Séance en hémicycle du 13 novembre 2023 à 16h00

La séance

Source

La séance est ouverte à seize heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, de financement de la sécurité sociale pour 2024 (projet n° 77, rapport n° 84, avis n° 80).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Aurélien Rousseau

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, issue de la rencontre, fût-elle improbable, des esprits visionnaires de Pierre Laroque, Alexandre Parodi et Ambroise Croizat, la sécurité sociale est l’un des plus grands acquis du modèle social français. Elle est notre bien commun, le premier patrimoine de ceux qui n’en ont pas.

C’est un système qui, à maintes reprises, a montré sa performance et son utilité : nous l’avons vu pendant la crise sanitaire, nous l’avons vu face à l’inflation, nous le ressentons, chaque jour, dans un pays où le reste à charge des assurés en matière de santé est l’un des plus faibles du monde.

Néanmoins, c’est aussi un système qui présente des fragilités et qui doit faire face, aujourd’hui, à de très grands défis. Je pense évidemment aux transformations démographiques, sociales et environnementales de notre temps, qui appellent des adaptations indispensables. Mais je pense aussi, à une autre échelle, à la fraude, qui mine la confiance de tous les acteurs.

C’est donc dans un état d’esprit à la fois réaliste et ambitieux que je tiens à aborder nos débats sur ce premier projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), que j’ai l’honneur de défendre devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs.

J’estime qu’il est indispensable, avant toute chose, d’élargir notre regard, afin d’inscrire l’examen de ce texte dans un contexte global.

Notre politique sociale ne se déploie pas tout entière à partir de cet unique véhicule législatif.

Il y a quinze jours, vous avez adopté la proposition de loi visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels. À ce titre, permettez-moi, une nouvelle fois, de saluer la qualité des travaux menés par le Sénat dans des conditions difficiles, sous l’égide de la rapporteure Corinne Imbert.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Burgoa

De l’excellente rapporteure Corinne Imbert !

Debut de section - Permalien
Aurélien Rousseau

La négociation conventionnelle avec les médecins libéraux, vous le savez, reprendra formellement après-demain.

Ces démarches produiront, autant que la future loi de financement de la sécurité sociale, des effets concrets sur l’organisation de l’offre de soins partout en France, effets qui seront soutenus par l’augmentation structurelle des effectifs médicaux et soignants permise par la suppression du numerus clausus, ainsi que par les efforts menés avec les régions, dont je salue l’implication, pour augmenter les places en formation paramédicale.

J’ai eu l’occasion d’y revenir longuement devant votre commission des affaires sociales, que je remercie de sa sagacité, jusque dans ses questions les plus difficiles.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Aurélien Rousseau

Il convient également de rappeler qu’un budget est indissociable de son contexte. Si celui-ci, nous le savons tous, est réellement difficile – loin de moi l’idée de le nier –, il est également contrasté.

Je mesure les obstacles, parfois désespérants, auxquels est encore confronté un très grand nombre de nos concitoyens en matière d’accès aux soins. Je connais les difficultés des soignants mobilisés au quotidien pour accompagner les Françaises et les Français.

Si je n’entends pas tout repeindre en rose, tant l’hétérogénéité est grande dans nos territoires, il faut toutefois reconnaître que le cadre d’action que j’ai décrit est soutenu par les moyens très importants déployés depuis plusieurs années, ainsi que par les efforts consentis par les assurés sociaux et les cotisants eux-mêmes.

On le voit, par exemple, à la reprise de l’activité hospitalière, mais surtout à celle des recrutements hospitaliers, qui nous permettront, d’ici à la fin de l’année, de rouvrir plusieurs milliers de lits hospitaliers.

C’est l’un des effets des investissements massifs qui ont été consentis dans cadre du Ségur de la santé et qui continuent à être décaissés pour construire ou rénover nos établissements de santé, même s’il faut reconnaître que l’inflation est telle qu’elle nous oblige parfois à revoir certains de ces projets.

Dans chacune de ces démarches, nous sommes guidés par l’idée de renforcer notre système de santé, afin de protéger toujours mieux les Français et de répondre aux difficultés auxquelles nous sommes confrontés.

Car, oui, des difficultés existent et des fragilités redoutables persistent. Le contexte macroéconomique sera marqué cette année encore par la pression inflationniste et par une dégradation des comptes de la sécurité sociale, notamment ceux de la branche maladie, même si nous sommes passés à un déficit de 9 milliards d’euros en 2023, contre 22 milliards d’euros l’année précédente.

Cette inflation touche notamment les établissements de santé. Plusieurs d’entre vous m’ont fait part de leurs inquiétudes concernant les hôpitaux de leur département, et toutes les fédérations hospitalières ont eu l’occasion de s’exprimer sur ce sujet.

Comme je l’ai déjà indiqué, je puis vous assurer que le Gouvernement est particulièrement attentif à la situation de ces établissements et qu’il ne les laissera pas dans l’impasse, y compris d’ici à la fin de l’année.

Je m’en suis ouvert très directement auprès de la totalité des fédérations d’établissements de santé, qui tirent la sonnette d’alarme. Grâce à un travail conjoint, le Gouvernement et ces fédérations ont établi une estimation commune des coûts et des effets de l’inflation.

Je le répète, le déficit de la branche maladie s’élève donc cette année à environ 9 milliards d’euros. Bien qu’il soit en baisse par rapport au déficit constaté en 2022, il reste très important, notamment du fait du fort dynamisme des dépenses de santé, en particulier en ville, qui rend urgente la recherche de soutenabilité.

Telle est la condition incontournable de la pérennité de notre modèle social et de son ambition, fondée sur un modèle assurantiel et, partant, sur la solidarité.

Pour répondre à cette double exigence d’ambition et de soutenabilité, le Gouvernement vous propose en premier lieu dans ce projet de loi, mesdames, messieurs les sénateurs, de rectifier l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) pour 2023, à hauteur de 8 milliards d’euros. Cette rectification permet principalement d’intégrer les revalorisations salariales et la dynamique des soins de ville.

Je connais vos préoccupations à ce sujet et je souhaite que nous puissions progressivement refaire de l’Ondam un outil non plus de constatation de la dépense, mais de pilotage. Il nous revient en effet d’améliorer la conduite, le suivi et la maîtrise de la dépense.

Le Gouvernement présente en second lieu un Ondam pour 2024 en hausse de 3, 2 % hors dépenses liées à la crise sanitaire, ce qui, contrairement à ce que j’entends parfois, est bien supérieur à l’inflation prévisionnelle. Les moyens hors covid progresseront donc de 8 milliards d’euros en 2024, un montant équivalant, rappelons-le, à celui du budget du ministère de la justice il y a deux ans.

Une telle progression, en contradiction totale avec le reproche, parfois avancé, selon lequel ce serait un Ondam d’austérité, permet en particulier de compléter de près de 1, 5 milliard d’euros les revalorisations engagées par le Ségur de la santé, afin de mieux reconnaître et de mieux rémunérer de manière pérenne l’engagement des professionnels des établissements sanitaires et médico-sociaux – Aurore Bergé y reviendra –, qui travaillent la nuit, le week-end et les jours fériés.

Le Gouvernement continue ainsi d’investir avec ambition dans l’avenir du système de santé et dans les ressources humaines.

Cette augmentation des moyens doit toutefois être gagée en partie par de nouvelles mesures de maîtrise de la tendance de progression de la dépense publique. L’objectif est de l’ordre de 3, 5 milliards d’euros de maîtrise sur le tendanciel de dépenses. J’estime en effet que le terme d’efficience ne doit pas être tabou.

La ligne de crête, ténue, n’est pas facile à tenir. C’est dire combien est fausse l’idée, exprimée par certains, selon laquelle ce gouvernement laisserait filer les dépenses sans se fixer d’objectif de maîtrise de la dépense publique.

Nous atteindrons cet objectif ambitieux tout d’abord par des efforts de modération des volumes et des baisses des prix des produits de santé, qui permettront de freiner la hausse de ce poste de dépense.

Le Gouvernement présentera notamment un amendement visant à encourager la substitution par les pharmaciens de médicaments biologiques par leurs biosimilaires. De manière générale, je ne doute pas que le débat parlementaire permettra d’enrichir ce texte.

Nous atteindrons cet objectif de maîtrise de la dépense ensuite par les efforts d’efficience et de pertinence qui sont prévus dans ce texte et qui seront au cœur de la négociation conventionnelle – la lettre de cadrage que j’ai adressée au directeur général de la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) le mentionnait très explicitement.

Nous l’atteindrons, enfin, grâce à des efforts de responsabilisation des assurés, notamment par des mesures de régulation des arrêts de travail et une plus forte association des mutuelles, notamment pour les soins dentaires.

La question des franchises et de la participation forfaitaire a déjà été évoquée à l’Assemblée nationale. Nous poursuivrons, ensemble, cette réflexion au Sénat.

Le texte comporte enfin des mesures relatives à la lutte contre la fraude, un enjeu de soutenabilité autant que de justice sociale et un point d’attention prioritaire pour le Sénat – M. Jean-Marie Vanlerenberghe a eu l’occasion de le rappeler avec force lors des travaux de la commission, et Thomas Cazenave y reviendra dans un instant.

Je tiens à souligner que, dans toutes ces démarches, une attention particulière a été portée aux plus fragiles, qui ne doivent pas être pénalisés. C’est notamment pour cela que, en matière d’arrêt de travail, le Gouvernement vous présentera un amendement tendant à apporter des garanties supplémentaires pour les patients atteints d’une affection de longue durée (ALD).

Je veux être très clair : par « responsabilisation », il ne s’agit pas de pointer la responsabilité de tel ou tel, des patients, des médecins ou des entreprises, mais de rappeler que la soutenabilité globale de ce patrimoine inouï qu’est notre système de protection sociale appartient à tous.

Ces efforts ne doivent pas nous empêcher de continuer à faire avancer notre système de santé vers une modernisation indispensable, notamment vers davantage de prévention et un accès facilité aux soins. Sans vouloir être exhaustif dans le cadre de ce propos liminaire, permettez-moi de revenir rapidement sur certains éléments.

Le premier est la modernisation du fonctionnement de notre système de santé, pour améliorer l’accès aux soins et répondre au mieux aux besoins de santé de nos concitoyens.

Moderniser notre système de santé implique tout d’abord de faire évoluer le financement des établissements de santé, pierre angulaire de notre organisation.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale traduit l’ambition fixée par le Président de la République de mettre fin au caractère central de la tarification à l’activité. La réforme proposée mettra ainsi en place une rémunération partiellement structurée selon des objectifs de santé publique négociés à l’échelle des territoires, ce qui permettra de rétribuer de manière effective les missions réalisées par chacun.

Organisée en trois compartiments, la nouvelle tarification se déploiera entre 2024 et 2026, en articulation avec les nouveaux protocoles pluriannuels de financement des établissements de santé auxquels le Gouvernement travaillera avec les acteurs dans le courant de l’année 2024.

J’entends parfois dire que cette évolution n’est pas assez substantielle, mais ceux qui, sans doute nombreux, ont été parmi vous présidents de conseils d’administration ou de conseils de surveillance d’établissement savent ce que représente quelque évolution de la tarification que ce soit.

Moderniser notre système de santé, c’est aussi s’appuyer sur les expérimentations et les initiatives locales. Le texte prévoit ainsi de généraliser certaines expérimentations en créant un forfait qui permettra de financer solidairement des équipes de soins sans être tenu à la rémunération à l’activité.

Ces mesures sont autant d’outils que nous mettons entre les mains des acteurs de santé, qui pourront s’en saisir pour appuyer les solutions les mieux adaptées aux réalités locales.

Je sais combien vous êtes investis, mesdames, messieurs les sénateurs, pour faire vivre ces collectifs dans chacun de vos territoires, y compris et surtout là où la tension en matière de démographie médicale est la plus forte. Je salue à ce titre l’engagement de Mme la rapporteure générale, Élisabeth Doineau, au sein de la commission des affaires sociales, mais aussi dans son territoire, en Mayenne.

Je ne le dirai jamais assez, il faut continuer de faire confiance aux acteurs de terrain et leur donner tous les moyens pour libérer les énergies. C’est à nous, la puissance publique, de nous adapter à la situation, sans forcer les différents acteurs à entrer dans des cases préétablies.

Mes déplacements m’offrent souvent l’occasion de constater combien la réalité est contrastée. Je repense régulièrement à une visite que j’ai effectuée très peu de temps après ma prise de fonction à Lannoy, en Dordogne. Avec la sénatrice Marie-Claude Varaillas, qui m’accompagnait, j’ai pu mesurer combien la compétence conjuguée des différents professionnels de santé pouvait être une très puissante réponse à une situation difficile.

Dans la continuité des travaux menés au Parlement ces dernières années, nous avançons par exemple sur l’extension des compétences des pharmaciens en matière de prescription d’antibiotiques, sur les parcours de prise en charge de la dépression post-partum, ou encore sur l’élargissement à la médecine scolaire des possibilités d’adressage vers le dispositif « Mon soutien psy ».

Le second pilier de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est l’accélération du virage de la prévention, de manière que le tournant pris soit irréversible.

Je le dis souvent, la prévention n’est pas un supplément d’âme. Ce n’est pas ce que l’on fera quand on aura réglé tous les autres problèmes. J’envisage au contraire la rupture, dans les pratiques comme dans les mentalités, avec un système historiquement tourné vers le « tout curatif » comme une transformation absolument essentielle.

J’en suis convaincu, sans une politique de prévention suffisamment exhaustive et développée, aucun pays, quelle que soit la qualité de son système de soins, ne peut durablement faire face aux défis sanitaires et sociaux que sont notamment le vieillissement démographique et le poids croissant des maladies chroniques.

Telle sera notre grande ambition pour les prochaines années. Si celle-ci prend déjà corps grâce aux opérations de dépistage et de santé publique en cours, elle devra s’incarner plus largement dans toutes nos politiques publiques, comme l’ont du reste souligné plusieurs travaux et rapports de votre commission des affaires sociales ces dernières années.

J’estime que le travail d’élaboration du PLFSS pour 2025 devra commencer très rapidement, y compris avec les deux assemblées. On ne peut pas se contenter de lancer une salve de concertations à quelques semaines du PLFSS. Je pense en particulier à plusieurs sujets qui me tiennent à cœur et pour lesquels j’estime que nous ne sommes pas allés jusqu’au bout dans le présent PLFSS, comme la santé des femmes ou la prise en compte des spécificités de l’outre-mer.

La campagne de vaccination contre les infections liées au papillomavirus est un bon exemple. Nous avons lancé une dynamique inédite, mais l’Assemblée nationale nous a légitimement invités à élargir aux établissements accueillant des enfants en situation de handicap, ce que nous ferons.

Nous devrons également étudier, après l’avis de la Haute Autorité de santé (HAS), les modalités d’instauration d’un dépistage précoce systématique des situations de handicap pouvant être induites par la contraction du cytomégalovirus pendant le premier trimestre de la grossesse.

Le texte comporte enfin plusieurs dispositions importantes relatives à l’accès aux médicaments, un sujet auquel je sais le Sénat très attentif et qui, alors que nous entrons dans la période hivernale, constitue un sujet de préoccupation pour nos concitoyens.

En effet, loin de se limiter à des enjeux techniques, la politique du médicament fait partie de ces politiques publiques qui ont une traduction concrète et presque quotidienne dans la vie des Français. La régulation et le financement des produits de santé sont également au croisement des enjeux majeurs d’attractivité, d’innovation et de souveraineté.

C’est pour cela qu’une partie significative de ce projet de loi est consacrée à ces questions, à commencer par la réforme du mode de calcul de la clause de sauvegarde. Celle-ci a de plus été réduite pour 2023 et 2024, afin de donner plus de visibilité aux secteurs en contrepartie d’engagements visant réciproquement à donner plus de visibilité à la puissance publique.

La question de la lutte contre les pénuries fait également l’objet de travaux approfondis.

Ces dernières années, de nombreux acteurs se sont penchés sur cette question, notamment le Sénat, dont je salue très sincèrement le rapport de la commission d’enquête sur la pénurie de médicaments. Les travaux menés par Sonia de La Provôté et Laurence Cohen, avec lesquelles j’ai échangé, m’ont notamment été très précieux dans le cadre de la réunion que j’ai tenue vendredi dernier avec tous les professionnels du secteur.

Le Gouvernement est mobilisé au quotidien pour assurer le suivi des stocks des médicaments les plus cruciaux.

Comme je l’indiquais, j’ai d’ailleurs fait le point avec les professionnels vendredi dernier. Une charte de bonne pratique sera établie sous dix jours, afin de remédier, non plus à une pénurie, comme celle à laquelle nous avons dû fait face l’an dernier, mais à la totale dérégulation entre les différents acteurs industriels – grossistes, répartiteurs et pharmaciens – que nous connaissons actuellement. Les patients et assurés sociaux ne peuvent pas être la variable d’ajustement entre les différents acteurs du secteur du médicament.

Cette charte sera d’ailleurs coordonnée, à ma demande, sous l’égide de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et de la présidente de l’ordre national des pharmaciens, qui a accepté cette mission.

Par ailleurs, pour faire face aux difficultés d’approvisionnement plus structurelles, je présenterai prochainement avec Roland Lescure, ministre chargé de l’industrie, une feuille de route actualisée de lutte contre les pénuries de médicaments.

Sans attendre, le projet de loi de financement de la sécurité sociale complète nos outils de gestion des tensions, notamment par la limitation des prescriptions par téléconsultation lors des situations les plus tendues, ou encore par la dispensation à l’unité, au sujet de laquelle je sais que des questions se posent, mais dont je suis convaincu qu’elle est une partie de la réponse aux difficultés observées.

Les débats nous permettront d’approfondir ce point et de revenir, au-delà de la gestion des situations de tension, sur les dispositions que nous prévoyons pour améliorer structurellement l’accès aux médicaments et aux actes de diagnostic innovants, un sujet qui, je le sais, est cher à nombre d’entre vous, notamment à M. le sénateur Alain Milon.

