Séance en hémicycle du 19 mai 2010 à 14h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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La séance est ouverte à quatorze heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Mes chers collègues, j’ai l’honneur de saluer, dans la tribune officielle, Mmes et MM. les ambassadeurs représentant les pays africains, anciennes colonies françaises ayant accédé, en 1960, à l’indépendance, ainsi que le secrétaire général du cinquantenaire des indépendances africaines, M. Jacques Toubon.

Nous célébrons, cette année, le cinquantenaire de leur indépendance, et nous venons de nous retrouver dans les salons de Boffrand, pour un moment de convivialité.

Cette année, pour marquer les liens particuliers qui nous unissent, nous qui avons une histoire commune, des troupes de chacun de ces pays défileront sur les Champs-Élysées le jour de notre fête nationale, le 14 juillet prochain. Chacun ici se souvient que Brazzaville fut, un jour, la capitale de la France libre.

À quelques jours de l’ouverture, à Nice, du XXVe sommet des chefs d’État d’Afrique et de France, chacun mesure l’importance de nos relations avec l’Afrique.

Je veux aussi saluer la mémoire de nos collègues qui, sous la IVe République, représentaient, dans cette enceinte, les territoires situés sur le continent africain : ils étaient au nombre de 58, soit près d’un sénateur sur cinq. Je salue leur apport à notre vie politique et, souvent, après l’indépendance de ces pays, à la mise en place des institutions de leurs jeunes États.

Mesdames, messieurs les ambassadeurs, nous avons une histoire commune. Avec ses pages glorieuses, mais aussi ses pages douloureuses, celle-ci est un lien indissoluble entre nous. C’est aussi le socle sur lequel il nous appartient de consolider, jour après jour, l’amitié entre nos peuples. Nos relations seront alors d’autant plus fortes que, aujourd’hui, elles sont non plus imposées, mais librement choisies de part et d’autre.

Je vous remercie de votre présence.

M. le secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique relatif au Conseil économique, social et environnemental est parvenue à l’adoption d’un texte commun.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le Premier ministre a communiqué au Sénat :

- le projet de contrat d’objectifs et de moyens entre l’État et l’Institut national de l’audiovisuel pour la période 2010-2014, établi en application de l’article 53 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ;

- le rapport sur l’état semestriel des sommes restant dues par l’État aux régimes obligatoires de base de sécurité sociale au 31 décembre 2009, établi en application de l’article L.O. 111-10-1 du code de la sécurité sociale.

Acte est donné du dépôt de ces documents.

Le premier a été transmis à la commission des finances ainsi qu’à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication ; le second, à la commission des affaires sociales. Ils seront disponibles au bureau de la distribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean Louis Masson, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Monsieur le président, je tiens à attirer votre attention, ainsi que celle de mes collègues, sur les dérives actuelles des délais de réponses apportées par le Gouvernement aux questions écrites.

J’ai d’ailleurs moi-même fait constater par les services de notre assemblée la dérive totale qui existe en la matière depuis six mois, avec un allongement parfaitement anormal des délais. Mais ce ne serait rien si les réponses étaient faites correctement. Certains ministres prennent l’habitude de répondre d’abord aux questions similaires posées par nos collègues de l'Assemblée nationale !

Récemment encore, alors même que j’avais posé une question – la question n° 11 292 – au ministre de l’intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, reprise ultérieurement par l’un de mes collègues députés, celui-ci a obtenu une réponse deux mois avant moi ! C’est tout à fait anormal !

Ce qui est plus indécent encore, c’est le fait de m’avoir renvoyé à la réponse adressée à mon collègue de l'Assemblée nationale et de ne pas m’avoir répondu sur le fond ! Cette situation est parfaitement invraisemblable !

Aussi, j’aimerais que vous rappeliez, monsieur le président, aux membres du Gouvernement leurs obligations de nous répondre, en vertu de notre règlement, dans des délais réglementaires. Par ailleurs, je souhaiterais que vous demandiez au ministre en cause de faire des réponses un peu plus décentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Mon cher collègue, je vous donne acte de votre rappel au règlement.

Je vous informe qu’un certain nombre de vos collègues m’ont personnellement fait part de leurs observations sur ce sujet par écrit ou oralement. Je vais m’enquérir des raisons de cette situation auprès du ministre chargé des relations avec le Parlement et lui demander de faire le point avec les membres du Gouvernement pour que ceux-ci vous apportent des réponses non seulement dans des délais convenables, mais aussi, surtout, sur le fond.

Je ne manquerai pas de tenir le Sénat informé.

(Texte de la commission)

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, pour le développement des sociétés publiques locales (proposition de loi n° 359, texte de la commission n° 430, rapport n° 429).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d’État.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Monsieur le président, permettez-moi, tout d’abord, de m’associer, au nom du Gouvernement, à l’hommage que vous avez rendu à Mmes et MM. les ambassadeurs représentant les pays africains, ainsi qu’à M. Jacques Toubon, président du comité d’organisation des cérémonies marquant le cinquantième anniversaire de l’indépendance de ces États africains amis.

Monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous examinons aujourd’hui, en deuxième lecture, la proposition de loi pour le développement des sociétés publiques locales.

J’aimerais, au préalable, revenir sur le contexte dans lequel s’est inscrite cette initiative parlementaire de votre collègue Daniel Raoul.

Une proposition de loi similaire avait été déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale par M. Jean-Pierre Schosteck, député. Celui-ci a d’ailleurs fort logiquement été désigné rapporteur de la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui. Pour être complet, je signale également l’initiative voisine du sénateur Jean-Léonce Dupont.

J’ai bien évidemment noté le consensus qui a présidé à l’examen de ce texte en première lecture, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, celui-ci ayant été adopté, modifié par quelques amendements, à l’unanimité par les deux chambres.

Cette initiative parlementaire fédère les différents groupes politiques ; je mesure donc la forte volonté du Parlement de proposer un nouvel outil aux collectivités territoriales.

Ce texte a pour objet d’apporter aux collectivités territoriales un nouvel outil juridique pour exercer les compétences qui leur sont confiées par la loi.

Je rappelle très brièvement que la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement a permis aux collectivités territoriales et à leurs groupements de créer, à titre expérimental pour une durée de cinq ans, des sociétés publiques locales d’aménagement dont elles détiennent l’intégralité du capital.

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui tend à développer cet outil, d’une part, en pérennisant les sociétés publiques locales d’aménagement et, d’autre part, en créant des sociétés publiques locales aux compétences élargies, avec un domaine d’intervention calqué sur celui des sociétés d’économie mixte.

Il s’agit, par ce texte, de tirer profit des récentes évolutions de la jurisprudence dite « in house », comme l’on dit dans le Cantal, monsieur le rapporteur

Sourires.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Dans votre rapport, vous avez parfaitement rappelé les critères de cette jurisprudence et leurs conséquences juridiques sur les statuts des futures sociétés publiques locales, ou SPL.

Deux conditions cumulatives doivent en effet être réunies : d’une part, l’autorité publique doit exercer sur la personne en cause un contrôle analogue à celui qu’elle exerce sur ses propres services ; d’autre part, la société publique locale doit réaliser l’essentiel de son activité avec la ou les collectivités qui la détiennent.

Les conséquences juridiques sur le régime des sociétés publiques locales sont donc les suivantes.

Premièrement, celles-ci devront prendre la forme de sociétés anonymes régies par le code de commerce, sous réserve des dispositions spécifiques prévues pour les sociétés d’économie mixte locales.

Deuxièmement, leur capital sera composé d’au moins deux actionnaires et il sera entièrement détenu par des collectivités territoriales et leurs groupements.

Troisièmement, leur objet social sera déterminé par référence aux compétences attribuées par la loi aux collectivités : opérations d’aménagement ou de construction, exploitation de services publics industriels et commerciaux ou toutes autres activités d’intérêt général.

Quatrièmement, leur activité s’exercera pour le compte exclusif de leurs actionnaires et sera limitée au territoire des collectivités territoriales ou groupements actionnaires.

Il me paraissait nécessaire de rappeler ces règles, qui ont d’ailleurs été renforcées en première lecture, même si toutes les inquiétudes n’ont pas disparu, y compris dans des secteurs qui, me semble-t-il, n’entrent pas spontanément dans le champ d’activité des sociétés publiques locales envisagées par les auteurs de la proposition de loi. Je pense par exemple au secteur funéraire.

Nous devons collectivement veiller à la fiabilité de ce nouveau cadre juridique et répondre aux inquiétudes qui subsisteraient encore sur les contours et l’activité des futures sociétés publiques locales. Certains acteurs économiques ont pu, en effet, exprimer la crainte de voir les missions et les prestations de service public échapper aux règles de mise en concurrence prévues par le droit communautaire. Une saisine ultérieure de la Cour de justice de l’Union européenne n’est d’ailleurs pas totalement à exclure et, vous en conviendrez, rien ne serait plus désastreux pour les collectivités territoriales elles-mêmes qu’un outil juridiquement peu fiable.

C’est pourquoi le Gouvernement, en première lecture, a déposé ou soutenu des amendements visant à sécuriser le dispositif, et il se réjouit que ceux-ci aient été adoptés.

Nous allons examiner dans quelques instants sept amendements parlementaires qui visent soit à renforcer le contrôle des sociétés publiques locales, soit à en réduire le champ d’activité.

À ce stade du débat, je voudrais formuler brièvement trois séries de remarques.

Permettez-moi, tout d’abord, de rappeler quelques principes sur le cadre juridique.

Premier principe : à l’instar des sociétés publiques locales d’aménagement, les futures sociétés publiques locales ne pourront exercer leurs activités que pour leurs seuls actionnaires. Cette précision est importante.

Deuxième principe : le champ d’activité des sociétés publiques locales devra correspondre strictement aux compétences des collectivités territoriales actionnaires et s’exercer uniquement sur leur territoire.

Troisième principe : en dehors des groupements de collectivités territoriales, les établissements publics ne pourront figurer parmi les actionnaires de la société.

Quatrième principe : la jurisprudence communautaire exige que le contrôle exercé par l’autorité publique soit analogue – j’insiste sur ce mot – à celui qu’elle exerce sur ses propres services. À défaut, le juge communautaire estimerait que le lien de type « in house » entre la personne publique et la société est rompu.

Cinquième principe, enfin : ce lien, qui doit être examiné au cas par cas, est une dérogation aux règles de mise en concurrence définies par le droit communautaire.

J’en viens maintenant à une deuxième série de remarques : les SPL vont s’insérer dans un dispositif de contrôle existant, que je voudrais rappeler.

Premièrement, les dispositions du code de commerce qui s’appliquent en la matière vont introduire le contrôle d’un commissaire aux comptes et la nécessité de certifier les comptes.

Deuxièmement, différents outils de contrôle seront à la disposition des collectivités territoriales et de leurs groupements en leur qualité d’actionnaires : l’examen des rapports annuels réalisés par leurs mandataires, l’analyse des comptes rendus d’exécution des missions confiées aux sociétés publiques locales et, plus généralement, l’organisation par les statuts d’un mode de gouvernance spécifique garantissant effectivement le contrôle analogue – j’insiste de nouveau sur ce mot – nécessaire à la situation de quasi-régie.

Troisièmement, le contrôle de légalité du préfet s’appliquera de plein droit ; il sera même renforcé, car l’article L. 1524–1 du code général des collectivités territoriales introduit un contrôle spécifique en la matière.

Ce contrôle donne au préfet un droit d’information en organisant une procédure de transmission obligatoire de certains actes des sociétés d’économie mixte. Ce dispositif sera applicable aux sociétés publiques locales. Ainsi, les délibérations du conseil d’administration ou de surveillance, les rapports annexés, le budget, le compte de résultat, et leurs annexes, devront être transmis au préfet.

Quatrièmement, enfin, le préfet peut toujours saisir la chambre régionale des comptes lorsqu’il estime qu’une délibération est de nature à augmenter gravement la charge financière d’une ou de plusieurs collectivités ou groupements actionnaires.

Troisième série de remarques : si le droit applicable aux sociétés publiques locales devait soulever, à l’usage, des difficultés d’application, il conviendrait de réfléchir, tous ensemble, à une adaptation ultérieure des textes.

La proposition de loi ne prévoyant pas de décret d’application, la future loi sera donc d’application immédiate, dès sa publication. Il me semble toutefois de bonne gestion d’envisager une circulaire d’application destinée à rappeler le cadre juridique des sociétés publiques locales, notamment les précautions que devront prendre les collectivités territoriales.

De même, dans la mesure où nous n’avons que peu de recul par rapport à l’expérimentation relative aux sociétés publiques locales d’aménagement, je ne m’interdis pas de penser que des ajustements seront peut-être nécessaires à l’issue des premiers retours d’expérience.

Nous créons en effet aujourd’hui un instrument juridique nouveau en faveur des collectivités locales, nous appuyant en cela sur les dernières évolutions de la jurisprudence européenne.

Il importera donc d’être attentif à sa mise en œuvre, pour l’avenir, afin de bien sécuriser juridiquement nos collectivités locales.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. Marc Daunis applaudit également.

M. Roland du Luart remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je voudrais tout d’abord vous féliciter, monsieur le secrétaire d'État, de la virtuosité avec laquelle vous maniez le « in house » !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Le texte que nous examinons a pour objet de créer une nouvelle catégorie d’entreprises publiques, un nouvel instrument au service des collectivités territoriales, à savoir les sociétés publiques locales. Cette proposition de loi de notre collègue Daniel Raoul est très similaire à celles qu’ont déposées respectivement notre collègue Jean-Léonce Dupont et le député Jean-Pierre Schosteck.

Les collectivités territoriales, qui génèrent les trois quarts de l’investissement public, doivent pouvoir recourir aux services de tiers dans des conditions compétitives et juridiquement simples, dans le respect du droit communautaire de la concurrence. Si l’instrument des sociétés d’économie mixte, ou SEM, n’était plus adapté à ces exigences, c’est parce que leur capital est en partie privé. Il fallait donc créer des sociétés publiques locales à capital entièrement public émanant de nos collectivités territoriales.

En première lecture, cette proposition de loi a été votée à l’unanimité, tant par le Sénat que par l’Assemblée nationale, avec quelques améliorations qui ne remettent pas en cause l’équilibre général.

Le statut de ces sociétés publiques locales résulte tout à la fois de la réglementation des sociétés anonymes, des dispositions particulières applicables aux sociétés d’économie mixte, en raison de la présence des collectivités locales dans l’actionnariat, et des règles spécifiques découlant de l’article 1er de cette proposition de loi.

L’Assemblée nationale a ajouté un article 1er bis A, aux termes duquel la délégation de service public par une collectivité territoriale à une société publique locale dont elle est membre s’effectuera sans mise en concurrence, comme c’est déjà le cas pour les établissements publics. Nos collègues députés ont ajouté l’obligation pour l’assemblée délibérante de se prononcer sur le principe de délégation de service public à la société publique locale.

L’exonération de la mise en concurrence ressortit à la nature de l’entreprise, qui est le prolongement de la collectivité.

Comme l’a rappelé M. le secrétaire d'État, il faut deux conditions cumulatives selon les critères du « in house » et de la jurisprudence européenne résultant de l’arrêt Teckal, de novembre 1999, et de l’arrêt Coditel Brabant, de novembre 2008 : l’autorité publique doit exercer sur la société publique locale un contrôle analogue à celui qu’elle exerce sur ses propres services – c’est la définition du droit européen – et la société publique locale doit réaliser l’essentiel de son activité avec la ou les collectivités qui la détiennent.

Le dispositif qui en résultera sera sécurisé : société anonyme avec application des dispositions spécifiques prévues pour les sociétés d’économie mixte ; capital avec au moins deux actionnaires, ainsi que le Sénat en avait exprimé la volonté lors de la première lecture ; capital entièrement détenu par les collectivités territoriales et leurs groupements ; une activité pour le compte exclusif des actionnaires ; un cantonnement au territoire de ces collectivités.

Ainsi, nous avons tout fait pour que ce texte apporte un maximum de sécurité juridique.

Les sociétés publiques locales d’aménagement, depuis leur création, en 2006, n’avaient pas connu un très grand succès en raison de la contrainte qui leur était imposée de compter au moins sept actionnaires. Pour leur permettre de se développer, nous avons décidé de réduire ce chiffre à deux.

Ces outils d’aménagement conformes à la jurisprudence européenne sont très utiles pour nos collectivités. Il ne s’agit aucunement de restreindre l’activité du secteur privé, en particulier du secteur du bâtiment et des travaux publics, qui, au contraire, a tout intérêt à ce que nos collectivités territoriales disposent des meilleurs instruments pour développer l’investissement. Là est le message et il importe de le faire partager.

Ces évolutions facilitent la réintégration au sein d’une seule entité de diverses activités aujourd’hui dissociées et permettent, par exemple, de doter les intercommunalités d’un outil de mutualisation dans le champ du « in house ».

Cette mutualisation, monsieur le secrétaire d'État, me paraît participer à l’effort nécessaire pour réaliser un maximum d’économies.

Des auditions que nous avons menées, il ressort que la Fédération des entreprises publiques locales et l’ensemble des associations d’élus émettent un avis très favorable sur cette proposition de loi, le MEDEF et la Fédération française du bâtiment ayant, quant à eux, exprimé leur inquiétude.

Au-delà de toute caricature, soulignons encore une fois que ce texte n’a pas pour objet de permettre aux élus de faire n’importe quoi. Alors qu’il leur est souvent reproché de ne jamais être d’accord sur rien, saluons l’unanimité avec laquelle les élus accueillent ce texte, signe qu’une vraie volonté se manifeste en faveur de nos collectivités territoriales.

Je pense que les élus des collectivités locales, en ces temps d’errements financiers, montrent quotidiennement leur capacité à gérer ces collectivités. D’ailleurs, les sociétés d’économie mixte qui en dépendent servent souvent l’intérêt général de façon exemplaire.

J’en viens aux articles qui composent ce texte.

L’article 1er est consacré aux dispositions concernant le régime juridique de cette nouvelle catégorie d’entreprises. Je rappelle que nous avons tous fait le maximum en vue d’une sécurisation juridique : à travers le contrôle de légalité, comme vous l’avez rappelé, monsieur le secrétaire d’État ; mais aussi à travers l’approbation par les assemblées délibérantes de toute modification des éléments constitutifs de la société ; la compétence, que vous avez également rappelée, de la chambre régionale des comptes ; et les règles spécifiques aux SPL sur l’objet social, la composition du capital et les règles encadrant leur activité prévues par le présent article.

Ainsi, ce statut fixe des règles strictes justifiant la dispense de l’obligation de mise en concurrence. L’Assemblée nationale a retenu ce dispositif, avec deux précisions rédactionnelles opportunes. Votre commission propose donc d’adopter l’article 1er sans modification.

Dans l’article 1er bis A, introduit par l’Assemblée nationale, il s’agit simplement, par coordination avec l’institution des SPL, de compléter le régime des délégations de service public pour délimiter le domaine d’application des règles concurrentielles. Ainsi, avec ce nouvel article, la délégation de service public par une collectivité territoriale à une SPL dont elle est membre s’effectuera sans mise en concurrence.

Je rappelle qu’une telle exemption existe déjà au profit d’établissements publics. Nous arrivons à une situation où il est nécessaire de requérir de la personne publique qu’elle « exerce un contrôle comparable à celui qu’elle exerce sur ses propres services » – cela, c’est la déclinaison du droit communautaire – et qu’elle bénéficie de l’essentiel des activités de l’établissement. En outre, dans le respect du principe de spécialité qui régit les établissements publics, les statuts doivent prévoir expressément l’activité déléguée.

L’Assemblée nationale a étendu ces dispositions aux SPL en tenant compte, pour mesurer leur activité au regard du second critère du « in house », de l’ensemble des actionnaires. Il s’agit donc, très clairement, de la transposition de la jurisprudence de la Cour européenne, qui apprécie globalement l’activité de la société en cause, c’est-à-dire au niveau de l’ensemble des personnes publiques détentrices de la société, et non pour chacune d’entre elles. Cela est bien conforme à l’arrêt Carbotermo de 2006.

Nos collègues députés ont renforcé dans ce cas le contrôle préalable des élus en prévoyant une délibération sur le principe de toute délégation de service public à une SPL.

Votre commission des lois a approuvé ces harmonisations utiles, ce verrou supplémentaire que constitue l’intervention de l’assemblée délibérante, qui conforte tout autant le contrôle exercé sur la société que la démocratie locale.

La commission vous propose par conséquent d’adopter l’article 1er bis A sans modification.

L’article 1er bis porte sur la pérennisation des sociétés publiques locales d’aménagement. Là aussi, notre collègue Daniel Raoul avait déposé un amendement qui a été retenu pour pérenniser ces SPLA en étendant leur champ d’action. L’Assemblée nationale a modifié la rédaction du premier alinéa de l’article L. 327-1 du code de l’urbanisme pour l’aligner parfaitement sur les dispositions introduites dans le code général des collectivités territoriales. Aussi, votre commission a adopté cet article sans modification.

Plus généralement, ces SPLA, dont le nombre a augmenté au cours de la dernière année, vont certainement connaître un développement relativement important. L’intérêt récent pour cet instrument est dû, je l’ai rappelé tout à l’heure, à l’abaissement à deux du nombre minimal d’actionnaires. Nous vous proposons d’adopter également l’article 2 sans modification.

Monsieur le secrétaire d’État, pour répondre aux objections et aux inquiétudes sur lesquelles vous avez attiré l’attention de notre assemblée, il me semble utile de rappeler, pour qu’il n’existe aucune ambiguïté, que les SPL représentent 80 % des 16 000 entreprises publiques locales en activité dans les autres pays européens, ce qui n’empêche pas les entreprises privées – et notamment les groupes français – d’y gagner des parts de marché significatives.

Comme les quelque 1 100 SEM en activité, les SPL se consacreront principalement à des missions de coordination et d’impulsion, et ne seront aucunement destinées à concurrencer les entreprises privées. Elles auront un rôle « pilote » d’entraînement sur les territoires, ce qui aura des retombées sur les entreprises en termes de commandes, directes ou indirectes.

Nous avons donc veillé, je le rappelle encore une fois, à ce que les futures SPL « collent » à la définition la plus rigoureuse du « in house » bâtie par la jurisprudence communautaire.

En ce qui concerne les logements sociaux, qui ont fait l’objet de quelques inquiétudes, il convient de préciser que les SPL n’auront pas, en l’état, la possibilité d’en réaliser.

En effet, sans modification de la réglementation, les SPL n’auront accès ni aux subventions de l’État, ni aux prêts de la CDC pour la construction de logements locatifs sociaux.

L’article R. 331-14 du code de la construction et de l’habitation liste de manière exhaustive les organismes qui peuvent avoir accès à ces subventions et à ces prêts. Les SPL n’en font pas partie : je crois qu’il convenait de rappeler cet élément, notamment pour rassurer l’Union sociale de l’habitat.

De plus, les SPL n’auront la possibilité d’exercer leurs activités que pour le compte de leurs actionnaires.

Monsieur le secrétaire d’État, si des collectivités locales souhaitent à l’avenir que des SPL soient autorisées à construire des logements sociaux, il conviendra éventuellement de le prévoir par des dispositions ultérieures, après discussion avec les pouvoirs publics, et de modifier les textes en conséquence.

Pour conclure, la commission a considéré à l’unanimité qu’il convenait d’adopter conforme ce texte, car il paraît tout à fait sécurisé quant à l’application du droit communautaire, tout en donnant à nos collectivités un instrument d’action supplémentaire pour développer encore l’investissement, ce qui est tout à fait primordial, en particulier en ces temps difficiles.

Applaudissements sur les travées du RDSE, de l ’ UMP et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je dois dire tout d’abord que j’approuve tout à fait cette proposition de loi.

Si l’on remonte dans l’histoire, on se rend compte que les premières interventions juridiquement structurées des collectivités locales dans la vie économique ont été mises en place dans les trois départements d’Alsace-Moselle. C’est un héritage du droit local de ces trois départements.

Ainsi, depuis plus d’un siècle, cent quarante ans, nous disposons dans ces trois départements d’un certain nombre de possibilités qui, si elles ont eu tendance à être un peu moins utilisées quand le statut des SEM a été créé, restent cependant encore d’actualité. En effet, un certain nombre de sociétés relevant de la même philosophie que les sociétés publiques locales que nous sommes en train de créer existent dans ces trois départements.

Dans l’ensemble, je considère qu’il s’agit d’une avancée et, surtout, d’une clarification pour le droit français. Il me semble très positif que les collectivités locales puissent attribuer des délégations de service public sans passer par la concurrence, car il est tout à fait normal qu’une collectivité locale ait la possibilité de choisir les critères d’intervention d’une société qu’elle maîtrise.

C’est la raison pour laquelle je voterai en faveur du texte qui nous est soumis.

MM. Pierre Bordier et Pierre-Yves Collombat applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, contrairement aux idées reçues, les élus locaux recourent de plus en plus à la gestion directe de leurs services publics.

Qu’il s’agisse de l’eau, des déchets ou du transport, les collectivités locales, qui avaient abondamment délégué la gestion de leurs services publics, ont tendance à recourir de nouveau à un opérateur interne, sous la forme juridique d’une régie simple, d’un EPIC, ou bientôt – à l’issue du vote de ce texte, je l’espère ! – d’une société publique locale.

Je tiens également à rappeler que nos collectivités territoriales sont à l’origine de près des trois quarts des investissements publics en France.

En exerçant, avec plus ou moins de dynamisme suivant les régions, les compétences qui leur ont été attribuées par la loi dans le domaine de l’aménagement urbain, de l’équipement, du transport, du logement, du tourisme, de la culture, ou encore de l’environnement, les collectivités contribuent de manière très forte au développement économique de notre pays.

Nous traversons encore une période difficile, et nos collectivités restent les premiers acteurs de l’économie locale et comptent parmi les acteurs majeurs de l’économie nationale. La souplesse que nous offre cette proposition de loi nous permettra d’agir avec rapidité et efficacité, alors que le cadre juridique actuel est trop lourd, trop long et trop coûteux, et amoindrit notre réactivité.

La gestion directe offre des avantages. Les collectivités locales disposent d’une parfaite maîtrise et d’un contrôle total sur la société gestionnaire, et notamment sur ses comptes. Tous les administrateurs sont des élus. C’est la garantie que les orientations et les politiques publiques seront respectées.

La réactivité est meilleure : considérés comme des prolongements des collectivités locales, les opérateurs internes n’ont pas à être mis en concurrence par leurs actionnaires pour l’attribution de toute nouvelle mission. C’est autant de temps gagné pour la conduite des projets.

