Une telle appréciation relève de la compétence des juridictions administratives si elles sont saisies.
Certes, le juge des comptes peut, et même doit, refuser d’allouer des dépenses dont l’utilité publique a été reconnue par l’assemblée délibérante de la collectivité territoriale lorsqu’elles ont donné lieu à une condamnation pénale définitive du comptable de fait.
À l’inverse, il peut – et doit – également allouer lui-même des dépenses dont l’utilité publique n’a pas été reconnue lorsque les dépenses étaient obligatoires ou conditionnées à la perception des recettes.
Toutefois, ces cas ne sont pas les plus fréquents. En effet, un grand nombre de dépenses exposées par les collectivités territoriales ne sont pas des dépenses obligatoires. Je pense, par exemple, à la construction de certains équipements, aux subventions versées à des associations ou à des interventions économiques.
Enfin, une fois la décision de l’autorité budgétaire rendue, la juridiction financière demeure compétente pour statuer, au vu des justifications qui lui sont produites, sur la réalité, la régularité des dépenses alléguées. Après avoir fixé la ligne de compte, elle peut constituer le comptable de fait en débet et le condamner à l’amende.
Ces règles, d’une grande complexité, méritent sans doute d’être revues.
Toutefois, si l’Assemblée nationale a supprimé la compétence des assemblées délibérantes locales pour apprécier l’utilité publique de dépenses ayant donné lieu à gestion de fait, le texte qu’elle a adopté ne garantit en rien que la juridiction financière se contenterait, comme elle en a aujourd’hui l’obligation, de vérifier la réalité des dépenses alléguées sans se faire juge de leur légalité, voire, lorsque la question porte sur le point de savoir si les dépenses présentaient un intérêt local, de leur opportunité.
En outre, si le texte remet en cause une prérogative des élus locaux à l’égard des gestions de fait intéressant les finances locales, il laisse inchangé le pouvoir des parlementaires à l’égard des gestions de fait concernant les deniers de l’État, qui s’exercent dans le cadre de la loi de règlement. Cette dichotomie pose problème.
En conclusion, la question posée par les députés, certes pertinente, devrait faire l’objet d’un examen d’ensemble dans le cadre de la réforme annoncée des missions des juridictions financières et des règles relatives à la responsabilité des gestionnaires publics.