Le PLFSS instaure par exemple une procédure d’inscription directe des actes de diagnostic innovants, afin de faciliter l’accès au marché et d’en réduire les délais.

Vous le constatez, mesdames, messieurs les sénateurs, nous nous efforçons de répondre par ce texte à des besoins urgents grâce à des mesures d’application directe, tout en préparant et en consolidant l’avenir du système de santé.

Le cadrage général du PLFSS répond à la double exigence d’ambition et de soutenabilité qui doit irriguer l’ensemble de l’action publique. Je crois profondément qu’il constituera un socle solide sur lequel nous pourrons continuer de construire avec réalisme et détermination.

Nous n’allons bien évidemment pas tout régler avec ce texte, et ce n’est en aucun cas ce que je prétends faire.

Les sujets sont vastes et les enjeux immenses : il nous faut par exemple intensifier le combat contre le cancer, continuer de soutenir et de faire prospérer la recherche française, lutter contre la financiarisation du système de santé ou encore renforcer notre politique en matière de santé mentale ou de santé des femmes. Nous y reviendrons, j’en suis sûr, au cours des débats.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - Permalien
Aurore Bergé

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le ministère des solidarités et des familles est au cœur des besoins essentiels de nos concitoyens.

Il les accompagne dans leur désir le plus intime qui soit, celui de fonder une famille, comme dans leurs peurs les plus grandes, s’agissant par exemple du soutien à leurs parents et leurs grands-parents. Il prend en charge le regard que nous posons sur la vulnérabilité dans notre société.

À nos enfants, nous devons permettre l’épanouissement et le développement. Il est de notre responsabilité de renforcer l’accompagnement de toutes les familles, en cohérence avec une conception universelle de la politique familiale que nous partageons, je le sais. Celle-ci ne saurait se limiter à une politique de redistribution ou de correction des inégalités. Elle vise d’abord à appuyer et à soutenir toutes les familles, dans le respect de leurs choix.

À nos parents et grands-parents, nous devons garantir l’autonomie, ce qui pose la question du regard que nous portons sur la vieillesse et de la préparation et de l’adaptation de notre société au vieillissement. Par ce texte, nous faisons grandir la branche autonomie, afin de relever le défi que constitue ce vieillissement.

Aux personnes en situation de handicap – un sujet auquel je vous sais attentif, cher Philippe Mouiller –, nous devons enfin une vie comme les autres, parmi les autres, pour que le droit commun s’applique à eux et à leur famille.

Le retour des familles dans la dénomination même du ministère marque notre détermination à réaffirmer cette priorité politique : aider toutes les familles et nous en donner les moyens.

Cette ambition est d’autant plus essentielle dans le contexte de baisse continue de la natalité que nous connaissons depuis dix ans et qui s’est accru ces deux dernières années. Il nous faut inverser cette tendance en renouant progressivement avec une politique familiale universelle, qui réponde aux besoins de toutes les familles. Je sais que nous partageons cet attachement, chère Élisabeth Doineau.

La branche famille consacre déjà plus de 50 milliards d’euros chaque année à cet objectif. Ces moyens augmenteront de 2 milliards d’euros supplémentaires en 2024, notamment pour mettre en œuvre le chantier du service public de la petite enfance.

Nous le savons, la question du mode de garde est aujourd’hui le premier frein à la réalisation du désir d’enfant au sein des familles. Quelque 6 milliards d’euros seront consacrés à ce service public jusqu’en 2027, pour revaloriser et accompagner nos professionnels de la petite enfance.

À ce titre, je remercie le Sénat, en particulier Mme le rapporteur Pascale Gruny, d’avoir permis que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour le plein emploi ait été conclusive. Il s’agit d’un investissement indispensable si nous voulons créer les 200 000 solutions de garde qui manquent aujourd’hui.

Soutenir toutes les familles, c’est aussi soutenir les mères seules. Le PLFSS intègre des aides monétaires, qui seront revalorisées à hauteur de 4, 6 % en avril prochain, comme l’allocation de soutien familial, c’est-à-dire la pension alimentaire minimale, donc nous avons augmenté de 50 % le montant l’année dernière.

Au total, le budget de la branche famille s’élèvera à 63 milliards d’euros en 2027, soit une augmentation de 20 % par rapport à 2022.

Vous le savez, le complément de libre choix du mode de garde et l’aide à la garde d’enfants feront l’objet d’une double réforme, puisque ces aides seront étendues à toutes les familles monoparentales et qu’elles s’appliqueront jusqu’aux 11 ans révolus de l’enfant. Dès 2025, le reste à charge sera enfin le même pour toutes les familles, qu’elles choisissent de faire garder leur enfant en crèche ou de les confier à une assistante maternelle.

Je m’assurerai que ces moyens soient dépensés effectivement et efficacement, pour garantir la qualité de la prise en charge et la sécurité de nos enfants. Pas un seul des 200 millions d’euros dédiés chaque année à la revalorisation des professionnels de la petite enfance n’ira à des structures qui n’amélioreraient pas les conditions de travail de ces derniers.

Enfin, nous ne pouvons pas nous résigner devant l’écart grandissant entre le désir d’enfant des Français et le nombre d’enfants mis au monde. Le service public de la petite enfance constitue un premier élément de réponse, mais nous devons aller au-delà, en levant les tabous tels que celui de l’infertilité. Aujourd’hui, un couple sur quatre est en effet confronté à la difficulté d’avoir un enfant. Avec le ministre de la santé, je travaille sur cette question.

J’ai par ailleurs annoncé que, dès 2025, nous mettrons en place, en sus des congés maternité et paternité, un nouveau droit à un congé familial mieux rémunéré, afin de garantir à tous les parents qui le souhaitent la possibilité de s’arrêter de travailler, à temps complet ou partiel, pour s’occuper de leur nouveau-né durant les premiers mois de ce dernier.

La question du maintien du congé parental en parallèle de ce nouveau droit se pose. Elle sera tranchée dans le cadre de la concertation avec les organisations syndicales et patronales.

Le ministère des solidarités et des familles prend également en charge les besoins tout au long de la vie. À ce titre, la question de l’autonomie doit plus que jamais être au cœur de nos engagements.

Nous le savons, nous allons faire face à un choc démographique. En 2030, un Français sur trois aura plus de 60 ans, et, pour la première fois dans l’histoire de notre pays, les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 15 ans.

C’est une chance pour notre pays, pour nos familles et pour nos solidarités. C’est une chance pour la participation de tous à la vie citoyenne et collective, mais cela suppose de nous y préparer, et ce dès aujourd’hui.

L’objectif global de dépense qui finance nos établissements pour personnes âgées aussi bien que pour personnes en situation de handicap augmentera de 4 % en 2024, soit davantage que l’inflation anticipée. Cette hausse des moyens traduit nos engagements envers les familles et les professionnels du secteur. Permettez-moi de les rappeler.

Le premier est de répondre aux demandes des personnes directement concernées. Or, nous le savons, la première volonté des personnes âgées est de vieillir chez elles, à leur domicile. C’est la raison pour laquelle nous avons entrepris le virage domiciliaire et que nous déploierons dès janvier 2024 MaPrimeAdapt’, une nouvelle aide financière pour prévenir la perte d’autonomie.

Des moyens sont ensuite consacrés à la poursuite du développement de nouveaux centres de ressources territoriaux, afin de décloisonner les interventions auprès des personnes âgées à domicile et de simplifier leurs démarches.

Ces centres s’inscrivent dans la dynamique du service public départemental de l’autonomie qui doit mettre fin à une forme d’errance, voire de parcours du combattant de nos aînés, des personnes en situation de handicap et de leurs familles.

Il s’agit d’un projet d’humanisation et de simplification de nos services publics. L’appel à manifestation d’intérêt a été publié, en septembre dernier, auprès de l’ensemble des conseils départementaux.

Parmi les réformes structurelles figure celle de l’aide à domicile. Le tarif plancher, fixé à 22 euros en 2022, est passé à 23 euros en 2023 et sera indirectement indexé sur l’inflation en 2024.

La dotation complémentaire, autrement appelée dotation qualité, a été portée à 3 euros.

Nous prévoyons également d’ici à 2030 la création de 25 000 nouvelles places dans les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad).

Enfin, les deux heures supplémentaires dédiées à l’accompagnement et à la lutte contre l’isolement social s’appliqueront à partir de janvier 2024.

Nous irons plus loin, puisque, dès la semaine prochaine, à l’Assemblée nationale, nous reprendrons l’examen de la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France, qui parviendra, je l’espère, dans les meilleurs délais au Sénat. Le texte contient des éléments de réponse concrets, comme la carte professionnelle pour les aides à domicile, le fonds de soutien à la mobilité, les mesures de lutte contre les maltraitances, ainsi que celles qui portent sur le droit de visite des familles en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).

Je souhaite que nous puissions enfin proposer un parcours résidentiel adapté aux besoins de nos concitoyens et, surtout, respectueux de leurs envies et de leurs volontés.

Pour consolider l’offre d’accompagnement des personnes âgées en établissement, des recrutements doivent pallier la pénurie de professionnels. Il faut 50 000 postes supplémentaires en Ehpad et, fidèles à la trajectoire fixée, après avoir ouvert 3 000 postes en 2023, nous doublerons ce nombre à 6 000 postes en 2024.

Bien évidemment, l’enjeu est d’abord de rendre ces postes attractifs. C’est pourquoi j’ai obtenu que les infirmiers et les aides-soignants qui exercent dans les Ehpad publics bénéficient de la même mesure de revalorisation des rémunérations pour le travail de nuit que leurs collègues en établissements publics sanitaires.

Cette revalorisation, qui concerne également le secteur privé non lucratif, est tout simplement une mesure d’égalité et de justice. En effet, il n’y a pas d’un côté le secteur sanitaire, de l’autre le secteur médico-social. Les deux font face aux mêmes difficultés et doivent par conséquent travailler dans les mêmes conditions, sans hiérarchie.

Enfin, je n’ignore rien des difficultés financières que traversent de nombreux Ehpad – pour ne pas dire la quasi-totalité d’entre eux – et de services d’aide à domicile.

Avec l’accord de la Première ministre, nous avons débloqué un premier fonds d’urgence de 100 millions d’euros dès l’été dernier. Surtout, nous avons créé et installé des commissions départementales qui réunissent les créanciers et les financeurs pour établir une cartographie précise de la situation des 7 500 Ehpad de notre pays, en distinguant ce qui relève des difficultés conjoncturelles comme l’inflation, l’augmentation du prix de l’énergie ou la revalorisation des rémunérations, et ce qui s’explique par des difficultés structurelles.

Le PLFSS apporte justement une première réponse structurelle en offrant aux départements qui le souhaitent la possibilité de fusionner les sections soins et dépendance des Ehpad. Si le texte est adopté, cette mesure aux conséquences financières importantes pourra être testée dans les départements pilotes qui auront manifesté leur intérêt.

En effet, j’ai souhaité dès le début de l’élaboration du texte que nous respections le libre choix des départements pour la mise en place des politiques publiques qu’ils mèneront en faveur de l’autonomie.

Je compte également sur la réforme des concours versés par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) aux départements, pour mieux soutenir ces derniers dans leurs efforts et pour rendre plus lisible la politique publique que nous menons en matière d’autonomie.

Comme j’ai eu l’occasion de le souligner la semaine dernière lors des Assises des départements de France, rien ne se décidera sans ou contre les départements. Je crois à l’échelon départemental et à la nécessité de mener des politiques décentralisées, au plus près de nos concitoyens, tout comme je crois à la nécessité de l’équité territoriale.

La réforme des concours que nous souhaitons mener en 2025 avec les départements vise à mettre en place une compensation forte, lisible et attendue, me semble-t-il, à savoir la prise en charge à 50 % de toutes les dépenses nouvelles réalisées par les départements dans le champ de l’autonomie.

Cette ambition que la Première ministre et moi-même avons souhaité défendre se concrétisera dès 2024. C’est du moins l’objet d’un amendement au PLFSS visant à prévoir une enveloppe supplémentaire de 150 millions d’euros, qui s’ajoutera à celle qui est prévue pour la progression des concours historiques.

Nous ciblerons ainsi volontairement l’effort, pour atteindre un taux de compensation de 40 % par département, ce qui permettra de mettre fin à l’iniquité de la situation présente, certains départements bénéficiant d’un taux de compensation de 22 %, alors que, pour d’autres, ce taux dépasse les 40 %. La justice et l’équité territoriale passent aussi par ce type de mesures.

Comme je l’ai indiqué devant votre commission, je souhaite que les moyens nouveaux bénéficient aussi, en priorité, aux départements qui agissent le plus en faveur du bien vieillir.

Les départements ruraux, notamment, sont particulièrement engagés sur la question de l’aide à domicile. L’enveloppe sera donc utilisée également en contrepartie de l’effort déployé pour mettre en œuvre concrètement la dotation qualité dans les services d’accompagnement et d’aide à domicile.

Enfin, ce PLFSS vise à mettre en œuvre les engagements que nous avons pris en ce qui concerne le handicap, notamment lors de la Conférence nationale du handicap (CNH).

Dans ce cadre, le Président de la République a annoncé le déploiement de 50 000 solutions nouvelles pour les personnes en situation de handicap, insistant ainsi volontairement sur la nécessité de mettre en œuvre une multiplicité de solutions.

Il s’agit, en effet, de garantir le droit à la scolarité, y compris en institut médico-éducatif, où il faut faire cesser la pratique des demi-matinées de cours, qui continue parfois d’exister ; il s’agit aussi de garantir le droit à une prise en charge adaptée, notamment dans le cadre de l’aide sociale à l’enfance (ASE), où 20 % des enfants sont en situation de handicap.

Ces 50 000 solutions favoriseront en priorité – c’est en tout cas ce que j’ai voulu – la sortie des 10 000 adultes maintenus dans les établissements pour enfants handicapés au titre de l’amendement dit Creton. Ces adultes ont eux aussi droit à une prise en charge correspondant à leurs besoins et respectant leur dignité. Cela permettra de libérer des places qui devraient être dévolues depuis longtemps à des enfants.

En accord avec les annonces de la CNH, ces solutions supplémentaires seront complétées par le déploiement de facilitateurs, pour encourager l’orientation, donc la sortie, des jeunes entre 15 ans et 20 ans qui se trouvent placés en structure pour enfants.

Une autre mesure clé pour 2025 vise la création d’un service efficace de repérage et d’orientation des situations de handicap chez les tout jeunes enfants, jusqu’à l’âge de 6 ans.

Enfin, nous faciliterons également la vie des personnes en situation de handicap en agissant sur leur pouvoir d’achat. En effet, 60 000 familles déboursent en moyenne plus de 5 000 euros pour acheter un fauteuil adapté à leurs besoins. Le prix de certains modèles spécifiques s’élève bien au-delà de cette somme et peut atteindre plusieurs dizaines de milliers d’euros, de sorte que certains de nos concitoyens en sont réduits à organiser des cagnottes sur internet pour pouvoir les acheter.

Nous supprimerons donc à 100 % le reste à charge lors de l’achat d’un fauteuil. Cette petite révolution contribuera concrètement à changer la vie des familles et permettra à chacun d’accéder au modèle dont il a besoin, quel que soit son niveau de revenu.

Vous le savez, les mesures de progrès que je viens d’évoquer pour accompagner les personnes âgées et les personnes en situation de handicap ne seront possibles que grâce à la création de la cinquième branche relative à l’autonomie et à la part supplémentaire de 0, 15 point, soit un montant de 2, 6 milliards d’euros qui lui sera dévolu à partir de 2024.

Du fait de nos dépenses actuelles, nous consommerons plus de la moitié de ce surplus en 2024. Quant à la trajectoire des dépenses prévues, en augmentation de près de 30 % sur le quinquennat, l’intégralité des crédits restants servira à la couvrir.

La réforme à venir des concours versés par la CNSA et celle de la stratégie d’adaptation de notre société au vieillissement pourront produire des évolutions sur lesquelles nous devrons travailler ensemble.

Le texte que nous vous présentons reprend plusieurs amendements auxquels le Gouvernement a d’ores et déjà donné un avis favorable à l’Assemblée nationale.

Il s’agit notamment de ceux qui tendent à s’inscrire dans le prolongement de la stratégie nationale pour les aidants, afin de mieux accompagner et de mieux soutenir ces derniers. Ils visent par exemple le renouvellement des droits à l’allocation journalière du proche aidant pour chaque personne aidée, parce que chacun peut être amené dans sa vie à aider plusieurs personnes, comme un enfant en situation de handicap et un parent en perte d’autonomie.

Nous prolongerons également en 2024 l’expérimentation du dispositif de relayage au domicile des personnes, en attendant une généralisation dont je sais que vous souhaitez qu’elle arrive rapidement – je le souhaite aussi.

L’examen du PLFSS au Sénat fera naturellement encore évoluer le texte. Vous êtes nombreux à proposer de décaler de quelques mois la date limite de candidature à la fusion des sections, prévue l’année prochaine pour les Ehpad. Je pense que ce délai nous permettra de mieux travailler avec chacun des établissements les modalités précises de cette fusion, afin de leur assurer un choix éclairé. Je serai donc favorable à un amendement en ce sens.

Chère Annick Petrus, je me montrerai également favorable à votre amendement visant à créer une maison territoriale pour les personnes handicapées à Saint-Martin. Votre territoire bénéficiera à travers elle du plein soutien, y compris financier, de l’État et de la CNSA.

Enfin, chère Chantal Deseyne, comme je l’ai annoncé en commission, je suis favorable à la transformation de la fusion des sections en une expérimentation, afin de nous assurer que cette nouvelle modalité fonctionne de manière efficace avant toute mise en place définitive. Tel était, je crois, le sens des échanges que nous avons eus lors de mon audition par la commission des affaires sociales.

Étant donné les enjeux, il est normal de fournir aux départements un rapport d’évaluation précis du dispositif au bout d’un certain nombre d’années et de permettre, si besoin est, un retour en arrière. J’espère que nous n’aurons pas à le faire et je ne crois pas que ce sera le cas, mais tel est le bon esprit dans lequel nous devons travailler, non seulement avec le Sénat, mais aussi avec les départements.