Enfin, entreprises à part entière, les opérateurs internes apporteront souplesse et performance au service public local, dans une vision de long terme conforme à l’intérêt général.

Je ne reviendrai pas sur la conformité du texte au droit communautaire, notre collègue et rapporteur ayant parfaitement exposé la jurisprudence. Néanmoins, je tiens à préciser que l’Europe, que l’on accuse souvent de tous les maux, reconnaît, au travers de sa jurisprudence, que les entreprises de droit privé doivent pouvoir échapper au régime actuel à deux conditions : que le capital de la SA soit totalement public, et que l’essentiel de son activité se fasse avec les collectivités qui la détiennent.

Au-delà du fonctionnement juridique et technique de la SPL, je souhaite rappeler que ces nouvelles sociétés présentent un intérêt majeur : celui de la coopération institutionnelle. Les autorités organisatrices locales pourront devenir actionnaires de ces sociétés afin de couvrir un bassin de vie qui dépasse les frontières géographiques d’une intercommunalité, d’un département, d’une région.

Cette notion de « bassin de vie » est fondamentale : il s’agit en effet d’un territoire doté d’une cohérence géographique, sociale, culturelle et économique, exprimant des besoins homogènes en matière d’activités et de services.

La SPL, j’en suis convaincu, permettra aux élus d’élaborer une nouvelle organisation des services publics au bénéfice d’une articulation renforcée de nos territoires et, donc, d’une plus grande cohérence. Elle constitue ainsi un outil pertinent.

Il est très important que les collectivités puissent avoir recours aux services de tiers dans des conditions économiquement compétitives et juridiquement simples, mais aussi dans le respect du droit communautaire de la concurrence.

Le texte qui nous est proposé précise que le capital de la SPL doit être détenu en totalité par des actionnaires, au moins deux, dont le caractère public ne soulève aucune ambiguïté ; que ces sociétés exercent leur activité exclusivement pour le compte de leurs actionnaires et sur leur territoire ; et que le principe de toute délégation de service public à une SPL doit être débattu par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales et groupements concernés.

En conciliant le respect du droit communautaire et le principe de libre administration, nous apporterons ainsi aux collectivités la possibilité d’exercer pleinement leurs compétences, au travers d’un statut sécurisé associant transparence et contrôle.

Enfin, je souhaiterais exprimer ma satisfaction personnelle de voir que ce texte fait l’objet d’un consensus au sein des deux assemblées. Cela montre que le Parlement a à cœur de répondre aux préoccupations des collectivités territoriales.

C’est pourquoi le groupe UMP votera, bien entendu, cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – MM. Pierre-Yves Collombat, Marc Daunis et François Rebsamen applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en cette période où les collectivités locales sont particulièrement malmenées, la proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui fait figure d’exception.

En effet, a contrario de la réforme des collectivités territoriales, ce texte concrétise une attente forte des élus locaux et répond à l’une de leurs préoccupations essentielles : conforter le principe de leur libre administration.

Un autre aspect est remarquable. En voulant tirer les conséquences de l’évolution de la jurisprudence européenne et reconnaître aux collectivités locales la possibilité de bénéficier du régime in house, ce texte s’oppose au dogme des obligations concurrentielles et revient sur la remise en cause, par la Commission européenne, des contrats de mandat, passés entre les personnes publiques et les sociétés d’économie mixte.

Cette double singularité doit être notée, tant il est rare qu’un texte soit débattu et voté alors même qu’il déroge à l’idéologie libérale dominante.

Par le passé, nos collègues communistes et socialistes de l’Assemblée nationale ont bien tenté, mais sans succès, de rétablir le droit, pour les collectivités locales, de bénéficier du régime un peu spécial du in house, qui prévalait naguère dans les projets d’aménagement. Il a fallu attendre 2006 et la loi portant engagement national pour le logement pour que soit réintroduite la possibilité, pour les collectivités, de disposer à nouveau d’outils d’aménagement, via la création de sociétés publiques locales d’aménagement, ou SPLA.

Toutefois, comme nous l’avions dit en première lecture, du fait de la complexité de leurs règles de création et de leur champ d’action très limité, ces nouvelles structures n’ont pas su occuper la place laissée vacante par les sociétés d’économie mixte, les SEM.

C’est le succès plus que mitigé de ces fameuses SPLA qui a conduit les promoteurs de la présente proposition de loi à suggérer la création des SPL, dotées d’un champ de compétences élargi.

Ce texte tire les enseignements pratiques de l’expérimentation des sociétés publiques locales dans le domaine de l’aménagement. Ainsi, il a été proposé de permettre aux collectivités territoriales de déroger au code de commerce qui impose, s’agissant des sociétés anonymes, un minimum de sept actionnaires. Cette obligation faisait obstacle à la réalisation d’un projet ou à la gestion d’un équipement intéressant un nombre inférieur de partenaires publics.

En première lecture, nous avions approuvé cette dérogation. Nous approuvons également les modifications qui ont été apportées depuis, notamment la possibilité pour les SPL de bénéficier de la jurisprudence communautaire relative aux prestations intégrées dans les mêmes conditions et pour les mêmes motifs que les établissements publics. La possibilité ainsi offerte aux collectivités de confier la gestion des services publics à des sociétés anonymes qu’elles détiendront intégralement sera un gage d’efficacité, de réactivité et de sécurité juridique.

Dotées de compétences élargies et renforcées, les sociétés publiques locales vont compléter utilement la boîte à outils des élus locaux afin de permettre à ceux-ci de mieux répondre aux besoins des populations et des territoires.

Nous nous réjouissons qu’un tel texte, qui va à contre-courant des dogmes de l’économie libérale, fasse l’objet d’un tel consensus.

Permettez-moi d’ajouter que s’il est cohérent pour notre famille politique de voter ce texte, il n’en va pas nécessairement de même pour la majorité. Cela montre bien, à notre sens, les limites théoriques et pratiques des promoteurs de la privatisation à outrance et de la mise en concurrence systématique.

Nous voterons donc la présente proposition de loi, en sachant combien les entreprises publiques locales constituent un levier de développement indispensable au service des territoires et de leurs habitants. L’enjeu est de réaffirmer aussi, à travers cet outil, la valeur fondamentale de la notion de service public, dont on sait à quel point elle est aujourd’hui menacée. §

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, voilà plus d’un an, je déposais, avec plusieurs de mes collègues, une proposition de loi relative au développement des sociétés publiques locales. Je me réjouis que ce texte revienne aujourd’hui devant nous en deuxième lecture pour, je l’espère, une adoption définitive.

Je tiens néanmoins à rappeler qu’il aura fallu attendre plus de neuf mois – délai de gestation assez long – entre l’adoption du texte ici même et son examen en première lecture par l’Assemblée nationale. À ce stade, je voudrais remercier tous ceux – ils se reconnaîtront ! – qui ont agi pour que ce texte sorte du « tunnel » entre nos deux assemblées, alors que d’autres y restent en déshérence.

Je ne reviendrai pas sur le rapport, très exhaustif, de M. Jacques Mézard. Je me limiterai à rappeler que cette proposition de loi comporte deux volets.

Le premier est consacré à la création de sociétés publiques locales. L’idée principale était de compléter l’arsenal dont disposent les collectivités territoriales et leurs groupements pour agir de façon rapide, moins coûteuse et sûre juridiquement dans leurs champs d’intervention. Je tiens de ce point de vue à saluer le travail qui a été fait par nos collègues députés qui ont sécurisé et borné cette proposition de loi sur le plan juridique. Je les remercie d’avoir enrichi le texte qui résultait du travail que nous avions fait en commun, monsieur le rapporteur, ici même en première lecture.

La jurisprudence communautaire des « prestations intégrées » – pour ne pas parler anglais – permet par exemple à une collectivité locale de confier à un tiers la réalisation d’opérations non soumises aux procédures de passation des marchés publics. Cette jurisprudence va encore plus loin depuis l’arrêt Teckal du 18 novembre 1999, qui pose deux conditions.

Première condition : l’autorité publique doit exercer sur la personne en cause un contrôle « analogue » – vous l’avez souligné, monsieur le secrétaire d’État – à celui qu’elle exerce sur ses propres services. C’est un point important qu’il conviendra de bien définir dans la gouvernance des sociétés publiques locales.

Seconde condition : la société publique locale doit réaliser l’essentiel de son activité avec les collectivités qui la détiennent.

Si les sociétés intégralement publiques sont une pratique courante dans la plupart des États de l’Union européenne, ce n’est pas le cas en France. Le texte qui nous est soumis aujourd’hui vise donc à autoriser la création d’un tel outil. Les SPL seraient instaurées afin de réaliser, outre les activités prévues dans le cadre des SPLA – qui existent à titre expérimental depuis 2006 – et sur lesquelles je reviendrai dans un instant, des opérations de construction, des exploitations de service public à caractère commercial ou industriel ou toutes autres activités d’intérêt général.

Concernant le statut juridique, il s’agira de SA régies par le code de commerce, sous réserve des dispositions spécifiques aux sociétés d’économie mixte prévues dans le code général des collectivités territoriales.

Enfin, l’actionnariat sera assuré en totalité par des personnes publiques, éventuellement associées à des établissements publics. Le nombre minimum d’actionnaires sera fixé à deux – précision apportée ici même en première lecture –, contre un seul dans le texte initial. C’est aussi le nombre qui sera désormais applicable aux SPLA, l’expérience ayant démontré que le nombre de sept, qui était jusqu’à présent exigé, pouvait freiner la création de telles sociétés. Bien entendu, l’activité de la SPL devra se réaliser sur le territoire des collectivités actionnaires.

Le second volet de la proposition de loi porte sur les modifications apportées aux SPLA. Il s’agit simplement d’élargir le champ d’activité de ces sociétés, créées en 2006, en permettant notamment la réalisation d’études préalables, l’acquisition foncière ou immobilière en vue d’effectuer des actions ou opérations d’aménagement destinées à mettre en œuvre un projet urbain.

En outre, pour la réalisation de leurs activités, les SPLA devront pouvoir exercer, par délégation de leurs titulaires – cela devra faire l’objet d’une délibération dans chaque collectivité, comme il a été rappelé tout à l’heure –, les droits de préemption et de priorité, et obtenir la possibilité de recourir à la procédure d’expropriation.

J’évoquerai maintenant les intérêts et objectifs : ces deux outils doivent permettre aux collectivités locales, qui, je le rappelle, réalisent plus de 70 % des investissements publics, d’élargir leurs possibilités, de gagner en « efficience » – pour reprendre un mot « tendance » –, de permettre la mutualisation et de compléter leurs moyens d’action sur leur territoire à côté des sociétés d’économie mixte.

Le large consensus qui s’est fait autour de ce texte, dont l’ampleur s’est encore accrue grâce aux améliorations apportées par les deux chambres en matière de sécurisation juridique, est à la hauteur de l’enjeu territorial. Les SPL font l’unanimité, dans tous les partis politiques. J’ai pu le constater de nouveau en écoutant les intervenants qui se sont d’ores et déjà exprimés. Les élus locaux attendent depuis des années la mise en place d’un tel dispositif, que certains d’entre eux ont déjà eu l’occasion d’expérimenter avec les SPLA.

Les entreprises publiques locales, notamment leur fédération, approuvent ce texte. Seuls les opérateurs privés semblent craindre pour l’équité dans le domaine concurrentiel. Je tiens à préciser que de nombreux garde-fous – M. le rapporteur les a évoqués – entourent la création des SPL. Il s’agit non pas de mettre à mal la concurrence, si chère à certains grands groupes, mais bien de renforcer l’autonomie des collectivités locales, leur réactivité et leur efficacité afin de rendre un service public de qualité, qui soit en adéquation avec les politiques publiques menées par ailleurs. Il y va de la reconnaissance des collectivités locales en tant que plus gros investisseur public de France et de la cohérence des politiques qui sont menées sur les territoires.

Lors de la rédaction de cette proposition de loi, ma volonté était simple : proposer à nos collectivités locales un outil efficace, tant dans sa mise en œuvre que dans sa gestion, permettant d’améliorer la qualité du service public. Je remercie les orateurs qui m’ont précédé à cette tribune des intentions de vote qu’ils ont manifestées.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – MM. Pierre Bordier et André Villiers applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Mme Anne-Marie Escoffier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ma tâche est malaisée ou, à l’inverse, trop aisée, qui consiste à intervenir après l’excellent rapport de mon collègue Jacques Mézard et les interventions concordantes des différents orateurs, sans avoir rien à ajouter qui soit pertinent.

M. Daniel Raoul applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Rappeler les conditions de dépôt et d’examen de cette proposition de loi dans les deux assemblées ne présente que peu d’intérêt, sauf à relever le délai raisonnable qui a séparé la première adoption du texte, à l’unanimité, par notre Haute Assemblée, le 4 juin 2009, de sa discussion aujourd’hui en deuxième lecture.

Il me semble plus important de souligner la bonne complémentarité entre nos deux assemblées qui, en parfait accord avec le Gouvernement, se sont attachées à répondre efficacement à l’attente des collectivités locales pour améliorer l’efficience de leur gestion.

Le texte qu’il nous est donc proposé d’adopter, enrichi par les apports des uns et des autres, est un texte d’équilibre qui sécurise pleinement, et c’est ce que je voudrais développer, le statut de la société publique locale.

Il garantit la compatibilité parfaite des sociétés publiques locales avec la définition du régime du in house, c’est-à-dire des prestations intégrées, bâti par la jurisprudence européenne. Il prévoit en effet, d’une part, que les SPL exercent leur activité exclusivement pour le compte de leurs actionnaires et sur leur seul territoire, et, d’autre part, que la composition de leur capital est limitée aux seules collectivités locales et à leurs groupements.

Leur champ d’intervention, comme celui des sociétés d’économie mixte, est clairement défini par référence aux compétences des collectivités locales : les missions de service public à caractère industriel ou commercial et les activités d’intérêt général.

Créées sous forme de société anonyme, ce qui écarte pour elles la possibilité de se constituer en société par actions simplifiée, les SPL comptent au moins deux actionnaires pour éviter toutes les tentations de dérive que l’on aurait pu connaître avec un seul actionnaire.

Il s’agit là d’une solide garantie pour les collectivités elles-mêmes, et pour leurs groupements, une forme d’autoprotection comparable à celle dont elles bénéficient d’ailleurs avec la nouvelle obligation qui est faite pour l’assemblée délibérante de se prononcer sur le principe de toute délégation de service public à une SPL.

Il convient d’ajouter que, comme le Gouvernement s’y est engagé, les SPL constituent un outil juridique, mis à la disposition des collectivités territoriales, qui n’emporte aucune incidence financière en termes de recettes et de dépenses, ni pour les collectivités elles-mêmes ni pour l’État.

Par ailleurs, la proposition de loi conforte la place et le rôle des sociétés publiques locales d’aménagement, initialement créées à titre expérimental. Fortes de leur succès mais – cela a été rappelé – contraintes par le nombre minimal de sept actionnaires qui était souvent difficile à atteindre, elles auront désormais un statut calqué sur celui des SPL. Elles verront ainsi leurs prérogatives notablement élargies pour réaliser toutes opérations d’aménagement, au sens du code de l’urbanisme. Elles peuvent désormais, en particulier, par délégation de leurs titulaires, exercer le droit de préemption et de priorité, et recourir à l’expropriation.

Au total, ce texte, en l’état, répond pleinement aux besoins des collectivités locales qui, de façon unanime, soulignaient jusqu’à présent les lourdeurs et les contraintes des procédures des marchés publics dans des situations qui ne justifiaient pas pareil appel à concurrence.

Ce nouveau dispositif, considérablement renforcé dans sa sécurité juridique, ne peut que rassurer les institutions ou les organismes qui, au départ, voyaient dans son adoption une concurrence peut-être injuste et inéquitable.

Il a en outre un avantage dont on n’a peut-être pas suffisamment mesuré la portée : aux réformes successives des collectivités locales qui sont venues troubler le paysage administratif, à celles qui ne manqueront pas d’intervenir dans quelques mois, il est important d’apporter quelques éléments structurants. Chacun s’accorde à reconnaître l’absolue nécessité d’apporter cohérence et rationalisation dans la gestion locale. Les SPL sont l’outil juridique pleinement approprié pour faciliter la mutualisation indispensable à cette cohérence et à cette modernisation.

Pour toutes ces raisons, le groupe du RDSE suivra les conclusions de notre excellent rapporteur.

Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Gautier

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous examinons en deuxième lecture cette proposition de loi de notre collègue Daniel Raoul, visant à développer les sociétés publiques locales.

Il s’agit de doter les collectivités locales françaises d’un outil dont toutes les autres collectivités européennes disposent déjà : des entreprises privées à capital 100 % public pouvant associer plusieurs personnalités morales publiques. Il va sans dire que la Fédération des entreprises publiques locales, anciennement Fédération des sociétés d’économie mixte, soutient très énergiquement ce projet.

En France, on compte quelque 1 100 sociétés d’économie mixte, ou SEM, qui représentent plus de 51 000 emplois directs dans huit grands secteurs d’activité, le développement économique, le tourisme, le développement urbain et les infrastructures publiques, la production et la distribution de l’eau et de l’énergie, l’environnement, les transports, les télécommunications et autres services.

Une partie de leur capital – 35 % en moyenne – est privée.

Or, pour certaines d’entre elles, la perte du marché signifie la mort de l’entreprise : en effet, elles sont nombreuses à ne fournir des prestations que pour un seul site ou un seul projet, sans prétendre gagner d’autres marchés hors de leur territoire. Pour certaines, la mise en concurrence conduirait donc à la disparition de l’entreprise.

C’est la raison pour laquelle il était opportun de réfléchir aux moyens de doter les élus locaux, dans tous les domaines de compétence actuellement ouverts aux SEM, de l’outil leur permettant de concilier pleinement droit communautaire et principe de libre administration des collectivités territoriales.

L’expérimentation de la société publique locale a été conduite dans le domaine de l’aménagement depuis 2006. Un peu moins d’une dizaine de sociétés publiques locales d’aménagement, ou SPLA, existent aujourd’hui. Cette structure séduit les collectivités locales, mais le cadre juridique n’était pas parfait. C’est pourquoi la proposition de loi de notre collègue Daniel Raoul repose sur deux axes : l’élargissement des SPL à tous les champs traditionnels des SEM et l’amélioration du statut des SPLA.

Il s’agit non pas de transformer toutes les SEM en SPL, mais de permettre aux collectivités de créer des entreprises privées à capitaux exclusivement publics. C’est aussi un outil plus souple et plus transparent en matière de gestion comptable et de gestion du personnel.

On sait combien nos villes doivent aujourd’hui se transformer, notamment par la réhabilitation de quartiers entiers qui ne font pas honneur à notre République. Mais c’est dans l’agglomération dans son ensemble que ces réhabilitations doivent se concevoir, pour la mise en place d’une réelle mixité sociale partout sur notre territoire.

Cette proposition de loi va donc dans le bon sens : celui de l’amélioration de l’efficacité de nos collectivités et d’une plus grande transparence.

Nous avons entendu les voix de nombreuses professions qui nous ont alertés sur les prétendus dangers de ce texte. Nous serions en passe d’entraver la libre concurrence dans toute une série de secteurs, de la gestion des cimetières à la construction des HLM… Comme si le texte que nous examinons aujourd’hui avait pour objectif de soustraire les collectivités locales au droit commun de la commande publique ! Ce n’est pas du tout la réalité : nous sommes au contraire sur le point de doter les collectivités d’un outil leur permettant de choisir un mode de gestion moderne et adapté pour les services publics dont elles ont la responsabilité. Il s’agit d’un outil qui manquait à leur palette et qui permettra de soutenir le développement de nouveaux services dans des domaines aussi divers que la résorption de l’habitat insalubre ou la gestion de l’assainissement individuel. Est-il raisonnable de craindre que les collectivités retrouvent enfin leur capacité d’action ?

Avant de terminer, je souhaite rappeler le contexte particulier de l’examen de ce texte.

Comme plusieurs intervenants l’ont dit, il s’agit d’une proposition de loi de notre collègue socialiste Daniel Raoul, adoptée à l’unanimité par notre assemblée en première lecture voilà presque un an. Ce texte a été voté également à l’unanimité à l’Assemblée nationale, il y a quelques mois, sur l’initiative du groupe UMP. Je souhaitais le souligner car ce cas de figure est cependant assez rare, …

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Gautier

… nombre de textes votés à l’unanimité par notre assemblée ne sont jamais examinés au Palais-Bourbon ou se perdent dans les méandres de la navette parlementaire.

Nous espérons donc, comme cela se dessinait en commission des lois le 5 mai dernier, que notre assemblée réitérera l’unanimité de la première lecture, afin que les collectivités locales puissent se saisir rapidement d’un nouvel outil qui leur permettra d’améliorer leur efficacité et leur compétitivité.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – MM. Antoine Lefèvre, Pierre Bordier et André Villiers applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

M. Marc Daunis. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cette discussion générale touche à sa fin, l’essentiel a été évoqué, je dirai cependant quelques mots, d’abord pour féliciter notre éminent collègue et ami Daniel Raoul : nous l’attendions, il l’a fait !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Fort de son expérience parlementaire, nourri par la pratique des responsabilités d’élu local, il nous présente une proposition de loi qui pourrait apparaître modeste – à son image –, mais elle se compose de quelques articles extrêmement utiles et très attendus.

Il ne s’agit pas d’un texte révolutionnaire ; il ne bouleversera pas les codes ; il ne passionnera sans doute pas les médias, il est constructif.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Mais pour les élus locaux et pour l’action de nos collectivités, quelle satisfaction et quelle facilité !

Tout en rendant hommage à son auteur, je sais aussi, mes chers collègues, que cette proposition de loi est l’aboutissement d’une démarche consensuelle entre la majorité et l’opposition, cela a été rappelé. Encore bravo, cher Daniel Raoul !

M. Daniel Raoul fait mine de jouer du violon.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Au-delà du clin d’œil, si ce texte obtient le soutien unanime de nos deux assemblées, c’est d’abord, me semble-t-il, parce qu’il repose sur un principe simple : le pragmatisme au service d’une volonté politique structurée.

Reconnaissons que cet esprit peut nous faire parfois défaut, nous législateurs, inventeurs permanents du droit devant l’éternité.

Oui, le pragmatisme est bien la marque de fabrique de ce texte.

Au-delà de l’adaptation juridique liée à la jurisprudence communautaire, la création des SPL dans notre pays répond, en effet, à un besoin vital pour l’administration de nos territoires.

Il s’agit également d’une démarche pragmatique fondée sur l’observation et la comparaison internationale.

Cet instrument nous permettra d’appliquer pleinement le droit communautaire, tout en respectant le principe de libre administration des collectivités territoriales.

À ce propos, il est un peu lassant et irritant d’entendre des groupes privés ou des fédérations professionnelles faire part de leurs inquiétudes de non-concurrence, là où la concurrence joue toujours de façon parfaite et à l’encontre des élus locaux. Ces derniers sont un peu fatigués de recevoir des leçons d’intérêt général émanant de groupes privés, car les élus locaux sont les premiers porteurs de l’intérêt général.

Par ailleurs, ces sociétés publiques locales existent déjà dans la plupart des autres pays européens, et plus particulièrement en Allemagne, puisque l’on en dénombre 16 000 au total dans les États constituant l’Union européenne.

Dans tous ces pays, les collectivités territoriales disposent déjà d’un tel outil dans leur arsenal juridique. Ce n’était pas le cas de la France, c’est aujourd'hui, je l’espère, quasiment fait.

Il s’agit, enfin, d’une démarche pragmatique fondée sur l’expérimentation, dans notre pays, des SPLA.

Le statut des sociétés publiques locales d’aménagement, constituées à titre expérimental pour une durée de cinq ans, est consolidé grâce à ce texte.

Dans un passé récent, il y a environ cinq ans, en tant que conseiller régional et président de la SEM d’aménagement de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, j’ai pu ainsi modestement contribuer à la mise en place de cette expérimentation. Notre région avait d’ailleurs été l’une des toutes premières collectivités à transformer une SEM en SPLA. À l’époque, les partenaires habituels de la SEM, c'est-à-dire les sociétés qui construisaient les lycées ou celles qui effectuaient les opérations du contrat de plan, et non pas les partenaires institutionnels, avaient exprimé leur satisfaction car ils craignaient que des délais supplémentaires ne se rajoutent à la réactivité dont ils bénéficiaient avec cette société d’économie mixte régionale ou qu’une internalisation en régie, par exemple, ne modifie les délais de paiement de leurs prestations.

C’est pourquoi je suis un peu étonné de certaines remarques, qui visent éventuellement, au travers de tel ou tel amendement, à restreindre le champ d’intervention des SPL ou, au contraire, à essayer à tout prix de réintroduire une certaine rigidité malgré la sécurité tout à fait suffisante, me semble-t-il, apportée par cette proposition de loi. D’autant plus que nous avons, d’une part, le recul de l’expérimentation, qui a déjà quatre ans, et, d’autre part, la possibilité, si nous constatons ici ou là telle ou telle fragilité, de pouvoir adapter notre dispositif législatif, comme cela a été précisé par M. le secrétaire d'État et par M. le rapporteur.

Pour une fois que nous faisons quelque chose de simple, pourrions-nous en rester là et ne pas alourdir le dispositif de façon inutile ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

M. Marc Daunis. En conclusion, il s’agit d’une initiative heureuse, notre vote sera enthousiaste, et conforme, je l’espère, car ce texte est très attendu !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Mme Anne-Marie Escoffier et M. André Villiers applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

Je rappelle que, aux termes de la nouvelle rédaction de l’article 48, alinéa 5, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets et propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux assemblées du Parlement n’ont pas encore adopté un texte identique.

En conséquence, sont irrecevables les amendements remettant en cause les articles adoptés conformes ou les articles additionnels qui sont sans relation directe avec les dispositions restant en discussion.

Le livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales est complété par un titre III ainsi rédigé :

« Titre III

« Sociétés publiques locales

« Art. L. 1531 -1. – Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent créer, dans le cadre des compétences qui leur sont attribuées par la loi, des sociétés publiques locales dont ils détiennent la totalité du capital.

« Ces sociétés sont compétentes pour réaliser des opérations d’aménagement au sens de l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme, des opérations de construction ou pour exploiter des services publics à caractère industriel ou commercial ou toutes autres activités d’intérêt général.

« Ces sociétés exercent leurs activités exclusivement pour le compte de leurs actionnaires et sur le territoire des collectivités territoriales et des groupements de collectivités territoriales qui en sont membres.

