Monsieur le secrétaire d'État, le rapprochement de la gendarmerie et de la police nationale s’inscrit dans le mouvement plus vaste de fragilisation des services publics que le Gouvernement a engagé au nom du principe de rationalisation budgétaire érigé en dogme. Trésoreries, directions départementales de l’équipement, casernes militaires, tribunaux, hôpitaux, présence postale et aujourd’hui gendarmerie : la liste est longue de ces services publics qui disparaissent petit à petit, et ce en totale contradiction avec le discours prononcé par le Président de la République, le 9 février 2010, à Morée.
Permettez-moi de le citer :
« Parce que l’on s’est habitué à une politique de l’aménagement du territoire qui, au fond, n’avait comme seule ambition d’accompagner vos territoires vers le déclin, faire en sorte que ce soit un peu moins douloureux, que cela se passe un peu moins vite, qu’on retarde d’un an la fermeture d’une école, de deux ans celle d’un bureau de poste, de trois ans celle d’un hôpital, de quatre ans celle d’un tribunal. C’était une vision défensive. Je souhaite une vision offensive à l’image de la croissance de votre démographie [...] Naturellement, la responsabilité de l’État face aux besoins des habitants de la ruralité c’est que, partout, vous ayez accès aux services essentiels, les services à la population. »
Le Président reconnaît lui-même que l’on ne peut pas s’appuyer sur la seule norme comptable pour engager une nouvelle politique d’aménagement des territoires ruraux, dont la démographie est en croissance et qui sont de plus en plus touchés par la délinquance.
Dans ces conditions, décider de supprimer en 2010 1 303 postes, après les 1 246 supprimés en 2009, soit au total près de 2 500 postes en deux ans, paraît incompréhensible et en totale contradiction avec la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, la LOPSI, dans laquelle on a pourtant estimé à 7 000 emplois les renforts nécessaires pour remplir les missions de maintien de l’ordre public.
Le département du Gers, que j’ai l’honneur de représenter, est particulièrement touché par les conséquences du rapprochement entre la gendarmerie et la police nationale.
En effet, par courrier du 15 mai 2009, j’ai été informé par l’autorité régionale d’une « remontée d’effectifs », qui se traduit concrètement par la suppression de cent quarante-trois gendarmes dans la région Midi-Pyrénées, dont vingt-trois dans le seul département du Gers, où sont affectés trois cent soixante-neuf militaires et qui pourtant connaît une augmentation démographique de 5 %.
En 1999, nous avions pourtant accepté la réorganisation de la gendarmerie autour des brigades communautaires, organisation qui a fait la preuve de son efficacité et pour laquelle de nombreuses communes se sont engagées dans des opérations coûteuses de rénovation ou de construction de casernes et de logements. Dans le département du Gers, on en compte quinze.
Faut-il dès aujourd’hui que nous nous organisions à l’échelle des territoires que couvriront les conseillers territoriaux ? Alors que chaque chef-lieu de canton compte à ce jour une caserne de gendarmerie, faut-il imaginer qu’il n’y aura qu’une seule gendarmerie à l’échelle de quatre ou cinq cantons ?
De plus, la fermeture programmée de la moitié des casernes d’ici à 2011, comme le préconise la RGPP, va considérablement peser sur les finances des collectivités : les casernes venant d’être construites sont louées par bail de neuf ans, tandis que l’investissement consenti par les collectivités ne sera remboursé qu’en vingt ou trente ans.
Quelles compensations avez-vous prévues pour pallier cette situation ? Comptez-vous initier des programmes de reconversion immobilière pour ces locaux très spécifiques ? Avez-vous prévu des plans d’accompagnement financier, à l’image des communes touchées par la réorganisation de la carte militaire ? Comment les maires pourront-ils, demain, exercer leur pouvoir de police, qui est pourtant une compétence obligatoire ?
Peu de communes ont la capacité de financer une police municipale. Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'État, la grande inquiétude à la fois de la population et des élus locaux dès lors que le besoin d’une force de sécurité de proximité est patent.