Je serai également attentive à la proposition d’une expérimentation de la fusion des sections dites miroirs, permettant de transférer la responsabilité de la nouvelle section intégralement au département. Je n’ai aucun tabou sur le sujet, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, et nous pourrons en discuter, puisque vous avez déposé des amendements en ce sens.

Je ne doute pas que d’autres sujets de discussion se présenteront, cette semaine, dans le cadre de nos débats, et vous pourrez compter sur moi pour porter une pleine attention à vos propositions.

Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de vous présenter le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, aux côtés d'Aurélien Rousseau et d'Aurore Bergé.

Tout au long de l'élaboration du texte, jusqu'à son examen à l'Assemblée nationale et, aujourd'hui, au Sénat, nous avons eu comme seule boussole de prolonger et d'amplifier l'investissement dans notre système de protection sociale et de santé, tout en cherchant à maîtriser nos dépenses.

Vous le savez, la maîtrise des dépenses, notamment celles de santé, est une condition indispensable pour préserver notre système à court et moyen terme. Nous ne pouvons pas fermer les yeux sur la question financière, car nous risquerions d'hypothéquer notre capacité à faire face aux crises de demain.

Si nous avons réussi à mettre en œuvre le « quoi qu'il en coûte » et à protéger les Français face à la crise sanitaire, c'est parce que nous avions des marges de manœuvre suffisantes pour le faire. Il faut les retrouver.

Cette logique est valable pour la sécurité sociale comme pour les finances publiques dans leur ensemble. Nous avons pour objectif de ramener le déficit public sous la barre des 3 % à horizon de 2027. Nous pouvons revenir à ce niveau, que nous avions atteint avant les crises, puisque le déficit avait diminué à 2, 9 % du PIB en 2017 et à 2, 3 % du PIB en 2018, pour s'établir à 3 % du PIB en 2019. Il faut que l'effort soit partagé entre l'État, les collectivités territoriales et la sécurité sociale.

En parallèle, l'évolution de la démographie et le vieillissement de la population, ainsi que le renchérissement associé au progrès médical, rehaussent constamment et spontanément nos dépenses. Des mesures de maîtrise sont donc absolument nécessaires pour éviter que le système ne dérive.

Pour redresser nos comptes, ce PLFSS prévoit 3, 5 milliards d'euros d'économies dans le champ de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam). Ces économies résident dans un effort partagé, demandé à tous les acteurs.

En premier lieu, les dépenses de médicaments ont augmenté de 4 % par an, en moyenne, au cours des dernières années. Au total, elles ont atteint 35 milliards d'euros en 2022. Des marges d'amélioration sont possibles, notamment en ce qui concerne les antibiotiques, pour lesquels notre consommation est supérieure de 20 % à la moyenne européenne.

Aussi, en 2024, des économies d'un montant de 1, 3 milliard d'euros seront attendues spécifiquement sur les dépenses de médicaments et dispositifs médicaux. Afin d'y parvenir, nous nous assurerons de la baisse des prix de ces produits dans le cadre des négociations entre les industriels et le comité économique des produits de santé, pour une économie de 1 milliard d'euros.

Nous travaillerons également sur la maîtrise des quantités consommées, pour une économie de 300 millions d'euros.

Grâce à ce PLFSS, nous pourrons ainsi activer des mesures d'épargne, dont le conditionnement à l'unité, en cas de risque de pénurie sur les médicaments. Je souhaite que nous progressions encore à l'avenir, pour mettre en place ce conditionnement chaque fois que cela est possible, et pas seulement en période de pénurie.

Quant à l'effort et à la participation des complémentaires et des assurés, ils garantiront 1, 3 milliard d'euros d'économies.

Ces économies ne proviennent pas nécessairement de dispositions législatives. Nous souhaitons continuer de travailler avec tous les acteurs concernés, ainsi qu'avec les parlementaires qui souhaiteront nous aider.

Parmi les mesures déjà décidées figure le recours au transport sanitaire partagé, disposition qui relève du bon sens. Les patients qui n'ont aucune contre-indication médicale se verront proposer un transport collectif dans le cadre de leurs soins. Cela permettra de réduire les dépenses en matière de transport et de contribuer à nos objectifs dans le domaine de la transition écologique.

Nous favoriserons aussi le recours aux médicaments génériques ou biosimilaires chaque fois que cela est possible.

Enfin, concernant l'Ondam, la maîtrise des dépenses au travers de mesures portant sur les soins de ville et l'hôpital permettra une économie à hauteur de 900 millions d'euros. Nous continuerons notamment de diminuer les dépenses sur les tarifs des actes de biologie et d'imagerie médicale, grâce à la réforme de leur financement.

À moyen terme, les amendements adoptés à l'Assemblée nationale, qui ont pour objet la dialyse et la radiothérapie à l'hôpital, permettront de réajuster le financement de ces soins.

Ce travail, qui favorise les économies nécessaires à la soutenabilité de notre système, doit se poursuivre au-delà de ce PLFSS. Je rappelle que la loi de programmation des finances publiques prévoit à partir de 2025 un objectif de 12 milliards d'euros d'économies nouvelles, dont 6 milliards d'euros dans le champ des administrations de sécurité sociale.

Pour l'atteindre, nous nous appuierons sur un nouveau cycle de revues de dépenses, qui visera à évaluer la qualité de l'action publique et à en améliorer l'efficience.

Nous engagerons aussi des réformes structurelles sur certains postes de dépenses. Comme l'a annoncé la Première ministre à l'été dernier, nous lancerons par exemple une concertation sur les indemnités journalières. Je souhaite que ce chantier puisse aboutir en 2025.

Enfin, nous renforcerons nos outils de pilotage de la dépense. En particulier, nous engagerons un travail sur l'Ondam, pour que celui-ci permette de mieux réguler la dépense et de garantir le respect des objectifs fixés chaque année avec les parlementaires dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS).

Au-delà des mesures sur l'assurance maladie, nous favoriserons la maîtrise des dépenses sociales par la lutte contre le chômage et par nos actions en faveur du plein emploi.

Dans ce champ, nous bénéficions des réformes structurelles engagées par le Gouvernement et portées en particulier par Olivier Dussopt. La réforme de l'assurance chômage et celle des retraites permettent de limiter nos dépenses et d'augmenter les recettes des administrations de sécurité sociale.

Cette année, le niveau du taux de chômage est historiquement bas, à 7, 2 %. Depuis 2017, quelque 2 millions d'emplois ont été créés. Pour atteindre le plein emploi et l'objectif d'un taux de chômage à 5 %, nous devons poursuivre dans cette voie. Nous assurerons ainsi la pérennité de notre système.

Le bénéfice de ces réformes doit être préservé. Je sais que les derniers débats sur l'Agirc-Arrco ont beaucoup préoccupé le Sénat. Je me réjouis de le constater, les partenaires sociaux se sont accordés pour discuter du financement des dispositifs de solidarité. Je souhaite que ce dialogue aboutisse, et qu'ils puissent s'engager dans cette voie.

Deux mesures concernant ce régime de retraite complémentaire figurent néanmoins dans le texte, sur lesquelles je souhaite apporter des clarifications.

L'article 8 du PLFSS prévoit de revenir sur le transfert aux Urssaf du recouvrement des cotisations de retraite complémentaire, qui devait avoir lieu en 2024.

Dans un rapport de 2022, la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat avait souligné les risques liés à ce transfert et préconisé son report. Nous l'avons mis en œuvre en 2023 et nous faisons désormais le choix du maintien d'un circuit spécifique. Toutefois, je tiens à le dire, nous demeurons convaincus de la nécessité pour l'Agirc-Arrco et l'Urssaf de travailler ensemble pour faciliter la vie des entreprises.

S'agissant de l'article 9, il prévoit un transfert pour le financement des régimes spéciaux en extinction. En effet, le régime bénéficiera de nombreux nouveaux cotisants sans devoir effectuer de paiements de pensions avant de longues années.

Bien évidemment, la priorité reste donnée à la voie conventionnelle. Le Parlement a examiné des dispositions tout à fait similaires, par deux fois déjà, notamment pour la SNCF dans la LFSS pour 2020, sans les contester. Je comprends que le sujet soit sensible, mais j'espère que vous vous inscrirez dans ces précédents et que vous ne remettrez pas en cause le texte du Gouvernement.

En plus des économies que nous dégageons, nous augmentons aussi les recettes de la sécurité sociale.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à contenir l'augmentation des allègements de charges patronales. Nous avons acté la stabilisation des barèmes à leur niveau de 2023 s'agissant des bornes à 2, 5 Smic et 3, 5 Smic, ce qui évitera une perte de recettes de l'ordre de 600 millions d'euros. Cette mesure ne modifie pas les exonérations déjà perçues par les différents secteurs économiques, ce qui permet de les sécuriser.

Je tiens à saluer le travail de Mme la rapporteure générale, qui, en commission des affaires sociales, a introduit un plancher supplémentaire pour empêcher que plusieurs gels successifs n'aboutissent à des seuils inférieurs ou égaux à 2 Smic. Nous sommes favorables à cette mesure, qui apporte de la visibilité à tous les acteurs, ce qui correspond pleinement à nos objectifs en la matière.

Les économies que je vous présente renforcent donc la pérennité de notre système. Elles nous permettront de continuer d'investir dans ce qui constitue les priorités des Français.

L'Ondam 2023 intègre ainsi l'enveloppe de 100 millions d'euros que la Première ministre avait annoncée, l'été dernier, dans le cadre d'un nouveau fonds d'urgence pour accompagner les Ehpad et les services à domicile rencontrant des difficultés financières.

En 2024, l'Ondam franchira le seuil des 30 milliards d'euros, au bénéfice du grand âge et du handicap. En effet, nous poursuivrons l'évolution du financement des Ehpad dans les départements volontaires.

Nous poursuivrons également la revalorisation des rémunérations des professionnels déjà actée, à l'hôpital comme dans les établissements médico-sociaux. Par exemple, pour les professionnels soignants, nous augmenterons la rémunération du travail de nuit, de manière qu'elle soit supérieure de 25 % à celle du travail de jour. Concrètement, un infirmier en milieu de carrière qui aura travaillé de dix à douze nuits par mois verra sa rémunération mensuelle brute augmenter de 300 euros par rapport à 2022.

Ainsi, les dépenses en faveur de l'hôpital atteindront en 2024 un niveau inédit et dépasseront les 100 milliards d'euros pour la deuxième année consécutive.

Nous avons aussi amélioré le texte grâce aux propositions des députés. Nous étendrons le champ de la vaccination contre le papillomavirus aux jeunes accueillis dans des établissements médico-sociaux et nous généraliserons le dépistage du cytomégalovirus pendant la grossesse.

En outre, comme le rappelait Aurore Bergé, nous avons acté la prise en charge à 100 % des fauteuils roulants et la suppression du délai de carence pour les arrêts de travail qui font suite à une interruption médicale de grossesse. Enfin, nous expérimenterons un nouveau parcours de soins pour les dépressions post-partum.

Au total, l'Ondam 2024 progressera de 3, 2 %, soit un taux supérieur à celui de l'inflation, qui s'établira, quant à lui, à 2, 5 %. Ce sera le cas également dans les prochaines années.

Hors du champ de l'Ondam, je souhaite rappeler que le Gouvernement maintient un système protecteur d'indexation des prestations sur l'inflation, pour un montant supplémentaire de 14 milliards d'euros pour les retraites et de plus de 1 milliard d'euros pour les prestations familiales.

En matière de pensions, le texte adopté à l'Assemblée nationale comporte également une réforme de l'assiette du prélèvement pour les travailleurs indépendants.

Cette mesure aura vocation à leur ouvrir des droits nouveaux pour la retraite, notamment via les complémentaires, tout en étant neutre pour les finances publiques. Je suis heureux que la rédaction de ce dispositif, fruit d'une longue concertation, ait abouti à temps pour figurer dans le texte, de sorte que nous pourrons l'examiner ensemble.

Ce PLFSS acte donc une trajectoire ambitieuse pour notre système de santé et de solidarité. Il s'agit de maîtriser les dépenses tout en investissant. Telle est la position d'équilibre à laquelle nous avons abouti et que nous souhaitons conforter lors de nos travaux.

Toutefois, cet équilibre est menacé par un autre paramètre, à savoir la fraude.

À cet égard, notre objectif de tolérance zéro reste inchangé. Le Gouvernement est résolu à tout mettre en œuvre pour détecter, poursuivre et sanctionner chacune des fraudes.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave

Il s'agit là non seulement d'un impératif financier, mais aussi d'un impératif d'équité et de justice sociale pour l'ensemble des assurés.

Il n'est pas admissible que certains éludent leurs cotisations, perçoivent indûment des prestations, abusent de leur expertise ou, comme nous l'avons vu dans l'actualité récente, facilitent la fraude. Je sais que la commission des affaires sociales et le Sénat tout entier portent avec force ce sujet, au travers de rapports et de propositions de loi qu'illustrent notamment les travaux de Mmes les sénatrices Gruny et Harribey.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de vous présenter le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, aux côtés d’Aurélien Rousseau et d’Aurore Bergé.

Tout au long de l’élaboration du texte, jusqu’à son examen à l’Assemblée nationale et, aujourd’hui, au Sénat, nous avons eu comme seule boussole de prolonger et d’amplifier l’investissement dans notre système de protection sociale et de santé, tout en cherchant à maîtriser nos dépenses.

Vous le savez, la maîtrise des dépenses, notamment celles de santé, est une condition indispensable pour préserver notre système à court et moyen terme. Nous ne pouvons pas fermer les yeux sur la question financière, car nous risquerions d’hypothéquer notre capacité à faire face aux crises de demain.

Si nous avons réussi à mettre en œuvre le « quoi qu’il en coûte » et à protéger les Français face à la crise sanitaire, c’est parce que nous avions des marges de manœuvre suffisantes pour le faire. Il faut les retrouver.

Cette logique est valable pour la sécurité sociale comme pour les finances publiques dans leur ensemble. Nous avons pour objectif de ramener le déficit public sous la barre des 3 % à horizon de 2027. Nous pouvons revenir à ce niveau, que nous avions atteint avant les crises, puisque le déficit avait diminué à 2, 9 % du PIB en 2017 et à 2, 3 % du PIB en 2018, pour s’établir à 3 % du PIB en 2019. Il faut que l’effort soit partagé entre l’État, les collectivités territoriales et la sécurité sociale.

En parallèle, l’évolution de la démographie et le vieillissement de la population, ainsi que le renchérissement associé au progrès médical, rehaussent constamment et spontanément nos dépenses. Des mesures de maîtrise sont donc absolument nécessaires pour éviter que le système ne dérive.

Pour redresser nos comptes, ce PLFSS prévoit 3, 5 milliards d’euros d’économies dans le champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam). Ces économies résident dans un effort partagé, demandé à tous les acteurs.

En premier lieu, les dépenses de médicaments ont augmenté de 4 % par an, en moyenne, au cours des dernières années. Au total, elles ont atteint 35 milliards d’euros en 2022. Des marges d’amélioration sont possibles, notamment en ce qui concerne les antibiotiques, pour lesquels notre consommation est supérieure de 20 % à la moyenne européenne.

Aussi, en 2024, des économies d’un montant de 1, 3 milliard d’euros seront attendues spécifiquement sur les dépenses de médicaments et dispositifs médicaux. Afin d’y parvenir, nous nous assurerons de la baisse des prix de ces produits dans le cadre des négociations entre les industriels et le comité économique des produits de santé, pour une économie de 1 milliard d’euros.

Nous travaillerons également sur la maîtrise des quantités consommées, pour une économie de 300 millions d’euros.

Grâce à ce PLFSS, nous pourrons ainsi activer des mesures d’épargne, dont le conditionnement à l’unité, en cas de risque de pénurie sur les médicaments. Je souhaite que nous progressions encore à l’avenir, pour mettre en place ce conditionnement chaque fois que cela est possible, et pas seulement en période de pénurie.

Quant à l’effort et à la participation des complémentaires et des assurés, ils garantiront 1, 3 milliard d’euros d’économies.

Ces économies ne proviennent pas nécessairement de dispositions législatives. Nous souhaitons continuer de travailler avec tous les acteurs concernés, ainsi qu’avec les parlementaires qui souhaiteront nous aider.

Parmi les mesures déjà décidées figure le recours au transport sanitaire partagé, disposition qui relève du bon sens. Les patients qui n’ont aucune contre-indication médicale se verront proposer un transport collectif dans le cadre de leurs soins. Cela permettra de réduire les dépenses en matière de transport et de contribuer à nos objectifs dans le domaine de la transition écologique.

Nous favoriserons aussi le recours aux médicaments génériques ou biosimilaires chaque fois que cela est possible.

Enfin, concernant l’Ondam, la maîtrise des dépenses au travers de mesures portant sur les soins de ville et l’hôpital permettra une économie à hauteur de 900 millions d’euros. Nous continuerons notamment de diminuer les dépenses sur les tarifs des actes de biologie et d’imagerie médicale, grâce à la réforme de leur financement.

À moyen terme, les amendements adoptés à l’Assemblée nationale, qui ont pour objet la dialyse et la radiothérapie à l’hôpital, permettront de réajuster le financement de ces soins.

Ce travail, qui favorise les économies nécessaires à la soutenabilité de notre système, doit se poursuivre au-delà de ce PLFSS. Je rappelle que la loi de programmation des finances publiques prévoit à partir de 2025 un objectif de 12 milliards d’euros d’économies nouvelles, dont 6 milliards d’euros dans le champ des administrations de sécurité sociale.

Pour l’atteindre, nous nous appuierons sur un nouveau cycle de revues de dépenses, qui visera à évaluer la qualité de l’action publique et à en améliorer l’efficience.

Nous engagerons aussi des réformes structurelles sur certains postes de dépenses. Comme l’a annoncé la Première ministre à l’été dernier, nous lancerons par exemple une concertation sur les indemnités journalières. Je souhaite que ce chantier puisse aboutir en 2025.