« Ces sociétés revêtent la forme de société anonyme régie par le livre II du code de commerce et sont composées, par dérogation à l’article L. 225-1 du même code, d’au moins deux actionnaires.

« Sous réserve des dispositions du présent article, elles sont soumises au titre II du présent livre. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L’amendement n° 5, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer les mots :

ou toutes autres activités d’intérêt général

La parole est à M. Philippe Dominati.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais à mon tour m’associer à l’hommage rendu à notre collègue Daniel Raoul, qui a su profiter de la conjoncture et du retour de l’État dans l’économie qu’elle suscite pour déposer cette proposition de loi. Ce texte, qui a fait l’unanimité, a pour objet d’inscrire ce phénomène dans la pratique : il constitue en réalité une solution proposée au Gouvernement pour déroger aux principes qui régissent la passation des marchés publics.

C’est une inquiétude forte qui s’exprime : nous n’avons pas affaire à de vagues déclarations corporatistes. Une initiative parlementaire intéressante a été prise visant à introduire la souplesse que requièrent des circonstances exceptionnelles – je me souviens de la discussion, dans sa première version, de la proposition de loi – et à permettre aux collectivités territoriales de réaliser des économies.

Finalement, pourtant, ce qui était à l’origine une bonne idée, une idée simple, débouche sur un mécanisme susceptible d’entraîner un contentieux important parce qu’il remet en cause des principes forts, tel celui de la liberté d’entreprendre, tels ceux auxquels doit obéir la passation des marchés publics.

Mes chers collègues, en cette année où, pour la première fois, la dépense publique de la France représente 56 % de son PIB, dans une conjoncture où le Gouvernement dénonce les dérapages des collectivités territoriales, on instaurerait un régime d’exception pour faciliter le passage dérogatoire des marchés publics, évidemment au détriment de la libre entreprise, évidemment au détriment d’une certaine contractualisation entre les entrepreneurs et les collectivités territoriales ?

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

M. Philippe Dominati. Les sociétés d’économie mixte avaient été créées à l’occasion d’une réforme menée par M. Mauroy : c’est un retour en arrière !

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

On entend beaucoup de louanges sur cette initiative, qui part d’un très bon sentiment… Pour ma part, je fais partie des parlementaires qu’elle préoccupe. Que se passera-t-il pour les entrepreneurs, surtout les plus petits d’entre eux, qui ont passé des marchés avec des collectivités territoriales ? Qu’adviendra-t-il lors du renouvellement de leurs contrats ou de la redéfinition des prestations demandées ? En réalité, avant même que ne soit parvenue à son terme l’expérimentation engagée, nous ouvrons à chaque SEM, à chaque collectivité territoriale – et l’on en connaît le nombre ! –, la possibilité de s’affranchir de plusieurs règles en matière de marchés publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Monsieur le président, j’ai certes dépassé le temps de parole qui m’était imparti pour présenter l’amendement n° 5, mais, si vous m’y autorisez, je poursuivrai cette intervention pour défendre également l’amendement n° 6, qui relève du même principe.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

M. Philippe Dominati. Ainsi, je n’aurai pas besoin de reprendre la parole tout à l’heure.

Marques de satisfaction sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Gautier

Ça vaudra mieux, si c’est pour dire la même chose !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

J’appelle donc également en discussion l'amendement n° 6, présenté par M. P. Dominati, et qui est ainsi libellé :

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Afin d'assurer le respect de ces exigences, la mise en œuvre ainsi que les modalités de réalisation des activités confiées à ces sociétés font systématiquement l'objet d'un contrat entre celles-ci et les collectivités actionnaires.

Veuillez poursuivre, monsieur Dominati.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

J’ai présenté jusqu’ici le contexte général dans lequel s’insèrent mes deux amendements.

Le premier, l’amendement n° 5, vise à restreindre le champ d’application de la future loi en en modifiant l’article 1er, dont je propose de supprimer la notion vague que recouvrent les mots « toutes autres activités d’intérêt général ». La conserver, ce serait laisser planer le doute sur la pratique, mais surtout ouvrir la porte à des contentieux ultérieurs.

Le second amendement, qui porte le numéro 6, a pour objet que soit clairement définie par contrat la prestation que la SPL fournira à la collectivité.

À travers ces deux amendements, ce sont donc des garde-fous que j’invite à poser en faisant appel aux principes qui régissent actuellement les liens entre le secteur public et le secteur privé. Je sais parfaitement qu’en ce moment le Gouvernement est très sensible à l’apologie du « tout-privé »…

Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

… je veux dire bien sûr du « tout-public » ; pour autant, je pense qu’il nous faut être très prudents quand il y va de principes essentiels pour une économie telle que la nôtre aujourd’hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

L’amendement n° 5, qui vise à supprimer la mention « ou toutes autres activités d’intérêt général », reviendrait en fait à restreindre, à cantonner les capacités d’action des SPL. J’ajoute que je ne vois pas en quoi la définition des compétences des SPL qui figure à l’article 1er de la proposition de loi serait de nature à inquiéter les petites entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Dans tous les départements, ces sociétés publiques locales leur permettront, au contraire, de développer leur activité. Que de très grandes entreprises, dans certains secteurs d’activité de service public, soient préoccupées, on peut le comprendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Pour ce qui est des SPL, non seulement elles ne viendront pas concurrencer les petites entreprises, mais, bien évidemment, elles continueront de faire appel à elles, voire les solliciteront encore davantage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je ne vois donc pas où est l’antagonisme contre lequel tend à lutter ce premier amendement.

L’amendement n° 6 vise la question de la contractualisation. Mais les SPL exerceront leur activité selon les procédures habituelles de contractualisation ! Le régime dérogatoire porte uniquement sur les obligations concurrentielles, et ce dans le cadre très strict du respect du droit communautaire.

Il me semble que tous les garde-fous et toutes les sécurités utiles sont en place. La commission a donc émis, je le répète, un avis défavorable sur ces deux amendements.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d’État

Monsieur Dominati, je souhaiterais que vous retiriez vos amendements, …

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d’État

… faute de quoi j’en demanderai le rejet.

Pour ce qui est de l’amendement n° 5, plutôt que de tenter de restreindre le champ d’intervention des sociétés publiques locales à tel ou tel domaine – solution qui, je le rappelle, n’avait pas été retenue, il y a un an, par votre assemblée –, il me paraît préférable de sécuriser leur mode de contrôle. Je vous confirme qu’en la matière celui-ci sera effectué au cas par cas, par le biais, bien sûr, du contrôle de légalité. Le champ d’application des SPL sera donc encadré par ce contrôle, ce qui, me semble-t-il, répond à votre souhait.

Quant à l’amendement n° 6, monsieur le sénateur, j’attire votre attention sur le fait que, même en l’absence de contrat, le contrôle de légalité trouvera à s’exercer au travers des délibérations que les collectivités actionnaires seront tenues d’adopter pour confier à une SPL quelque mission que ce soit. Par ailleurs, les préfets seront en mesure de vérifier, encore une fois au cas par cas, le respect des critères de contrôle comparables.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Monsieur Dominati, les amendements n° 5 et 6 sont-ils maintenus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Monsieur le secrétaire d’État, votre réponse ne me satisfait guère, car vous n’avez pas apporté les précisions qui m’auraient permis de retirer ces amendements.

Pour autant, le débat continue sur cette procédure extrêmement compliquée, et j’aurai l’occasion de m’exprimer de nouveau en défendant un autre amendement. Les choses peuvent donc évoluer d’ici au vote final.

Dans l’instant, monsieur le président, je retire ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Les amendements n° 5 et 6 sont retirés.

L’amendement n° 1, présenté par MM. Houel et Bécot, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Un contrat ne peut être conclu entre une collectivité territoriale et une société publique locale pour l’une des opérations visées au deuxième alinéa de l’article L. 1531-1 du présent code, que si l’initiative privée s’est avérée défaillante. Cette situation ne peut résulter que de l’absence de réponse des entreprises privées aux consultations lancées pour cet objet.

La parole est à M. Michel Houel.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Houel

Monsieur le président, je serai très bref : je retire cet amendement, ainsi que l’amendement n° 2, déposé à l’article 1er bis A.

En effet, M. le rapporteur a indiqué tout à l’heure qu’il nous appelait à voter les articles sans modification : mes amendements ne pourront donc qu’essuyer des refus de la part de notre assemblée, où ce texte recueille une belle unanimité, et j’en suis ravi.

Permettez-moi néanmoins, mes chers collègues, de vous faire entendre une autre « petite musique ». Comme vous, je suis un élu local depuis de nombreuses années, et je n’ai pas été habitué à passer des marchés sans faire appel à la concurrence.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Houel

Aussi, aujourd’hui, je ne comprends pas.

J’insisterai cependant sur un point, même s’il peut paraître marginal. Les communes ont longtemps eu la possibilité de passer sans mise en concurrence des commandes n’excédant pas 4 000 euros. Ce seuil a ensuite été porté à 20 000 euros : c’était merveilleux ! Même si, personnellement, j’avais demandé qu’il soit fixé à 28 000 euros, j’estimais que 20 000 euros permettaient déjà de travailler de façon correcte. Et voilà qu’aujourd’hui ce seuil est de nouveau ramené à 4 000 euros, et ce alors que les SPL pourront passer des marchés de un ou plusieurs millions d’euros sans aucune publicité ni appel à concurrence ! Je crains très sincèrement que les élus locaux qui appliqueront ce dispositif n’aillent au-devant de contentieux, et les propos tenus par les orateurs qui sont intervenus dans la discussion générale ne m’ont convaincu.

Aussi, je retire mes amendements, mais je ne voterai pas cette proposition de loi, sur laquelle je m’abstiendrai.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L’amendement n° 1 est retiré.

Je mets aux voix l’article 1er.

L’article 1 er est adopté.

I. – Après les mots : « établissement public », la fin du b de l’article L. 1411-12 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigée : « ou à une société publique locale sur lesquels la personne publique exerce un contrôle comparable à celui qu’elle exerce sur ses propres services et qui réalisent l’essentiel de leurs activités pour elle ou, le cas échéant, les autres personnes publiques qui contrôlent la société, à condition que l’activité déléguée figure expressément dans les statuts de l’établissement ou de la société ; ».

II. – Le chapitre Ier du titre Ier du livre IV de la première partie du même code est complété par un article L. 1411-19 ainsi rédigé :

« Art. L. 1411 -19. – Les assemblées délibérantes des collectivités territoriales et de leurs groupements se prononcent sur le principe de toute délégation de service public à une société publique locale, le cas échéant après avoir recueilli l’avis de la commission consultative des services publics locaux prévue à l’article L. 1413-1. Elles statuent au vu d’un rapport qui présente le document contenant les caractéristiques des prestations que doit assurer la société publique locale délégataire. »

III. – Après les mots : « établissement public », la fin du b de l’article 41 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques est ainsi rédigée : « ou à une société publique locale sur lesquels la personne publique exerce un contrôle comparable à celui qu’elle exerce sur ses propres services et qui réalisent l’essentiel de leurs activités pour elle ou, le cas échéant, les autres personnes publiques qui contrôlent la société, à condition que l’activité déléguée figure expressément dans les statuts de l’établissement ou de la société ; ».

IV. – Après l’article 47 de la même loi, il est rétabli un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V

« Contrôle exercé par les assemblées locales sur les délégations de service public confiées à des sociétés publiques locales

« Art. 48. – Les assemblées délibérantes des collectivités territoriales et de leurs groupements se prononcent sur le principe de toute délégation de service public à une société publique locale. Elles statuent au vu d’un rapport qui présente le document contenant les caractéristiques des prestations que doit assurer la société publique locale délégataire. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L’amendement n° 7, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Philippe Dominati.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Cet amendement a pour objet de consolider l’esprit de la proposition de loi en supprimant un ajout apporté par l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

M. Philippe Dominati. Il est en effet un point que je ne comprends pas. Il me semble qu’en réalité, par le biais de cette proposition de loi, nous profitons du droit communautaire et des dérogations qu’il autorise pour officialiser celles-ci dans le droit national et les rendre permanentes. C’est la collectivité territoriale qui, par la composition du capital, conférera son caractère dérogatoire à la société, et non l’aspect « in house » – je ne sais pas si c’est de l’angevin ou du corrézien…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Quoi qu’il en soit, cet article m’inquiète beaucoup, car je pense qu’il suffira à provoquer la remise en cause totale du texte – il est vrai que cela aurait l’avantage de corriger les imperfections que j’ai eu l’occasion de souligner précédemment ! –, et c’est pourquoi mon amendement vise à le supprimer.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je crois que l’amendement va à l’encontre du but que son auteur annonce.

L’Assemblée nationale a inséré cet article additionnel afin de sécuriser encore davantage les dispositions de la proposition de loi en renforçant le contrôle préalable des élus. C’est pour cette raison qu’elle a prévu une délibération sur le principe de toute délégation de service public à une SPL, sur la base d’un rapport détaillant les caractéristiques des prestations attendues de la société publique locale.

C’est article a donc pour objet, au contraire, de sécuriser le dispositif par rapport à la jurisprudence communautaire. Il apporte une garantie supplémentaire et, mon cher collègue, va dans le sens que vous semblez souhaiter.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d’État

Même avis défavorable que M. le rapporteur.

En effet, monsieur le sénateur, la formulation retenue a été parfaitement validée par la Commission, puisque celle-ci, au vu de cette disposition, a décidé en novembre dernier de classer la procédure qu’elle avait elle-même engagée. L’article 1er bis A n’est donc pas contraire à l’esprit du droit communautaire et apporte toute sécurité à l’égard de Bruxelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Monsieur le secrétaire d’État, vous vous avancez, me semble-t-il, car la Commission a reculé sur l’application et face à l’incertitude juridique, compte tenu du caractère dérogatoire du dispositif. La Commission attend de connaître l’évolution de la jurisprudence. Nous, nous sommes en train d’inscrire dans le droit français du « dérogatoire permanent » ! Cet article fragilise très probablement le droit français de façon durable.

Cela étant dit, je retire mon amendement, monsieur le président. Nous verrons ce qu’il adviendra.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L’amendement n° 7 est retiré.

L'amendement n° 2, présenté par MM. Houel et Bécot, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Le contrat de délégation de service public ne peut être conclu entre la collectivité territoriale et la société publique locale que si l'initiative privée s'est avérée défaillante. Cette situation ne peut résulter que de l'absence de réponse des entreprises privées aux consultations lancées pour cet objet.

Cet amendement a été retiré.

Je mets aux voix l'article 1er bis A.

L'article 1er bis A est adopté.

Après le mot : « peuvent », la fin du premier alinéa de l’article L. 327-1 du code de l’urbanisme est ainsi rédigée : « créer, dans le cadre des compétences qui leur sont attribuées par la loi, des sociétés publiques locales d’aménagement dont ils détiennent la totalité du capital. » –

Adopté.

Les trois derniers alinéas de l’article L. 327-1 du code de l’urbanisme sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Ces sociétés sont compétentes pour réaliser toute opération d’aménagement au sens du présent code. Elles sont également compétentes pour réaliser des études préalables, procéder à toute acquisition et cession d’immeubles en application des articles L. 221-1 et L. 221-2, procéder à toute opération de construction ou de réhabilitation immobilière en vue de la réalisation des objectifs énoncés à l’article L. 300-1, ou procéder à toute acquisition et cession de baux commerciaux, de fonds de commerce ou de fonds artisanaux dans les conditions prévues au chapitre IV du titre Ier du livre II du présent code. Elles peuvent exercer, par délégation de leurs titulaires, les droits de préemption et de priorité définis par le présent code et agir par voie d’expropriation dans les conditions fixées par des conventions conclues avec l’un de leurs membres.

« Ces sociétés exercent leurs activités exclusivement pour le compte de leurs actionnaires et sur le territoire des collectivités territoriales et des groupements de collectivités territoriales qui en sont membres.

« Ces sociétés revêtent la forme de société anonyme régie par le livre II du code de commerce et sont composées, par dérogation à l’article L. 225-1 du même code, d’au moins deux actionnaires.

« Sous réserve des dispositions du présent article, elles sont soumises au titre II du livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales. » –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 3 est présenté par M. Repentin.

L'amendement n° 4 rectifié est présenté par MM. Braye et Jarlier.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Lorsqu'elles interviennent pour réaliser des opérations de logement social, les sociétés publiques locales et les sociétés publiques locales d'aménagement sont soumises aux dispositions du titre VIII du livre IV du code de la construction et de l'habitation ainsi modifié :

1° L'intitulé du titre VIII du livre IV est complété par les mots : « et aux sociétés publiques locales » ;

2° Le chapitre premier du titre VIII du livre IV est ainsi modifié :

a) Son intitulé est ainsi rédigé : « Dispositions relatives aux sociétés d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux » ;

b) Avant l'article L. 481-1, il est inséré une division ainsi intitulée :

« Section 1

« Dispositions générales » ;

c) Après l'article L. 481-7, il est inséré une division ainsi intitulée :

« Section 2

« Dispositions relatives à la mobilité des locataires » ;

d) Les articles L. 482-1 à L. 482-4 deviennent respectivement les articles L. 481-8 à L. 481-11 ;

3° Le chapitre II du titre VIII du livre IV est ainsi rédigé :

« Chapitre II

« Dispositions relatives aux sociétés publiques locales

« Art. L. 482-1. - Les sociétés publiques locales sont agréées par le ministre chargé du logement en vue d'exercer une activité de construction ou de gestion de logements sociaux, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État.

« En cas d'irrégularités graves ou de fautes graves de gestion commises par une société agréée en application de l'alinéa précédent, ou en cas de carence de son conseil d'administration ou de son conseil de surveillance, le ministre chargé du logement peut retirer cet agrément. Le retrait est prononcé après avoir mis les dirigeants de la société en mesure de présenter leurs observations dans le délai d'un mois. Les décisions prises sont communiquées au conseil d'administration ou au conseil de surveillance et au directoire de l'organisme, dès sa plus proche réunion.

« Dans les six mois qui suivent le retrait de son agrément, la société doit céder son patrimoine conventionné à un organisme d'habitations à loyer modéré, ou à une société d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux, ou à une autre société publique locale agréée ou à un organisme agréé au titre de l'article L. 365-2.

« Art. L. 482 -2. - Les dispositions du présent code applicables aux sociétés d'économie mixte le sont pour les sociétés publiques locales agréées. »

La parole est à M. Thierry Repentin, pour présenter l’amendement n° 3.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Repentin

Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous me dire si, au vu de cet amendement, vos services ont analysé les répercussions de l’intervention des sociétés publiques locales, les SPL, dans le domaine du logement social ? Ces sociétés, qui pourraient être autorisées à réaliser des opérations de logement social, seront-elles bien soumises aux mêmes contraintes de gestion et de dévolution du patrimoine que tous les autres organismes produisant aujourd’hui du logement social dans notre pays ? Un doute subsiste à cet égard.

Ainsi, ces sociétés devront-elles respecter les règles d’attribution des logements construits ? En effet, il ne faudrait pas que des maires puissent créer, avec une SPL, leur propre outil en matière de logement social et allouer les logements à qui ils souhaitent sans passer par les commissions d’attribution. Dans ce domaine, les sociétés de logement, vous le savez, doivent aujourd’hui respecter des règles de transparence et d’équité vis-à-vis de nos concitoyens.

Par ailleurs, lorsqu’une SPL viendra à disparaître, le patrimoine construit restera-t-il dans le champ du logement social, comme c’est la règle pour tous les organismes de logements sociaux ? Au travers du texte qui nous est proposé, je ne sais pas si tel est le cas.

Enfin, et ce sera ma dernière question, monsieur le secrétaire d’État, vos services ont-ils vérifié que le dispositif que nous examinons est eurocompatible ? L’Union européenne n’a pas aujourd'hui une vision très positive et pragmatique du logement social. Elle tente de remettre en cause les aides nationales en faveur de la construction de logements sociaux. Elle ne les tolère aujourd’hui que parce que le dispositif est très encadré, qu’il s’agisse notamment des plafonds de ressources et des règles d’attribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Dominique Braye, pour présenter l'amendement n° 4 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la présente proposition de loi, qui vise à doter les collectivités locales d’un nouvel outil d’intervention pour réaliser des « prestations intégrées », prévoit la création de SPL et le renforcement des SPLA créées par la loi de 2006 portant engagement national pour le logement. Comme vient de le souligner Thierry Repentin, cette proposition de loi, telle qu’elle est actuellement rédigée, pose de réelles difficultés dans le domaine du logement social, la construction et la gestion de logements sociaux entrant de fait dans le champ d’activité potentielle de ces structures.

Tout d’abord, la proposition de loi introduit une inégalité de traitement entre acteurs ayant les mêmes missions. Si les SPL et les SPLA peuvent intervenir en tant qu’opérateurs en matière de logement social, le principe d’égalité de traitement impose qu’elles se voient appliquer les mêmes obligations que celles qui pèsent sur les organismes d’HLM, les SEM et les organismes à but non lucratif titulaires de l’agrément « maîtrise d’ouvrage » ou de l’agrément « intermédiation locative et gestion locative sociale ».

Ensuite, la proposition de loi est contradictoire avec les orientations de la politique gouvernementale tendant à concentrer les acteurs du logement social. Tous les efforts en direction du monde HLM – efforts ô combien importants ! même s’ils donnent peu de résultats, j’en conviens – visent aujourd’hui à encourager et à favoriser la coopération et le regroupement des organismes d’HLM, donc la réduction du nombre d’intervenants – on en compte plus de neuf cents à ce jour –, afin de promouvoir la mutualisation des moyens et de dégager des fonds propres. À cet égard, je compte sur le président de l’Union sociale pour l’habitat pour œuvrer dans ce sens et pour accroître la performance des bailleurs sociaux.

Ainsi convient-il de prévoir, dès la création des SPL – et le renforcement des SPLA –, que l’intervention de ce nouvel acteur dans le champ du logement social devra être également soumise à la délivrance d’un agrément, garantissant la capacité à l’encadrer, dans ce domaine particulièrement sensible, vous en conviendrez, et qui met en jeu d’importants crédits d’État.

Je tiens à rappeler à M. le président de la commission des lois, à M. le rapporteur ainsi qu’à M. le secrétaire d’État que le Conseil de modernisation des politiques publiques a demandé au ministre en charge du logement de procéder à la restructuration du réseau des organismes de logement social pour aller vers la constitution de groupes structurés et professionnels, ce qui n’est pas le cas actuellement.

Or, force est de le reconnaître, d’un point de vue politique il est difficile de forcer le monde HLM à se restructurer alors que, en parallèle, on permet l’émergence, sans aucun contrôle, d’opérateurs potentiellement concurrents. Les messages adressés à la profession doivent être cohérents. L’argument du verrou réglementaire n’est inversement pas crédible, car les bailleurs sociaux, vous le savez, anticiperont immédiatement en étendant les financements des prêts locatifs à usage social, les PLUS, et des prêts locatifs aidés d’intégration, les PLAI, aux SPL.

D’un point de vue juridique, les SPL pourront avoir accès aux financements des prêts locatifs sociaux, les PLS, lesquels sont ouverts, je le rappelle, à tous les opérateurs. Leur actionnariat étant public, il est très probable que si demain une SPL intentait un recours pour obtenir le financement d’une opération en logement social – PLUS ou PLAI –, elle obtiendrait gain de cause en s’appuyant sur le double argumentaire suivant : d’abord, la directive « Services » impose aux États membres d’accorder les mêmes avantages à des opérateurs réalisant des missions de services publics identiques ; ensuite, son statut est à mi-chemin entre celui des offices et celui des sociétés d’économie mixte et impose logiquement qu’elle bénéficie des mêmes droits.

Selon nous, il y a là tout l’arsenal juridique pour faire condamner l’État, monsieur le secrétaire d’État, en vertu de normes supérieures au décret que vous ne manquerez pas de prendre, à ouvrir les financements PLUS et PLAI aux SPL.

Aussi, pour vous protéger, monsieur le secrétaire d’État, pour protéger l’État et ceux qui vont voter cette proposition de loi, il nous semble impérieux que les SPL et les SPLA qui seraient amenées à intervenir dans le domaine du logement social soient soumises à l’agrément du ministre du logement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

Nous considérons que, en l’état, les sociétés publiques locales n’auront pas la possibilité de réaliser des logements sociaux. L’article R. 331-14 du code de la construction et de l’habitation – je l’ai évoqué dans la discussion générale – liste en effet de manière très exhaustive les organismes pouvant avoir accès à ces subventions et à ces prêts. Les SPL n’en font pas partie. Cela ne signifie pas que cette liste ne peut pas être modifiée pour permettre aux SPL d’entrer dans le jeu du logement social, mais, en l’état, elles n’y ont strictement aucun intérêt. En outre, elles ne peuvent obtenir ni les agréments nécessaires, ni les concours financiers de l’État, ni les prêts de la CDC, contrairement aux organismes agréés aujourd’hui.

Telle est la réponse claire que je souhaitais apporter à cette question importante et légitime.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Je partage l’avis de M. le rapporteur.

Les amendements n° 3 et 4 rectifié visent à instituer une procédure d’agrément préalable délivré par le ministre en charge du logement pour les SPL chargées d’exercer une activité de construction ou de gestion de logements sociaux afin de réguler la création d’organismes nouveaux dans ce secteur d’activité.

S’il me paraît bon de soumettre ces sociétés aux règles applicables à ce secteur d’activité, j’observe toutefois que les sociétés d’économie mixte locales, dont le capital est par essence mixte, ne sont aujourd’hui pas soumises à cette contrainte. Dès lors, il peut sembler surprenant de conditionner l’activité des seules SPL à un tel agrément alors que leur capital est à 100 % public. Il y a là une incohérence qui pose problème.

Monsieur Repentin, je vous confirme, après expertise, que, concernant le secteur du logement, aucun problème ne se pose en termes de compatibilité avec les textes européens.

Aussi, je souhaiterais que ces deux amendements soient retirés.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Repentin

Monsieur le secrétaire d’État, selon notre analyse, les sociétés d’économie mixte locales n’ont effectivement pas besoin d’un agrément préalable du ministre du logement. Cela étant, elles sont soumises aux dispositions du code de la construction et de l’habitation, soit à un certain nombre de règles très précises en termes de fonctionnement. Elles sont par exemple obligées de mettre en place des commissions d’attribution. L’agrément préalable du ministre du logement pour les SPL impliquerait qu’elles seraient soumises, elles aussi, à cette obligation.

