Dans la continuité des propos d’Audrey Linkenheld, je citerai un exemple concret.
J’ai eu le plaisir d’inaugurer il y a quelques semaines un immeuble neuf aux 40-44, rue Max Dormoy dans le XVIIIe arrondissement de Paris, une parcelle qui a longtemps été détenue par un marchand de sommeil, lequel avait fait cent cinquante victimes, dont cinquante enfants, vivant dans des conditions absolument indignes.
Cette opération a mis quinze ans à sortir de terre ! En effet, il est souvent très compliqué de lutter contre les marchands de sommeil. D’ailleurs, ce combat est également parfois très coûteux puisque, en l’occurrence, l’expropriation de cette parcelle nous a coûté 6, 7 millions d’euros d’indemnités que nous avons dû à l’époque reverser à ce marchand de sommeil.
Depuis, heureusement, la loi a changé, à la suite notamment de l’adoption de l’amendement du député communiste Stéphane Peu. Il est désormais possible d’exproprier un marchand de sommeil sans l’indemniser.
Cela étant, pourquoi est-ce si compliqué et si long ? C’est parce que les personnes vivant dans ces immeubles sont pour une large part des sans-papiers en situation irrégulière – on estime que 40 % des victimes de marchands de sommeil n’ont pas de papiers. Or, dès lors que ces étrangers n’en possèdent pas, il n’est pas possible de les reloger dans un logement social.
C’est une situation kafkaïenne d’une certaine manière : certains sont obligés de demeurer dans un immeuble, y compris quand le propriétaire a été exproprié par les pouvoirs publics, parce qu’ils ne peuvent pas accéder à un logement social et, en définitive, l’opération est bloquée.
C’est la raison pour laquelle notre amendement vise à rendre possible l’octroi d’un titre de séjour provisoire aux victimes de marchands de sommeil lorsqu’elles portent plainte, dispositif déjà en vigueur en matière de lutte contre la traite des êtres humains.