Enfin, nous renforcerons nos outils de pilotage de la dépense. En particulier, nous engagerons un travail sur l’Ondam, pour que celui-ci permette de mieux réguler la dépense et de garantir le respect des objectifs fixés chaque année avec les parlementaires dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS).

Au-delà des mesures sur l’assurance maladie, nous favoriserons la maîtrise des dépenses sociales par la lutte contre le chômage et par nos actions en faveur du plein emploi.

Dans ce champ, nous bénéficions des réformes structurelles engagées par le Gouvernement et portées en particulier par Olivier Dussopt. La réforme de l’assurance chômage et celle des retraites permettent de limiter nos dépenses et d’augmenter les recettes des administrations de sécurité sociale.

Cette année, le niveau du taux de chômage est historiquement bas, à 7, 2 %. Depuis 2017, quelque 2 millions d’emplois ont été créés. Pour atteindre le plein emploi et l’objectif d’un taux de chômage à 5 %, nous devons poursuivre dans cette voie. Nous assurerons ainsi la pérennité de notre système.

Le bénéfice de ces réformes doit être préservé. Je sais que les derniers débats sur l’Agirc-Arrco ont beaucoup préoccupé le Sénat. Je me réjouis de le constater, les partenaires sociaux se sont accordés pour discuter du financement des dispositifs de solidarité. Je souhaite que ce dialogue aboutisse, et qu’ils puissent s’engager dans cette voie.

Deux mesures concernant ce régime de retraite complémentaire figurent néanmoins dans le texte, sur lesquelles je souhaite apporter des clarifications.

L’article 8 du PLFSS prévoit de revenir sur le transfert aux Urssaf du recouvrement des cotisations de retraite complémentaire, qui devait avoir lieu en 2024.

Dans un rapport de 2022, la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat avait souligné les risques liés à ce transfert et préconisé son report. Nous l’avons mis en œuvre en 2023 et nous faisons désormais le choix du maintien d’un circuit spécifique. Toutefois, je tiens à le dire, nous demeurons convaincus de la nécessité pour l’Agirc-Arrco et l’Urssaf de travailler ensemble pour faciliter la vie des entreprises.

S’agissant de l’article 9, il prévoit un transfert pour le financement des régimes spéciaux en extinction. En effet, le régime bénéficiera de nombreux nouveaux cotisants sans devoir effectuer de paiements de pensions avant de longues années.

Bien évidemment, la priorité reste donnée à la voie conventionnelle. Le Parlement a examiné des dispositions tout à fait similaires, par deux fois déjà, notamment pour la SNCF dans la LFSS pour 2020, sans les contester. Je comprends que le sujet soit sensible, mais j’espère que vous vous inscrirez dans ces précédents et que vous ne remettrez pas en cause le texte du Gouvernement.

En plus des économies que nous dégageons, nous augmentons aussi les recettes de la sécurité sociale.

L’Assemblée nationale a adopté un amendement visant à contenir l’augmentation des allègements de charges patronales. Nous avons acté la stabilisation des barèmes à leur niveau de 2023 s’agissant des bornes à 2, 5 Smic et 3, 5 Smic, ce qui évitera une perte de recettes de l’ordre de 600 millions d’euros. Cette mesure ne modifie pas les exonérations déjà perçues par les différents secteurs économiques, ce qui permet de les sécuriser.

Je tiens à saluer le travail de Mme la rapporteure générale, qui, en commission des affaires sociales, a introduit un plancher supplémentaire pour empêcher que plusieurs gels successifs n’aboutissent à des seuils inférieurs ou égaux à 2 Smic. Nous sommes favorables à cette mesure, qui apporte de la visibilité à tous les acteurs, ce qui correspond pleinement à nos objectifs en la matière.

Les économies que je vous présente renforcent donc la pérennité de notre système. Elles nous permettront de continuer d’investir dans ce qui constitue les priorités des Français.

L’Ondam 2023 intègre ainsi l’enveloppe de 100 millions d’euros que la Première ministre avait annoncée, l’été dernier, dans le cadre d’un nouveau fonds d’urgence pour accompagner les Ehpad et les services à domicile rencontrant des difficultés financières.

En 2024, l’Ondam franchira le seuil des 30 milliards d’euros, au bénéfice du grand âge et du handicap. En effet, nous poursuivrons l’évolution du financement des Ehpad dans les départements volontaires.

Nous poursuivrons également la revalorisation des rémunérations des professionnels déjà actée, à l’hôpital comme dans les établissements médico-sociaux. Par exemple, pour les professionnels soignants, nous augmenterons la rémunération du travail de nuit, de manière qu’elle soit supérieure de 25 % à celle du travail de jour. Concrètement, un infirmier en milieu de carrière qui aura travaillé de dix à douze nuits par mois verra sa rémunération mensuelle brute augmenter de 300 euros par rapport à 2022.

Ainsi, les dépenses en faveur de l’hôpital atteindront en 2024 un niveau inédit et dépasseront les 100 milliards d’euros pour la deuxième année consécutive.

Nous avons aussi amélioré le texte grâce aux propositions des députés. Nous étendrons le champ de la vaccination contre le papillomavirus aux jeunes accueillis dans des établissements médico-sociaux et nous généraliserons le dépistage du cytomégalovirus pendant la grossesse.

En outre, comme le rappelait Aurore Bergé, nous avons acté la prise en charge à 100 % des fauteuils roulants et la suppression du délai de carence pour les arrêts de travail qui font suite à une interruption médicale de grossesse. Enfin, nous expérimenterons un nouveau parcours de soins pour les dépressions post-partum.

Au total, l’Ondam 2024 progressera de 3, 2 %, soit un taux supérieur à celui de l’inflation, qui s’établira, quant à lui, à 2, 5 %. Ce sera le cas également dans les prochaines années.

Hors du champ de l’Ondam, je souhaite rappeler que le Gouvernement maintient un système protecteur d’indexation des prestations sur l’inflation, pour un montant supplémentaire de 14 milliards d’euros pour les retraites et de plus de 1 milliard d’euros pour les prestations familiales.

En matière de pensions, le texte adopté à l’Assemblée nationale comporte également une réforme de l’assiette du prélèvement pour les travailleurs indépendants.

Cette mesure aura vocation à leur ouvrir des droits nouveaux pour la retraite, notamment via les complémentaires, tout en étant neutre pour les finances publiques. Je suis heureux que la rédaction de ce dispositif, fruit d’une longue concertation, ait abouti à temps pour figurer dans le texte, de sorte que nous pourrons l’examiner ensemble.

Ce PLFSS acte donc une trajectoire ambitieuse pour notre système de santé et de solidarité. Il s’agit de maîtriser les dépenses tout en investissant. Telle est la position d’équilibre à laquelle nous avons abouti et que nous souhaitons conforter lors de nos travaux.

Toutefois, cet équilibre est menacé par un autre paramètre, à savoir la fraude.

À cet égard, notre objectif de tolérance zéro reste inchangé. Le Gouvernement est résolu à tout mettre en œuvre pour détecter, poursuivre et sanctionner chacune des fraudes.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de vous présenter le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, aux côtés d’Aurélien Rousseau et d’Aurore Bergé.

Tout au long de l’élaboration du texte, jusqu’à son examen à l’Assemblée nationale et, aujourd’hui, au Sénat, nous avons eu comme seule boussole de prolonger et d’amplifier l’investissement dans notre système de protection sociale et de santé, tout en cherchant à maîtriser nos dépenses.

Vous le savez, la maîtrise des dépenses, notamment celles de santé, est une condition indispensable pour préserver notre système à court et moyen terme. Nous ne pouvons pas fermer les yeux sur la question financière, car nous risquerions d’hypothéquer notre capacité à faire face aux crises de demain.

Si nous avons réussi à mettre en œuvre le « quoi qu’il en coûte » et à protéger les Français face à la crise sanitaire, c’est parce que nous avions des marges de manœuvre suffisantes pour le faire. Il faut les retrouver.

Cette logique est valable pour la sécurité sociale comme pour les finances publiques dans leur ensemble. Nous avons pour objectif de ramener le déficit public sous la barre des 3 % à horizon de 2027. Nous pouvons revenir à ce niveau, que nous avions atteint avant les crises, puisque le déficit avait diminué à 2, 9 % du PIB en 2017 et à 2, 3 % du PIB en 2018, pour s’établir à 3 % du PIB en 2019. Il faut que l’effort soit partagé entre l’État, les collectivités territoriales et la sécurité sociale.

En parallèle, l’évolution de la démographie et le vieillissement de la population, ainsi que le renchérissement associé au progrès médical, rehaussent constamment et spontanément nos dépenses. Des mesures de maîtrise sont donc absolument nécessaires pour éviter que le système ne dérive.

Pour redresser nos comptes, ce PLFSS prévoit 3, 5 milliards d’euros d’économies dans le champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam). Ces économies résident dans un effort partagé, demandé à tous les acteurs.

En premier lieu, les dépenses de médicaments ont augmenté de 4 % par an, en moyenne, au cours des dernières années. Au total, elles ont atteint 35 milliards d’euros en 2022. Des marges d’amélioration sont possibles, notamment en ce qui concerne les antibiotiques, pour lesquels notre consommation est supérieure de 20 % à la moyenne européenne.

Aussi, en 2024, des économies d’un montant de 1, 3 milliard d’euros seront attendues spécifiquement sur les dépenses de médicaments et dispositifs médicaux. Afin d’y parvenir, nous nous assurerons de la baisse des prix de ces produits dans le cadre des négociations entre les industriels et le comité économique des produits de santé, pour une économie de 1 milliard d’euros.

Nous travaillerons également sur la maîtrise des quantités consommées, pour une économie de 300 millions d’euros.

Grâce à ce PLFSS, nous pourrons ainsi activer des mesures d’épargne, dont le conditionnement à l’unité, en cas de risque de pénurie sur les médicaments. Je souhaite que nous progressions encore à l’avenir, pour mettre en place ce conditionnement chaque fois que cela est possible, et pas seulement en période de pénurie.

Quant à l’effort et à la participation des complémentaires et des assurés, ils garantiront 1, 3 milliard d’euros d’économies.

Ces économies ne proviennent pas nécessairement de dispositions législatives. Nous souhaitons continuer de travailler avec tous les acteurs concernés, ainsi qu’avec les parlementaires qui souhaiteront nous aider.

Parmi les mesures déjà décidées figure le recours au transport sanitaire partagé, disposition qui relève du bon sens. Les patients qui n’ont aucune contre-indication médicale se verront proposer un transport collectif dans le cadre de leurs soins. Cela permettra de réduire les dépenses en matière de transport et de contribuer à nos objectifs dans le domaine de la transition écologique.

Nous favoriserons aussi le recours aux médicaments génériques ou biosimilaires chaque fois que cela est possible.

Enfin, concernant l’Ondam, la maîtrise des dépenses au travers de mesures portant sur les soins de ville et l’hôpital permettra une économie à hauteur de 900 millions d’euros. Nous continuerons notamment de diminuer les dépenses sur les tarifs des actes de biologie et d’imagerie médicale, grâce à la réforme de leur financement.

À moyen terme, les amendements adoptés à l’Assemblée nationale, qui ont pour objet la dialyse et la radiothérapie à l’hôpital, permettront de réajuster le financement de ces soins.

Ce travail, qui favorise les économies nécessaires à la soutenabilité de notre système, doit se poursuivre au-delà de ce PLFSS. Je rappelle que la loi de programmation des finances publiques prévoit à partir de 2025 un objectif de 12 milliards d’euros d’économies nouvelles, dont 6 milliards d’euros dans le champ des administrations de sécurité sociale.

Pour l’atteindre, nous nous appuierons sur un nouveau cycle de revues de dépenses, qui visera à évaluer la qualité de l’action publique et à en améliorer l’efficience.

Nous engagerons aussi des réformes structurelles sur certains postes de dépenses. Comme l’a annoncé la Première ministre à l’été dernier, nous lancerons par exemple une concertation sur les indemnités journalières. Je souhaite que ce chantier puisse aboutir en 2025.

Enfin, nous renforcerons nos outils de pilotage de la dépense. En particulier, nous engagerons un travail sur l’Ondam, pour que celui-ci permette de mieux réguler la dépense et de garantir le respect des objectifs fixés chaque année avec les parlementaires dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS).

Au-delà des mesures sur l’assurance maladie, nous favoriserons la maîtrise des dépenses sociales par la lutte contre le chômage et par nos actions en faveur du plein emploi.

Dans ce champ, nous bénéficions des réformes structurelles engagées par le Gouvernement et portées en particulier par Olivier Dussopt. La réforme de l’assurance chômage et celle des retraites permettent de limiter nos dépenses et d’augmenter les recettes des administrations de sécurité sociale.

Cette année, le niveau du taux de chômage est historiquement bas, à 7, 2 %. Depuis 2017, quelque 2 millions d’emplois ont été créés. Pour atteindre le plein emploi et l’objectif d’un taux de chômage à 5 %, nous devons poursuivre dans cette voie. Nous assurerons ainsi la pérennité de notre système.

Le bénéfice de ces réformes doit être préservé. Je sais que les derniers débats sur l’Agirc-Arrco ont beaucoup préoccupé le Sénat. Je me réjouis de le constater, les partenaires sociaux se sont accordés pour discuter du financement des dispositifs de solidarité. Je souhaite que ce dialogue aboutisse, et qu’ils puissent s’engager dans cette voie.

Deux mesures concernant ce régime de retraite complémentaire figurent néanmoins dans le texte, sur lesquelles je souhaite apporter des clarifications.

L’article 8 du PLFSS prévoit de revenir sur le transfert aux Urssaf du recouvrement des cotisations de retraite complémentaire, qui devait avoir lieu en 2024.

Dans un rapport d’information de 2022, la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat avait souligné les risques liés à ce transfert et préconisé son report. Nous l’avons mis en œuvre en 2023 et nous faisons désormais le choix du maintien d’un circuit spécifique. Toutefois, je tiens à le dire, nous demeurons convaincus de la nécessité pour l’Agirc-Arrco et l’Urssaf de travailler ensemble pour faciliter la vie des entreprises.

S’agissant de l’article 9, il prévoit un transfert pour le financement des régimes spéciaux en extinction. En effet, le régime bénéficiera de nombreux nouveaux cotisants sans devoir effectuer de paiements de pensions avant de longues années.

Bien évidemment, la priorité reste donnée à la voie conventionnelle. Le Parlement a examiné des dispositions tout à fait similaires, par deux fois déjà, notamment pour la SNCF dans la LFSS pour 2020, sans les contester. Je comprends que le sujet soit sensible, mais j’espère que vous vous inscrirez dans ces précédents et que vous ne remettrez pas en cause le texte du Gouvernement.

En plus des économies que nous dégageons, nous augmentons aussi les recettes de la sécurité sociale.

L’Assemblée nationale a adopté un amendement visant à contenir l’augmentation des allégements de charges patronales. Nous avons acté la stabilisation des barèmes à leur niveau de 2023 s’agissant des bornes à 2, 5 Smic et 3, 5 Smic, ce qui évitera une perte de recettes de l’ordre de 600 millions d’euros. Cette mesure ne modifie pas les exonérations déjà perçues par les différents secteurs économiques, ce qui permet de les sécuriser.

Je tiens à saluer le travail de Mme la rapporteure générale, qui, en commission des affaires sociales, a introduit un plancher supplémentaire pour empêcher que plusieurs gels successifs n’aboutissent à des seuils inférieurs ou égaux à 2 Smic. Nous sommes favorables à cette mesure, qui apporte de la visibilité à tous les acteurs, ce qui correspond pleinement à nos objectifs en la matière.

Les économies que je vous présente renforcent donc la pérennité de notre système. Elles nous permettront de continuer d’investir dans ce qui constitue les priorités des Français.

L’Ondam 2023 intègre ainsi l’enveloppe de 100 millions d’euros que la Première ministre avait annoncée, l’été dernier, dans le cadre d’un nouveau fonds d’urgence pour accompagner les Ehpad et les services à domicile rencontrant des difficultés financières.

En 2024, l’Ondam franchira le seuil des 30 milliards d’euros, au bénéfice du grand âge et du handicap. En effet, nous poursuivrons l’évolution du financement des Ehpad dans les départements volontaires.

Nous poursuivrons également la revalorisation des rémunérations des professionnels déjà actée, à l’hôpital comme dans les établissements médico-sociaux. Par exemple, pour les professionnels soignants, nous augmenterons la rémunération du travail de nuit, de manière qu’elle soit supérieure de 25 % à celle du travail de jour. Concrètement, un infirmier en milieu de carrière qui aura travaillé de dix à douze nuits par mois verra sa rémunération mensuelle brute augmenter de 300 euros par rapport à 2022.

Ainsi, les dépenses en faveur de l’hôpital atteindront en 2024 un niveau inédit et dépasseront les 100 milliards d’euros pour la deuxième année consécutive.

Nous avons aussi amélioré le texte grâce aux propositions des députés. Nous étendrons le champ de la vaccination contre le papillomavirus aux jeunes accueillis dans des établissements médico-sociaux et nous généraliserons le dépistage du cytomégalovirus pendant la grossesse.

En outre, comme le rappelait Aurore Bergé, nous avons acté la prise en charge à 100 % des fauteuils roulants et la suppression du délai de carence pour les arrêts de travail qui font suite à une interruption médicale de grossesse. Enfin, nous expérimenterons un nouveau parcours de soins pour les dépressions post-partum.

Au total, l’Ondam 2024 progressera de 3, 2 %, soit un taux supérieur à celui de l’inflation, qui s’établira, quant à lui, à 2, 5 %. Ce sera le cas également dans les prochaines années.

Hors du champ de l’Ondam, je souhaite rappeler que le Gouvernement maintient un système protecteur d’indexation des prestations sur l’inflation, pour un montant supplémentaire de 14 milliards d’euros pour les retraites et de plus de 1 milliard d’euros pour les prestations familiales.

En matière de pensions, le texte adopté à l’Assemblée nationale comporte également une réforme de l’assiette du prélèvement pour les travailleurs indépendants.

Cette mesure aura vocation à leur ouvrir des droits nouveaux pour la retraite, notamment via les complémentaires, tout en étant neutre pour les finances publiques. Je suis heureux que la rédaction de ce dispositif, fruit d’une longue concertation, ait abouti à temps pour figurer dans le texte, de sorte que nous pourrons l’examiner ensemble.

Ce PLFSS acte donc une trajectoire ambitieuse pour notre système de santé et de solidarité. Il s’agit de maîtriser les dépenses tout en investissant. Telle est la position d’équilibre à laquelle nous avons abouti et que nous souhaitons conforter lors de nos travaux.

Toutefois, cet équilibre est menacé par un autre paramètre, à savoir la fraude.

À cet égard, notre objectif de tolérance zéro reste inchangé. Le Gouvernement est résolu à tout mettre en œuvre pour détecter, poursuivre et sanctionner chacune des fraudes.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave

Ce PLFSS renforce donc notre arsenal de lutte contre la fraude. Nous sécurisons le circuit de paiement des cotisations des travailleurs des plateformes, en garantissant non seulement le paiement, mais aussi l'acquisition de nouveaux droits sociaux pour ces travailleurs.

Nous renforçons les sanctions contre les professionnels de santé fraudeurs. Ces professionnels devront rembourser les cotisations prises en charge par l'assurance maladie. Sur un montant de fraudes détectées de 316 millions d'euros en 2022, quelque 68 % sont le fait de professionnels de santé.

Un amendement adopté à l'Assemblée nationale vise à préciser que les informations sur les professionnels de santé fraudeurs seront transmises aux ordres professionnels.

Nous sécurisons le dispositif d'avance immédiate au crédit d'impôt sur les services à la personne, car, s'il simplifie l'accès à ces services, l'expérience a montré qu'il était aussi à l'origine de nouveaux schémas de fraude. Des discussions avec les acteurs sont encore en cours pour faire évoluer le dispositif dans les prochaines semaines, afin de trouver le bon équilibre entre la prévention efficace de la fraude et le soutien à ce dispositif qui rend service à plus de 800 000 Français.

Nous simplifions le circuit de contrôle des arrêts maladie et le rendons plus effectif, tout en préservant les droits des assurés. Un amendement a d'ailleurs été déposé qui vise à prévoir un schéma spécifique pour les assurés en affection de longue durée.

La lutte contre la fraude doit également permettre de traduire en justice et de sanctionner ceux qui en font la promotion ou qui mettent des outils de fraude à disposition. Nous créons donc un délit de facilitation de la fraude, assorti d'une peine de trois ans d'emprisonnement et de 250 000 euros d'amende. Lorsque les faits sont commis en ligne, les peines sont aggravées.

Nous proposerons également un amendement pour augmenter les peines lorsque les faits sont commis en bande organisée. Nous avons la même ambition en matière de fraude sociale et de fraude fiscale.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave

Il s’agit là non seulement d’un impératif financier, mais aussi d’un impératif d’équité et de justice sociale pour l’ensemble des assurés.

Il n’est pas admissible que certains éludent leurs cotisations, perçoivent indûment des prestations, abusent de leur expertise ou, comme nous l’avons vu dans l’actualité récente, facilitent la fraude. Je sais que la commission des affaires sociales et le Sénat tout entier portent avec force ce sujet, au travers de rapports et de propositions de loi qu’illustrent notamment les travaux de Mmes les sénatrices Gruny et Harribey.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave

Ce PLFSS s'inscrit ainsi dans la mise en œuvre du plan de lutte contre toutes les fraudes, par ailleurs doté de moyens humains renforcés. Au total, 1 000 agents supplémentaires participeront à la lutte contre la fraude au sein des caisses de sécurité sociale d'ici à 2027.

Enfin, pour mieux combattre ces fraudes, nous devons mieux les connaître. C'est pourquoi j'ai lancé, au mois d'octobre dernier, le conseil d'évaluation de la fraude, auquel participent plusieurs parlementaires. Il travaillera à mieux évaluer les fraudes dans le champ de l'assurance maladie et à affiner l'évaluation de la fraude aux cotisations.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale est donc un texte que caractérisent le sérieux et l'esprit de responsabilité. Nous continuons d'investir massivement dans notre système de santé et de solidarité. Nous amorçons une stratégie de maîtrise des dépenses, afin de retrouver les marges de manœuvre nécessaires pour faire face aux crises.

Enfin, nous pérennisons un système qui ne saurait tolérer d'être mis à mal par la fraude.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave

Ce PLFSS renforce donc notre arsenal de lutte contre la fraude. Nous sécurisons le circuit de paiement des cotisations des travailleurs des plateformes, en garantissant non seulement le paiement, mais aussi l’acquisition de nouveaux droits sociaux pour ces travailleurs.

Nous renforçons les sanctions contre les professionnels de santé fraudeurs. Ces professionnels devront rembourser les cotisations prises en charge par l’assurance maladie. Sur un montant de fraudes détectées de 316 millions d’euros en 2022, quelque 68 % sont le fait de professionnels de santé.

Un amendement adopté à l’Assemblée nationale vise à préciser que les informations sur les professionnels de santé fraudeurs seront transmises aux ordres professionnels.

Nous sécurisons le dispositif d’avance immédiate au crédit d’impôt sur les services à la personne, car, s’il simplifie l’accès à ces services, l’expérience a montré qu’il était aussi à l’origine de nouveaux schémas de fraude. Des discussions avec les acteurs sont encore en cours pour faire évoluer le dispositif dans les prochaines semaines, afin de trouver le bon équilibre entre la prévention efficace de la fraude et le soutien à ce dispositif qui rend service à plus de 800 000 Français.

Nous simplifions le circuit de contrôle des arrêts maladie et le rendons plus effectif, tout en préservant les droits des assurés. Un amendement a d’ailleurs été déposé qui vise à prévoir un schéma spécifique pour les assurés en affection de longue durée.

La lutte contre la fraude doit également permettre de traduire en justice et de sanctionner ceux qui en font la promotion ou qui mettent des outils de fraude à disposition. Nous créons donc un délit de facilitation de la fraude, assorti d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 250 000 euros d’amende. Lorsque les faits sont commis en ligne, les peines sont aggravées.

Nous proposerons également un amendement pour augmenter les peines lorsque les faits sont commis en bande organisée. Nous avons la même ambition en matière de fraude sociale et de fraude fiscale.

Applaudissements s ur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave

Ce PLFSS s’inscrit ainsi dans la mise en œuvre du plan de lutte contre toutes les fraudes, par ailleurs doté de moyens humains renforcés. Au total, 1 000 agents supplémentaires participeront à la lutte contre la fraude au sein des caisses de sécurité sociale d’ici à 2027.

Enfin, pour mieux combattre ces fraudes, nous devons mieux les connaître. C’est pourquoi j’ai lancé, au mois d’octobre dernier, le conseil d’évaluation de la fraude, auquel participent plusieurs parlementaires. Il travaillera à mieux évaluer les fraudes dans le champ de l’assurance maladie et à affiner l’évaluation de la fraude aux cotisations.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale est donc un texte que caractérisent le sérieux et l’esprit de responsabilité. Nous continuons d’investir massivement dans notre système de santé et de solidarité. Nous amorçons une stratégie de maîtrise des dépenses, afin de retrouver les marges de manœuvre nécessaires pour faire face aux crises.

Enfin, nous pérennisons un système qui ne saurait tolérer d’être mis à mal par la fraude.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des finances, mes chers collègues, nous nous apprêtons à examiner le deuxième projet de loi de financement de la sécurité sociale de la législature. Or, les conditions de cet examen sont étonnamment proches de celles d'il y a un an.

Tout d'abord, comme l'année dernière, dans le cadre de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a été conduit à recourir à l'article 49, alinéa 3, de la Constitution pour faire adopter les deux parties relatives à l'exercice suivant.

Ensuite, comme l'année dernière, pour ne pas prolonger excessivement la durée d'examen du texte à l'Assemblée nationale, le Gouvernement n'a pas engagé sa responsabilité sur les autres dispositions du texte. Celui-ci nous arrive donc, cette fois encore, en étant dépourvu de certaines dispositions pourtant obligatoires, dont l'absence pourrait entraîner la censure de l'ensemble.

L'année dernière, il manquait le tableau d'équilibre rectifié et l'Ondam rectifié pour l'exercice en cours. Il en va de même cette année, mais il manque en outre l'article liminaire, relatif à l'ensemble des administrations de sécurité sociale.

Le Sénat fera, bien évidemment, preuve de responsabilité, et, comme l'année dernière, il rétablira les dispositions obligatoires manquantes.

Le PLFSS pour 2024 nous arrive donc tronqué. Surtout, le débat parlementaire lui-même a jusqu'à présent été tronqué.

Au vu des enjeux financiers et politiques très importants des projets de loi de financement de la sécurité sociale – madame, messieurs les ministres, vous venez de les rappeler –, nous avons la responsabilité de faire vivre au Sénat des débats complets sur le PLFSS pour 2024. Soyez sûrs que ces débats seront à l'image de la Haute Assemblée, c'est-à-dire non seulement sérieux et respectueux, mais aussi exigeants, et parfois en contradiction avec votre approche.

Un autre point commun avec la situation d'il y a un an est que, paradoxalement, l'examen du PLFSS pour 2024 coïncide, cette fois encore, avec celui d'un projet de loi de programmation des finances publiques.

En effet, le projet de loi de programmation des finances publiques, rejeté par l'Assemblée nationale et adopté, profondément modifié, par le Sénat, à l'automne de l'année dernière, nous est revenu de l'Assemblée nationale cet automne, le Gouvernement ayant cette fois-ci eu recours à l'article 49.3 de la Constitution. Le Sénat a adopté le texte en nouvelle lecture le 16 octobre dernier.

Des dispositions essentielles du PLFSS 2024 sont donc la déclinaison de mesures figurant dans le projet de loi de programmation des finances publiques. C'est le cas de celles qui visent à fixer jusqu'en 2027 le montant annuel des dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ou bien de celles qui sont relatives à l'Ondam.

La situation a toutefois évolué depuis le 16 octobre. Par exemple, compte tenu des perspectives d'exécution de 2023, l'Ondam pour 2024 peut désormais sembler optimiste, raison pour laquelle, mes chers collègues, nous vous proposerons de supprimer l'article 43.

(À suivre)

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des finances, mes chers collègues, nous nous apprêtons à examiner le deuxième projet de loi de financement de la sécurité sociale de la législature. Or, les conditions de cet examen sont étonnamment proches de celles d'il y a un an.

Tout d'abord, comme l'année dernière, dans le cadre de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a été conduit à recourir à l'article 49, alinéa 3, de la Constitution pour faire adopter les deux parties relatives à l'exercice suivant.

Ensuite, comme l'année dernière, pour ne pas prolonger excessivement la durée d'examen du texte à l'Assemblée nationale, le Gouvernement n'a pas engagé sa responsabilité sur les autres dispositions du texte. Celui-ci nous arrive donc, cette fois encore, en étant dépourvu de certaines dispositions pourtant obligatoires, dont l'absence pourrait entraîner la censure de l'ensemble.

L'année dernière, il manquait le tableau d'équilibre rectifié et l'Ondam rectifié pour l'exercice en cours. Il en va de même cette année, mais il manque en outre l'article liminaire, relatif à l'ensemble des administrations de sécurité sociale.

Le Sénat fera, bien évidemment, preuve de responsabilité, et, comme l'année dernière, il rétablira les dispositions obligatoires manquantes.

Le PLFSS pour 2024 nous arrive donc tronqué. Surtout, le débat parlementaire lui-même a jusqu'à présent été tronqué.

Au vu des enjeux financiers et politiques très importants des projets de loi de financement de la sécurité sociale – madame, messieurs les ministres, vous venez de les rappeler –, nous avons la responsabilité de faire vivre au Sénat des débats complets sur le PLFSS pour 2024. Soyez sûrs que ces débats seront à l'image de la Haute Assemblée, c'est-à-dire non seulement sérieux et respectueux, mais aussi exigeants, et parfois en contradiction avec votre approche.

Un autre point commun avec la situation d'il y a un an est que, paradoxalement, l'examen du PLFSS pour 2024 coïncide, cette fois encore, avec celui d'un projet de loi de programmation des finances publiques.

En effet, le projet de loi de programmation des finances publiques, rejeté par l'Assemblée nationale et adopté, profondément modifié, par le Sénat, à l'automne de l'année dernière, nous est revenu de l'Assemblée nationale cet automne, le Gouvernement ayant cette fois-ci eu recours à l'article 49.3 de la Constitution. Le Sénat a adopté le texte en nouvelle lecture le 16 octobre dernier.

Des dispositions essentielles du PLFSS 2024 sont donc la déclinaison de mesures figurant dans le projet de loi de programmation des finances publiques. C'est le cas de celles qui visent à fixer jusqu'en 2027 le montant annuel des dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ou bien de celles qui sont relatives à l'Ondam.

La situation a toutefois évolué depuis le 16 octobre. Par exemple, compte tenu des perspectives d'exécution de 2023, l'Ondam pour 2024 peut désormais sembler optimiste, raison pour laquelle, mes chers collègues, nous vous proposerons de supprimer l'article 43.

Ces similitudes institutionnelles avec la situation d'il y a un an ne doivent pas masquer deux profondes évolutions, qui font de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale un texte de rupture.

La première rupture est celle de l'abandon affiché, non seulement de l'objectif de retour de la sécurité sociale à l'équilibre, mais aussi du simple objectif de stabilisation du déficit.

Ce dernier a atteint 40 milliards d'euros en 2020 du fait de la crise sanitaire, ce qui était inévitable et parfaitement normal, puisque la France a connu sa pire récession économique depuis la Seconde Guerre mondiale et a, de surcroît, dû assumer le coût direct de la crise sanitaire – vous l'avez rappelé, monsieur le ministre.

On peut aussi considérer que, pour l'essentiel, le point de départ de 8, 8 milliards d'euros en 2023 est normal. En effet, le produit intérieur brut de la France a été réduit de manière durable, voire pérenne, par la crise, ce qui explique l'essentiel de ce déficit.

Ce qui est sans doute moins normal, c'est qu'à partir de ce point de départ de 8, 8 milliards d'euros, la situation se dégrade fortement : l'augmentation du déficit se poursuivrait pour atteindre 17, 5 milliards d'euros en 2027. C'est une différence majeure par rapport à la situation qu'a connue notre pays dans les années 2010 : après la crise des dettes souveraines, le solde des comptes de la sécurité sociale est passé d'un déficit de plus de 25 milliards d'euros au quasi-équilibre qui prévalait avant la survenue de la crise sanitaire.

Il y a là comme un aveu d'impuissance, l'idée assumée que l'on transmet notre dette sociale aux générations futures.

Schématiquement, la branche maladie, actuellement déficitaire d'environ 10 milliards d'euros, le resterait jusqu'en 2027. La branche vieillesse verrait, quant à elle, son déficit exploser : il passerait de 2 milliards d'euros en 2023 à 14 milliards d'euros en 2027.

Évidemment, il ne faut pas se tromper sur le sens à donner à ces chiffres concernant les retraites. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, qui supposait déjà dans sa programmation un report de l'âge légal de la retraite, prévoyait un déficit de la branche vieillesse de 15, 7 milliards d'euros en 2026, déficit ramené à 14, 2 milliards d'euros par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 qui a réformé les retraites, ce qui n'est pas significativement différent des 14 milliards d'euros de déficit actuellement prévus pour 2027.

Cette augmentation du déficit de la branche vieillesse n'est donc pas une nouveauté : elle était prévue lors de la récente réforme des retraites qui, selon le Gouvernement, permettra de réduire le déficit à 6, 3 milliards d'euros en 2027.

Ce qui est nouveau en revanche, c'est que, contrairement à ce que les précédentes lois de financement de la sécurité sociale prévoyaient, on n'escompte plus d'amélioration du solde de la branche maladie. Le Gouvernement assume de financer durablement la santé par le déficit. Voilà ce qui est véritablement contestable dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La seconde rupture tient à ce que l'on assiste en 2023 à une déconnexion historique entre le déficit de 8, 8 milliards d'euros de la sécurité sociale et l'excédent – je dis bien l'excédent, pas le déficit ! – de l'ensemble des administrations de sécurité sociale, qui comprennent, en plus de la sécurité sociale, des entités comme la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades), l'Unédic ou les régimes complémentaires de retraite.

Ces administrations de sécurité sociale, dont le périmètre est donc nettement plus vaste que celui de la sécurité sociale, seraient très largement excédentaires cette année, ce qui est nouveau – un tel excédent est apparu l'année dernière seulement.

Le Gouvernement suppose que ce phénomène historiquement atypique, loin de se résorber, s'accentuera d'ici 2027, année où l'excédent des administrations de sécurité sociale atteindrait un point de PIB, c'est-à-dire 30 milliards d'euros.

D'où ces 30 milliards d'euros d'excédent global proviendraient-ils ?

D'un côté, il y aurait 17, 5 milliards d'euros de déficit de la sécurité sociale stricto sensu.

De l'autre, il y aurait une cinquantaine de milliards d'euros d'excédents divers, qui correspondent essentiellement à ceux de la Cades, de l'Unédic et des régimes complémentaires de retraite et à 6 milliards d'euros d'économies restant à documenter, monsieur le ministre

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale.

M. le ministre délégué chargé des comptes publics acquiesce.

Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Cette programmation conduit à se poser quatre questions.

Première question : cette prévision en matière d'excédents des administrations de sécurité sociale à l'échéance 2027 est-elle réaliste ?

La commission des affaires sociales juge pour sa part que cette programmation est optimiste.

Elle estime, du fait notamment d'une hypothèse de croissance elle-même optimiste de 1, 3 % par an – plutôt que de 1, 7 % par an, comme le prévoit le Gouvernement – et d'un Ondam plus dynamique, que le déficit de la sécurité sociale stricto sensu sera nettement supérieur en 2027 à ce que prévoit le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Elle considère en outre que les prévisions d'excédents de l'Unédic et des régimes complémentaires de retraite sont également optimistes.

Au total, en 2027, l'excédent des administrations de sécurité sociale, considérées dans leur ensemble, ne s'élèverait pas à plus de 30 milliards d'euros, mais, à notre avis, à quelques milliards d'euros seulement.

La deuxième question à se poser a trait à la gestion de cette situation de décalage entre une sécurité sociale stricto sensu en fort déficit et d'autres administrations de sécurité sociale en fort excédent, même s'il nous semble que cet excédent sera moins fort que ce que pense l'exécutif.

Le Gouvernement choisit de prendre de l'argent aux administrations de sécurité sociale en fort excédent et de le transférer à la branche vieillesse dans le cas de l'Agirc-Arrco ou à l'État dans le cas de l'Unédic. La commission des affaires sociales juge que ces deux mesures sont inappropriées : c'est pourquoi elle vous proposera de supprimer les dispositions correspondantes aux articles 9 et 10.

La commission considère, d'une part, qu'il ne faut pas réaliser subrepticement une nouvelle réforme des retraites en contraignant financièrement l'Agirc-Arrco et, d'autre part, que la priorité pour l'Unédic, comme d'ailleurs pour l'ensemble des administrations publiques, est de se désendetter. Si l'État veut financer de nouvelles dépenses, il doit le faire par des économies.

La troisième question est celle du financement d'une dette de la sécurité sociale stricto sensu qui continuera à croître. En 2020, la loi a autorisé le transfert de 136 milliards d'euros de dette à la Cades. Actuellement, seuls 8, 8 milliards d'euros – cela tombe bien : c'est justement le déficit de cette année ! – restent disponibles sur cette enveloppe.

À droit inchangé, les déficits annuels s'accumuleront au niveau de l'Urssaf Caisse nationale, l'ancienne Acoss. Si l'on ne fait rien, dans dix ans, la somme pourrait atteindre 200 milliards d'euros. L'Urssaf Caisse nationale se finançant à court terme sur les marchés, cela serait dangereux, en particulier si la France devait connaître une nouvelle crise économique.

Quatrième question à se poser : que faut-il faire pour réduire le déficit de la sécurité sociale stricto sensu ?

Comme les années précédentes, la commission des affaires sociales a abordé chacun des articles de ce texte de façon constructive.

En particulier, elle propose de rétablir l'article liminaire et l'article 1er dans leur version initiale, ainsi que l'article 2, mais en modifiant, pour cet article, la répartition de l'Ondam pour 2023 entre ses différentes composantes.

Elle a par ailleurs exprimé son désaccord avec la trajectoire financière et l'absence de stratégie du Gouvernement, en proposant de rejeter l'article 16 et l'annexe A, ainsi que l'article 42.

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des finances, mes chers collègues, nous nous apprêtons à examiner le deuxième projet de loi de financement de la sécurité sociale de la législature. Or, les conditions de cet examen sont étonnamment proches de celles d’il y a un an.

Tout d’abord, comme l’année dernière, dans le cadre de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a été conduit à recourir à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution pour faire adopter les deux parties relatives à l’exercice suivant.

Ensuite, comme l’année dernière, pour ne pas prolonger excessivement la durée d’examen du texte à l’Assemblée nationale, le Gouvernement n’a pas engagé sa responsabilité sur les autres dispositions du texte. Celui-ci nous arrive donc, cette fois encore, en étant dépourvu de certaines dispositions pourtant obligatoires, dont l’absence pourrait entraîner la censure de l’ensemble.

L’année dernière, il manquait le tableau d’équilibre rectifié et l’Ondam rectifié pour l’exercice en cours. Il en va de même cette année, mais il manque en outre l’article liminaire, relatif à l’ensemble des administrations de sécurité sociale.

Le Sénat fera, bien évidemment, preuve de responsabilité, et, comme l’année dernière, il rétablira les dispositions obligatoires manquantes.

Le PLFSS pour 2024 nous arrive donc tronqué. Surtout, le débat parlementaire lui-même a jusqu’à présent été tronqué.

Au vu des enjeux financiers et politiques très importants des projets de loi de financement de la sécurité sociale – madame, messieurs les ministres, vous venez de les rappeler –, nous avons la responsabilité de faire vivre au Sénat des débats complets sur le PLFSS pour 2024. Soyez sûrs que ces débats seront à l’image de la Haute Assemblée, c’est-à-dire non seulement sérieux et respectueux, mais aussi exigeants, et parfois en contradiction avec votre approche.

Un autre point commun avec la situation d’il y a un an est que, paradoxalement, l’examen du PLFSS pour 2024 coïncide, cette fois encore, avec celui d’un projet de loi de programmation des finances publiques.

En effet, le projet de loi de programmation des finances publiques, rejeté par l’Assemblée nationale et adopté, profondément modifié, par le Sénat, à l’automne de l’année dernière, nous est revenu de l’Assemblée nationale cet automne, le Gouvernement ayant eu recours cette fois-ci à l’article 49.3 de la Constitution. Le Sénat a adopté le texte en nouvelle lecture le 16 octobre dernier.

Des dispositions essentielles du PLFSS 2024 sont donc la déclinaison de mesures figurant dans le projet de loi de programmation des finances publiques. C’est le cas de celles qui visent à fixer jusqu’en 2027 le montant annuel des dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ou bien de celles qui sont relatives à l’Ondam.

La situation a toutefois évolué depuis le 16 octobre. Par exemple, compte tenu des perspectives d’exécution de 2023, l’Ondam pour 2024 peut désormais sembler optimiste, raison pour laquelle, mes chers collègues, nous vous proposerons de supprimer l’article 43.

Ces similitudes institutionnelles avec la situation d’il y a un an ne doivent pas masquer deux profondes évolutions, qui font de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale un texte de rupture.

La première rupture est celle de l’abandon affiché, non seulement de l’objectif de retour de la sécurité sociale à l’équilibre, mais aussi du simple objectif de stabilisation du déficit.

Ce dernier a atteint 40 milliards d’euros en 2020 du fait de la crise sanitaire, ce qui était inévitable et parfaitement normal, puisque la France a connu sa pire récession économique depuis la Seconde Guerre mondiale et a, de surcroît, dû assumer le coût direct de la crise sanitaire – vous l’avez rappelé, monsieur le ministre.

On peut aussi considérer que, pour l’essentiel, le point de départ de 8, 8 milliards d’euros en 2023 est normal. En effet, le produit intérieur brut de la France a été réduit de manière durable, voire pérenne, par la crise, ce qui explique l’essentiel de ce déficit.

Ce qui est sans doute moins normal, c’est qu’à partir de ce point de départ de 8, 8 milliards d’euros, la situation se dégrade fortement : l’augmentation du déficit se poursuivrait pour atteindre 17, 5 milliards d’euros en 2027. C’est une différence majeure par rapport à la situation qu’a connue notre pays dans les années 2010 : après la crise des dettes souveraines, le solde des comptes de la sécurité sociale est passé d’un déficit de plus de 25 milliards d’euros au quasi-équilibre qui prévalait avant la survenue de la crise sanitaire.

Il y a là comme un aveu d’impuissance, l’idée assumée que l’on transmet notre dette sociale aux générations futures.

Schématiquement, la branche maladie, actuellement déficitaire d’environ 10 milliards d’euros, le resterait jusqu’en 2027. La branche vieillesse verrait, quant à elle, son déficit exploser : il passerait de 2 milliards d’euros en 2023 à 14 milliards d’euros en 2027.

Évidemment, il ne faut pas se tromper sur le sens à donner à ces chiffres concernant les retraites. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, qui supposait déjà dans sa programmation un report de l’âge légal de la retraite, prévoyait un déficit de la branche vieillesse de 15, 7 milliards d’euros en 2026, déficit ramené à 14, 2 milliards d’euros par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 qui a réformé les retraites, ce qui n’est pas significativement différent des 14 milliards d’euros de déficit actuellement prévus pour 2027.

Cette augmentation du déficit de la branche vieillesse n’est donc pas une nouveauté : elle était prévue lors de la récente réforme des retraites qui, selon le Gouvernement, permettra de réduire le déficit à 6, 3 milliards d’euros en 2027.

Ce qui est nouveau en revanche, c’est que, contrairement à ce que les précédentes lois de financement de la sécurité sociale prévoyaient, on n’escompte plus d’amélioration du solde de la branche maladie. Le Gouvernement assume de financer durablement la santé par le déficit. Voilà ce qui est véritablement contestable dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La seconde rupture tient à ce que l’on assiste en 2023 à une déconnexion historique entre le déficit de 8, 8 milliards d’euros de la sécurité sociale et l’excédent – je dis bien l’excédent, pas le déficit ! – de l’ensemble des administrations de sécurité sociale, qui comprennent, en plus de la sécurité sociale, des entités comme la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), l’Unédic ou les régimes complémentaires de retraite.

Ces administrations de sécurité sociale, dont le périmètre est donc nettement plus vaste que celui de la sécurité sociale, seraient très largement excédentaires cette année, ce qui est nouveau – un tel excédent est apparu l’année dernière seulement.

Le Gouvernement suppose que ce phénomène historiquement atypique, loin de se résorber, s’accentuera d’ici 2027, année où l’excédent des administrations de sécurité sociale atteindrait un point de PIB, c’est-à-dire 30 milliards d’euros.

D’où ces 30 milliards d’euros d’excédent global proviendraient-ils ?

D’un côté, il y aurait 17, 5 milliards d’euros de déficit de la sécurité sociale stricto sensu.

De l’autre, il y aurait une cinquantaine de milliards d’euros d’excédents divers, qui correspondent essentiellement à ceux de la Cades, de l’Unédic et des régimes complémentaires de retraite et à 6 milliards d’euros d’économies restant à documenter, monsieur le ministre

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des finances, mes chers collègues, nous nous apprêtons à examiner le deuxième projet de loi de financement de la sécurité sociale de la législature. Or, les conditions de cet examen sont étonnamment proches de celles d’il y a un an.

Tout d’abord, comme l’année dernière, dans le cadre de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a été conduit à recourir à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution pour faire adopter les deux parties relatives à l’exercice suivant.

Ensuite, comme l’année dernière, pour ne pas prolonger excessivement la durée d’examen du texte à l’Assemblée nationale, le Gouvernement n’a pas engagé sa responsabilité sur les autres dispositions du texte. Celui-ci nous arrive donc, cette fois encore, en étant dépourvu de certaines dispositions pourtant obligatoires, dont l’absence pourrait entraîner la censure de l’ensemble.

L’année dernière, il manquait le tableau d’équilibre rectifié et l’Ondam rectifié pour l’exercice en cours. Il en va de même cette année, mais il manque en outre l’article liminaire, relatif à l’ensemble des administrations de sécurité sociale.

Le Sénat fera, bien évidemment, preuve de responsabilité, et, comme l’année dernière, il rétablira les dispositions obligatoires manquantes.

Le PLFSS pour 2024 nous arrive donc tronqué. Surtout, le débat parlementaire lui-même a jusqu’à présent été tronqué.

Au vu des enjeux financiers et politiques très importants des projets de loi de financement de la sécurité sociale – madame, messieurs les ministres, vous venez de les rappeler –, nous avons la responsabilité de faire vivre au Sénat des débats complets sur le PLFSS pour 2024. Soyez sûrs que ces débats seront à l’image de la Haute Assemblée, c’est-à-dire non seulement sérieux et respectueux, mais aussi exigeants, et parfois en contradiction avec votre approche.

Un autre point commun avec la situation d’il y a un an est que, paradoxalement, l’examen du PLFSS pour 2024 coïncide, cette fois encore, avec celui d’un projet de loi de programmation des finances publiques.

En effet, le projet de loi de programmation des finances publiques, rejeté par l’Assemblée nationale et adopté, profondément modifié, par le Sénat, à l’automne de l’année dernière, nous est revenu de l’Assemblée nationale cet automne, le Gouvernement ayant eu recours cette fois-ci à l’article 49.3 de la Constitution. Le Sénat a adopté le texte en nouvelle lecture le 16 octobre dernier.

Des dispositions essentielles du PLFSS pour 2024 sont donc la déclinaison de mesures figurant dans le projet de loi de programmation des finances publiques. C’est le cas de celles qui visent à fixer jusqu’en 2027 le montant annuel des dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ou bien de celles qui sont relatives à l’Ondam.

La situation a toutefois évolué depuis le 16 octobre. Par exemple, compte tenu des perspectives d’exécution de 2023, l’Ondam pour 2024 peut désormais sembler optimiste, raison pour laquelle, mes chers collègues, nous vous proposerons de supprimer l’article 43.

Ces similitudes institutionnelles avec la situation d’il y a un an ne doivent pas masquer deux profondes évolutions, qui font de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale un texte de rupture.

La première rupture est celle de l’abandon affiché, non seulement de l’objectif de retour de la sécurité sociale à l’équilibre, mais aussi du simple objectif de stabilisation du déficit.

Ce dernier a atteint 40 milliards d’euros en 2020 du fait de la crise sanitaire, ce qui était inévitable et parfaitement normal, puisque la France a connu sa pire récession économique depuis la Seconde Guerre mondiale et a, de surcroît, dû assumer le coût direct de la crise sanitaire – vous l’avez rappelé, monsieur le ministre.

On peut aussi considérer que, pour l’essentiel, le point de départ de 8, 8 milliards d’euros en 2023 est normal. En effet, le produit intérieur brut de la France a été réduit de manière durable, voire pérenne, par la crise, ce qui explique l’essentiel de ce déficit.

Ce qui est sans doute moins normal, c’est qu’à partir de ce point de départ de 8, 8 milliards d’euros, la situation se dégrade fortement : l’augmentation du déficit se poursuivrait pour atteindre 17, 5 milliards d’euros en 2027. C’est une différence majeure par rapport à la situation qu’a connue notre pays dans les années 2010 : après la crise des dettes souveraines, le solde des comptes de la sécurité sociale est passé d’un déficit de plus de 25 milliards d’euros au quasi-équilibre qui prévalait avant la survenue de la crise sanitaire.

Il y a là comme un aveu d’impuissance, l’idée assumée que l’on transmet notre dette sociale aux générations futures.

Schématiquement, la branche maladie, actuellement déficitaire d’environ 10 milliards d’euros, le resterait jusqu’en 2027. La branche vieillesse verrait, quant à elle, son déficit exploser : il passerait de 2 milliards d’euros en 2023 à 14 milliards d’euros en 2027.

Évidemment, il ne faut pas se tromper sur le sens à donner à ces chiffres concernant les retraites. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, qui supposait déjà dans sa programmation un report de l’âge légal de la retraite, prévoyait un déficit de la branche vieillesse de 15, 7 milliards d’euros en 2026, déficit ramené à 14, 2 milliards d’euros par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 qui a réformé les retraites, ce qui n’est pas significativement différent des 14 milliards d’euros de déficit actuellement prévus pour 2027.

Cette augmentation du déficit de la branche vieillesse n’est donc pas une nouveauté : elle était prévue lors de la récente réforme des retraites qui, selon le Gouvernement, permettra de réduire le déficit à 6, 3 milliards d’euros en 2027.

Ce qui est nouveau en revanche, c’est que, contrairement à ce que les précédentes lois de financement de la sécurité sociale prévoyaient, on n’escompte plus d’amélioration du solde de la branche maladie. Le Gouvernement assume de financer durablement la santé par le déficit. Voilà ce qui est véritablement contestable dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La seconde rupture tient à ce que l’on assiste en 2023 à une déconnexion historique entre le déficit de 8, 8 milliards d’euros de la sécurité sociale et l’excédent – je dis bien l’excédent, pas le déficit ! – de l’ensemble des administrations de sécurité sociale, qui comprennent, en plus de la sécurité sociale, des entités comme la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), l’Unédic ou les régimes complémentaires de retraite.

Ces administrations de sécurité sociale, dont le périmètre est donc nettement plus vaste que celui de la sécurité sociale, seraient très largement excédentaires cette année, ce qui est nouveau – un tel excédent est apparu l’année dernière seulement.

Le Gouvernement suppose que ce phénomène historiquement atypique, loin de se résorber, s’accentuera d’ici à 2027, année où l’excédent des administrations de sécurité sociale atteindrait un point de PIB, c’est-à-dire 30 milliards d’euros.

D’où ces 30 milliards d’euros d’excédent global proviendraient-ils ?

D’un côté, il y aurait 17, 5 milliards d’euros de déficit de la sécurité sociale stricto sensu.

De l’autre, il y aurait une cinquantaine de milliards d’euros d’excédents divers, qui correspondent essentiellement à ceux de la Cades, de l’Unédic et des régimes complémentaires de retraite et à 6 milliards d’euros d’économies restant à documenter, monsieur le ministre

M. le ministre délégué chargé des comptes publics acquiesce.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Doineau

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Puisque j'ai déjà dépassé mon temps de parole, j'en viens à ma conclusion : vous l'aurez compris, madame la ministre, messieurs les ministres, nous serons, tout au long de ce débat, que nous espérons riche, des interlocuteurs à la fois exigeants et constructifs !

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Cette programmation conduit à se poser quatre questions.

Première question : cette prévision en matière d’excédents des administrations de sécurité sociale à l’échéance 2027 est-elle réaliste ?

La commission des affaires sociales juge pour sa part que cette programmation est optimiste.

Elle estime, du fait notamment d’une hypothèse de croissance elle-même optimiste de 1, 3 % par an – plutôt que de 1, 7 % par an, comme le prévoit le Gouvernement – et d’un Ondam plus dynamique, que le déficit de la sécurité sociale stricto sensu sera nettement supérieur en 2027 à ce que prévoit le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Elle considère en outre que les prévisions d’excédents de l’Unédic et des régimes complémentaires de retraite sont également optimistes.

Au total, en 2027, l’excédent des administrations de sécurité sociale, considérées dans leur ensemble, ne s’élèverait pas à plus de 30 milliards d’euros, mais, à notre avis, à quelques milliards d’euros seulement.

La deuxième question à se poser a trait à la gestion de cette situation de décalage entre une sécurité sociale stricto sensu en fort déficit et d’autres administrations de sécurité sociale en fort excédent, même s’il nous semble que cet excédent sera moins fort que ce que pense l’exécutif.

Le Gouvernement choisit de prendre de l’argent aux administrations de sécurité sociale en fort excédent et de le transférer à la branche vieillesse dans le cas de l’Agirc-Arrco ou à l’État dans le cas de l’Unédic. La commission des affaires sociales juge que ces deux mesures sont inappropriées : c’est pourquoi elle vous proposera de supprimer les dispositions correspondantes aux articles 9 et 10.

La commission considère, d’une part, qu’il ne faut pas réaliser subrepticement une nouvelle réforme des retraites en contraignant financièrement l’Agirc-Arrco et, d’autre part, que la priorité pour l’Unédic, comme d’ailleurs pour l’ensemble des administrations publiques, est de se désendetter. Si l’État veut financer de nouvelles dépenses, il doit le faire par des économies.

La troisième question est celle du financement d’une dette de la sécurité sociale stricto sensu qui continuera à croître. En 2020, la loi a autorisé le transfert de 136 milliards d’euros de dette à la Cades. Actuellement, seuls 8, 8 milliards d’euros – cela tombe bien : c’est justement le déficit de cette année ! – restent disponibles sur cette enveloppe.

À droit inchangé, les déficits annuels s’accumuleront au niveau de l’Urssaf Caisse nationale, l’ancienne Acoss. Si l’on ne fait rien, dans dix ans, la somme pourrait atteindre 200 milliards d’euros. L’Urssaf Caisse nationale se finançant à court terme sur les marchés, cela serait dangereux, en particulier si la France devait connaître une nouvelle crise économique.

Quatrième question à se poser : que faut-il faire pour réduire le déficit de la sécurité sociale stricto sensu ?

Comme les années précédentes, la commission des affaires sociales a abordé chacun des articles de ce texte de façon constructive.

En particulier, elle propose de rétablir l’article liminaire et l’article 1er dans leur version initiale, ainsi que l’article 2, mais en modifiant, pour cet article, la répartition de l’Ondam pour 2023 entre ses différentes composantes.

Elle a par ailleurs exprimé son désaccord avec la trajectoire financière et l’absence de stratégie du Gouvernement, en proposant de rejeter l’article 16 et l’annexe A, ainsi que l’article 42.

Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions. – Mme Solanges Nadille applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Puisque j’ai déjà dépassé mon temps de parole, j’en viens à ma conclusion : vous l’aurez compris, madame la ministre, messieurs les ministres, nous serons, tout au long de ce débat, que nous espérons riche, des interlocuteurs à la fois exigeants et constructifs !

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, les projets de loi de financement de la sécurité sociale se suivent et, malheureusement, se ressemblent.

En 2024, l'assurance maladie suivra une trajectoire de dépenses particulièrement dynamique. À la crise sanitaire et aux dépenses exceptionnelles qu'elle a provoquées a succédé, depuis 2023, un contexte inflationniste favorisant la hausse rapide de l'Ondam.

L'objectif national de dépenses d'assurance maladie a ainsi augmenté de 27 % en cinq ans, passant de 200 milliards d'euros en 2019 à près de 255 milliards d'euros en 2024, un montant vertigineux dont peu de personnes osent prétendre qu'il contribue à répondre aujourd'hui aux besoins du système de santé et à financer justement l'accès aux soins dans les territoires.

Il s'agit d'une enveloppe considérable qu'à nouveau le Gouvernement ne prend la peine ni de justifier ni d'affiner pour la soumettre de manière lisible à la représentation nationale. De ce point de vue, le sujet des franchises et des participations forfaitaires est devenu tristement caricatural.

Sans enthousiasme, devant un manque de transparence qui n'est pas admissible, la commission n'a d'autre choix que de proposer le rejet de l'Ondam pour 2024.

Il est question de dépenses substantielles que, je le disais, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne permet pourtant pas de couvrir, laissant cette année encore l'assurance maladie en déficit.

Le Gouvernement nous annonçait l'an passé un spectaculaire redressement des comptes de l'assurance maladie, sans raison aucune. Nous avions jugé cette annonce peu crédible : il a fallu moins de douze mois pour nous donner raison et l'annexe A ne tente désormais même plus de fournir des explications.

Croyez-le, monsieur le ministre, nous ne demandions qu'à avoir tort : qui peut se réjouir de faire face à un horizon de déficits durables à plus de 9, 5 milliards d'euros par an ? Surtout, que finance-t-on aujourd'hui par la dette de nos enfants ? Le Gouvernement se refuse à assumer des choix difficiles, pourtant devenus incontournables, au risque d'hypothéquer définitivement notre offre de soins.

Près d'une quarantaine d'articles sont rattachés à la branche maladie. Je retiendrai plusieurs dispositions emblématiques.

Le soutien à la vaccination contre les papillomavirus humains, par exemple, face au retard préjudiciable qu'accuse notre pays, est bienvenu, mais il constitue un volet de prévention réduit à la portion congrue, quand la prescription des antibiotiques pour angine et cystite par les pharmaciens incarne la principale mesure d'accès aux soins face à la pénurie de soignants.

Le Gouvernement s'attaque cette année encore aux arrêts de travail injustifiés par un renforcement des contrôles et un strict encadrement des prescriptions en téléconsultation. Nous avons souscrit à cette mesure.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit la généralisation d'expérimentations dites de l'article 51 avec, à la clé, des modes de financement nouveaux pour favoriser l'organisation de parcours coordonnés, en ville particulièrement.

Hélas, le Gouvernement n'a pas retenu la méthode prudente des expérimentations pour un sujet bien plus ambitieux, celui de la réforme du financement de l'hôpital, notamment pour ce qui est au cœur de son activité, les soins de médecine, chirurgie, obstétrique, qui représentent pas moins de 75 milliards d'euros.

La commission ne s'oppose pas au principe d'un modèle établi sur trois piliers – nous l'avons soutenu l'an passé –, mais nous ne pouvons pas approuver la méthode gouvernementale qui consiste à proposer une réforme sans champ réellement défini, sans étude d'impact et sans financement complémentaire.

On aurait pourtant pu croire que le Gouvernement était vacciné §depuis la mise en œuvre erratique des réformes de la psychiatrie et des soins médicaux de suite et de réadaptation.

Nous refusons de jouer avec l'hôpital pour répondre à un effet d'annonce : saisissez la main tendue par la commission, monsieur le ministre !

Enfin, concernant les produits de santé, la commission a veillé à soutenir l'innovation dans le cadre de l'accès précoce et a garanti une construction cohérente et utile de la clause de sauvegarde. Elle a également travaillé à consolider les dispositions visant à prévenir les ruptures d'approvisionnement en médicaments.

Pourtant, malgré ces quelques mesures intéressantes que la commission a souhaité accompagner, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale nous laisse un goût amer. Quant au texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité, on peine à voir des changements majeurs, quand seuls des dispositifs cosmétiques ou des dispositions fondées sur de bons sentiments ont été retenus.

Monsieur le ministre, vous nous disiez il y a quelques semaines que nous pouvions nous passer d'un projet de loi relatif à la santé, dans la mesure où le Parlement était saisi chaque année du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne revêt pourtant ni la forme ni l'apparence d'un projet de loi santé et, cela va sans dire, il n'a pas davantage la cohérence d'un tel texte.

Cela devrait, d'une certaine manière, nous réjouir : le plan Juppé de 1996 n'avait pas pour vocation de faire du PLFSS un projet de loi portant diverses mesures d'ordre social. À trop confondre le projet de loi de financement de la sécurité sociale avec un grand fourre-tout annuel et à s'en satisfaire, le Gouvernement prive « en même temps » le Parlement d'un débat financier et d'un débat sur la politique de santé.

J'espère que l'examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale apportera des réponses claires quant aux solutions que le Gouvernement entend défendre, afin que l'assurance maladie retrouve une trajectoire de financement saine, lui donnant la capacité d'affronter les défis de santé actuels. Nous sommes prêts à en débattre. §

Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions. – Mme Solanges Nadille applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'année 2023 a été marquée par l'adoption d'une réforme des retraites défendue depuis plusieurs années par notre assemblée.

Celle-ci a été adoptée très tardivement, trop tardivement sans doute, mais mieux vaut tard que jamais ! La trajectoire financière de la branche vieillesse démontre d'ailleurs, si cela était encore nécessaire, que cette réforme était certes indispensable, mais qu'elle est encore insuffisante.

L'année 2023 devrait en effet être la dernière année marquée par une réduction du déficit de la branche sous l'effet du rebond économique post-covid.

Dès 2024, en raison du vieillissement démographique, du ralentissement de la croissance de la masse salariale du secteur privé et des difficultés financières de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), la courbe s'inversera brutalement.

Le déficit, qui approche le milliard d'euros aujourd'hui, serait ainsi décuplé à l'horizon 2027. Sans cette réforme tant décriée à ma gauche, ce ne sont pas 11 milliards d'euros de déficit que nous aurions alors à gérer, mais plus de 17 milliards d'euros !

Quels efforts aurions-nous alors dû demander aux Français ? À ceux qui considèrent encore et toujours que c'est au pied du mur que l'on voit le maçon, je réponds avec fermeté : la réforme était nécessaire et nous sommes fiers de l'avoir demandée et assumée !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Venons-en à ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

S'il contient quelques propositions intéressantes permettant de corriger les effets de bord ou les oublis de la réforme des retraites, je veux surtout insister ici sur deux mesures d'ampleur.

La première, prévue à l'article 9, consiste en l'adossement des régimes spéciaux fermés au régime général, qui sera désormais chargé d'assurer leur équilibre en lieu et place de l'État, lequel lui attribuera, en compensation, des recettes correspondant aux crédits actuels de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».

En parallèle, l'Agirc-Arrco versera au régime général une contribution correspondant aux cotisations perçues au titre des nouvelles affiliations liées à la fermeture des régimes spéciaux, ce qui me paraît tout à fait légitime dans la mesure où ceux-ci demeurent responsables du paiement des pensions des assurés affiliés avant le 1er septembre.

Ce qui l'est beaucoup moins, en revanche, c'est la seconde contribution demandée à l'Agirc-Arrco au titre des gains que le régime complémentaire tire de la réforme des retraites.

De fait, le Gouvernement lui demande une contribution correspondant aux gains bruts engendrés par la réforme, alors que les partenaires sociaux ont décidé de financer à partir de ces gains la suppression du bonus-malus, la création de droits au titre du dispositif de cumul emploi-retraite et la revalorisation des pensions à un niveau proche de l'inflation.

En outre, après l'abandon du système universel de retraite et de l'unification du recouvrement social, il n'est pas acceptable que le Gouvernement tente une troisième fois de s'imposer aux partenaires sociaux, dont les décisions courageuses ont permis de redresser la trajectoire financière de l'Agirc-Arrco au prix d'efforts importants consentis par les travailleurs.

La commission vous propose donc, mes chers collègues, de témoigner une fois de plus notre attachement au paritarisme, en lui confiant, et à lui seul, la responsabilité de décider de contribuer ou non au financement des déficits du régime général.

La confiance envers les partenaires sociaux, telle est également la position que je vous proposerai d'adopter sur la réforme de l'assiette sociale des travailleurs indépendants, prévue à l'article 10 ter.

Le Gouvernement souhaite en effet assurer la neutralité financière de cette réforme, qui est très attendue des professionnels dans la mesure où elle leur permettra, à niveau global de prélèvements constant, de cotiser davantage et, donc, de se voir accorder des droits supplémentaires.

Pour ce faire, il demande notamment à être habilité à modifier lui-même les taux et les barèmes des cotisations de retraite complémentaire des professionnels libéraux. Là encore, la commission vous invitera à refuser d'accorder une telle autorisation qui non seulement n'a pas sa place dans une loi de financement de la sécurité sociale, mais constituerait également un dangereux précédent.

J'en profite pour déplorer le choix d'inclure dans le texte une réforme d'une telle ampleur, dont le coût brut s'élèverait à 1, 4 milliard d'euros, et ce par voie d'amendement, sans étude d'impact, dans la précipitation la plus totale, alors qu'elle n'a pas vocation à s'appliquer avant 2026. Aucune information ne m'a par ailleurs été communiquée au sujet des professions qui y perdraient en raison de ce nouveau mode de calcul. Il n'est pas acceptable, monsieur le ministre, que la représentation nationale soit contrainte de travailler dans de telles conditions.

Enfin, notre commission a souhaité aller au-delà des quelques mesures proposées par le Gouvernement pour lutter contre la fraude aux prestations sociales. C'est la raison pour laquelle elle vous soumettra un amendement tendant à rendre obligatoire le contrôle biométrique de l'existence des bénéficiaires de pensions de retraite résidant à l'étranger d'ici à trois ans, afin de mettre un terme aux pratiques scandaleuses observées dans un certain nombre de pays, où les ayants droit de retraités décédés depuis longtemps continuent de percevoir leur pension.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC et au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, les projets de loi de financement de la sécurité sociale se suivent et, malheureusement, se ressemblent.

En 2024, l’assurance maladie suivra une trajectoire de dépenses particulièrement dynamique. À la crise sanitaire et aux dépenses exceptionnelles qu’elle a provoquées a succédé, depuis 2023, un contexte inflationniste favorisant la hausse rapide de l’Ondam.

L’objectif national de dépenses d’assurance maladie a ainsi augmenté de 27 % en cinq ans, passant de 200 milliards d’euros en 2019 à près de 255 milliards d’euros en 2024, un montant vertigineux dont peu de personnes osent prétendre qu’il contribue à répondre aujourd’hui aux besoins du système de santé et à financer justement l’accès aux soins dans les territoires.

Il s’agit d’une enveloppe considérable qu’à nouveau le Gouvernement ne prend la peine ni de justifier ni d’affiner pour la soumettre de manière lisible à la représentation nationale. De ce point de vue, le sujet des franchises et des participations forfaitaires est devenu tristement caricatural.

Sans enthousiasme, devant un manque de transparence qui n’est pas admissible, la commission n’a d’autre choix que de proposer le rejet de l’Ondam pour 2024.

Il est question de dépenses substantielles que, je le disais, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne permet pourtant pas de couvrir, laissant cette année encore l’assurance maladie en déficit.

Le Gouvernement nous annonçait l’an passé un spectaculaire redressement des comptes de l’assurance maladie, sans raison aucune. Nous avions jugé cette annonce peu crédible : il a fallu moins de douze mois pour nous donner raison et l’annexe A ne tente désormais même plus de fournir des explications.

Croyez-le, monsieur le ministre, nous ne demandions qu’à avoir tort : qui peut se réjouir de faire face à un horizon de déficits durables à plus de 9, 5 milliards d’euros par an ? Surtout, que finance-t-on aujourd’hui par la dette de nos enfants ? Le Gouvernement se refuse à assumer des choix difficiles, pourtant devenus incontournables, au risque d’hypothéquer définitivement notre offre de soins.

Près d’une quarantaine d’articles sont rattachés à la branche maladie. Je retiendrai plusieurs dispositions emblématiques.

Le soutien à la vaccination contre les papillomavirus humains, par exemple, face au retard préjudiciable qu’accuse notre pays, est bienvenu, mais il constitue un volet de prévention réduit à la portion congrue, quand la prescription des antibiotiques pour angine et cystite par les pharmaciens incarne la principale mesure d’accès aux soins face à la pénurie de soignants.

Le Gouvernement s’attaque cette année encore aux arrêts de travail injustifiés par un renforcement des contrôles et un strict encadrement des prescriptions en téléconsultation. Nous avons souscrit à cette mesure.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit la généralisation d’expérimentations dites de l’article 51 avec, à la clé, des modes de financement nouveaux pour favoriser l’organisation de parcours coordonnés, en ville particulièrement.

Hélas, le Gouvernement n’a pas retenu la méthode prudente des expérimentations pour un sujet bien plus ambitieux, celui de la réforme du financement de l’hôpital, notamment pour ce qui est au cœur de son activité, les soins de médecine, chirurgie, obstétrique, qui représentent pas moins de 75 milliards d’euros.

La commission ne s’oppose pas au principe d’un modèle établi sur trois piliers – nous l’avons soutenu l’an passé –, mais nous ne pouvons pas approuver la méthode gouvernementale qui consiste à proposer une réforme sans champ réellement défini, sans étude d’impact et sans financement complémentaire.

On aurait pourtant pu croire que le Gouvernement était vacciné §depuis la mise en œuvre erratique des réformes de la psychiatrie et des soins médicaux de suite et de réadaptation.

Nous refusons de jouer avec l’hôpital pour répondre à un effet d’annonce : saisissez la main tendue par la commission, monsieur le ministre !

Enfin, concernant les produits de santé, la commission a veillé à soutenir l’innovation dans le cadre de l’accès précoce et a garanti une construction cohérente et utile de la clause de sauvegarde. Elle a également travaillé à consolider les dispositions visant à prévenir les ruptures d’approvisionnement en médicaments.

Pourtant, malgré ces quelques mesures intéressantes que la commission a souhaité accompagner, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale nous laisse un goût amer. Quant au texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité, on peine à voir des changements majeurs, quand seuls des dispositifs cosmétiques ou des dispositions fondées sur de bons sentiments ont été retenus.

Monsieur le ministre, vous nous disiez il y a quelques semaines que nous pouvions nous passer d’un projet de loi relatif à la santé, dans la mesure où le Parlement était saisi chaque année du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne revêt pourtant ni la forme ni l’apparence d’un projet de loi santé et, cela va sans dire, il n’a pas davantage la cohérence d’un tel texte.

Cela devrait, d’une certaine manière, nous réjouir : le plan Juppé de 1996 n’avait pas pour vocation de faire du PLFSS un projet de loi portant diverses mesures d’ordre social. À trop confondre le projet de loi de financement de la sécurité sociale avec un grand fourre-tout annuel et à s’en satisfaire, le Gouvernement prive « en même temps » le Parlement d’un débat financier et d’un débat sur la politique de santé.

