… ou liées au handicap et à l’âge, deux sujets sur lesquels, je me permets de vous le faire remarquer, monsieur le rapporteur, nous avions tout de même formulé des observations.
Vous ne pouviez ignorer les diverses tentatives, venant de vos rangs ou encore des organisations patronales, d’abaisser le délai de prescription à cinq ans en matière de discriminations au travail, à l’image de l’ancien député Jacques Godfrain, qui, dès octobre 2003, déposait une proposition de loi visant à réduire à cinq ans la prescription applicable aux actions en justice fondées sur une discrimination syndicale.
En janvier 2004, le rapport Virville reprenait à son compte cette revendication, tout comme le MEDEF, qui, dans le domaine de la lutte contre les discriminations, s’est révélé beaucoup moins frileux qu’en matière de droit commun de la prescription. Dans ses quarante-quatre propositions pour moderniser le code du travail, document datant de mars 2004, le MEDEF proposait, lui aussi, d’abaisser à cinq ans le délai pour agir en justice.
Dans des trois cas, le souci est identique : ne pas faire peser sur les entreprises le risque qu’un jour, trop longtemps après les faits, un salarié puisse réclamer en justice réparation d’un préjudice subi en raison d’une situation de discrimination. Cela les obligerait à conserver les preuves durant de longues années, et le fait d’attendre plusieurs dizaines d’année constituerait la preuve de la négligence grave du salarié. Tous arrivent donc logiquement à la conclusion selon laquelle il est nécessaire de réduire le délai de prescription en soumettant les actions en réparation d’un préjudice résultant d’une discrimination au délai quinquennal.
L’examen du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations a été l’occasion, pour la commission des lois, de tenter de réparer quelque peu cette erreur.
Ainsi a été adopté un amendement visant à insérer dans le code du travail et dans la loi de 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires des dispositions spécifiques à l’action en réparation du préjudice subi résultant d’une discrimination.
Cet amendement, devenu l’article 8 de la présente proposition de loi, vise à maintenir un délai de prescription quinquennal, tel que prévu initialement par la proposition de loi, mais précise que le délai ne commence à courir qu’au moment de la révélation de la discrimination, qu’il n’est pas susceptible d’aménagement conventionnel et, enfin, que les dommages et intérêts réparent l’entier préjudice résultant de la discrimination, pendant toute sa durée.
Ce nouvel article L. 1134-5 du code du travail pose cependant quelques problèmes.
Tout d’abord, la référence à la « révélation » de la discrimination n’est pas suffisamment précise. Or, c’est ce qui constitue le point de départ du délai de prescription. Certes, la notion de « révélation » est issue de la jurisprudence de la Cour de cassation et, dans son arrêt du 22 mars 2007, celle-ci explicite ce qu’est la révélation du fait de discrimination ; j’y reviendrai ultérieurement.
En se fondant sur fait que la doctrine définit la révélation comme « la connaissance du manquement et du préjudice en résultant », il ne faudrait donc pas s’inquiéter du point de départ du délai de prescription. Toutefois, la Cour de cassation n’a utilisé cette notion qu’une seule fois, en l’explicitant, ce que ne fait pas le texte.
Par ailleurs, la rédaction retenue pour l’article L. 1134-5 du code du travail ne retient que les dommages et intérêts en matière de réparation du préjudice résultant de la discrimination. Là encore, ce choix, qui s’apparente à un choix de compromis, n’est pas pleinement satisfaisant, car il envisage la réparation sous le seul angle pécuniaire, alors que le champ de la réparation peut être beaucoup plus vaste et comprendre la réintégration, un reclassement ou encore un repositionnement.
Les éléments qui nous ont été communiqués, tant en commission qu’en séance publique à l’Assemblée nationale, ne sont pas de nature à nous rassurer. C’est pourquoi nous avons déposé, sur l’article 8, un amendement destiné à lever toute ambiguïté.