Sur le fond, je ne suis pas convaincu par l’analyse de vos services, d’autant plus que M. le secrétaire d’État chargé du logement et de l’urbanisme, que j’ai interrogé hier, m’a lui-même fait part de sa perplexité quant à l’application de cette loi.

Cela étant dit, la commission et le Gouvernement ayant émis un avis défavorable, je ne maintiendrai pas mon amendement, car il ne sera pas adopté. Mais je prends date pour l’avenir : nous aurons l’occasion de revenir sur cette question notamment lors de l’examen de textes portant sur les collectivités locales, puisque vous serez alors au banc du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 3 est retiré.

Monsieur Braye, l'amendement n° 4 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Monsieur le rapporteur, j’ai été surpris par vos propos : vous m’avez répondu comme si je n’avais pas développé d’argumentation. Il me semble pourtant avoir avancé une argumentation fondée. Je vous ai démontré que, au nom du principe de la hiérarchie des normes, la directive « Services » s’appliquera, malgré la législation française existante. Si vous m’avez écouté, monsieur le rapporteur, vous ne m’avez pas entendu. Monsieur le secrétaire d’État le sait, mon analyse juridique est la bonne, j’en suis quasiment persuadé. Je tenais à ce qu’il en soit pris acte par le Sénat.

Aucun amendement n’ayant été adopté par notre assemblée, je ne prolongerai pas les débats au-delà de ce que tout le monde souhaite. Aussi, je retire mon amendement, monsieur le président, tout en priant vivement M. le secrétaire d’État de bien vouloir étudier la question qu’il soulève de façon un peu plus approfondie, afin de permettre l’adoption d’une telle disposition, qui serait de nature à garantir sérieusement le système.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 4 rectifié est retiré.

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Le paradoxe serait d’en venir à inciter les sociétés publiques locales à concurrencer les organismes d’HLM. Or c’est exactement ce que vous êtes en train de faire !

Si des SPL souhaitent un jour conduire des opérations de logement social – des SEM se sont aussi lancées dans ce type de projets –, elles devront être agréées selon certaines conditions, ce qui n’est pas le cas aujourd'hui. Elles seront soumises aux mêmes règles que les autres organismes si elles veulent accéder aux financements accordés au logement social.

Renoncez à insérer une telle disposition, mes chers collègues. N’incitez pas ceux qui voudraient concurrencer les organismes constructeurs et gestionnaires de logements sociaux à se lancer dans ce type d’activité.

Il me semble naturel de soulever cette question et d’exprimer une telle préoccupation par le biais de vos amendements. Mais, honnêtement, les amendements aboutiraient à dire : « Si vous voulez faire du logement social, il faut que vous rentriez dans le système ! ». Je considère – et je pense que c’est aussi l’esprit qui a animé les auteurs des amendements initiaux – que les sociétés publiques locales n’ont pas vocation à intervenir dans ce domaine. Les sociétés publiques locales ont beaucoup d’autres missions à remplir que de concurrencer les organismes d’HLM qui, depuis longtemps, font bien ce travail. En fin de compte, il pourrait y avoir une tentation, et il ne faut en aucun cas pousser les gens à la tentation…

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

Je remercie le président de la commission des lois pour son explication à laquelle j’aimerais réagir brièvement.

Avec les SPL, c’est un partenariat public-public, impliquant des collectivités locales, qui va se constituer sur un périmètre déterminé. Ce serait effectivement une curieuse tentation pour les collectivités locales qui créent une société publique locale d’aménagement de concurrencer leurs propres sociétés d’HLM sur le territoire sur lequel elles opèrent.

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

Pas plus que les SEM ne le font actuellement, et pourraient le faire demain. J’essaie de fournir quelques éléments d’explication.

J’ai moi-même créé une SPLA il y a deux ou trois ans. Elle mène des activités d’aménagement et, bien évidemment, elle confie à des organismes d’HLM la construction de logements sociaux sur le territoire concerné. Si vous le permettez, je voudrais souligner, monsieur Dominati, que les entreprises locales se félicitent de la création des SPLA.

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

Il existe de nombreux dispositifs dont on ne parle pas, je pense notamment au « Small Business Act ». La rapidité d’action des SPL est la bienvenue dans la perspective d’une relance de l’activité économique sur un territoire. Je crois que nous allons les voir fleurir et c’est un très bon signe pour l’économie !

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

C’est pourquoi j’en remercie, vous me le permettez, d’un geste amical, notre éminent collègue Daniel Raoul.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Je voudrais intervenir brièvement car j’ai été un peu interpellé par la réaction du président de la commission des lois.

Vous savez, pour avoir des idées, il n’est pas nécessaire de les soumettre. Il y a déjà des gens qui ont des idées, mon cher collègue ! Il ne suffit pas qu’elles soient émises dans la Haute Assemblée pour que les gens aient des idées et préparent leur mise en œuvre. On ne vit manifestement pas dans le même monde ! La Seine-et-Marne doit être un département idyllique où les mauvaises idées n’existent pas… En tout cas, il y a déjà des gens qui se préparent à intervenir dans le domaine du logement social et c’est pourquoi j’attire l’attention de M. le secrétaire d’État.

Monsieur Rebsamen, si tout le monde est persuadé – et je m’en excuse auprès de mon collègue Thierry Repentin – que les bailleurs sociaux font tous le meilleur travail au meilleur prix, il n’y a pas de problème. Pourtant, je peux vous donner un certain nombre d’exemples qui montrent que ce n’est pas tout à fait le cas et que des élus pourraient être tentés, afin de remettre de l’ordre dans l’activité de leur propre bailleur social, d’inciter à un certain nombre d’actions.

On est dans un monde où la réalité prime et où l’on veut économiser l’argent public, monsieur le secrétaire d’État. Le devoir des élus locaux – on nous le dit du matin au soir et vous avez bien raison de le rappeler – est d’optimiser l’emploi de l’argent public, mais encore faut-il leur en donner les moyens. Même sans ces moyens, il y a déjà des gens qui, par ces SPL, se préparent à agir dans le domaine du logement social.

Aussi, il vaudrait mieux que vous garantissiez le dispositif, car la réponse à l’emporte-pièce faite par M. le rapporteur me paraît osée.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l’objet de la deuxième lecture.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

La proposition de loi est adoptée définitivement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, avant d’aborder le point suivant de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures vingt-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique relatif à l’application de l’article 65 de la Constitution.

Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l’article 12 du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L’ordre du jour appelle la discussion de la question orale avec débat n° 60 de M. Jean-Louis Carrère à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales sur la situation de la gendarmerie nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Jean-Louis Carrère, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Monsieur le secrétaire d’État, sans minorer l’importance de votre présence et sans vouloir manifester une quelconque discourtoisie à votre égard, je considère que le sujet de la question aurait justifié la présence du ministre de l’intérieur et du ministre de la défense.

Jean-Louis Carrère, sénateur socialiste des Landes, n’est absolument pas mis en cause ou brimé par votre présence ; au contraire, il l’apprécie. Pour autant, la gendarmerie – un pilier de la république – aurait mérité la présence du ministre de la défense, qui se défausse chaque fois que l’on aborde les questions relatives à la gendarmerie, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

M. Jean-Louis Carrère. …et celle du ministre de l’intérieur.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Robert Hue applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Je voudrais brièvement compléter le propos de Jean-Louis Carrère. Nous organisons nos débats, en ces périodes d’initiative parlementaire notamment, en essayant d’y donner du contenu et d’être de dignes représentants de cette assemblée. Lors de la conférence des présidents, il nous a été donné l’assurance que le ministre serait présent. C’est en partie en fonction des accords que nous passons avec des ministres que nous organisons nos débats.

Malgré tout l’intérêt et l’amitié que je porte moi aussi à M. Marleix, je trouve très regrettable que nous soyons privés de la présence du ministre de l’intérieur…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Moi qui croyais que le ministre aimait la châtaigne !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Acte vous est donné de cette déclaration, mes chers collègues.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Nous en venons donc à la discussion de la question orale avec débat n° 60 de M. Jean-Louis Carrère à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Cette question est ainsi libellée :

« M. Jean-Louis Carrère attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités locales sur les conséquences désastreuses de l'application de la loi n° 2009-971 du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale et notamment du rattachement à la police nationale.

« De nombreuses inquiétudes ont été exprimées ces derniers mois sur la situation de la gendarmerie sans que le Gouvernement y apporte de réponse concrète. Pourtant, la situation sur le terrain est extrêmement préoccupante, notamment en milieu rural et dans les zones périurbaines. Le rattachement de la gendarmerie à la police nationale et les conséquences budgétaires qui l'accompagnent posent aujourd'hui clairement la question de l'avenir même du service public de la sécurité : personnel, statut, formation et matériels de gendarmerie sont aujourd'hui mis à mal par ce “rattachement”.

« Cette situation est d'autant plus dramatique que la révision générale des politiques publiques entraîne des coupes supplémentaires dans les moyens dont dispose la gendarmerie nationale. En témoignent la suppression de 1 300 emplois prévus en 2010 et la fermeture de 175 brigades territoriales d'ici 2012.

« Il souhaite ainsi interroger le Gouvernement sur l'évaluation de cette politique, particulièrement dommageable pour l'équilibre des territoires. Il demande que, dans le cadre de ce débat, le Gouvernement permette l'accès à l'intégralité du rapport de l'Inspection générale de l'administration consacré aux conséquences financières du rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur.

« Il souhaite également demander au Gouvernement des éclaircissements quant à la cohérence de cette politique de réduction des moyens de la gendarmerie avec les objectifs affichés par le Gouvernement en termes de sécurité et de prévention. »

La parole est à M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, si je prends encore une fois la parole pour évoquer la situation de la gendarmerie, c’est parce que l’heure est grave !

Le Gouvernement s’ébat dans une certaine confusion, incapable qu’il est de contrôler ses propres impulsions législatives.

Bel exemple de cafouillage, le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dit « LOPPSI 2 », et sa programmation : annoncé dès 2007, inscrit à l’ordre du jour du Parlement en 2009 par Mme Michèle Alliot-Marie, puis ajourné ; puis de nouveau inscrit à l’ordre du jour et débattu à l’Assemblée nationale au mois de février 2010, ce projet de loi n’en finit pas de ne pas arriver au Sénat !

Aux dernières nouvelles, il était ajourné. Mais, ce matin, on nous l’a annoncé pour le 15 août. Ah non, pas pour le 15 août, pour le « début du mois de septembre », sachant que le « début du mois », cela va du 6 au 30 septembre, en l’étirant un peu…

Si le sujet n’était pas si grave, on pourrait en rire !

Selon les documents officiels, la « LOPPSI 2 » vise à adapter les moyens de la gendarmerie nationale aux évolutions de la délinquance sur la période 2009-2013... J’ai bien dit « 2009 » ! Or nous sommes en 2010, et nous serons bientôt au mois d’août. Mais, c’est vrai, ce ne sera pas pour le 15 août, puisque, maintenant, on nous parle de septembre…

Quelle considération pour le Parlement ! Quelle considération pour les élus de toutes tendances, qui, en matière de sécurité, sont confrontés sans cesse, sur le terrain, à des difficultés croissantes !

Ce projet de loi, qui, nous disaient les ministres successifs, était « très, très important », est encalminé ; il ne bouge plus. Est-il mort, monsieur le secrétaire d’État ? Ne faudrait-il pas envisager dès maintenant un autre projet couvrant, par exemple, la période 2010-2013 ou la période 2011-2014 ?

Voilà un parcours chaotique, mais représentatif de la manière dont le Gouvernement traite les questions de sécurité, quelquefois, d’ailleurs, à usage électoral !

La loi sur la gendarmerie avait connu, elle aussi, des péripéties similaires, et certaines dispositions avaient été mises en pratique avant même son adoption ! Là, c’est le bouquet !

Voilà des preuves flagrantes d’impéritie, et je mesure mes mots !

Or cette fameuse « LOPPSI 2 » contient, ou contenait – on ne sait plus –, des dispositions relatives à la gendarmerie nationale et à la mise en œuvre de la politique de rattachement au ministère de l’intérieur. L’ajournement n’augure rien de bon ! Dites-moi, monsieur le secrétaire d’État, cet ajournement cache-t-il des problèmes de mise en place de certaines dispositions ? Est-il dû aux résistances rencontrées sur le terrain par certaines de vos mesures ?

De récents changements à la tête de la gendarmerie peuvent également être interprétés comme faisant partie de la confusion dans laquelle vous évoluez.

Ainsi, le départ précipité, et prématuré, du directeur général de la gendarmerie nationale et la nomination à sa place d’un ancien membre du cabinet du ministre de l’intérieur sont d’autres symptômes, me semble-t-il, d’un malaise profond.

De même, les réactions caporalistes qui s’abattent sur des gendarmes coupables d’expression poétique…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

… ou de critique raisonnée sont les indices d’une certaine nervosité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Je sais que Lionel Jospin vous pose des problèmes. Si vous le souhaitez, nous en reparlerons après !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Jospin avait sanctionné les gendarmes qui s’exprimaient !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

C’est faux ! C’est vous qui les avez sanctionnés ! On vous a vus !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Le moral n’est pas au beau fixe dans une institution dont bien des membres renâclent, face au processus d’intégration au sein du ministère de l’intérieur décidé par la loi d’août 2009.

En tout état de cause, la situation qui prévaut dans les forces de sécurité n’est pas satisfaisante. Et si je concentre aujourd'hui mon intervention sur la gendarmerie, il faudra revenir très rapidement – vous le savez bien, monsieur le secrétaire d’État – sur la situation de la police.

Monsieur le secrétaire d’État, j’entends des mots durs qui montent du pays profond. La gendarmerie souffre ; les gendarmes vivent mal une situation qui les dépasse et, quand ils s’expriment, avec modération, les sanctions tombent !

D’ailleurs, le 29 mars dernier, avec mes collègues du groupe socialiste – je parle sous votre contrôle, cher Didier Boulaud –, nous avions demandé à vous entendre, vous et le ministre de la défense, qui se défile, telle une anguille, sur le sujet, pour connaître les motivations et le sens des sanctions prises à l’encontre du gendarme Matelly. Vous avez aujourd’hui l’occasion de vous expliquer et de nous dire ce qu’il en est.

Toutefois, j’entends aussi les élus, qui nous interpellent. Ils s’inquiètent de certaines décisions. Ils ne comprennent pas pourquoi vous abandonnez actuellement des territoires qui ont besoin, eux aussi, d’une sécurité assurée, voire confortée.

Selon le discours officiel, le rattachement, une sorte de fusion progressive qui ne dit pas son nom, se justifierait par des raisons budgétaires : il faut mutualiser pour faire des économies.

Si, pour les questions de sécurité, comme dans les domaines de l’école ou de la santé, la recherche exacerbée d’une prétendue rationalité économique doit être l’alpha et l’oméga de l’action publique, alors, je vous le dis, monsieur le secrétaire d’État, je ne me reconnais plus dans cette République qui tourne le dos à ses valeurs fondatrices !

Peu de jours avant sa soudaine éjection, le général Roland Gilles, auditionné par notre commission, avait insisté sur l’absence de plan global de suppression des brigades territoriales. Qu’en est-il ? Ou alors, s’il ne s’agit pas d’un plan global, peut-être s’agit-il d’un plan local ?

Quels sont les projets d’ajustements ponctuels des zones de compétence en préparation ? En passant, notons comment le langage technocratique tente de cacher la férocité des conséquences de ce type de décisions.

Quelle relation y a-t-il entre ces ajustements ponctuels et la création de communautés d’agglomération confiées à la police nationale ? Est-ce que cela implique une éviction de la gendarmerie des zones périurbaines ?

Je profite de l’occasion pour vous dire qu’il y a un vrai défaut dans la méthode utilisée en cette matière par le Gouvernement. Sans donner de leçons, ce défaut, c’est le manque de concertation ! Les « ajustements », comme on les appelle, qui sont souvent lourds de conséquences pour l’économie et la vie sociale locales, ne sont ni préparés ni menés dans la concertation avec les élus locaux. Ceux-ci en souffrent ; ils nous le disent et vous le disent !

Manque de concertation aussi avec les gendarmes : ils expriment leur malaise, sans syndicats, avec des moyens bricolés : des associations, des forums sur Internet ou dans une publication connue par sa modération, L’Essor de la gendarmerie nationale, qui est l’organe des retraités de cette arme et qui devient, par la force des choses, le thermomètre de ce corps militaire enfiévré.

Monsieur le secrétaire d’État, dans un souci d’efficacité, et dans le cadre de la modernisation de l’action de sécurité, vous auriez dû vous appliquer à réduire, à calmer, la vieille et inutile rivalité entre police et gendarmerie. Au lieu de cela, le Gouvernement, qui préconisait justement de gommer ces aspérités, semble, par la politique qu’il mène, jeter de l’huile sur le feu et attiser les comparaisons nuisibles entre les deux forces.

Une sorte de jeu pervers et corporatiste s’installe sous le toit même du ministère de l’intérieur. Il consiste à comparer et à mesurer en permanence les avantages, les acquis, d’une force par rapport à l’autre, en considérant les indices, le déroulement de carrière, le logement...

Une telle évolution désorganise le système de sécurité intérieur de notre pays.

Mais que devient donc la gendarmerie ? Elle ne joue plus son rôle de proximité. Elle n’assure plus, par une présence visible, proche et durable, son rôle dissuasif et sécurisant.

Pourtant, la situation sur le terrain devient extrêmement préoccupante, notamment en milieu rural et dans les zones périurbaines. Et je sais que vous connaissez ces zones, monsieur le secrétaire d’État.

D’ailleurs, à ce qu’il semble, une nouvelle réorganisation géographique pourrait cantonner la gendarmerie aux zones rurales et aux voies de circulation, en la sortant complètement des zones périurbaines. Quels sont vos projets en matière de création de communautés d’agglomération ?

Le rattachement de la gendarmerie à la police nationale et les conséquences budgétaires qui l’accompagnent posent aujourd’hui clairement la question de l’avenir même du service public de la sécurité : personnels, statut, formation et matériels de gendarmerie sont aujourd’hui mis à mal par votre politique. Et ce n’est pas le projet de « LOPPSI 2 », avec ses financements - demain, on rase gratis ! -, qui nous permettra de reprendre confiance !

Comment pourra-t-on garantir demain la capacité opérationnelle de la gendarmerie et préserver sa présence sur le terrain ? Vous le voyez, je suis encore plus préoccupé par l’avenir de l’arme que par la préservation de son statut militaire.

Comment ne pas s’interroger ? Soyez-en juges, mes chers collègues.

On prévoit la suppression de 1 300 emplois en 2010 et la fermeture de 175 brigades territoriales d’ici à 2012 !

Les effectifs de la gendarmerie doivent baisser de 3 509 équivalents temps plein travaillé, dans le cadre triennal 2009-2011, ce qui mettra en danger le maillage territorial de la gendarmerie, notamment en milieu rural.

Quatre écoles de gendarmerie sur huit seront fermées.

Au détour d’une loi de finances rectificative, 23, 5 millions d’euros de crédits affectés au budget de la gendarmerie seront transférés vers celui de la police. C’est une grande première…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Dans ma région, à la fin de l’année 2009, du fait des contraintes budgétaires, la gendarmerie avait réduit le nombre de patrouilles en véhicules, car les gendarmes ne pouvaient même plus les effectuer.

On recourt aux nouvelles technologies pour remplacer les personnels en diminution.

L’accroissement des charges opérationnelles et administratives, avec toujours plus de missions et toujours moins d’effectifs, soumet la gendarmerie, mais également la police, à une trop lourde tension.

Le statut militaire de la gendarmerie risque de subir rapidement une dégradation progressive qui pourrait lui être fatale.

Et, monsieur le secrétaire d’État, vous avez toujours la prétention de faire mieux avec beaucoup moins ! Les chiffres l’infirment.

Cette situation est d’autant plus saisissante que, à la révision générale des politiques publiques, déjà à l’origine de coupes dans les moyens humains dont dispose la gendarmerie nationale, viendront s’ajouter les coupes de la rigueur budgétaire annoncée par le Premier ministre, sous couvert de la crise.

Monsieur le secrétaire d’État, puisque vous êtes un partisan acharné de la « politique du chiffre » - et du découpage §, nous aimerions avoir des chiffres précis sur les redéploiements entre police et gendarmerie, sur les fermetures de brigades, sur la diminution des personnels…

L’évolution en cours est dangereuse pour le maillage du territoire et néfaste pour la présence de la gendarmerie auprès des populations rurales et périurbaines.

Les menaces de fermeture d’un certain nombre de brigades de gendarmerie représentent un sujet très sensible, pour les gendarmes comme pour les élus, qui sont particulièrement attachés à la présence de la gendarmerie en zone rurale.

Toutes les semaines, sur tout le territoire, les élus font état de telles menaces et de leur inquiétude.

Monsieur le secrétaire d’État, je n’exprime pas uniquement la pensée de la gauche, encore moins celle du seul parti socialiste. Permettez-moi de vous donner lecture de deux courts extraits de questions posées au Gouvernement par certains de nos collègues députés de la majorité.

Le 27 avril 2010 – c’est tout récent –, un député UMP de la Moselle, dont je pourrais vous donner le nom, « attire l’attention de M. le ministre de la défense sur le climat d’inquiétude qui semble régner au sein des effectifs de la gendarmerie nationale. Le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur, en janvier 2009, a été présenté comme un avantage en matière de coût de formation, d’équipement de matériel et de coordination des moyens. Après plus d’un an de fonctionnement, les gendarmes sont inquiets et la rumeur commence à gronder. » Je tiens à votre disposition la suite de la question.

Pas de réponse !

Le 27 avril dernier, un député Nouveau centre du Rhône, dont je tiens également le nom à votre disposition, interroge M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, en déclarant notamment ceci : « Par ailleurs, la gendarmerie redoute très fortement la réunification des structures de police et de gendarmerie scientifique et le rapprochement envisagé, voire le remplacement, du GIGN par les RAID. Cette perspective de réorganisation se traduirait par une dévalorisation certaine de l’action de nos forces de gendarmerie. »

Là encore, pas de réponse !

Et, quand j’interroge mes collègues, que me répondent-ils ?

Dans l’Ain – c’est précis –, toutes les brigades ne sont désormais plus habilitées à recueillir des plaintes, ce qui oblige les victimes à se déplacer au-delà de leur secteur. Cette situation peut évidemment décourager certaines personnes de porter plainte.

Dans les Bouches-du-Rhône, après la fermeture de la gendarmerie de Saint-Chamas, les élus redoutent, dans un contexte d’augmentation de la délinquance, la prochaine fermeture des casernes de Berre-l’Étang et de Rognac. Ils ont condamné l’absence totale de concertation avec les élus locaux.

Dans le Rhône, les brigades de gendarmerie de Feyzin et de Chassieu seraient appelées à disparaître ; elles pourraient être suivies par la brigade d’Écully.

Dans le Doubs, la pérennité de l’escadron de gendarmes mobiles de Besançon est menacée. L’escadron représente 106 familles, qui participent à la vie socio-économique de la cité.

Monsieur le secrétaire d'État, quelle inquiétude ! Mes collègues ne manqueront pas de revenir sur ce point.

Je veux dire avec force, monsieur le secrétaire d'État, que, pour nous, pour moi, la première richesse de la police et de la gendarmerie nationales, ce sont les hommes et les femmes qui y travaillent. Attention à ne pas les démoraliser ! Attention à ne pas mettre à mal une organisation qui fonctionne très bien, au nom d’une quête effrénée d’économies, au nom d’une obsession du chiffre et de la communication !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Applaudissements sur certaines travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, loi du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale, dont j’ai eu l’honneur d’être le rapporteur pour le Sénat, présente un caractère historique.

En effet, depuis la loi du 28 germinal an VI, donc depuis 1798, aucune loi n’avait été adoptée sur l’organisation de la gendarmerie.

Les règles régissant le statut et les missions de la gendarmerie nationale reposaient sur un simple décret datant de 1903.

Cette loi constitue également une réforme profonde puisqu’elle organise le rattachement de la gendarmerie nationale au ministre de l’intérieur, conformément à la volonté exprimée par le Président de la République, dans son discours du 29 novembre 2007. Ce n’est d’ailleurs pas nouveau, puisque, du fait d’un certain nombre de dispositions prises dès 2002, le ministère de l’intérieur avait déjà dans 90 % des cas la gouvernance de la gendarmerie.

Avant même le dépôt du projet de loi, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat avait constitué en son sein, sur l’initiative de son président, un groupe de travail chargé de réfléchir à l’avenir de l’organisation et des missions de la gendarmerie.

Ce groupe de travail, que je présidais, respectait la diversité politique de notre assemblée, puisqu’il était composé de Michèle Demessine, Hubert Haenel, Philippe Madrelle, Charles Pasqua, Yves Pozzo di Borgo et André Rouvière.

À l’issue de nos travaux, nous avons présenté dix-sept recommandations, qui ont été adoptées à l’unanimité par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, et reprises dans un rapport d’information publié en avril 2008, soit en amont de la loi du 3 août 2009.

Lors de l’examen du projet de loi, je me suis largement fondé sur ces recommandations.

M’inspirant d’une phrase figurant dans le décret du 20 mai 1903, j’ai également « cherché à bien définir la part d’action que chaque département ministériel peut exercer sur la gendarmerie, afin de sauvegarder cette arme contre les exigences qui ne pouvaient trouver leur prétexte que dans l’élasticité ou l’obscurité de quelques articles ».

Je voudrais également souligner la très bonne collaboration que nous avons eue avec le rapporteur pour avis de la commission des lois, notre collègue Jean-Patrick Courtois.

Le texte initial du projet de loi présenté par le Gouvernement et déposé en premier lieu au Sénat ne comportait que dix articles.

Lors de l’examen du projet de loi, j’ai présenté une vingtaine d’amendements, qui ont tous été adoptés par la commission.

Tel que voté par le Sénat, en décembre 2008, le projet de loi comportait vingt-deux articles, soit plus du double que le texte initial.

Après son adoption par l’Assemblée nationale, en juillet dernier, le texte du projet de loi comportait vingt-six articles. Au final, le texte issu de la commission mixte paritaire en comprenait vingt-sept. Cela signifie qu’un certain nombre d’amendements ont été retenus.

Quelles ont été les principales modifications introduites par le Sénat ?

Tout d’abord, nous avons entièrement réécrit l’article définissant les missions de la gendarmerie nationale afin, ce qui n’était pas le cas auparavant, de consacrer son caractère de « force armée » et de mentionner expressément son rôle en matière de police judiciaire. En inscrivant dans le texte de loi que la mission de police judiciaire constitue l’une des « missions essentielles » de la gendarmerie, nous avons éteint certaines craintes. Si on veut ôter à la gendarmerie ses missions de police judiciaire, il faudra une autre loi !

Nous avons également affirmé l’ancrage territorial de la gendarmerie et rappelé ses missions militaires, notamment sa participation aux opérations extérieures.

Nous avons, par ailleurs, introduit un nouvel article afin de consacrer dans la loi le principe du libre choix du service enquêteur par l’autorité judiciaire.

Ces deux verrous – l’inscription dans la loi de cette mission essentielle et la consécration du principe du libre choix – permettent de bien affirmer le rôle de la gendarmerie en matière de police judiciaire.

Comme vous le savez, la question des relations avec les préfets avait pu susciter des interrogations, notamment auprès des élus.

Entendons-nous bien, il ne s’agissait pas pour nous de remettre en cause le rôle du préfet, qui occupe une place essentielle en matière de coordination des forces de sécurité publique ; mais il nous semblait nécessaire de concilier le rôle central du préfet avec le respect de la chaîne hiérarchique, consubstantielle au statut militaire de la gendarmerie. En aucun cas nous ne souhaitions que les services préfectoraux interviennent dans la chaîne de commandement.

En définitive, il me semble que nous sommes parvenus à un bon équilibre sur ce point. Je constate d’ailleurs que, quelques mois après l’adoption de la loi, cet équilibre a été traduit au niveau réglementaire.

Un autre sujet délicat a concerné la suppression de la procédure de réquisition. Là encore, il y a eu des résistances.

Estimant que cette procédure n’était pas compatible avec le rattachement au ministère de l’intérieur, nous avons accepté de supprimer la réquisition, en prévoyant toutefois deux tempéraments.

D’une part, nous avons souhaité maintenir une procédure d’autorisation pour le recours aux moyens militaires spécifiques, comme les véhicules blindés ou les hélicoptères.

D’autre part, nous avons souhaité, sur une suggestion de Mme Demessine, encadrer l’usage des armes à feu pour le maintien de l’ordre, tant par les gendarmes que par les policiers, en particulier afin de garantir la traçabilité des ordres.

Enfin, je rappelle que, grâce à ce projet de loi, les militaires de la gendarmerie bénéficieront d’une grille indiciaire spécifique, ce qui permettra d’aller vers une parité globale de traitement et de carrière entre les gendarmes et les policiers, conformément à l’engagement pris par le Président de la République.

En fin de compte, je crois pouvoir affirmer que, au-delà des clivages politiques, les travaux du Sénat ont été marqués par le souci d’apporter toutes les garanties pour le maintien du « dualisme » des forces de sécurité publique et du caractère militaire de la gendarmerie, auxquels nous sommes tous ici très attachés.

Le Gouvernement a, le 26 janvier dernier, remis au Parlement un rapport sur l’application de la loi relative à la gendarmerie.

À cette date, sur la quarantaine de décrets nécessaires à la mise en œuvre de cette loi, dix-sept décrets avaient été publiés et vingt-six textes réglementaires sont prévus à la fin du premier trimestre de 2010.

Les documents du ministère de l’intérieur relatifs aux coopérations opérationnelles entre la police et la gendarmerie, en matière de renseignement, de sécurité routière ou de coopération internationale respectent également l’équilibre entre les deux forces.

Je pense, en particulier, à la police judiciaire, domaine dans lequel la gendarmerie conservera la totalité de ses attributions.

Tout à l’heure, Jean-Louis Carrère a repris dans son exposé un certain nombre de déclarations faites à l’Assemblée nationale par nos collègues députés. Je ferai à mon tour quelques citations.

« Au final, ni la police ni la gendarmerie n’ont pour l’heure à pâtir des rapprochements et mutualisations opérées » : ces propos ne sont pas de moi ; je cite ici notre collègue député Jean-Jacques Urvoas, secrétaire national du Parti socialiste à la sécurité, et auteur d’une étude sur le rapprochement entre la police et la gendarmerie pour la Fondation Jean-Jaurès !

Par ailleurs, je voudrais rappeler que, sur l’initiative du Sénat, une disposition a été introduite dans la loi, qui prévoit que « Le Gouvernement remet au Parlement, tous les deux ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, un rapport évaluant, d’une part, les modalités concrètes du rattachement organique et budgétaire de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur et notamment son impact sur son organisation interne, ses effectifs, l’exercice de ses missions et sa présence sur le territoire, et, d’autre part, les effets de ce rattachement concernant l’efficacité de l’action de l’État en matière de sécurité et d’ordre publics et la mutualisation des moyens entre la police et la gendarmerie. »

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Espérons que ce rapport sera effectivement remis !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

Il est donc prématuré de manifester trop d’anxiété au sujet des conséquences de ce rapprochement !

Le rapport doit aussi comporter « les éléments relatifs à l’obtention d’une parité globale entre les personnels des deux forces ».

Ainsi, le Gouvernement devra remettre au Parlement, à l’été 2011, un rapport d’évaluation détaillé comprenant, notamment, un bilan du rattachement de la gendarmerie au ministre de l’intérieur.

En introduisant cette disposition, nous souhaitions disposer d’une évaluation précise des conséquences du rattachement de la gendarmerie nationale au ministre de l’intérieur afin d’avoir la possibilité d’en corriger les éventuels effets négatifs.

Plutôt que de porter un jugement définitif, et prématuré, sur une loi quelques mois après son adoption, pourquoi ne pas attendre la publication du rapport pour débattre en toute sérénité ?

Le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur permettra de renforcer la coordination en matière de lutte contre la criminalité, et donc d’améliorer la sécurité des Français.

À cet égard, je veux saluer la décision prise par le ministre de l’intérieur d’installer le bureau du directeur général de la gendarmerie nationale à proximité immédiate de la place Beauvau, ainsi que la récente décision du Président de la République de nommer de nouveau un officier de gendarmerie à la tête de la Direction générale de la gendarmerie nationale, conformément à ce qu’avait souhaité le groupe de travail du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Ce n’est pas une nouveauté, c’était déjà le cas avant !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

Ce rapprochement permettra également d’accélérer la mutualisation des moyens, de développer les synergies et de renforcer la coopération opérationnelle entre la police et la gendarmerie.

Le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dit « LOPSSI 2 », que nous avons examiné ce matin en commission, devrait d’ailleurs nous permettre d’aller plus loin en matière de coopération entre la police et la gendarmerie, dans le respect des spécificités des deux forces.

Monsieur le secrétaire d'État, quelles seront les conséquences sur la LOPPSI 2 du gel des dépenses publiques annoncé par le Premier ministre pour les trois prochaines années ?

Ce rattachement ne remet nullement en cause le caractère militaire de la gendarmerie, qui non seulement est préservé, mais de surcroît se trouve consacré au niveau législatif.

Les gendarmes resteront des militaires, soumis au statut général des militaires, et ne bénéficieront pas, à ce titre, du droit syndical.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Il ne manquerait plus qu’ils perdent leur statut militaire sans obtenir le droit syndical !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

Le statut militaire n’autorise pas le syndicalisme, ce qui n’exclut pas l’expression. De ce point de vue, monsieur Carrère, je vous rejoins : le groupe de travail avait envisagé des possibilités d’expression des militaires, dans le respect de leur statut, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

… mais avec d’autres formules de désignation des représentants, qui n’auraient plus été nommés par la hiérarchie, mais auraient été désignés par leurs collègues, afin qu’ils soient des porte-parole légitimes.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Le groupe de travail est mort et enterré ! Lors de la discussion de la loi, vous vous êtes couché ! Maintenant, c’est la loi qui compte !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

Comme l’a déclaré le Président de la République, l’existence de deux forces de sécurité, l’une à statut militaire, la gendarmerie, l’autre à statut civil, la police, constitue un atout majeur pour notre pays.

Comme j’ai pu le constater lors d’un déplacement récent en Afghanistan, aux côtés de M. le ministre de l’intérieur, …

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Un voyage UMP en Afghanistan, précisons-le !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

… la présence de 150 gendarmes français en Afghanistan témoigne de l’atout que constitue le statut militaire de la gendarmerie pour ce type d’opérations. Peut-être pourriez-vous nous indiquer également, monsieur le secrétaire d’État, quelles sont les perspectives de renforcement de ce dispositif ?

Lors d’un déplacement de la commission des affaires étrangères, avec notre collègue André Vantomme, auprès des gendarmes français déployés dans le cadre de la mission de surveillance de l’Union européenne en Géorgie, nous avons également pu mesurer le rôle important joué par nos gendarmes pour assurer la stabilité de cette région après le conflit russo-géorgien de l’été 2008.

Or il semblerait que le Gouvernement envisage, pour des raisons essentiellement budgétaires, de réduire d’un tiers la participation française dans cette mission, à partir de septembre prochain. Il est vrai que la mission de l’Union européenne en Géorgie n’est qu’une mission civile d’observation et que les gendarmes français peuvent sembler sous-employés, en comparaison de l’engagement en Afghanistan. Pourquoi ne pas remplacer éventuellement ces gendarmes par des réservistes, voire par des civils ?

Il nous semble que ce désengagement massif risque d’être mal interprété, tant par la partie géorgienne que par la partie russe, et qu’il risque de se traduire par un amoindrissement de la présence et de l’influence françaises dans cette région.

Ce désengagement risque d’abord d’être mal perçu par les autorités géorgiennes, notamment dans le contexte du projet de vente de bâtiments de type Mistral à la Russie, alors que la mission de l’Union européenne joue un rôle majeur pour la stabilité de ce pays. Pour la partie russe, il pourrait être interprété comme le signe d’un moindre intérêt de la France pour la Géorgie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

Ce désengagement, s’il n’est pas effectué dans de bonnes conditions, risque surtout de se traduire par un affaiblissement de l’influence française au sein de la mission.

Plutôt qu’un retrait massif, essayons plutôt de remplacer progressivement ces gendarmes par des réservistes ou des experts.

Le groupe UMP ne peut que réaffirmer ici son attachement au statut militaire de la gendarmerie et sa confiance dans la capacité du Gouvernement à renforcer la coopération entre les forces de sécurité et améliorer la sécurité des Français.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Hue

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, dans la question qu’il a posée au ministre de l’intérieur, notre collègue Carrère a raison d’affirmer que, neuf mois après son adoption, la loi sur le rattachement total de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur suscite toujours autant de craintes, d’interrogations et de critiques.

À la différence du débat qui avait eu lieu sur cette même question au mois de janvier dernier, il n’est plus tout à fait prématuré de procéder aujourd’hui à une évaluation de cette loi.

En effet, cette réorganisation des forces de sécurité intérieure passe mal, sur le terrain, auprès des élus locaux et des populations. Mais elle passe mal, aussi, nous le savons, au sein de l’institution elle-même.

Monsieur le secrétaire d’État, les élus locaux n’étaient pas demandeurs d’une telle réforme. Certes, ils souhaitaient une adaptation des forces de gendarmerie aux nouvelles formes de délinquance et une modernisation de leurs moyens d’action pour une plus grande efficacité. Est-ce vraiment le cas aujourd’hui ?

Du fait de l’application quasi mécanique de la révision générale des politiques publiques, ils sont, ou seront, pratiquement tous amenés à constater des réductions d’effectifs, qui se traduisent parfois par des suppressions pures et simples de brigades territoriales, puisque 175 d’entre elles devraient disparaître d’ici à 2012. Je rappelle aussi qu’il est prévu de supprimer 1 300 emplois en 2010, alors que la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure avait chiffré à 7 000 les effectifs supplémentaires nécessaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Hue

Les élus et les populations rurales peuvent donc mieux percevoir aujourd’hui les conséquences très négatives de cette application mécanique de règles comptables sur le maillage territorial, garant de la proximité entre les services de gendarmerie et les citoyens, l’une des spécificités de ce corps.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Hue

Alors que la population s’accroît dans les zones de compétence de la gendarmerie et que la délinquance augmente dans les zones rurales et périurbaines, cette logique purement comptable n’est pas cohérente avec les déclarations présidentielles et gouvernementales sur le renforcement de la lutte contre l’insécurité.

Au-delà de ses effets sur les populations et les territoires, votre réforme, monsieur le secrétaire d’État, produit des conséquences négatives au sein même de l’institution. Telle qu’elle a été adoptée, cette réforme n’était voulue ni par les gendarmes, ni par les policiers. Bien que comprenant la nécessité de synergies et de coopérations entre les deux forces, chacun souhaitait conserver son budget, ses effectifs, son périmètre de missions, toutes choses qui, avec la culture propre à chaque service, sont constitutives de leur identité.

Or la réforme a été effectuée assez brutalement, sans analyse préalable des spécificités et des complémentarités des deux forces, ni véritable concertation avec les élus locaux. Cette méthode prouve combien l’objectif premier était non la modernisation et la mutualisation des moyens, non plus que l’amélioration des conditions d’emploi et de coopération des deux forces, mais bien la volonté de constituer rapidement une seule force de sécurité sous la seule autorité civile de l’exécutif.

Certaines conséquences concrètes de la loi, comme la mutualisation des moyens entre la gendarmerie et la police, la formation au maintien de l’ordre, désormais commune – quand, dans le même temps, vous fermez quatre écoles sur huit ! – apparaissent plus clairement maintenant. Elles sont révélatrices de cette volonté de faire disparaître la spécificité de chacune des deux forces. En effet, la rationalisation et la mutualisation ne sont pas en elles-mêmes négatives, mais elles créeront à la longue des habitudes et une uniformisation qui contribueront à diluer les identités respectives.

La diminution des effectifs, la suppression d’unités, la répartition inéquitable des missions de renseignement, de police judiciaire et de circulation routière entre les deux forces, voire également la pression des syndicats de police, sont aussi des conséquences concrètes du rattachement qui vont nourrir des conflits.

La tendance à uniformiser les deux forces ne peut qu’inciter les gendarmes à comparer leur statut avec celui des policiers, en particulier sur l’un des principes fondamentaux du statut militaire, la disponibilité. En outre, la coexistence, au sein d’un même ministère, de deux systèmes, la représentation syndicale, pour les policiers, et la concertation propre aux militaires, pour les gendarmes, incitera tôt ou tard de facto les uns et les autres à vouloir aligner leurs statuts. Sans doute l’objectif visé est-il de faire en sorte que les gendarmes en viennent eux-mêmes à revendiquer une harmonisation statutaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Hue

Cette façon de procéder, d’ailleurs assez insidieuse, est à l’origine du malaise souterrain, profond et latent – faute de possibilité d’expression publique –, perceptible au sein même de l’institution.

Cette situation alimente toutes les craintes sur l’éventualité d’une fusion, à terme, de la police et de la gendarmerie. Et il ne s’agit pas d’une crainte infondée, ni d’un procès d’intention de notre part, monsieur le secrétaire d’État. Ces inquiétudes bien réelles ont été encore récemment exprimées lors du congrès de l’Union nationale du personnel en retraite de la gendarmerie et sa très influente revue, L’essor de la gendarmerie nationale, s’en est fait écho.

Le Président de la République a d’ailleurs une façon bien à lui de répondre au malaise des gendarmes et aux critiques sur les conséquences de la mise sous tutelle de la gendarmerie : l’autoritarisme et la reprise en main directe de la sécurité intérieure !

J’en veux pour preuve le limogeage du directeur général de la gendarmerie nationale : il a mis en œuvre la réforme, mais sans réussir à réduire la grogne de gendarmes, qui craignent d’être bientôt dissous dans la police.

Je vous rappellerai également le décret du Président de la République radiant des cadres pour motif disciplinaire un chef d’escadron, par ailleurs chercheur au CNRS, qui avait critiqué ès qualités, dans un article, le rattachement total de la gendarmerie au ministère de l’intérieur.

J’espère que vous avez conscience, monsieur le secrétaire d’État, de l’effet désastreux – je pèse mes mots – de cette lourde sanction sur les gendarmes, une sanction disproportionnée au regard du manquement à l’obligation de réserve qui aurait été commis.

Enfin, en la comparant à un autre décret du Président de la République nommant sous-préfet hors cadre un ancien syndicaliste policier élu conseiller régional UMP, cette décision inéquitable et maladroite a d’ailleurs renforcé de nombreux gendarmes dans leur conviction que le rattachement se ferait à leur détriment.

Tout cela est révélateur d’une volonté toujours plus affirmée de remise en ordre et de renforcement de la centralisation s’agissant des questions de sécurité.

La presse n’a-t-elle pas évoqué, il y a quelque temps, la création d’un secrétariat d’État chargé d’assister le ministre de l’intérieur pour veiller au rapprochement de la police avec la gendarmerie, mais aussi avec les polices municipales, les entreprises privées de sécurité et, sans doute, un jour, les Douanes ?

Non, décidément, notre évaluation de la loi, neuf mois après son adoption, ne peut que nous conforter dans l’idée que le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur comporte de réels dangers et qu’il soulèvera plus de problèmes qu’il n’en résoudra !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avec deux débats sur ce thème organisés dans notre hémicycle en cinq mois à peine et la discussion d’un projet de loi important, personne ne peut plus douter de l’intérêt que portent les sénateurs à la gendarmerie !

Je n’étais pas convaincue de l’opportunité du transfert de la gendarmerie au ministère de l’intérieur et je n’ai donc pas voté la loi dont nous parlons aujourd’hui, pas plus que l’article 5 de la loi relative à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014.

Nous apprenions jadis que « la police est de pouvoir, la gendarmerie est d’État ». Comprendra qui voudra, la loi est votée, elle est devenue loi de la République et nous la respectons comme telle.

Je profite enfin de notre discussion pour redire mon attachement et celui de mon groupe à plusieurs principes très importants ; mais vous y êtes assurément tout aussi attaché que nous, monsieur le secrétaire d’État !

Je pense tout d’abord au maintien du statut militaire de la gendarmerie nationale. L’aboutissement du rapprochement issu de la loi du 3 août 2009 doit permettre d’accélérer la complémentarité et la coordination de nos deux forces de sécurité. Ce cheminement ne doit en aucun cas aboutir à une fusion. Toute remise en cause du statut militaire de la gendarmerie serait, à nos yeux, inacceptable, nous souhaitons le réaffirmer, mais les précédents orateurs l’ont tous rappelé avant moi.

Nous devons rapidement progresser vers une parité globale de traitement et de carrière entre gendarmes et policiers. Les progrès qui doivent être accomplis sur cette voie sont importants à double titre : d’abord, pour une question d’équité, ensuite, parce que c’est l’une des conditions de la pérennité du statut militaire.

Je saisis cette occasion pour saluer le travail de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat et de son rapporteur, Jean Faure, grand artisan de ces dispositions fondamentales.

La personne la mieux placée pour parler de la gendarmerie ne peut être qu’un gendarme… Je voudrais donc vous lire un extrait du discours prononcé par le capitaine Pascal Kleck, du groupement de gendarmerie mobile d’Argentan, lors d’une manifestation à La Ferté-Macé, le 15 mai dernier.

« La gendarmerie est une arme d’élite. Si notre institution obtient ce qualificatif, c’est qu’au fur et à mesure des siècles et des épreuves, des valeurs ont été transmises, comme un héritage, et inculquées à ses membres. En effet, le gendarme est un militaire particulier. C’est un soldat de la loi, qui œuvre au service de la justice. Il lui est demandé de développer son courage, sa force de travail, son dévouement au concitoyen, en faisant preuve d’une disponibilité de tous les instants. De plus, il est toujours resté fidèle au pouvoir légal. La gendarmerie est une force humaine, qui sert la France et sa population au quotidien, quelles que soient les circonstances. »

Le capitaine Kleck ajoute : « Ceci reste d’ailleurs valable aujourd’hui, au sein du ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, où la gendarmerie tient sa place en assurant la sécurité du citoyen sur l’ensemble du territoire, y compris dans les nouveaux espaces de communication. Elle partage même son savoir-faire dans plusieurs pays en proie à des crises majeures, comme, par exemple, Haïti ou l’Afghanistan. »

Il faut croire que les craintes que nous évoquons ici ne sont pas arrivées jusqu’au bon département de l’Orne !

Mais revenons donc au débat qui nous occupe aujourd’hui…

Comme l’avait déjà souligné notre collègue Joseph Kergueris lors du dernier débat sur l’application de la loi relative à la gendarmerie nationale, je constate que de nombreux décrets prévus par ce texte sont toujours en attente de publication. Pour cette raison, d’importantes dispositions ne sont pas encore entrées en vigueur et, malgré les publications du 11 février dernier, il reste des lacunes à combler.

Je regrette ce retard, monsieur le secrétaire d’État. Je souhaiterais donc savoir dans quel délai nous pouvons espérer la publication de ces mesures réglementaires, notamment celles qui concernent les grilles indiciaires de retraite ou d’avancement.

Enfin, je tenais à profiter de cette question orale avec débat pour évoquer une problématique importante, à laquelle je suis très attachée - cela vous changera d’ailleurs un peu du discours que vous entendez depuis tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État – à savoir l’intégration et la promotion de l’égalité des chances au sein de la gendarmerie nationale et de la police, enfin, disons au sein des forces regroupées dans votre ministère !

Je veux parler ici de l’intégration des jeunes, notamment de ceux qui sont issus de milieux défavorisés et de l’immigration.

Plusieurs initiatives ont été mises en œuvre récemment afin d’assurer l’égalité des chances dans la police nationale.

Ainsi, le dispositif des cadets de la République, mis en place en 2005, a pour objectif de promouvoir l’égalité des chances au sein de la police nationale, en permettant à des jeunes n’ayant pas le baccalauréat de se préparer aux concours de gardien de la paix.

Je pense aussi, à un autre niveau, aux classes préparatoires intégrées, qui visent à préparer aux concours d’officier et de commissaire de police.

Néanmoins, les nombreux rapports élaborés sur ce sujet font état d’une situation extrêmement inquiétante en termes de discriminations à l’intérieur des forces de police.

C’est d’ailleurs sans doute le rapport de Catherine Wihtol de Wenden et d’un chercheur de l’Institut français des relations internationales, l’IFRI, qui a suggéré à Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire, son discours du 23 février 2006 sur l’égalité des chances et « la discrimination positive à la française ».

Voici précisément un extrait des propos tenus par l’ancien occupant du ministère de l’intérieur : « Le temps est à l’action. Nous devons promouvoir un modèle de société plus ouverte et plus juste. Je veux ici affirmer ma détermination à faire de ce ministère un exemple. La police doit être à l’image de la société. Elle doit, à mérites équivalents, accueillir dans ses rangs tous ceux qui partagent la motivation, le désir et les capacités de travailler partout et pour tous à garantir la sécurité des Français. […]

« L’égalité républicaine ne saurait être qu’un concept, une idée purement virtuelle. Je veux en faire une réalité car ce dont il s’agit, c’est bel et bien de construire ensemble l’avenir de notre République. […]

« Il faut savoir intégrer toutes les populations en une seule communauté de valeurs et de destins : celle des citoyens de la République. C’est notre responsabilité, notre devoir et notre honneur. […]

« L’État doit être le premier acteur de cette politique, qui exige des actions et des résultats concrets. »

Voilà ce que disait le ministre de l’intérieur Nicolas Sarkozy.

Alors, monsieur le secrétaire d’État, qu’en est-il du programme des cadets de la République ? Qu’en est-il des conventions signées avec notamment le président du groupe Vedior France, afin de poursuivre les initiatives en cours en matière de formation ?

Il était aussi prévu que la gendarmerie nationale offre le statut d’aspirant de gendarmerie issu du volontariat à un certain nombre d’étudiants afin que ceux-ci puissent, par ce biais, préparer les concours d’admission.

Quels sont les résultats de toutes ces actions, certes ambitieuses, mais dont nous n’entendons pas beaucoup parler aujourd’hui ?

Je vous remercie des réponses que vous pourrez me donner à ce sujet et, si vous êtes libre à la fin du mois de juin

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Le maire, qui s’est beaucoup battu pour garder cette gendarmerie, ambitionne – car nous avons des ambitions dans l’Orne – de lui donner le nom d’un ancien parlementaire, grand député, ancien militaire, vaillant et authentique gaulliste, Daniel Goulet !

Monsieur le secrétaire d’État, nous vous accueillerons à Passais-la-Conception avec enthousiasme !

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais d’abord remercier mon collègue Jean-Louis Carrère : sa question résume de manière absolument pertinente le fond du dossier et il dresse un tableau juste de ce que l’on pourrait appeler le « moral des troupes », tableau nourri par la connaissance du terrain.

Cela a été dit plusieurs fois depuis le début de ce débat, le désarroi est aujourd’hui total : les gendarmes doutent de leur présent et craignent pour leur avenir ; les élus locaux, viscéralement attachés à leurs brigades, ne savent pas, si vous me permettez l’expression, « à quelle sauce ils vont être mangés » ; nos concitoyens, eux, hésitent entre résignation et colère face à l’échec flagrant des politiques de sécurité dont ils constatent la mise en œuvre sur le terrain.

Je voudrais évoquer brièvement, comme point de départ de mon propos, la situation d’un département que je connais bien, celui de l’Ariège.

L’Ariège compte trois compagnies de gendarmerie – Foix, Pamiers et Saint-Girons –, neuf communautés de brigades et vingt-trois brigades territoriales, dont deux autonomes.

Que constatons-nous sur le terrain ?

Foix, chef-lieu de département, a vu les effectifs de sa brigade baisser insidieusement, jusqu’à la fermeture. De la même manière, nous craignons aujourd’hui pour la pérennité de deux autres brigades. La conséquence est mécanique, chacun le comprend : les zones d’intervention s’étendent sans cesse, sans aucune augmentation d’effectifs pour compenser cette évolution, et le maillage territorial s’affaiblit d’autant !

Il va sans dire que ces fermetures sont le plus souvent mises en œuvre sans la moindre concertation avec les élus locaux, qui connaissent pourtant le terrain et devraient être systématiquement associés, très en amont, à toute évolution importante. C’est un peu de notre République, un peu du lien social, un peu de la confiance dans le principe d’égalité qui disparaît tout au long de ce processus.

Malheureusement, le cas de l’Ariège n’est pas unique. Il sert simplement d’illustration, mais aussi de révélateur d’une situation de la gendarmerie nationale qui nous alarme au plus haut point.

Au moment de la discussion de ce qui allait devenir la loi du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale, les parlementaires socialistes avaient manifesté, aussi bien à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, leur opposition à un texte qui tendait à rattacher la gendarmerie au ministère de l’intérieur. En effet, tout le monde sait bien que ce processus conduira, à terme, à un affaiblissement de l’identité propre de la gendarmerie, ce qui équivaudra à une disparition de toutes ses spécificités.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

M. Jean-Pierre Bel. Mon ami Jean Faure a souhaité faire référence, dans son intervention, à la position défendue par l’un de nos collègues députés. Puisque nous apprécions toujours que l’on cite un député, surtout quand il est socialiste

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

« Le problème des redéploiements […] est susceptible de remettre en cause l’équilibre entre les différents acteurs […]. De fait, la création envisagée de 175 communautés d’agglomération confiées à la police nationale s’apparenterait à un véritable séisme organisationnel qui aurait pour conséquence d’évincer la gendarmerie des zones périurbaines relevant aujourd’hui explicitement de sa compétence […].

« Quelles seront les contreparties à ces transferts ? Les nombreuses circonscriptions de police qui sont aujourd’hui implantées dans des villes de moins de 20 000 habitants environ seront-elles, comme il semblerait cohérent, attribuées à la gendarmerie ? Au contraire, les autorités comptent-elles s’affranchir de tout respect des équilibres coutumiers en termes de territoires et de populations administrés ? Dans ce cas, le mécontentement perceptible dans les rangs de l’Arme ne fera que croître. »

Je crois qu’il était tout de même utile de compléter les propos de ce responsable socialiste, qui, du reste, ne s’exprimait dans ce rapport qu’en son nom propre.

Mes chers collègues, je veux vous redire aujourd’hui notre attachement au modèle, inhérent à notre République, de deux institutions distinctes dans leur organisation et spécifiques dans leur fonctionnement, l’une civile, l’autre militaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Aujourd’hui, le malaise de la gendarmerie est palpable et omniprésent. Il est aggravé par des pratiques de gestion qui ont déjà été dénoncées au cours de ce débat.

Ainsi, monsieur le secrétaire d’État, votre gestion des ressources humaines est arbitraire et aveugle. La moindre critique, même nuancée, discrète et constructive, conduit à des déplacements d’office et à des mutations sanctions. J’ai pu en faire l’expérience dans mon département !

Votre gestion matérielle hypothèque l’avenir. Le parc immobilier de la gendarmerie nationale est composé à 60 % de casernes locatives, qui sont généralement en bon état grâce aux efforts substantiels consentis par les collectivités locales, et à 40 % de casernes domaniales, qui donc appartiennent à l’État et ont atteint un degré de vétusté préoccupant. L’État fera-t-il face à ses obligations, en octroyant les dotations nécessaires à la rénovation de ce parc ?

Cette situation se prolonge enfin par l’ignorance dans laquelle sont maintenus les élus locaux qui essaient, tant bien que mal, de faire face.

Comment obtenir, monsieur le secrétaire d’État, des informations précises et fiables sur les redéploiements des zones de compétence entre la police et la gendarmerie, ainsi que sur le maintien du maillage assuré par les brigades territoriales ? Nous attendons vos réponses !

Depuis plus de huit ans, le Président de la République et vous-même affirmez avoir fait de la sécurité votre priorité. Dont acte ! Mais vous avez eu tort d’en rester aux mots, sans jamais passer à l’action. Dans un instant, mes collègues de l’opposition, chiffres en mains, illustreront la réalité de l’échec qui est le vôtre dans ce domaine.

Pourquoi un tel échec, notamment en matière de violence aux personnes ? Parce que vous vous attaquez à ce qui marche au lieu de réformer ce qui ne marche pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La réforme pour la réforme désorganise le travail des hommes sur le terrain ; elle désorganise la sécurité publique ; elle désorganise et déstabilise les forces de sécurité.

En un mot, le changement, tel que vous le mettez en œuvre, apporte le désordre au lieu d’améliorer le maintien de l’ordre.

Vous l’aurez compris, nous jugeons sévèrement ce bilan en matière de sécurité et constatons votre échec dans la lutte contre l’insécurité, qui est pourtant une priorité affichée du Président de la République depuis de nombreuses années.

Nous proposons une autre approche des problèmes de sécurité, globale et cohérente, au lieu d’une gestion à la petite semaine et de dispositifs rapiécés.

Nous considérons comme une fausse idée votre conception même de la réforme, cette volonté de casser ce qui fonctionne au lieu de réparer ce qui ne fonctionne pas.

La sécurité est un droit pour nos concitoyens et une ardente obligation pour ceux qui prétendent nous gouverner. C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, nous attendons aujourd’hui, dans votre intervention, des réponses aux questions légitimes qui vous ont été posées !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Vall

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le débat tenu dans cet hémicycle le 14 janvier dernier sur l’application de la loi du 3 août 2009 fut loin de rassurer ceux qui, comme moi, s’inquiètent des modalités du rapprochement de la gendarmerie et de la police nationale. À cette heure, rien n’est venu sensiblement démentir nos arguments, hélas !

Monsieur le secrétaire d'État, le rapprochement de la gendarmerie et de la police nationale est une fusion qui ne veut pas dire son nom. De surcroît, elle remet en cause l’identité militaire des gendarmes, ce qui ne va pas sans susciter une certaine émotion parmi nombre d’entre eux.

La sanction prononcée contre le chef d’escadron Jean-Hugues Matelly, radié des cadres pour s’être publiquement exprimé contre cette réforme, illustre le malaise qui affecte une partie des personnels. Si je ne conteste pas le devoir de réserve auquel sont astreints tout fonctionnaire et a fortiori tout militaire, je m’étonne néanmoins de la sévérité de la sanction prononcée, décision d’ailleurs suspendue en référé par le Conseil d’État, le 30 avril dernier.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Vall

Monsieur le secrétaire d'État, le rapprochement de la gendarmerie et de la police nationale s’inscrit dans le mouvement plus vaste de fragilisation des services publics que le Gouvernement a engagé au nom du principe de rationalisation budgétaire érigé en dogme. Trésoreries, directions départementales de l’équipement, casernes militaires, tribunaux, hôpitaux, présence postale et aujourd’hui gendarmerie : la liste est longue de ces services publics qui disparaissent petit à petit, et ce en totale contradiction avec le discours prononcé par le Président de la République, le 9 février 2010, à Morée.

Permettez-moi de le citer :

« Parce que l’on s’est habitué à une politique de l’aménagement du territoire qui, au fond, n’avait comme seule ambition d’accompagner vos territoires vers le déclin, faire en sorte que ce soit un peu moins douloureux, que cela se passe un peu moins vite, qu’on retarde d’un an la fermeture d’une école, de deux ans celle d’un bureau de poste, de trois ans celle d’un hôpital, de quatre ans celle d’un tribunal. C’était une vision défensive. Je souhaite une vision offensive à l’image de la croissance de votre démographie [...] Naturellement, la responsabilité de l’État face aux besoins des habitants de la ruralité c’est que, partout, vous ayez accès aux services essentiels, les services à la population. »

Le Président reconnaît lui-même que l’on ne peut pas s’appuyer sur la seule norme comptable pour engager une nouvelle politique d’aménagement des territoires ruraux, dont la démographie est en croissance et qui sont de plus en plus touchés par la délinquance.

Dans ces conditions, décider de supprimer en 2010 1 303 postes, après les 1 246 supprimés en 2009, soit au total près de 2 500 postes en deux ans, paraît incompréhensible et en totale contradiction avec la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, la LOPSI, dans laquelle on a pourtant estimé à 7 000 emplois les renforts nécessaires pour remplir les missions de maintien de l’ordre public.

Le département du Gers, que j’ai l’honneur de représenter, est particulièrement touché par les conséquences du rapprochement entre la gendarmerie et la police nationale.

En effet, par courrier du 15 mai 2009, j’ai été informé par l’autorité régionale d’une « remontée d’effectifs », qui se traduit concrètement par la suppression de cent quarante-trois gendarmes dans la région Midi-Pyrénées, dont vingt-trois dans le seul département du Gers, où sont affectés trois cent soixante-neuf militaires et qui pourtant connaît une augmentation démographique de 5 %.

En 1999, nous avions pourtant accepté la réorganisation de la gendarmerie autour des brigades communautaires, organisation qui a fait la preuve de son efficacité et pour laquelle de nombreuses communes se sont engagées dans des opérations coûteuses de rénovation ou de construction de casernes et de logements. Dans le département du Gers, on en compte quinze.

Faut-il dès aujourd’hui que nous nous organisions à l’échelle des territoires que couvriront les conseillers territoriaux ? Alors que chaque chef-lieu de canton compte à ce jour une caserne de gendarmerie, faut-il imaginer qu’il n’y aura qu’une seule gendarmerie à l’échelle de quatre ou cinq cantons ?

De plus, la fermeture programmée de la moitié des casernes d’ici à 2011, comme le préconise la RGPP, va considérablement peser sur les finances des collectivités : les casernes venant d’être construites sont louées par bail de neuf ans, tandis que l’investissement consenti par les collectivités ne sera remboursé qu’en vingt ou trente ans.

Quelles compensations avez-vous prévues pour pallier cette situation ? Comptez-vous initier des programmes de reconversion immobilière pour ces locaux très spécifiques ? Avez-vous prévu des plans d’accompagnement financier, à l’image des communes touchées par la réorganisation de la carte militaire ? Comment les maires pourront-ils, demain, exercer leur pouvoir de police, qui est pourtant une compétence obligatoire ?

Peu de communes ont la capacité de financer une police municipale. Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'État, la grande inquiétude à la fois de la population et des élus locaux dès lors que le besoin d’une force de sécurité de proximité est patent.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Vall

Plus largement, je m’interroge toujours sur la pertinence de cette réforme, alors que nul ne remettait en cause l’action de la gendarmerie, même si son fonctionnement mérite une modernisation pour plus de performance.

En tant que telle, la mutualisation des moyens d’action des forces de sécurité est sans doute nécessaire pour permettre une meilleure appréhension, dans un souci de complémentarité, des faits de délinquance et de criminalité. Mais un accroissement de cette mutualisation aboutira à la disparition progressive du statut militaire et de la garantie que représentaient l’ensemble de la chaîne de commandement et la procédure de réquisition.

De plus, l’insuffisance des moyens matériels – moyens héliportés obsolètes, parc automobile vieillissant, casernes vétustes, absence de renouvellement des matériels lourds – conduit à s’interroger sur le rôle qu’entend assigner le Gouvernement, dans ces conditions, à la gendarmerie. Je vous rappelle que le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008 a fait de la sécurité intérieure, à laquelle concourt la gendarmerie, un des piliers de la stratégie de sécurité de la France.

C’est dans ce contexte que j’ai initié une pétition, relayée nationalement par le Parti radical de gauche, contre ces suppressions de poste. Plus de la moitié des communes du Gers, toutes tendances politiques confondues, l’ont déjà signée, preuve que l’inquiétude des élus locaux est réelle et qu’elle dépasse les clivages partisans.

Compte tenu de ces éléments peu rassurants, j’aurais souhaité, monsieur le secrétaire d'État, que vous nous éclairiez sur la façon dont vous entendez pérenniser l’avenir de la gendarmerie et assurer à l’ensemble de nos concitoyens, où qu’ils résident, le droit à la sécurité, que doit garantir la République, et qui fait partie des « droits naturels et imprescriptibles » inscrits dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789.

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Robert Hue applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la question orale avec débat de cet après-midi sur la situation de la gendarmerie nationale est la deuxième sur ce sujet depuis le mois de janvier 2010.

C’est une fois de plus l’occasion pour la Haute Assemblée d’exercer son rôle de contrôle de l’action du Gouvernement, conformément à la révision constitutionnelle, révision que certains n’ont pas cru bon d’adopter, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

… bien qu’ils en soient bénéficiaires à cet instant.

Cependant, permettez-moi de vous rappeler que la loi du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale prévoyait déjà son évaluation tous les deux ans par le biais d’un rapport du Gouvernement au Parlement, notre collègue Jean Faure l’a souligné.

Mes chers collègues, n’oublions pas qu’évaluation n’est pas synonyme de précipitation. Dans ce domaine, comme dans d’autres, restons sereins. Nous avons voté la loi il y a moins d’un an, et nous en sommes déjà, je viens de le dire, au deuxième débat !

Faut-il y voir la peur séculaire du gendarme ? Ou est-ce en raison – et j’en suis convaincu – de l’intérêt que chacun d’entre nous, sur toutes ces travées, porte à un corps qui, tout au long de l’histoire, n’a eu de cesse de défendre les valeurs de la République ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Mais, comme répétition est force de pédagogie, je profiterai des quelques minutes qui me sont imparties pour vous faire part d’un certain nombre d’observations qu’il me semble nécessaire de rappeler.

Comme l’a indiqué le rapporteur de la loi de 2009, Jean Faure – je tiens à saluer le travail accompli par notre collègue, sous l’autorité du président Josselin de Rohan -, en aucun cas la loi de 2009 ne remet en question le statut militaire des gendarmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Nous nous y sommes engagés, et nous y veillerons ! N’en déplaise à tous ceux qui n’ont de cesse de laisser croire le contraire. Le rôle des élus que nous sommes n’est pas d’alimenter ou d’attiser les angoisses de ceux pour lesquels nous légiférons.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Les Français ont compris, il n’y a qu’à voir les sondages !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La loi que nous avons votée en août dernier n’est pas une OPA de la police sur la gendarmerie. Il ne s’agit pas non plus d’une fusion-acquisition entre les deux corps. À croire que les détracteurs n’ont pas lu le texte !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

C’est la pratique qui compte, pas le texte !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Bien au contraire, les missions de la gendarmerie ont été précisées et rappelées dans un seul et même texte.

Hormis un décret datant de 1903, aucun texte n’avait été adopté depuis 1798 ! Et chacun sait combien notre société a évolué en matière d’insécurité, de délinquance et de violence, phénomènes qui touchent non plus seulement, comme l’a rappelé à juste titre notre collègue Robert Hue, les grandes agglomérations, mais bien l’ensemble du territoire.

Cette loi établit un équilibre entre la police et la gendarmerie afin de mieux répondre au défi de la sécurité nationale et avant tout au besoin de sécurité de nos compatriotes.

Ce texte réaffirme les compétences de la gendarmerie pour assurer la sécurité publique et l’ordre public. Plus que jamais, cette loi reconnaît le statut de force armée à la gendarmerie nationale. Ses missions sont constituées, chacun le sait, par l’exécution des lois, les missions judiciaires, le renseignement, l’information des autorités publiques.

C’est la mission de défense au sens large qui est sanctuarisée dans ce texte, et ce à un moment où notre pays doit faire face à de plus en plus de menaces, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur de ses frontières.

L’actualité de ce week-end en témoigne avec l’organisation des « apéros géants ». Ces manifestations, dont les conséquences peuvent être dramatiques, se déroulent, pour la plupart, dans des zones de police. Très souvent, la gendarmerie et la police municipale viennent pallier le manque de policiers disponibles le week-end.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

On fera appel aux milices, à l’américaine !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Si la loi consacre le statut militaire de la gendarmerie, elle a pour corollaire la reconnaissance morale et matérielle liée aux contraintes de la fonction.

Certes, les gendarmes sont désormais rattachés administrativement au ministère de l’intérieur, mais il n’en demeure pas moins qu’ils ont et auront toujours un statut particulier, et cela à différents niveaux dans notre société jusqu’au plus profond de nos territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

C’est pour cela que le ministre de la défense s’y intéresse autant !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Il est plus préoccupé par la prochaine élection présidentielle !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

D’abord, le statut militaire répond à un code et à des valeurs. Cela est très important dans une société où la perte de repères se traduit chaque jour par l’allongement des rubriques de faits divers, presque proportionnellement à la diminution de l’âge des auteurs, dont les actes sont de plus en plus violents.

Le statut militaire, c’est aussi et avant tout l’engagement et le sacrifice, ce que l’on oublie trop souvent. À ce titre, je tiens à rendre un hommage appuyé au travail et à la mission qu’accomplissent les gendarmes, que ce soit sur le territoire national ou à des milliers de kilomètres.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

En Guyane, dans le cadre de la mission Harpie, où ils luttent contre l’orpaillage illégal, ou en Afghanistan, où ils forment les futures forces de police et de sécurité, les gendarmes, par leur professionnalisme et leur courage, sont des exemples pour la société civile.

De plus, je tiens à rappeler que l’ancrage territorial de la gendarmerie est l’une des clés de la cohésion nationale. Si les gendarmes exercent des missions régaliennes, notamment dans le domaine de la police judiciaire, ils assurent un rôle essentiel auprès des populations, bien au-delà des seules missions de sécurité et de prévention. La gendarmerie participe à la gestion humaine de nos territoires. Elle est un maillon indispensable du « vivre ensemble ».

De cette façon, les gendarmes sont des acteurs incontournables de l’aménagement du territoire, et je souhaite qu’ils soient davantage associés aux politiques du territoire engagées par l’État et par les collectivités locales.

Pour ces raisons, il est de notre devoir de veiller au maintien de leur proximité avec les populations et les territoires.

Par exemple, quand il s’agit d’implanter ou de déplacer une gendarmerie, il faut que ce soit en concertation avec les responsables locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Gendarmes et élus locaux ont en commun la connaissance du terrain. La décision ne peut provenir uniquement d’un organe central dont les exigences et les normes ne correspondent plus aux besoins et à la diversité des situations. Il s’agit ni plus ni moins d’un contrat entre les élus locaux et les gendarmes, chacun bien évidemment conservant ses compétences pour la préservation de l’ordre public, avec comme seul objectif l’optimisation des investissements et donc la garantie d’une meilleure efficacité.

À ce titre, il me semble nécessaire d’alléger leurs tâches administratives pour que les gendarmes puissent répondre aux besoins et aux attentes de proximité de nos compatriotes.

La loi de 2009 permet aux gendarmes de répondre à ces besoins, avec les forces de police, dans une démarche de complémentarité optimale et d’efficacité opérationnelle maximale, comme l’a rappelé le ministre de l’intérieur le 24 février dernier.

Aussi, monsieur le secrétaire d'État, nous savons pouvoir compter sur vous pour assurer la garantie du maintien du périmètre missionnel voulue et votée par le législateur. En conséquence, l’esprit et l’équilibre de la loi ne doivent pas être remis en cause par des décrets ou des circulaires comme cela arrive assez souvent.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je commencerai par vous dire que je partage entièrement non seulement les propos de mon collègue Jean-Louis Carrère, mais également ses convictions. Je le remercie d’avoir mis de nouveau la gendarmerie à l’ordre du jour de nos débats.

Beaucoup de choses ont déjà été dites et bien d’autres pourraient l’être encore, mais je ne dispose que de cinq minutes. Je vais donc tenter de me faire le porte-parole des gendarmes, de ces hommes et femmes de terrain qui vivent dans nos communes, sillonnent nos routes, font leurs courses dans les mêmes magasins que nous, mettent leurs enfants dans les mêmes écoles et sont engagés au service de notre sécurité et de celle de nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Oui, ils sont inquiets. Oui, il y a un malaise au sein de nos deux forces de sécurité, aussi bien dans la police nationale que dans la gendarmerie nationale. Monsieur le secrétaire d'État, même si leurs chefs ont relayé auprès de vous ces craintes, nous savons bien qu’ils l’ont fait avec modération et dans le respect de leur devoir de réserve –un devoir de réserve que je ne m’applique pas. Manifestement, soit vous ne les avez pas entendus, soit ils ne se sont pas exprimés assez fort !

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Je les ai rencontrés ! Je suis allé sur place !

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Vous ne l’entendez pas, mais, oui, il y a un malaise, et il est de notre responsabilité comme de la responsabilité des gouvernants que d’entendre les gendarmes.

Ils sont inquiets ; ils se sentent bousculés ; ils se sentent contraints ; ils sont écrasés par des calendriers et par une logique du chiffre ; ils ne sont pas reconnus. Parce qu’ils sont militaires, ils le disent à voix basse et pas à visage découvert. C’est justement pour cette raison que nous avons le devoir de les écouter, eux peut-être encore plus que d’autres, et, surtout, celui de les entendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Comment ne seraient-ils pas inquiets quand ils se demandent si leurs chefs sont respectés, écoutés et reconnus ; quand ils voient que les directions créées dans les administrations centrales pourront être confiées aux préfets ; quand ils constatent que des transferts de crédits, à hauteur de 23, 5 millions d’euros, sont opérés de la gendarmerie nationale vers la police nationale, sans aucune transparence, sans aucune communication ?

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Comment ne seraient-ils pas inquiets, quand ils voient dans quels logements ils habitent, dans quels locaux - vétustes, voire glauques - ils travaillent et les crédits mis en face pour les dépenses immobilières ?

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Mme Virginie Klès. Monsieur le secrétaire d'État, savez-vousque, dans certains logements de gendarmes, la température oscille l’hiver entre 14 et 16 degrés, malgré un chauffage poussé à son maximum ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Protestations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Chers collègues de la majorité, vous n’avez pas dû visiter les mêmes gendarmeries que moi, car c’est bien la réalité !

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

La LOPPSI maintient, en théorie, certains dispositifs, comme celui qui permet de rénover ou de reconstruire ces logements ou locaux. Mais quand sera-t-elle votée ? Et avec quels moyens en face, alors que ceux dont nous disposons sont déjà, nous le savons bien, insuffisants ?

Alors, oui, ces gendarmes ont le droit d’être inquiets quand on voit l’exigence de résultat qui leur est imposée, avec des missions sans cesse élargies – je pense à l’outre-mer, qui relève maintenant de leur responsabilité et qui mobilisera de nouveaux moyens humains.

La délinquance augmente, c’est le leitmotiv, et pourtant les moyens diminuent !

On nous dit que les technologies vont résoudre les problèmes, …

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

… mais elles ne parviendront pas à tous les régler. Ainsi, la vidéosurveillance, que vous préférez appeler « vidéoprotection », absorbera quasiment tous les crédits d’investissement en matière de technologie.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Et cela devrait tout résoudre ? Une fois que la caméra aura repéré la délinquance, il faudra bien intervenir, et qui, sinon des femmes et des hommes, devra se précipiter pour aller protéger nos concitoyens ?

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Alors, oui, ils sont encore inquiets, et on les comprend, quand on voit que la réorganisation entre nos deux forces a complètement bouleversé l’équilibre préexistant, sans aucune concertation ni évaluation de ces changements.

Oui, ils ont le droit d’être inquiets, quand ils voient la disparition d’escadrons, la création de communautés d’agglomération mises sous la protection de la police nationale, et non plus de la gendarmerie nationale, et leur exclusion des zones périurbaines, pour être repoussés vers le monde rural.

Les élus aussi sont inquiets, ils vous l’ont dit aujourd'hui. Quel maillage territorial derrière ces évolutions ? Quelles conditions de travail pour les gendarmes ? Quel impact sur leurs familles ?

Car, ne l’oubliez pas, monsieur le secrétaire d'État, les gendarmes sont des militaires, soumis donc au régime des mutations, et ils ont des familles. Comment les conjoints vont-ils pouvoir continuer de travailler si les gendarmes sont mutés tous les trois ans au fin fond d’une zone rurale où il n’y a pas d’emplois ? Comment feront les enfants, qui devront régulièrement changer d’école ? De telles conditions de vie sont totalement inacceptables.

Les crédits de fonctionnement sont insuffisants. Aujourd'hui, dans certaines gendarmeries, les gendarmes font eux-mêmes le ménage dans les locaux, car ils ne disposent plus de crédits suffisants pour signer des conventions ou pour travailler avec l’UGAP.

Alors oui, ils sont inquiets, et c’est bien normal !

Une chose m’étonne, et m’étonnera sans doute longtemps : on a vraiment besoin de la RGPP pour diminuer les effectifs de la gendarmerie nationale ? On trouve encore des hommes et des femmes prêts à s’engager dans ces conditions-là pour travailler au service de la sécurité de nos concitoyens : il n’est que temps de leur tirer un grand coup de chapeau !

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Absolument pas !

Je suis très inquiète aujourd'hui de voir un transfert de compétences se profiler…

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

… de ce service public de la sécurité, d’une part, vers la sécurité privée et, d’autre part, vers les polices municipales, sans aucune concertation avec les élus locaux ni même avec la police municipale.

Monsieur le secrétaire d'État, je ne quitterai pas cette tribune sans avoir réaffirmé mon attachement au service public de la sécurité et avoir rendu un hommage aux gendarmes, à ces hommes et à ces femmes de notre territoire, ne vous en déplaise !

Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, sachons raison garder et nous respecter les uns et les autres !

La parole est à M. Jacques Gautier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, rappelez-vous, nos ancêtres les Gaulois craignaient que le ciel ne leur tombe sur la tête. Nous avons connu la peur de l’An Mil et les prédictions de Nostradamus, qui annonçaient la mort du pape à Lyon et la fin du monde. Je remarque, d’ailleurs, que ces peurs sont souvent portées par ceux qui peuvent en tirer profit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

En la matière, vous êtes de grands spécialistes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Aujourd’hui, certains de nos collègues craignent que la gendarmerie nationale ne perde son statut militaire et ne se dilue au sein du ministère de l’intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Jean Faure l’a évoqué tout à l’heure, nous étions il y a dix jours en Afghanistan avec le ministre de l’intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Un voyage réservé à l’UMP ! Nous avions le droit d’y aller aussi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Nous aussi, nous sommes élus, et au suffrage universel majoritaire à deux tours, pas à la proportionnelle !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

M. Jacques Gautier. Je peux vous assurer que nos cent cinquante gendarmes qui assurent le tutorat des forces de sécurité afghanes en Surobi et en Kapisa

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, n’interrompez pas l’orateur !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Nous avions le droit d’aller aussi en Afghanistan !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

M. Jacques Gautier. … ou qui forment la gendarmerie ou les policiers afghans à Mazar-e-sharif, ne connaissent pas ce genre de crainte. Respectez-les, chers collègues de l’opposition ! Respectez-les, monsieur Carrère !

Exclamations continues sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Chers collègues, veuillez laisser parler l’orateur !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Ces gendarmes travaillent aux côtés de leurs camarades de la task force La Fayette et opèrent dans des zones dangereuses ; ils sont soumis à des tirs de roquette et à des tirs tendus, mais ils ont été préparés et équipés pour faire face à ces dangers.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Nous étions tout à fait capables d’aller en juger sur place !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

M. Jacques Gautier. Ce sont de vrais gendarmes et de vrais militaires ! Je tiens à témoigner devant vous de leur engagement.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.- Vives protestations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Les copains et les coquins, comme disait Poniatowski !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

M. Jacques Gautier. La loi sur le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur a pu en inquiéter certains. La gendarmerie a toujours été une force de police à statut militaire et personne, monsieur Carrère, personne ne peut imaginer que cette situation change.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

En revanche, je le rappelle, la gendarmerie était déjà, de fait, depuis 2002, rattachée, au niveau opérationnel, au ministère de l’intérieur.

Les zones d’intervention de la police et de la gendarmerie sont depuis longtemps définies et complémentaires ; elles s’adaptent selon le temps.

En tant que maire, j’ai connu la fermeture de la brigade de gendarmerie de ma commune, et le classement complet en zone de police d’État. Mais on me rétorquera que cela se passait à une autre époque, et que c’était un ministre de la défense socialiste, Alain Richard, qui les avait décidés…

Au moment où la RGPP s’impose à nous, nous sommes nombreux à prôner la rigueur budgétaire. Il n’est pas anormal de mutualiser une partie des moyens de ces deux forces, sans pour autant toucher à leur identité, à leurs spécificités ou à leurs statuts.

Mes chers collègues, certains parmi vous ont reproché la fermeture – éventuelle - de brigades territoriales ou d’escadrons mobiles et celle - elle, réelle - de quatre des huit écoles de gendarmerie. Pourtant, de telles décisions découleraient de la RGPP et non du rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur.

Ce format plus contraint de la gendarmerie nationale s’applique à l’ensemble de la fonction publique, y compris à nos forces armées.

Dans ces domaines, en particulier dans celui de la sécurité, le nombre n’a jamais fait l’efficacité et le résultat, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

M. Jacques Gautier. … sinon les députés seraient plus performants que les sénateurs !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Les efforts déployés en équipements, y compris pour ce qui concerne la vidéoprotection, la revalorisation des soldes ou la mutualisation de certains équipements, montrent, s’il en était besoin, que l’on peut faire aussi bien, sinon mieux, avec un dispositif plus contraint, et ce grâce à une meilleure organisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Ne nous trompons pas de débat, mes chers collègues !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Il s’agit ici de contrôler l’application de cette loi, et non de revenir sur la RGPP.

Mes chers collègues, sortons des a priori et des craintes supposées, et examinons avec M. le secrétaire d’État les premiers résultats d’une loi promulguée voilà moins d’un an.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Fervent défenseur des forces armées, je crois pouvoir dire que, dans les arbitrages passés du ministère de la défense, les gendarmes ont parfois été défavorisés par rapport à l’armée de terre, à la marine ou à l’armée de l’air.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Vous allez voir les arbitrages qui seront faits à l’avenir !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

M. Jacques Gautier. Je suis persuadé que cela ne sera plus le cas aujourd’hui, avec une gestion budgétaire dépendant du ministère de l’intérieur.

M. Didier Boulaud proteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Monsieur Boulaud, le débat est intéressant, laissez l’orateur s’exprimer !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Cela a été déjà évoqué, la commission a été saisie ce matin pour avis de la « LOPPSI 2 ». Ce projet de loi permettra à la gendarmerie nationale de bénéficier de matériels de haute technologie destinés à faire face aux nouvelles formes de délinquance, à la complexité des enquêtes et à la nécessité d’améliorer la protection des personnels.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Cette loi prendra aussi en compte la reprise, à compter de 2012, d’une partie des missions assurées actuellement par les armées outre-mer, et ce en conformité avec le Livre blanc.

Sur les treize points que compte la LOPPSI, je souhaite en rappeler certains, qui me paraissent essentiels : l’amélioration des capacités de soutien opérationnel ; le déploiement du dispositif de vidéoprotection et du système de lecture automatisée des plaques d’immatriculation, ou LAPI ; le développement des capacités de communication opérationnelles ; le développement des capacités de projection sur des situations de crise ; la lutte contre l’insécurité routière ; l’optimisation de l’emploi et des capacités de la force aérienne de sécurité intérieure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Mes chers collègues, le monde évolue, les menaces et vulnérabilités auxquelles nous sommes soumis aussi ; il est donc naturel que nos réponses s’adaptent en permanence.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Il y a au moins une chose qui ne change pas…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

M. Jacques Gautier. C’est ce qu’ont su faire nos armées ces dernières années ; c’est ce que font nos gendarmes, sans états d’âme.

Rires sardoniques sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Monsieur Carrère, je vous rappelle que, en 2001, les gendarmes sont venus, képis posés, avec leurs véhicules de fonction protester contre le ministre de la défense de l’époque, Alain Richard, et le Premier ministre, Lionel Jospin.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.- Exclamations indignées sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Je voudrais dire, monsieur le secrétaire d'État, toute l’estime et l’admiration que je porte aux personnels de la gendarmerie nationale et le soutien dont je les assure.

Monsieur Carrère, j’espère que nous n’aurons pas à débattre, dans quelques semaines, d’une nouvelle source de crainte, … la crainte de voir la police demander le statut militaire !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Ma chère collègue, j’espère que vous ramènerez la paix dans cette assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le président, je vais tenter de ne pas m’exprimer de façon trop passionnée !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, dans le cadre de ce débat consacré à la gendarmerie, je souhaite évoquer l’épineuse question de la liberté d’expression des chercheurs gendarmes.

Cette question a pris un relief particulier ces dernières semaines, puisqu’un militaire de carrière, que je ne nomme pas mais dont tout le monde ici a entendu parler, par ailleurs chercheur reconnu pour la qualité de ses travaux universitaires, a fait l’objet d’une mesure grave de radiation des cadres, en raison de propos qu’il a tenus dans les médias, notamment dans la presse écrite.

Je ne m’attarderai pas sur cette affaire, qui est en cours d’instruction devant le Conseil d’État, mais elle me donne l’occasion de soulever un point délicat de la loi du 24 mars 2005 portant statut général des militaires, qui pose justement les fondements et les limites de la liberté d’expression des militaires chercheurs, question ô combien passionnante.

Cette loi pose un principe simple : « Les opinions et croyances, notamment philosophiques, religieuses ou politiques sont libres. Elles ne peuvent cependant être exprimées qu’en dehors du service et avec les réserves exigées par l’état militaire. »

Par ailleurs, cette loi précise qu’un militaire chercheur est soumis aux règles pénales relatives à la violation du secret de la défense nationale et du secret professionnel.

Elle affirme, enfin, l’obligation de discrétion des militaires pour tous les faits, informations ou documents dont ils ont connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions.

On le voit bien, cette loi est d’inspiration libérale : elle a été présentée comme apportant de nouveaux droits aux militaires, notamment une liberté d’expression accrue. En effet, et c’est une nouveauté de cette loi, les militaires peuvent désormais librement s’exprimer, sans autorisation préalable, pour évoquer, dans le cadre de conférences, exposés ou articles de presse, des sujets politiques ou des questions internationales militaires non couverts par le secret.

On comprend donc que le statut de chercheur n’est pas incompatible avec celui de militaire sur le terrain de la liberté d’expression. En conséquence, le statut de militaire ne constitue pas en soi une entrave à la liberté d’expression des militaires dès lors que le secret défense ou des informations confidentielles ne sont pas en jeu.

Ma question est simple : un militaire chercheur, sous réserve bien évidemment de respecter le secret défense, peut-il critiquer, en sa qualité de chercheur, l’institution à laquelle il appartient ?

La Cour européenne des droits de l’homme a récemment apporté un commencement de réponse à cette question. Aux termes de l’arrêt rendu, la liberté universitaire d’un chercheur comprend notamment la liberté d’exprimer son avis au sujet de l’institution au sein de laquelle il travaille, de diffuser des connaissances et de répandre la vérité sans restriction.

Le statut militaire n’est donc pas un obstacle à la liberté d’expression du militaire chercheur. Cette liberté d’expression doit même être sauvegardée, car elle est saine et peut permettre à l’institution de s’interroger sur son mode de fonctionnement et, ainsi, d’évoluer.

Il s’agit non pas de laisser un militaire jeter l’opprobre sur l’institution à laquelle il appartient, mais de lui permettre d’assumer un statut hybride, celui de militaire chercheur, en lui laissant une marge de manœuvre nécessairement plus large que celle qui est accordée à un militaire n’ayant aucune activité universitaire.

J’ajoute que, lorsque les propos d’un militaire sont issus de recherches scientifiques, ils doivent être libres. Dans une démocratie, la recherche ne peut être la cause de sanctions du seul fait qu’elle a été réalisée par un militaire et qu’elle exprime une « prétendue » désapprobation de la politique conduite par le Gouvernement.

Cinq années après l’entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2005, il est nécessaire de clarifier le statut de gendarme chercheur afin de répondre aux exigences inhérentes à ces deux fonctions.

Il convient aujourd’hui de trouver un nouvel équilibre entre, d’une part, la liberté d’expression et de recherche du militaire, d’autre part, la protection du secret défense. Cet équilibre est subtil, je le reconnais et nous en convenons tous. Cependant, nous sommes prêts à réfléchir ensemble aux moyens d’assurer aux militaires chercheurs un cadre clair et transparent qui leur permettra de connaître à l’avance les limites de leur liberté d’expression.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite mettre l’accent sur les conséquences du statut militaire, une certaine inquiétude se manifestant au sein de l’institution, notamment en ce qui concerne le maintien du régime spécifique de retraite et des taux pratiqués. En effet, plane le risque d’un alignement sur le régime général, avec tout ce que cela implique.

Ce statut, conforté après le rapprochement de la police et de la gendarmerie sous l’autorité du ministère de l’intérieur, intègre la pénibilité et la dangerosité du métier de gendarme.

Toutefois, des questions restent en suspens.

Chacun sait que les gendarmes sont très fortement engagés dans leurs missions. Ils reconnaissent les avantages que leur procure leur statut, mais, en contrepartie, en raison de leur spécificité, et cela a été rappelé par tous ceux qui m’ont précédé à cette tribune, ils sont astreints à de nombreuses obligations de service continu.

Le point sur lequel je veux vous interroger est simple, monsieur le secrétaire d’État : pouvez-vous nous indiquer les intentions du Gouvernement au sujet des retraites ? Pouvez-vous nous préciser si une concertation avec le Conseil supérieur de la fonction militaire est à l’ordre du jour, comme cela est souhaité par les gendarmes, et si une concertation décentralisée à l’échelle des départements est prévue ?

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Ce sont de vraies questions !

La parole est à M. Daniel Reiner.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je voudrais à mon tour remercier notre collègue Jean-Louis Carrère d’avoir, par sa question orale avec débat, mis à l’ordre du jour la situation de la gendarmerie nationale. La passion qui nous anime cet après-midi prouve que c’était nécessaire.

Monsieur le secrétaire d’État, nous vivons une période un peu confuse où se mêlent, se heurtent même, plusieurs de vos décisions : tout d’abord, le rattachement officiel de la gendarmerie au ministère de l’intérieur, et nous avons tous dit le mal que nous en pensions ; ensuite, la poursuite de la réorganisation sur le territoire des forces de sécurité publique – police et gendarmerie – dans le cadre d’une loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure toujours en vigueur à ce jour, qui avait programmé, elle, une évolution positive des effectifs ; enfin, la RGPP, qui a stoppé en plein vol cette augmentation et qui organise, à l’inverse, une vigoureuse déflation des effectifs.

Ce climat particulièrement incohérent n’incite à la sérénité ni les gendarmes ni les élus des collectivités territoriales, qui sont en relation avec eux quotidiennement.

Je veux bien croire qu’il n’y a pas de plan caché global de suppression de brigades. Reste que, pendant quelques instants, à partir d’un exemple précis pris dans mon département, la Meurthe-et-Moselle, qui est celui que je connais le mieux, je vais vous faire partager la manière dont les choses se passent.

Après la suppression de deux brigades à Pont-à-Mousson et à Saint-Nicolas-de-Port l’année dernière, annoncée d’ailleurs le 30 décembre pour une mise en œuvre le 1er janvier, c’est-à-dire deux jours après, c’est cette fois la commune de Neuves-Maisons qui a été touchée.

Située au cœur d’un bassin ouvrier à une dizaine de kilomètres de Nancy, cette commune disposait jusqu’en 2004 - retenez bien cette date - d’un commissariat de police dont l’action s’étendait aux communes entourant ce chef-lieu de canton.

Le ministre de l’intérieur de l’époque – chacun voit de qui je veux parler – a décidé de transférer ces communes en zone de gendarmerie.

Pour emporter l’adhésion des élus locaux, qui étaient naturellement attachés à leur commissariat de police, il leur a demandé de délibérer sur sa proposition écrite « d’affecter trente-huit gendarmes à cette nouvelle brigade ». Était jointe une note d’impact précisant dans le détail comment le transfert s’effectuerait et comment le service serait « naturellement » bien assuré.

Forts de cette assurance, les élus acceptèrent par délibération cette évolution. J’ajoute qu’il était également prévu de procéder à une évaluation de ce transfert un an après. Je tiens toutes ces pièces à disposition ! « Naturellement », allais-je dire, aucune évaluation n’a été faite.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Les choses sont allées ainsi jusqu’en 2009, date à laquelle un nouveau courrier est parvenu aux élus les informant que leur brigade allait perdre dix postes de gendarme et qu’un regroupement avec deux communautés de brigades rurales voisines, dotées, elles, de seize gendarmes, allait voir le jour.

La stupeur des élus du bassin de Neuves-Maisons et des communes des cantons de Haroué et de Vézelise, sièges des deux autres brigades couvrant cinquante-deux communes, qui ont vite compris que la nouvelle communauté passerait de cinquante-quatre à quarante-quatre gendarmes, soit 20 % de postes en moins – ce n’est pas rien ! –, s’est transformée en indignation. Pour eux, il s’agissait d’un reniement total de la parole officielle donnée il y a quelques années à peine.

Alerté par ces élus, j’ai interrogé le ministre de l’intérieur lors de l’une de nos séances du mardi matin. Par la voix de la ministre chargée de l’outre-mer, Mme Penchard, …

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

… il m’a été répondu qu’il s’agissait d’une réflexion en cours, et non d’une décision, et qu’elle donnerait lieu à concertation avec les élus.

En effet, peu de temps après, je me suis rendu avec mes collègues sénateurs et le député de la circonscription à deux réunions organisées à la préfecture, auxquelles participaient les maires des soixante-neuf communes concernées.

J’ai une certaine conception de ce que peut être la concertation. La convocation d’élus locaux à la préfecture pour leur faire part des décisions du Gouvernement ne correspond pas tout à fait à l’idée que je m’en fais.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Un peu plus tard, une délégation d’élus a demandé à être reçue au ministère de l’intérieur. Elle y a entendu le même discours.

Depuis lors, plus de concertation officielle, mais on a appris qu’un marchandage serait en cours entre le ministère de l’intérieur et le secrétariat d’État chargée de la famille et de la solidarité. Il faut dire que Mme Morano est élue dans cette circonscription… Sur son initiative, des réunions ont été organisées sur cette question. L’idée serait que huit suppressions, au lieu de dix, constitueraient une avancée notable. §Une lettre du ministère de l’intérieur en ce sens lui a été adressée et circule actuellement dans certaines mairies.

Tout cela n’est ni sérieux ni respectueux.

Un argument spécieux, voire douteux, aurait même été avancé : si, depuis 2004, la commune de Neuves-Maisons avait construit une nouvelle gendarmerie, on n’en serait pas là … C’est un peu fort de café !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Depuis quand une gendarmerie neuve ou récemment construite empêche-t-elle l’État de supprimer des postes de gendarme ? Pour reprendre l’exemple que je citais plus haut, la gendarmerie de Saint-Nicolas-de-Port, qui a été supprimée, était neuve !

En réalité, ici, le terrain avait été acquis par la communauté de communes. La construction d’un immeuble de trente-huit logements était prévue. Évidemment, si les gendarmes ne sont plus désormais que vingt-huit ou trente, on a bien fait de ne pas commencer les travaux ….

Quant à la proposition d’un bail faite à l’État, nous n’avons pas obtenu de réponse. Il en va de même pour sa participation financière.

J’espère que ce cas n’est pas exemplaire, car il ne peut satisfaire personne, ni les élus ni les gendarmes, qui ne savent pas de quoi demain sera fait. Cette mauvaise méthode crée un climat de défiance, ce qui n’est jamais bon.

Quant à la population, qui est attachée à la sécurité publique et qui est la première concernée, elle constate, une fois de plus, que le service public s’éloigne d’elle et s’affaiblit. Si la sécurité publique est une priorité du Gouvernement, avouez qu’il a une drôle de manière de l’assumer dans ces trois cantons !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Berthou

Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite faire prendre conscience au Gouvernement de l’état préoccupant de la délinquance en France, plus particulièrement celle qui concerne les atteintes aux personnes et aux biens, en constante augmentation.

Mon intervention est celle d’un maire qui ne fait que rapporter ce que ressentent la plupart de ses collègues élus. En effet, pratiquement chaque jour dans nos communes urbaines, périurbaines et rurales, les maires que nous sommes sont confrontés à une multitude de faits qui inquiètent, scandalisent et rendent la vie impossible à nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Berthou

Les faits, vous les connaissez : trafics de drogues, squats d’escaliers ou d’espaces publics, beuveries, bruits, insultes, violences verbales et parfois même physiques contre ceux qui ont le courage de faire des remarques. À cela s’ajoutent les détériorations de mobiliers urbains, les voitures volées, cassées, vandalisées ou utilisées pour des rodéos, puis brûlées.

Cette liste n’est malheureusement pas exhaustive. Nos concitoyens, inquiets, apeurés, impuissants, ne sachant plus à qui s’adresser, se retournent vers leurs élus, les interpellent : « Que faites-vous, monsieur le maire ? Vous êtes responsable de la sécurité dans votre commune et vous ne faites rien, pas plus que la police ou la gendarmerie ! »

C’est bien là que le bât blesse, car nos administrés constatent que nos gendarmes, malgré toute leur bonne volonté, ne peuvent plus résorber cette délinquance, dépassés par son importance et sa diversité, à laquelle il convient d’ajouter les cambriolages, les vols, les braquages de commerces, les violences aux personnes, les divers constats d’accidents et les tâches administratives.

C’est dans ce contexte alarmant que vous réduisez les moyens qui permettraient de combattre cette insécurité, d’en limiter son évolution.

En instaurant la RGPP, en supprimant, dès 2010, 1 300 postes de gendarme et en réduisant leur effectif de 3 500 postes en trois ans, vous allez à contresens et contribuez ainsi à accentuer l’insécurité dans notre pays.

Avez-vous oublié ce temps, entre 2002 et 2005, où M. le Président de la République, alors ministre de l’intérieur, avait augmenté de façon très importante – pratiquement 12 000 emplois – les effectifs de la police et de la gendarmerie ? Et ce sont ces 12 000 emplois que vous allez supprimer d’ici à 2013, alors que l’insécurité dans notre pays s’aggrave !

Faut-il que M. le Président de la République redevienne ministre de l’intérieur pour donner aux forces de police et de gendarmerie les effectifs nécessaires à l’exercice de leur mission ?

Jamais la RGPP n’aurait dû concerner la sécurité !

Résoudre tous les problèmes que je viens d’évoquer exige obligatoirement une présence accrue des forces de police et de gendarmerie, et une présence de proximité.

Je tiens à souligner le rôle précieux que jouent nos gendarmes. À la fois proches des élus et des populations, ils peuvent avoir une connaissance précise des événements et obtenir des renseignements indispensables à la résolution d’une affaire.

En réduisant le nombre de gendarmes, vous perdrez inévitablement cette proximité ! Déjà, dans certaines brigades, on constate des regroupements d’activité. Comme l’a souligné mon ami Jean-Louis Carrère, certaines d’entre elles ne prennent plus les plaintes, contraignant les victimes, du moins celles qui ne baissent pas les bras, à se rendre dans des brigades très éloignées.

Beaucoup plus de travail, des missions de plus en plus diversifiées, mais aussi une approche des situations conflictuelles beaucoup plus professionnalisée, beaucoup plus technique, nécessitant des contacts humains et psychologiques permanents, tels sont les jalons qui ponctuent l’évolution de la fonction de gendarme.

La passion pour la fonction ne suffit plus ; la formation doit être beaucoup plus importante. Or ce n’est pas en supprimant quatre écoles de gendarmerie que vous allez, monsieur le secrétaire d'État, répondre à ces exigences de formation !

Aussi est-ce un véritable cri d’alarme que je vous lance ici !

Il ne suffit plus d’affirmer que la sécurité est l’une de vos préoccupations, encore faut-il le démontrer, en donnant à la gendarmerie nationale des moyens beaucoup plus importants que ceux dont elle dispose actuellement – et pas seulement des moyens technologiques : une caméra ne remplace pas un gendarme ! Surtout, il s’agit de ne pas faire marche arrière, en supprimant les postes que vous envisagez !

Mais je ne saurais conclure sans rendre un hommage appuyé à nos gendarmes.

Monsieur le secrétaire d'État, les Français, les élus jugeront vos actions sur des résultats et non pas sur des professions de foi !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous demande de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur, retenu cet après-midi à l'Assemblée nationale.

Monsieur Carrère, le 14 janvier dernier, Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, avait déjà été conduit à faire le point devant la Haute Assemblée sur le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur et à exposer les perspectives d’évolution de cette institution. À cette occasion, Brice Hortefeux avait souligné combien il lui semblait prématuré de dresser un premier bilan de ce rattachement, moins de six mois après l’entrée en vigueur de la loi du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale, d’autant que, comme l’a rappelé Jean Faure, cette loi prévoit expressément un tel bilan au terme de deux années d’application. Je ne peux que réitérer ce constat.

Le ministre de l’intérieur avait alors rappelé le sens du rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur, qui parachève un mouvement engagé à partir de 2002, et souligné toute l’importance de la loi de 2009, qui constitue une réforme d’envergure historique pour la gendarmerie nationale, en quelque sorte la première depuis deux cents ans. Il avait, par ailleurs, indiqué que cette réforme ne touchait ni aux missions ni au statut militaire de la gendarmerie.

Face aux inquiétudes exprimées dans ce débat tant par Virginie Klès, Robert Hue que, bien sûr, Jean-Louis Carrère, qui tend à considérer que le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur constitue une « fusion » de la gendarmerie et de la police, ce dont il n’a jamais été question, il me paraît important de rappeler, à ce stade du débat, un certain nombre de points.

Certes, je ne suis pas titulaire de la charge mais, en tant que secrétaire d’État à l'intérieur et aux collectivités territoriales, après avoir d’ailleurs été secrétaire d’État à la défense, chargé des anciens combattants, j’ai très fréquemment l’occasion d’inaugurer des casernes et des logements de gendarmerie

Depuis le début de l’année, je me suis ainsi rendu dans les Bouches-du-Rhône, la Haute-Loire, le Vaucluse, l’Hérault, la Lozère, les Côtes-d’Armor et le Maine-et-Loire. Lundi dernier encore, j’inaugurais une caserne, le matin, dans les Pyrénées-Orientales, à Osséja, près de Font-Romeu, et une autre, l’après-midi, dans la banlieue de Perpignan. J’irai bientôt dans le Haut-Rhin, dans le Gard, …

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Bien sûr, si vous persistez à m’y inviter, madame la sénatrice !

Sourires

Nouveaux sourires.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Alors, je m’y rendrai avec grand plaisir.

Lorsque je me déplace pour une inauguration, je ne suis pas expéditif, je ne me contente pas de couper le ruban, je prends mon temps, visite les logements et les casernements et rencontre les gendarmes et leurs familles.

Or je n’ai pas ressenti le désarroi que vous avez évoqué, pas plus que la colère ou la résignation ni même le malaise que vous avez décrits. Certes, des problèmes se posent ici ou là, inévitablement, et les gendarmes s’interrogent légitimement sur le devenir de leur arme. Mais j’ai vu des gendarmes fiers de leur arme, fiers de leur engagement militaire, fiers aussi de la mission qu’ils assurent en France ou lors d’opérations extérieures. En un mot, ils sont bien dans leur tête, et leurs familles sont globalement satisfaites de leurs conditions de logement.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

D’ailleurs, on n’a jamais autant construit de logements pour les gendarmes !

C’est ainsi que plus de 2 000 logements ont été mis en chantier en 2010 et plus de 2 300 logements seront livrés cette même année !

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

On est donc loin de la situation misérabiliste décrite par Mme Klès !

Sur le fond, la délinquance évolue, les forces de sécurité aussi. Pour relever au mieux les défis du xxie siècle, il fallait rattacher la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur.

Notre objectif est clair : il s’agit d’adapter l’architecture de la sécurité intérieure aux nouveaux défis de la délinquance.

Le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur a permis de placer sous une autorité politique unique, celle du ministre de l’intérieur, les deux grandes forces de sécurité de la République.

Comme l’ont fort justement souligné Jean Faure et Jacques Gautier, cette unité de commandement est l’une des conditions majeures de l’efficacité de la stratégie de lutte contre l’insécurité.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Elle permet de tirer le meilleur parti de l’ensemble de nos forces pour renforcer leur coopération sur le terrain et développer de nouveaux modes d’action, qui sont déjà très bien perçus par la population.

L’enjeu est clair : il s’agit de nous donner les moyens d’agir afin de faire face à une délinquance qui évolue en permanence et d’obtenir, par une meilleure organisation, une baisse durable et significative de celle-ci.

Pour y parvenir, la méthode que nous avons définie consiste à renforcer les coopérations opérationnelles et les mutualisations logistiques.

Le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur nous a, en effet, permis d’engager avec les directeurs généraux de la police nationale et de la gendarmerie nationale un vaste examen de l’ensemble des fonctions opérationnelles et logistiques prises en charge par les forces de sécurité.

Ce travail, en quelque sorte inédit, s’est traduit par l’élaboration de nouveaux modes d’action.

Dès le mois de septembre dernier, des cellules anti-cambriolages, par exemple, ont été créées dans tous les départements. Cette mise en commun des compétences a immédiatement produit ses effets, puisque le phénomène de hausse constaté depuis le début de l’année 2009 a été cassé.

J’ai appris lundi dernier, lors de mon déplacement dans les Pyrénées-Orientales, que le nombre de cambriolages y avait diminué, depuis le début de l’année, de 30 % en zone de gendarmerie et de 23 % en zone de police

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

J’ai tellement été impressionné par ces chiffres que je m’en souviens très précisément !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Les chiffres, c’est votre obsession ! Souvenez-vous aussi de ceux des régionales !

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

La prochaine fois, je vous emmènerai, monsieur Carrère !

Ce travail a également fait apparaître la nécessité de mettre sur pied des structures communes de nature à renforcer, de manière permanente, la coopération opérationnelle de la police et de la gendarmerie.

C’est ainsi que seront créées, dès l’été prochain, une unité de coordination de lutte contre l’insécurité routière, ou UCLIR, chargée d’améliorer l’efficacité de l’action menée par les forces de l’ordre sur le terrain et, à compter du 1er janvier 2011, la direction de la coopération internationale de la sécurité intérieure, la DCISI. Cette direction sera le point d’entrée de la gestion et de la conduite des questions policières internationales.

