Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, comme chacun le sait, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, la CNRACL, gère la retraite des agents des collectivités territoriales ainsi que celle des fonctionnaires hospitaliers, selon un principe fondamental pour le groupe CRC-SPG, celui de la répartition.
L’excédent financier de la CNRACL constitue d’ailleurs la preuve que le système solidaire de retraite par répartition est économiquement efficace, singulièrement en période de crise du système capitaliste. Avec quelque 2 millions de cotisants pour environ 950 000 retraités, la caisse connaît en effet une situation confortable sur laquelle le Gouvernement s’appuie, j’y reviendrai ultérieurement, pour lui imposer la surcompensation.
Permettez-moi aussi de rappeler que, outre ces bons résultats, la CNRACL présente également la spécificité d’être aujourd’hui la seule caisse de retraite dont le conseil d’administration comporte en son sein des représentants des employeurs et des salariés élus, de la même manière qu’est élu son président, en l’occurrence notre collègue Claude Domeizel.
Cette spécificité n’est peut-être pas sans incidence sur la bonne santé de la caisse, comme elle n’est peut-être pas sans incidence sur la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui : j’ai cru comprendre qu’elle avait fait l’objet la semaine dernière d’une présentation et d’une discussion en conseil d’administration.
Je ne vous surprendrai pas, mes chers collègues, en disant que les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG voteront en faveur de cette proposition de loi. En effet, comment ne pas souscrire aux quatre articles du dispositif qui visent à supprimer les effets néfastes des premières lois de décentralisation et de la loi Fillon de 2003 portant réforme des retraites ?
D’ailleurs, à la suite d’un bilan sur les conséquences de l’application à la CNRACL des lois de 2003, bilan demandé par la CGT, le conseil d’administration de la caisse avait formulé une série de propositions très proches de celles dont nous discutons aujourd’hui.
Mon groupe avait estimé en son temps que l’application des premières lois de décentralisation aurait pour conséquence le transfert massif de dépenses publiques de l’État vers les collectivités territoriales. Nous redoutions à l’époque que ces dépenses ne soient pas compensées… Malheureusement, la suite des événements nous a donné raison.
Si aujourd’hui le transfert des personnels de l’État aux collectivités locales est effectivement financé, force est de constater que tel n’est pas le cas pour ce qui relève des cotisations dues au titre des pensions civiles des fonctionnaires en détachement n’ayant pas opté, comme le leur permet la loi, pour l’intégration. Pour ces derniers, le taux de la contribution due par l’employeur, c’est-à-dire par les collectivités – qui n’étaient pas nécessairement demandeuses de transfert –, est de 60, 14 %, alors qu’il n’est que de 27, 3 % pour les fonctionnaires détachés ayant opté pour l’intégration.
Concrètement, les collectivités locales qui se sont vu « imposer » le transfert de certains personnels doivent acquitter une cotisation au même taux que celles qui ont entamé des démarches volontaires pour accueillir des fonctionnaires en détachement.
Que l’on ne s’y trompe pas : je ne veux nullement incriminer, stigmatiser ou, pis, sanctionner des agents qui, comme le leur permet la loi, n’ont pas souhaité être intégrés dans la collectivité locale où ils sont en détachement. Cependant, je refuse que pèsent sur les collectivités des dépenses importantes découlant de la seule volonté de l’État de transférer une partie de ses personnels. C’est pourquoi nous soutenons la proposition formulée par notre collègue Claude Domeizel d’établir un taux de contribution employeur unique pour l’ensemble des fonctionnaires relevant de la CNRACL.
De même, nous sommes favorables à l’article 1er de la proposition de loi, qui a pour objet d’appliquer l’article 9 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites. Aux termes de celui-ci devait intervenir une baisse progressive du taux de la surcompensation qui pèse sur les régimes spéciaux, et ce jusqu’à l’extinction, fixée théoriquement à 2012, de cette dernière. Je dis bien théoriquement, car, contrairement à ce qui était prévu dans la loi, le taux n’a pas diminué en 2009 : il a été maintenu à 12 %. Le Gouvernement ayant par trop tendance à repousser certaines échéances lorsqu’elles lui sont défavorables, il est légitime de nourrir quelque inquiétude à ce sujet !
Mon groupe juge cette surcompensation illégitime. En effet, contrairement aux arguments utilisés pour instaurer cette dernière, les régimes spéciaux, CNRACL en tête, sont en strict équilibre, et dégagent même des bénéfices. Cette vérité, votre gouvernement ne veut pas l’entendre, madame la secrétaire d’État, comme il n’a pas voulu l’entendre en 2007, quand il a été question de la réforme des régimes spéciaux de retraite.
Ce qu’il faut rappeler, c’est que les régimes spéciaux participent à hauteur de 47 % à la compensation, là où le régime général participe pour 46 % seulement. Quant aux bénéficiaires de cette compensation, ce sont principalement les exploitants agricoles, à hauteur de 70 %, et les commerçants et artisans, à hauteur de 24 %, les régimes spéciaux n’en percevant pour leur part que 7 %. C’est pourquoi il nous semble important de soutenir cet article 1er.
Cette question de la surcompensation est centrale, car la situation actuelle fait peser sur la CNRACL d’importantes dépenses. Ces dernières, si elles ne mettent pas en cause, à court terme, l’équilibre de la caisse, pourraient toutefois la fragiliser dans l’avenir, particulièrement si l’on s’en tient aux estimations formulées par le Conseil d’orientation des retraites, estimations assises sur un principe simple : la diminution du nombre de cotisants.
Pour notre part, nous contestons cette analyse qui entérine par avance des choix politiques – car c’est bien de cela qu’il s’agit ! – dogmatiques, destinés à réduire les dépenses publiques, que celles-ci soient nationales ou locales. Cela prend par exemple la forme du recours massif aux agents contractuels en lieu et place de titulaires, ou du non-remplacement de fonctionnaires au bénéfice d’une externalisation des services.
Pour toutes ces raisons, et comme je l’ai indiqué au début de mon intervention, le groupe CRC-SPG votera cette proposition de loi.