système existant : les protections légales contre l'expulsion dépendraient non plus de la peine prononcée, mais de la peine encourue.
Si la levée des protections doit évidemment être possible, encore faut-il respecter les principes de proportionnalité et d'individualisation des peines. Or c'est exactement ce qui est en train d'être mis à bas.
Le texte instaure une disproportion entre le motif sur lequel reposera l'expulsion et le profil des étrangers concernés. Par exemple, un étranger établi en France depuis plus de dix ans pourrait être expulsé pour des délits de faible gravité. Sa protection pourra être levée, par exemple, pour un simple vol à la tire dans le métro, puisque cette infraction constitue un vol aggravé, au sens de l'article 311-4 du code pénal, et est punie de cinq ans d'emprisonnement. Voilà une traduction concrète et opérationnelle de ce qui est en train d'être adopté.
Permettez-moi de rappeler quelques principes dont le respect définit l'État de droit. La rédaction proposée contredit ainsi le principe d'individualisation des peines, selon lequel le prononcé de la peine varie en fonction de la gravité de l'infraction et de la personnalité de son auteur. Je pourrais aussi citer l'article VIII de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ainsi, évidemment, que l'ensemble des décisions du Conseil constitutionnel.
Nous proposons donc, par cet amendement, que la levée de la protection ne soit possible qu'au regard de la peine effectivement prononcée, en l'espèce une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à dix ans pour les étrangers protégés au titre de l'article L. 631-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda).