Intervention de Pascale Gruny

Réunion du 13 novembre 2023 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2024 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Pascale GrunyPascale Gruny :

Venons-en à ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

S'il contient quelques propositions intéressantes permettant de corriger les effets de bord ou les oublis de la réforme des retraites, je veux surtout insister ici sur deux mesures d'ampleur.

La première, prévue à l'article 9, consiste en l'adossement des régimes spéciaux fermés au régime général, qui sera désormais chargé d'assurer leur équilibre en lieu et place de l'État, lequel lui attribuera, en compensation, des recettes correspondant aux crédits actuels de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».

En parallèle, l'Agirc-Arrco versera au régime général une contribution correspondant aux cotisations perçues au titre des nouvelles affiliations liées à la fermeture des régimes spéciaux, ce qui me paraît tout à fait légitime dans la mesure où ceux-ci demeurent responsables du paiement des pensions des assurés affiliés avant le 1er septembre.

Ce qui l'est beaucoup moins, en revanche, c'est la seconde contribution demandée à l'Agirc-Arrco au titre des gains que le régime complémentaire tire de la réforme des retraites.

De fait, le Gouvernement lui demande une contribution correspondant aux gains bruts engendrés par la réforme, alors que les partenaires sociaux ont décidé de financer à partir de ces gains la suppression du bonus-malus, la création de droits au titre du dispositif de cumul emploi-retraite et la revalorisation des pensions à un niveau proche de l'inflation.

En outre, après l'abandon du système universel de retraite et de l'unification du recouvrement social, il n'est pas acceptable que le Gouvernement tente une troisième fois de s'imposer aux partenaires sociaux, dont les décisions courageuses ont permis de redresser la trajectoire financière de l'Agirc-Arrco au prix d'efforts importants consentis par les travailleurs.

La commission vous propose donc, mes chers collègues, de témoigner une fois de plus notre attachement au paritarisme, en lui confiant, et à lui seul, la responsabilité de décider de contribuer ou non au financement des déficits du régime général.

La confiance envers les partenaires sociaux, telle est également la position que je vous proposerai d'adopter sur la réforme de l'assiette sociale des travailleurs indépendants, prévue à l'article 10 ter.

Le Gouvernement souhaite en effet assurer la neutralité financière de cette réforme, qui est très attendue des professionnels dans la mesure où elle leur permettra, à niveau global de prélèvements constant, de cotiser davantage et, donc, de se voir accorder des droits supplémentaires.

Pour ce faire, il demande notamment à être habilité à modifier lui-même les taux et les barèmes des cotisations de retraite complémentaire des professionnels libéraux. Là encore, la commission vous invitera à refuser d'accorder une telle autorisation qui non seulement n'a pas sa place dans une loi de financement de la sécurité sociale, mais constituerait également un dangereux précédent.

J'en profite pour déplorer le choix d'inclure dans le texte une réforme d'une telle ampleur, dont le coût brut s'élèverait à 1, 4 milliard d'euros, et ce par voie d'amendement, sans étude d'impact, dans la précipitation la plus totale, alors qu'elle n'a pas vocation à s'appliquer avant 2026. Aucune information ne m'a par ailleurs été communiquée au sujet des professions qui y perdraient en raison de ce nouveau mode de calcul. Il n'est pas acceptable, monsieur le ministre, que la représentation nationale soit contrainte de travailler dans de telles conditions.

Enfin, notre commission a souhaité aller au-delà des quelques mesures proposées par le Gouvernement pour lutter contre la fraude aux prestations sociales. C'est la raison pour laquelle elle vous soumettra un amendement tendant à rendre obligatoire le contrôle biométrique de l'existence des bénéficiaires de pensions de retraite résidant à l'étranger d'ici à trois ans, afin de mettre un terme aux pratiques scandaleuses observées dans un certain nombre de pays, où les ayants droit de retraités décédés depuis longtemps continuent de percevoir leur pension.

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