Mais je pense aussi à la réorganisation des services territoriaux et centraux de l’information générale, dans lesquels des militaires de la gendarmerie seront systématiquement affectés, et qui auront vocation à centraliser l’ensemble des informations émanant des services de police et des unités de gendarmerie.

Cette réorganisation devrait répondre à l’inquiétude que vous avez exprimée, madame Klès.

Outre ces structures communes, le renforcement de la coopération opérationnelle entre les deux forces s’accompagne enfin d’une véritable montée en puissance des mutualisations logistiques pour optimiser l’emploi des moyens disponibles et des « structures de soutien ».

Je prendrai quelques exemples.

Il s’agit ainsi de mettre en synergie les systèmes d’information et de communication des deux forces ; de procéder à la mutualisation progressive des fichiers judiciaires opérationnels, de manière à permettre à chaque enquêteur, qu’il appartienne à la police ou à la gendarmerie, de disposer de l’ensemble des renseignements judiciaires nécessaires au succès de ses investigations.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Vous n’avez pas besoin de fusionner les deux corps pour cela !

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Convenez-en, on aurait pu y penser plus tôt !

Dans le même ordre d’idées, il s’agit de la mutualisation systématique des achats.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Tout élu sait qu’il s’agit là d’une mesure importante de nature à nous faire réaliser des économies.

Il convient enfin de procéder à la mutualisation des structures de soutien, tels les ateliers automobiles, qui tiennent une place importante au sein tant de la police que de la gendarmerie.

Enfin, pour mener à bien ce rattachement, nous avons adopté une ligne de conduite claire : le respect de l’équilibre – et du strict équilibre ! – entre les deux forces de sécurité.

Tous les orateurs ont exprimé leur attachement à l’action de la gendarmerie et à son rôle irremplaçable pour assurer la sécurité des Français.

Je l’affirme clairement devant le Sénat : il n’est pas question de remettre en cause le dualisme qui caractérise notre dispositif de sécurité.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Les modes d’organisation de la police et de la gendarmerie sont adaptés aux spécificités et à la diversité des territoires dont l’une et l’autre ont la charge. Il ne s’agit en aucun cas d’aller vers une fusion des deux forces de sécurité, ce qui n’a aucun sens et ne présente aucun intérêt.

Il n’y a donc pas, et il n’y aura pas de fusion entre la police et la gendarmerie, mais il y a bien intégration de la gendarmerie au sein du ministère de l’intérieur, …

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

… et ce dans le respect de l’identité militaire des gendarmes.

Cette intégration s’inscrit, comme l’a souligné M. Gautier, dans la logique même des missions assumées par la gendarmerie nationale, qui a toujours été une force de police à statut militaire.

L’intégration de la gendarmerie au ministère de l’intérieur constitue une réforme d’envergure historique. L’arrivée des 100 000 personnels de la gendarmerie conduit, en effet, à augmenter d’un tiers les effectifs du ministère, ce qui constitue, on l’imagine, un défi considérable.

L’enjeu de cette réforme est de gagner en efficacité dans la lutte contre la délinquance, en additionnant les capacités opérationnelles, les talents et les compétences.

Nous en sommes conscients, la réussite de cette réforme repose, avant tout, sur le respect de l’équilibre des deux forces de sécurité.

Trois principes fondamentaux guident notre action.

Il s’agit d’abord de garantir un équilibre dans le traitement des personnels, en veillant à assurer une parité globale de traitement et de carrière ; l’actualisation du rapport de 2008 sur la parité a confirmé la réduction des écarts entre les deux forces.

Il s’agit ensuite de garantir un équilibre dans les missions, en gardant à l’esprit qu’il n’est pas question de remettre en cause celles qui sont consacrées de par la loi à la gendarmerie, laquelle les assume avec beaucoup de talent.

Je rappelle, notamment, que l’article 1er de la loi du 3 août 2009 reconnaît la police judiciaire comme une mission essentielle de la gendarmerie nationale.

Ne nous trompons pas de combat : l’enjeu est de renforcer nos moyens pour lutter contre le crime, et non pas de les diviser.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Nous n’aurons jamais trop de policiers et de gendarmes pour lutter contre les délinquants et les bandes criminelles qui menacent la sécurité de notre territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Pierre Signé

La délinquance augmente ! Il y a des personnes poignardées tous les jours !

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Il s’agit enfin d’assurer un équilibre des zones de compétence territoriale, ce qui n’interdit pas de poursuivre le travail d’adaptation de notre dispositif territorial engagé depuis 2002, afin d’implanter les forces de sécurité au plus près des besoins identifiés.

Je tiens à rassurer Nathalie Goulet et Virginie Klès, ainsi que Robert Hue et Jean-Louis Carrère, l’État ne se désengage pas et l’intégration de la gendarmerie au ministère de l’intérieur ne conduit pas, bien entendu, à abandonner les territoires.

Il faut donc cesser de professer des contrevérités, sous le couvert de prétendues sources bien informées : il n’a jamais été question de fusionner les services judiciaires de la police et de la gendarmerie, il n’a jamais été envisagé de mettre en œuvre un plan massif de fermeture de brigades de gendarmerie au nom de la révision générale des politiques publiques.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Ces rumeurs sont dénuées de tout fondement, et M. Hortefeux les a démenties avec fermeté et vigueur. Elles ne peuvent qu’inquiéter inutilement les militaires de la gendarmerie, qui accomplissent un travail remarquable et auxquels je veux, au nom du Gouvernement, rendre un hommage solennel.

Applaudissementssur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Certes, cette réforme, nous la menons dans un contexte marqué par la crise économique et la contrainte budgétaire. Mais que les choses soient claires : si nous traquons les doublons et les gaspillages, nous maintenons bien sûr tous les moyens nécessaires à l’exercice de notre mission.

La gendarmerie, comme l’ensemble des acteurs de l’État, participe au mouvement de maîtrise des dépenses publiques. Dans le climat de crise que nous connaissons, la réduction des dépenses publiques est plus que jamais un objectif prioritaire, et c’est pourquoi il faut poursuivre avec détermination la révision générale des politiques publiques, engagée depuis 2007. Mais la RGPP est synonyme non pas de désengagement, mais de rationalisation de l’action et des effectifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

C’est comme l’adjectif « populaire » dans « Union pour un mouvement populaire » : cela ne veut rien dire !

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Monsieur Fouché, je renvoie à l’examen du projet de loi de réforme des retraites la réponse à votre question sur le maintien du régime spécial de la gendarmerie. Pour l’heure, je puis seulement vous dire que si l’état de nos finances publiques exige que nous examinions tous les régimes de retraite, cet examen débutera bien évidemment par une période de concertation approfondie, qui sera menée, pour la gendarmerie, avec le Conseil de la fonction militaire.

Dans ce contexte budgétaire contraint, c’est l’immobilisme qui nous condamnerait à une sécurité au rabais. En adaptant notre organisation et nos modes d’action, nous nous donnons au contraire les moyens de gagner en efficacité.

Nos efforts se concentrent d’abord sur le recentrage des forces de l’ordre sur leur « cœur de métier ». Un important travail a ainsi été engagé avec le ministère de la justice afin de réduire les charges que le fonctionnement des juridictions judiciaires fait peser sur les forces de l’ordre. Nous pourrions en parler longuement, mais tel n’est pas l’objet de notre débat d’aujourd’hui.

Nous avons aussi élaboré de nouveaux modes d’action et aménagé les modalités d’emploi des unités de forces mobiles afin d’accroître la souplesse du dispositif. Nous avons ainsi mis l’accent sur la réversibilité, c’est-à-dire la possibilité d’employer une même unité de CRS ou un même escadron de gendarmerie mobile dans une mission de maintien de l’ordre, puis, en fonction de l’évolution de la situation, dans une mission de sécurité générale. Un autre principe est celui de la « sécabilité », à savoir la possibilité d’employer une partie seulement d’une unité de force mobile, au lieu d’une unité complète, pour proportionner au mieux les moyens aux besoins.

Toujours dans un souci d’efficacité, nous adaptons en permanence le dispositif territorial de la gendarmerie à l’évolution de la démographie, des flux et de la délinquance. Ainsi, loin de remettre en cause l’ancrage territorial de la gendarmerie, nous faisons en sorte que celui-ci corresponde toujours au mieux à la réalité du terrain. L’adaptation du dispositif territorial est d’abord le fruit d’une concertation avec les acteurs locaux de la sécurité.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Étant moi-même conseiller général, j’ai pu vérifier la réalité de cette concertation avec les autorités compétentes. C’est le préfet, épaulé par le commandant de groupement de gendarmerie et le directeur départemental de la sécurité publique, qui détermine les aménagements de ce dispositif de sécurité, après concertation avec les élus. Il les soumet ensuite à la validation du ministre de l’intérieur.

Monsieur Reiner, permettez-moi à cet égard de vous signaler que, dans votre département de Meurthe-et-Moselle, cette concertation a permis de maintenir un effectif de 46 militaires à la gendarmerie de Neuves-Maisons, pour une population d’environ 40 000 habitants, soit un ratio supérieur à la moyenne nationale.

Cette adaptation à la réalité de la diversité des territoires de la République, en milieu rural comme en milieu périurbain, sur le sol métropolitain comme outre-mer, se traduit, monsieur Vall, par une meilleure adéquation entre ressources opérationnelles disponibles et besoins identifiés.

Je rappelle en outre que, dans votre département du Gers, la gendarmerie a vu ses effectifs s’accroître de cinq militaires au cours de la période 2002-2008. Les évolutions à venir se feront en concertation avec les élus et ne remettront pas en cause la qualité du service public de sécurité que nous devons à nos concitoyens.

Il n’existe donc aucun plan de dissolution des unités de gendarmerie. En revanche, nous avons le souci de déployer nos forces au plus près des nécessités de terrain.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Vous avez évoqué, monsieur Carrère, la dissolution de 175 brigades territoriales d’ici à 2012. Franchement, je ne sais pas de qui vous tenez ce chiffre ! Je vous respecte trop pour vous mettre en cause personnellement, mais il s’agit véritablement là d’une désinformation à l’égard de nos concitoyens !

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

La plupart des gendarmes issus des quelques escadrons qui seront dissous d’ici à 2011 seront, comme cela a toujours été le cas, réaffectés dans les brigades territoriales des vingt-cinq départements les plus touchés par la délinquance. Cela paraît tout à fait logique.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Par ailleurs, chaque année, la gendarmerie renforce les effectifs dans les départements connaissant un fort accroissement de population pendant la saison touristique. Cet été, plus de 3 700 gendarmes seront ainsi déployés dans l’ensemble des départements du littoral.

Les résultats obtenus sur le terrain prouvent la pertinence des choix effectués. Pour répondre aux inquiétudes que vous évoquez, monsieur Carrère, permettez-moi de m’en tenir aux faits : la délinquance recule.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Les chiffres parlent d’eux-mêmes et confirment, pour les quatre premiers mois de 2010, la baisse de la délinquance réamorcée depuis le dernier trimestre de l’année 2009 : stabilisation du nombre des atteintes volontaires à l’intégrité physique en zone de gendarmerie et de sécurité publique ; baisse de 3, 33 % du nombre des atteintes aux biens par rapport à la même période de 2009 ; diminution de 10, 67 % du nombre des escroqueries et des infractions économiques et financières par rapport aux quatre premiers mois de 2009.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

La mutualisation des moyens et la coopération sur le terrain portent leurs fruits. Je voudrais en particulier souligner l’efficacité des cellules anti-cambriolage mises en place dans tous les départements, puisque le nombre des cambriolages a encore diminué de 3, 47 % en avril. Ce mouvement est continu depuis le début de l’année.

Enfin, la coopération de terrain entre les policiers et les gendarmes est pleinement entrée dans les mœurs, quoi que vous en pensiez. Loin des débats partisans, nos deux forces de sécurité travaillent en confiance pour mieux combattre la délinquance, comme on le voit chaque jour concrètement sur le terrain.

L’intégration de la gendarmerie au ministère de l’intérieur permet aussi de renforcer notre capacité à faire face aux crises de grande ampleur, que ce soit sur le territoire national ou à l’étranger.

Je pense bien sûr au tremblement de terre qui a ravagé Haïti le 12 janvier dernier. Endeuillée par la perte de deux militaires qui servaient là sous mandat de l’ONU, la gendarmerie s’est déployée en un temps record pour porter secours au peuple haïtien. Je pense aussi à la mobilisation des 565 militaires de la gendarmerie qui ont porté assistance aux victimes de la tempête Xynthia, en Vendée et en Charente-Maritime. Dans les deux cas, la gendarmerie s’est distinguée par sa capacité de mobilisation et de projection rapide, tant sur le théâtre national qu’à l’étranger. Ainsi, 190 gendarmes sont en place en Afghanistan, 174 en Haïti, 156 au Kosovo, 103 en Côte-d’Ivoire. Au total, 686 gendarmes sont déployés dans le cadre des OPEX, outre ceux qui assurent la protection et la sécurisation de nos postes diplomatiques les plus exposés.

La gendarmerie a eu à déplorer la mort en service de cinq de ses membres depuis le début de l’année, le dernier d’entre eux étant l’adjudant-chef Joos, décédé dans un accident survenu à Rouen la semaine dernière. C’est encore une fois une contribution très lourde que paie l’arme de la gendarmerie dans l’accomplissement de sa mission au service de nos concitoyens.

Le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur ne signifie nullement la démilitarisation de cette institution.

Très concrètement, cela se traduit par le maintien du recrutement des officiers dans les grandes écoles militaires et de la formation initiale spécifique des gendarmes, par le maintien à la charge du ministère de la défense des fonctions de soutien, par le maintien des devoirs inhérents au statut militaire, et en particulier des règles de concertation en vigueur au sein des forces armées, par le maintien de l’interdiction de création de groupements professionnels. À cet égard, permettez-moi de vous rappeler, madame Boumediene-Thiery, monsieur Hue, que, comme tous les militaires, les gendarmes demeurent soumis au devoir de réserve et n’ont donc pas à mettre en cause publiquement les choix du Gouvernement.

Enfin, je vous rappelle que c’est à leur statut militaire que les gendarmes doivent de pouvoir se déployer en Afghanistan. M. Hortefeux a d’ailleurs rendu hommage à l’excellence de leur travail à l’occasion de son déplacement à Kaboul, le 6 mai dernier.

Monsieur Faure, sachez que nous allons accroître notre effort dans ce pays d’ici à la fin du mois d’août, puisque 40 gendarmes supplémentaires seront envoyés à Kaboul pour prendre en charge l’encadrement pédagogique du nouveau centre de formation de police de Wardak.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Au détour d’une phrase, on nous annonce l’envoi de 40 gendarmes supplémentaires en Afghanistan ! C’est incroyable !

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

S’agissant de notre engagement en Géorgie, il est clair qu’il est indispensable de prendre en compte les enjeux internationaux. La progressivité sera de mise pour toute évolution de notre contingent.

Monsieur Carrère, concernant la « LOPSI 2 », je vous précise que la commission des lois du Sénat examinera ce texte le 9 juillet prochain, avant sa discussion en séance publique en septembre.

La désignation d’un nouveau directeur général issu des rangs de la gendarmerie est un signe de confiance envers cette arme. Le général Mignaux est le troisième officier général nommé directeur général consécutivement, après une longue série de préfets et de magistrats.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Il n’y a pas de plan global de fermeture de brigades, …

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

… mais des adaptations, …

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

… opérées en concertation avec les élus locaux.

Par ailleurs, il n’est pas question d’exclure la gendarmerie des zones périurbaines : la loi du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale prévoit sa compétence exclusive dans ces zones.

La diminution des effectifs concerne prioritairement les fonctions de soutien, et le maillage territorial sera préservé. D’ailleurs, des brigades sont rénovées ou même créées chaque mois.

Enfin, monsieur Carrère, il n’y a pas de remise en cause des capacités d’investigation en police technique et scientifique.

J’ajoute que toutes les brigades doivent recueillir les plaintes et sont en mesure de le faire.

Les brigades de Berre-l’Étang et de Rognac sont incluses dans le champ de la réflexion qui est menée sur la police d’agglomération. Aucune décision n’est encore arrêtée à ce stade. En tout état de cause, une brigade et de nombreux logements ont été inaugurés à Châteaurenard cette année, ce qui prouve bien que la présence de la gendarmerie dans cette partie ouest du département des Bouches-du-Rhône est non seulement maintenue, mais développée.

En ce qui concerne la procédure disciplinaire engagée contre le chef d’escadron Matelly, je rappelle que tout officier de gendarmerie est soumis au devoir de réserve, en vertu du statut militaire. Or cet officier, qui n’en est pas à son premier manquement en la matière, a remis publiquement en cause la décision du Président de la République de rattacher la gendarmerie au ministère de l’intérieur, et ce à plusieurs reprises. Il a déjà fait l’objet de sanctions disciplinaires, et la Cour européenne des droits de l’homme l’a d’ailleurs récemment débouté d’un recours dans une autre affaire de même nature. À la suite des propos qu’il a tenus dans la presse et conformément aux règles disciplinaires, il a été traduit devant un conseil d’enquête, afin que ses pairs évaluent la gravité des faits et proposent, en toute indépendance, les sanctions qu’ils estiment adaptées. L’avis rendu par cette instance le 13 octobre dernier est la radiation des cadres. M. Matelly a saisi le Conseil d’État d’une requête en annulation et en suspension de ce décret : dans son ordonnance du 29 avril 2010, le Conseil d’État a maintenu la mesure de radiation des cadres, même si M. Matelly conserve, provisoirement, son logement et sa rémunération.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Vous ne les suivez pas toujours, les avis du Conseil d’État…

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Beaucoup plus souvent que vous ne l’imaginez ! Ainsi, pour le découpage électoral, nous avons suivi son avis !

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Le message doit être clair : la gendarmerie est une institution militaire, elle le restera et ses personnels doivent respecter les contraintes de leur statut. On ne peut pas vouloir une chose et son contraire !

Monsieur Hue, la réforme n’a pas été mise en œuvre brutalement, mais de façon progressive, depuis le rattachement pour emploi de la gendarmerie au ministère de l’intérieur en 2002. Ce travail, qui vise à optimiser l’organisation de nos forces de sécurité, est équilibré : c’est d’ailleurs la conclusion du rapport de M. Urvoas, député socialiste du Finistère. En tout état de cause, je suis prêt à faire avec vous le tour des brigades du Val-d’Oise pour voir ce qu’il en est.

Madame Goulet, les cadets de la République sont un dispositif de la police nationale qui fonctionne bien. Pour la gendarmerie, il y a le dispositif « égalité des chances », qui consiste notamment à aider à la préparation des concours et des sélections aux aspirants de gendarmerie issus du volontariat – les AGIV –, à familiariser les jeunes au métier de gendarme à travers les préparations militaires gendarmerie et les préparations militaires supérieures gendarmerie, pour leur permettre de servir au sein de la réserve opérationnelle, enfin à ouvrir une classe préparatoire intégrée au concours universitaire d’officier de gendarmerie en 2010. L’accompagnement des élèves de cette classe, qui auront le statut de gendarme adjoint volontaire, s’inscrira dans la durée, afin de leur permettre de poursuivre l’élaboration de leur projet professionnel en cas d’échec au concours.

Toutes ces mesures contribuent à diversifier les recrutements, en facilitant l’accès à l’emploi public de jeunes sans qualification, issus de milieux socioprofessionnels très variés, souvent déshérités.

Le décret relatif aux indices de solde a par ailleurs été publié au Journal officiel du 12 mai dernier. Je vous en ferai parvenir une photocopie, madame la sénatrice.

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Monsieur Bel, la brigade de Foix est située en zone de compétence de la police nationale ; il est donc logique de recentrer l’action des gendarmes sur la zone de compétence de la gendarmerie.

Encore une fois, il n’y a aucun programme de création de 175 communautés d’agglomération. La gendarmerie nationale se verra d’ailleurs confier un certain nombre de communes comptant jusqu’à 20 000 habitants, et le maillage territorial sera maintenu, tout spécialement dans les départements de montagne, tels que l’Ariège.

Pour ma part, monsieur Bel, je ne souhaite pas faire entrer la politique dans ce débat

M. Jean-Louis Carrère s’esclaffe

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

On ne fait pas de politique ici, c’est bien connu !

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. … et je me garderai donc bien de rappeler les errances d’une certaine époque

Protestations sur les travées du groupe socialiste

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Monsieur Vall, les casernes venant d’être construites ne seront pas abandonnées, et les adaptations territoriales se feront après concertation locale. Vous aurez l’occasion de vous entretenir avec le ministre de l’intérieur. Je répète que, dans votre département, il y a eu non pas une baisse, mais une légère augmentation de l’effectif des gendarmes ces dernières années.

Monsieur Carle, un travail important est fait pour alléger les tâches administratives de nos gendarmes. Dans cette perspective, une diminution des missions dites « de transfèrement » a déjà été constatée en 2009, à hauteur de 5 %.

Madame Klès, la police d’agglomération a été mise en place à Paris en septembre 2009 et le sera prochainement à Lille, à Lyon et à Marseille. C’est une condition de l’efficacité des forces de sécurité, car cela donne de la cohérence au dispositif territorial.

En ce qui concerne la lutte contre la délinquance, monsieur Berthou, les chiffres du mois d’avril confirment les bons résultats enregistrés au premier trimestre. En effet, si la comparaison des résultats obtenus sur les quatre premiers mois de 2010 par rapport à la même période de 2009 fait apparaître une très légère hausse, à hauteur de 1, 54 %, du nombre des atteintes volontaires à l’intégrité physique des personnes, le recul des atteintes aux biens se poursuit, avec une baisse constatée de 3, 33 %, ainsi que celui des escroqueries et des infractions économiques et financières, dont le nombre a diminué de 10 %. Les résultats du mois d’avril révèlent aussi que l’action des forces de police et de gendarmerie a porté ses fruits dans beaucoup de départements particulièrement sensibles.

M. Jean-Louis Carrère s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Pierre Signé

Et les atteintes aux personnes ? On ne peut pas ouvrir le journal sans qu’il en soit question !

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

En conclusion, la loi relative à la gendarmerie conforte et reconnaît cette institution. C’est une nécessité pour la sécurité de nos concitoyens, comme l’a rappelé le chef de l’État lors de sa rencontre, suivie d’un déjeuner, avec des représentants de la gendarmerie à l’Élysée le 21 avril dernier. C’était la première fois qu’un chef de l’État recevait de cette façon des représentants des gendarmes de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Vous n’en savez rien, vous n’y étiez pas !

Debut de section - Permalien
Alain Marleix, secrétaire d'État

Contrairement à ce que peuvent laisser entendre un certain nombre d’interprétations erronées, cette évolution était nécessaire pour adapter les moyens aux besoins de l’époque, et elle ne remet aucunement en cause les spécificités qui font l’efficacité d’ensemble des forces de sécurité intérieure.

Le rapprochement entre la police nationale et la gendarmerie nationale se fait donc dans un esprit d’équilibre, de complémentarité et d’efficacité. Le Gouvernement fait confiance à la gendarmerie, qui est l’un des acteurs majeurs de la sécurité en France. Il lui donnera les moyens de remplir ses missions au service de nos concitoyens et de la République.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Monsieur le secrétaire d’État, vous parlez d’ « ancrage territorial » et vous semblez satisfait de la situation. Vous prétendez que la capacité de projection n’est pas altérée. Vous insinuez même que les chiffres que nous avançons en matière de suppressions d’emplois ou de fermetures de brigades seraient des inventions de nature à saper le moral des troupes.

Alors, je vous pose la question suivante : les supprimez-vous, oui ou non, ces plus de 5 000 postes ? Dans l’affirmative, cela aura forcément des répercussions, y compris en matière de projection ! Mettez donc vos actes en cohérence avec vos paroles d’estime pour la gendarmerie, auxquelles je souscris, et recréez ces postes.

À vous entendre, l’immobilisme aurait condamné la gendarmerie. Mais monsieur le secrétaire d’État, au temps où M. Chirac était Président de la République, vous et vos amis étiez déjà au pouvoir ! Je me souviens avoir entendu Mme Alliot-Marie déclarer devant la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat, la main sur le cœur, qu’il n’était pas question que la gendarmerie soit rattachée au ministère de l’intérieur, que cela ne correspondait absolument pas aux intentions du Président de la République et du Gouvernement. Les temps peuvent changer !...

Vous nous dites, monsieur le secrétaire d’État, que vous ne ressentez pas de désarroi lorsque vous assistez à l’inauguration d’une brigade. Eh bien moi non plus, car l’inauguration, en général, est un jour de fête, où les acteurs du territoire apprécient de se retrouver. Ce n’est pas à cette occasion que l’on entend le plus de doléances ! Cependant, votre sagacité et votre expérience du terrain devraient vous permettre de les percevoir. Je souligne au passage que les collectivités locales, que vous rackettez quelque peu, ont souvent largement contribué au financement de la construction des casernes que vous avez ensuite la satisfaction d’inaugurer…

Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Monsieur le secrétaire d’État, n’essayez pas de masquer les réelles difficultés de la gendarmerie par un jargon technocratique. Nous vous demandons de maintenir les effectifs, de garantir le statut militaire, de clarifier les situations, de rendre les gendarmes et leurs familles heureux, pour qu’ils puissent œuvrer sereinement à assurer la sécurité. Au lieu de cela, vous nous assénez une litanie de chiffres, en omettant celui des atteintes aux personnes, qui lui n’évolue pas dans le sens souhaitable !

En matière de lutte contre l’insécurité routière, vous condamnez les gendarmes à pratiquer une politique du chiffre, qui les amène à se désintéresser des zones où se produisent le plus d’accidents !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

C’est pourtant là qu’il faut empêcher les conducteurs de dépasser les vitesses autorisées.

Monsieur le secrétaire d’État, je ne doute pas que vous soyez comme nous attaché à la gendarmerie et qu’elle représente à vos yeux l’un des piliers de la République, mais, sans chercher à donner de leçons, je vous invite à faire attention à la réalité des chiffres : les crédits de paiements inscrits dans la « LOPSI 2 » – 53 millions d’euros pour 2009, 111 millions d’euros pour 2010, 132 millions d’euros pour 2011… – sont pathétiques ! Ces chiffres ne corroborent absolument pas vos propos ! Je le regrette pour la République et pour la gendarmerie !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

En application de l’article 83 du règlement, je constate que le débat est clos.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à vingt-et-une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Jean-Léonce Dupont.