J’espère que l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale apportera des réponses claires quant aux solutions que le Gouvernement entend défendre, afin que l’assurance maladie retrouve une trajectoire de financement saine, lui donnant la capacité d’affronter les défis de santé actuels. Nous sommes prêts à en débattre.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, les projets de loi de financement de la sécurité sociale se suivent et, malheureusement, se ressemblent.

En 2024, l’assurance maladie suivra une trajectoire de dépenses particulièrement dynamique. À la crise sanitaire et aux dépenses exceptionnelles qu’elle a provoquées a succédé, depuis 2023, un contexte inflationniste favorisant la hausse rapide de l’Ondam.

L’objectif national de dépenses d’assurance maladie a ainsi augmenté de 27 % en cinq ans, passant de 200 milliards d’euros en 2019 à près de 255 milliards d’euros en 2024, un montant vertigineux dont peu de personnes osent prétendre qu’il contribue à répondre aujourd’hui aux besoins du système de santé et à financer justement l’accès aux soins dans les territoires.

Il s’agit d’une enveloppe considérable que, de nouveau, le Gouvernement ne prend la peine ni de justifier ni d’affiner pour la soumettre de manière lisible à la représentation nationale. De ce point de vue, le sujet des franchises et des participations forfaitaires est devenu tristement caricatural.

Sans enthousiasme, devant un manque de transparence qui n’est pas admissible, la commission n’a d’autre choix que de proposer le rejet de l’Ondam pour 2024.

Il est question de dépenses substantielles que, je le disais, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne permet pourtant pas de couvrir, laissant cette année encore l’assurance maladie en déficit.

Le Gouvernement nous annonçait l’an passé un spectaculaire redressement des comptes de l’assurance maladie, sans raison aucune. Nous avions jugé cette annonce peu crédible : il a fallu moins de douze mois pour nous donner raison et l’annexe A ne tente désormais même plus de fournir des explications.

Croyez-le, monsieur le ministre, nous ne demandions qu’à avoir tort : qui peut se réjouir de faire face à un horizon de déficits durables à plus de 9, 5 milliards d’euros par an ? Surtout, que finance-t-on aujourd’hui par la dette de nos enfants ? Le Gouvernement se refuse à assumer des choix difficiles, pourtant devenus incontournables, au risque d’hypothéquer définitivement notre offre de soins.

Près d’une quarantaine d’articles sont rattachés à la branche maladie. Je retiendrai plusieurs dispositions emblématiques.

Le soutien à la vaccination contre les papillomavirus humains, par exemple, face au retard préjudiciable qu’accuse notre pays, est bienvenu, mais il constitue un volet de prévention réduit à la portion congrue, quand la prescription des antibiotiques pour angine et cystite par les pharmaciens incarne la principale mesure d’accès aux soins face à la pénurie de soignants.

Le Gouvernement s’attaque cette année encore aux arrêts de travail injustifiés par un renforcement des contrôles et un strict encadrement des prescriptions en téléconsultation. Nous avons souscrit à cette mesure.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit la généralisation d’expérimentations dites de l’article 51 avec, à la clé, des modes de financement nouveaux pour favoriser l’organisation de parcours coordonnés, en ville particulièrement.

Hélas, le Gouvernement n’a pas retenu la méthode prudente des expérimentations pour un sujet bien plus ambitieux, celui de la réforme du financement de l’hôpital, notamment pour ce qui est au cœur de son activité, les soins de médecine, chirurgie, obstétrique, qui représentent pas moins de 75 milliards d’euros.

La commission ne s’oppose pas au principe d’un modèle établi sur trois piliers – nous l’avons soutenu l’an passé –, mais nous ne pouvons pas approuver la méthode gouvernementale qui consiste à proposer une réforme sans champ réellement défini, sans étude d’impact et sans financement complémentaire.

On aurait pourtant pu croire que le Gouvernement était vacciné §depuis la mise en œuvre erratique des réformes de la psychiatrie et des soins médicaux de suite et de réadaptation.

Nous refusons de jouer avec l’hôpital pour répondre à un effet d’annonce : saisissez la main tendue par la commission, monsieur le ministre !

Enfin, concernant les produits de santé, la commission a veillé à soutenir l’innovation dans le cadre de l’accès précoce et a garanti une construction cohérente et utile de la clause de sauvegarde. Elle a également travaillé à consolider les dispositions visant à prévenir les ruptures d’approvisionnement en médicaments.

Pourtant, malgré ces quelques mesures intéressantes que la commission a souhaité accompagner, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale nous laisse un goût amer. Quant au texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité, on peine à voir des changements majeurs, quand seuls des dispositifs cosmétiques ou des dispositions fondées sur de bons sentiments ont été retenus.

Monsieur le ministre, vous nous disiez il y a quelques semaines que nous pouvions nous passer d’un projet de loi relatif à la santé, dans la mesure où le Parlement était saisi chaque année du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne revêt pourtant ni la forme ni l’apparence d’un projet de loi santé et, cela va sans dire, il n’a pas davantage la cohérence d’un tel texte.

Cela devrait, d’une certaine manière, nous réjouir : le plan Juppé de 1996 n’avait pas pour vocation de faire du PLFSS un projet de loi portant diverses mesures d’ordre social. À trop confondre le projet de loi de financement de la sécurité sociale avec un grand fourre-tout annuel et à s’en satisfaire, le Gouvernement prive « en même temps » le Parlement d’un débat financier et d’un débat sur la politique de santé.

J’espère que l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale apportera des réponses claires quant aux solutions que le Gouvernement entend défendre, afin que l’assurance maladie retrouve une trajectoire de financement saine, lui donnant la capacité d’affronter les défis de santé actuels. Nous sommes prêts à en débattre.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Il s'agit d'assurer ensemble, mes chers collègues, l'équité et la justice de notre système de retraite. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP. – M. le rapporteur pour avis applaudit également.)

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Henno

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, d'une certaine façon, l'avis de la commission est partagé au sujet de la branche famille.

Comme je l'ai dit en commission, nous entendons bien votre allant, votre désir d'agir, madame la ministre. Votre discours sur la natalité et la démographie est doux à nos oreilles, d'autant que notre pays ne comptabilise plus que 700 000 naissances par an contre 850 000 naissances auparavant.

Il est donc nécessaire d'attribuer une forme de priorité à notre politique familiale, a fortiori parce que le groupe UC et la majorité sénatoriale estiment que cette politique a un rôle majeur à jouer pour que la démographie se redresse dans notre pays.

Or, si nous regardons de manière factuelle la politique familiale telle qu'elle est retranscrite dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous sommes tentés de conclure que c'est la grande oubliée.

Dressons un rapide état des lieux : les allocations familiales ne sont toujours pas universelles – elles ne le sont malheureusement plus depuis 2015 – ; la réforme du tiers payant du complément de libre choix du mode de garde (CMG) dit « structure » est encore repoussée ; il n'y a nulle trace dans le texte de la réforme du congé parental, que vous avez pourtant annoncée, madame la ministre – un sujet que nous suivrons avec attention.

Se pose aussi la question de l'attractivité des métiers. J'ajoute – j'ouvre ainsi une parenthèse – que la médecine scolaire, la médecine de protection maternelle et infantile (PMI) comme la médecine du travail sont en crise. Enfin, nous sommes confrontés à une certaine nébuleuse quant à la mise en place annoncée d'un service public de la petite enfance – un objectif que nous partageons –, ainsi qu'à la création de places en crèche et de nouvelles solutions de garde.

En somme, vous nous avez mis en appétit, mais nous n'avons pas grand-chose à nous mettre sous la dent dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Selon les prévisions du Gouvernement, les dépenses de la branche famille devraient s'élever à 58 milliards d'euros, en hausse par rapport à 2022. Cette dynamique est d'abord le résultat de l'indexation des prestations légales et des quelques mesures votées les années précédentes.

Elle intègre également les efforts financiers de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) relatifs aux prestations extralégales en faveur des accueils collectifs. Les dépenses du Fonds national d'action sociale de la branche augmenteraient ainsi de 6, 4 % en 2023.

Enfin, et surtout, la hausse des dépenses traduit le transfert, décidé dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, de 60 % des charges de congé maternité à la Cnaf depuis la branche maladie, ce qui correspond à une amputation de 2 milliards d'euros.

La sécurité sociale parvient de moins en moins à soutenir l'ensemble des ménages au moment de la naissance d'un enfant. Je pense notamment aux familles de la classe moyenne, exclues par les barèmes de prestations, sans pour autant disposer des revenus nécessaires pour réaliser leur désir d'enfant.

Pire, le solde de la branche ne permet pas de dégager les marges de manœuvre suffisantes pour financer les réformes annoncées par le Gouvernement et encore moins les autres réformes nécessaires – c'est l'une de nos préoccupations.

C'est pourquoi un amendement de Mme la rapporteure générale vise à abonder les recettes de la branche famille de 2 milliards d'euros, transférés des comptes de l'assurance maladie. Ainsi, on ne pourra pas nous faire le coup de l'ambition qui ne peut pas se concrétiser faute de moyens.

En ce qui concerne la politique familiale, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale constitue une sorte d'année blanche.

La commission est favorable à l'adoption de l'article 46 bis qui prévoit un assouplissement de la prise du congé de paternité et d'accueil de l'enfant pour les non-salariés agricoles.

L'article 46 ter, quant à lui, prévoit plusieurs ajustements marginaux à la réforme du complément de libre choix du mode de garde. Si la commission est favorable à la plupart d'entre eux, elle souhaite toutefois conserver le dispositif qui permet de tenir compte des horaires atypiques de garde pour des parents travaillant la nuit ou le week-end. Elle a déposé un amendement en ce sens, car elle a jugé que la réforme à venir du CMG devait répondre à l'ensemble des situations familiales.

L'article 46 ter prévoit également de reporter à 2026 l'entrée en vigueur de la réforme du tiers payant du CMG. Or nous souhaitons que cette réforme soit applicable le plus rapidement possible. Il ne s'agirait pas qu'elle soit de nouveau reportée.

L'universalité de la politique familiale ne se décrète pas. C'est comme en amour : seules comptent les preuves ! §Aussi doit-elle s'incarner sous la forme de mesures concrètes. Tant que les allocations familiales ne profiteront pas à toutes les familles de la même manière, et ce pour des raisons budgétaires, il n'y aura pas de politique universelle.

Sachons répondre aux angoisses des familles, pas seulement par des mots, mais aussi par des réformes courageuses et ambitieuses ! §

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Richer

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, après une année 2023 marquée par un excédent record de 1, 9 milliard d'euros, la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) connaîtra de nouveau une situation excédentaire en 2024.

Malgré la baisse des taux de cotisation pour la branche, actée lors de la réforme des retraites afin de garantir la neutralité financière pour les employeurs d'une hausse symétrique des taux pour la branche vieillesse, les 17, 1 milliards d'euros de recettes prévisionnelles pour 2024 seront suffisants pour couvrir l'objectif de dépenses de la branche, fixé à 16 milliards d'euros, que je vous inviterai à adopter.

L'excédent structurel de la branche AT-MP peut paraître confortable, voire enviable, au regard de la situation financière d'autres branches.

Je l'entends, mais ce serait méconnaître un principe essentiel : une branche n'a pas davantage vocation à être excédentaire qu'à être déficitaire. Cet excédent structurel est en fait le signe d'une déconnexion à long terme entre les besoins de financement de la branche et ses recettes, illustrée par l'excédent cumulé toujours croissant de la branche, qui atteindra – rendez-vous compte ! – 12, 5 milliards d'euros à l'horizon 2027. Ce sont là autant de contributions réclamées à l'employeur qui ne servent pas leur destination originelle : lutter contre les risques professionnels et indemniser les victimes.

Et pourtant, malgré cette situation structurellement excédentaire, force est de constater que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est, une fois de plus, indigent pour ce qui concerne la branche AT-MP.

Alors que le renforcement de la prévention est au cœur de toutes les revendications, tant chez les organisations patronales que syndicales, le Gouvernement n'a pas jugé bon d'inclure la moindre mesure en la matière dans le texte initial.

Nous attendions – et nous continuerons malheureusement d'attendre… – un changement de paradigme sur la manière dont la prévention est envisagée par la branche.

Croyez-vous, monsieur le ministre, que les spots télévisuels déployés depuis un mois soient suffisants, alors que près d'un million de sinistres restent à déplorer chaque année et que les dépenses de prévention dépassent péniblement 2 % des dépenses de la branche ?

Que faut-il attendre pour que soit mis en œuvre un véritable accompagnement des entreprises en matière de prévention ?

Le succès indéniable des programmes s'inscrivant dans une démarche d'« aller vers », comme TMS-Pros, devrait pourtant conduire à encourager, étendre et développer de telles initiatives.

Pas de prévention donc, mais, à la place, des prélèvements pesant toujours plus sur la branche AT-MP. Il semblerait qu'il soit normal que la branche, parce qu'elle est excédentaire, voie ses ressources siphonnées. Naturellement, la commission s'y oppose et elle propose de revoir à la baisse le transfert de crédits à la branche maladie au titre de la sous-déclaration.

Elle a également déploré le fait que, bien que l'État soit responsable du scandale de l'amiante, le Gouvernement laisse la branche AT-MP augmenter de 50 % en 2024 sa dotation au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) sans avancer lui-même un centime de plus.

Dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, c'est toutefois une autre mesure qui a concentré tous les débats, mais aussi, et surtout, toutes les critiques. Le Gouvernement était très attendu sur l'article 39, qui devait engager une réforme ambitieuse de la rente AT-MP et transposer un accord national interprofessionnel (ANI) signé à l'unanimité des partenaires sociaux.

Le résultat est décevant, puisque les partenaires sociaux ne se reconnaissent pas dans les modalités de transcription retenues. En court-circuitant le dialogue social, en réclamant un chèque en blanc au Parlement sur une réforme dont tout rester à déterminer, en ignorant les associations, le résultat est là : un article qui, en définitive, ne satisfait quasiment personne et est mal compris et inapplicable en l'état.

L'article 39 a exacerbé les tensions entre partenaires sociaux. En l'absence de consensus, il a été supprimé du texte qui nous a été transmis – et je vous inviterai naturellement à vous prononcer pour la confirmation de cette suppression.

L'ANI doit maintenant faire l'objet, si un consensus venait à être trouvé, d'une transcription intégrale dans un projet de loi ad hoc. Il est possible de retravailler le texte et d'adopter une réforme plus équilibrée sans retarder excessivement le calendrier de mise en œuvre initialement prévu pour l'article 39, fixé à fin 2024, ce qui permettra de répondre ainsi aux inquiétudes des organisations patronales auditionnées. Cette réforme devra convenir à toutes les parties, y compris aux associations de défense des victimes.

Les trois autres articles comportent des mesures utiles, à n'en pas douter, mais dont les répercussions financières sur l'équilibre de la branche AT-MP devraient être modestes : je vous invite à adopter ces mesures, mais à les améliorer en votant les amendements de la commission.

L'article 26 prévoit que les médecins du travail puissent déléguer à des infirmiers qualifiés en santé au travail, dans la limite de leurs compétences et dans un cadre sécurisé par la commission, certains actes du renouvellement périodique de l'examen médical d'aptitude des salariés agricoles bénéficiaires du suivi individuel renforcé. En ce sens, il accroîtra l'accessibilité aux médecins du travail et renforcera l'attractivité des services de santé et de sécurité au travail des caisses de la Mutualité sociale agricole.

L'article 39 bis sécurisera, pour le passé et pour l'avenir, le versement de deux prestations relevant du régime des marins, tandis que l'article 39 ter offrira de nouveaux outils au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante pour lutter contre un non-recours alarmant, qui avoisinerait les 50 % pour les victimes de mésothéliome. §

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’année 2023 a été marquée par l’adoption d’une réforme des retraites défendue depuis plusieurs années par notre assemblée.

Celle-ci a été adoptée très tardivement, trop tardivement sans doute, mais mieux vaut tard que jamais ! La trajectoire financière de la branche vieillesse démontre d’ailleurs, si cela était encore nécessaire, que cette réforme était certes indispensable, mais qu’elle est encore insuffisante.

L’année 2023 devrait en effet être la dernière année marquée par une réduction du déficit de la branche sous l’effet du rebond économique post-covid.

Dès 2024, en raison du vieillissement démographique, du ralentissement de la croissance de la masse salariale du secteur privé et des difficultés financières de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), la courbe s’inversera brutalement.

Le déficit, qui approche le milliard d’euros aujourd’hui, serait ainsi décuplé à l’horizon 2027. Sans cette réforme tant décriée à ma gauche, ce ne sont pas 11 milliards d’euros de déficit que nous aurions alors à gérer, mais plus de 17 milliards d’euros !

Quels efforts aurions-nous alors dû demander aux Français ? À ceux qui considèrent encore et toujours que c’est au pied du mur que l’on voit le maçon, je réponds avec fermeté : la réforme était nécessaire et nous sommes fiers de l’avoir demandée et assumée !

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Deseyne

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'objectif de dépenses de la branche autonomie pour 2024 est fixé à 39, 9 milliards d'euros par le PLFSS, soit une augmentation de 5, 3 %.

Les perspectives financières de la branche sont temporairement améliorées par l'apport de 0, 15 point supplémentaire de contribution sociale généralisée (CSG) en provenance de la Cades, ce qui représente un surcroît de recettes de 2, 6 milliards d'euros. Ainsi, la branche passerait d'un déficit de 1, 1 milliard d'euros en 2023 à un excédent de 1, 3 milliard en 2024.

Toutefois, cet excédent devrait rapidement s'éroder sous l'effet du dynamisme tendanciel des dépenses. En l'absence de mesures nouvelles, il ne serait plus que de 0, 4 milliard d'euros en 2027. La question des ressources de la branche se posera donc de nouveau dans un avenir proche, dans un contexte de vieillissement de la population et de besoins encore insatisfaits.

Ce contexte exige une croissance du secteur médico-social qui sera difficile à soutenir. Alors que le Gouvernement avait annoncé le recrutement de 50 000 équivalents temps plein (ETP) dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) au cours du quinquennat, cet objectif a été repoussé à l'horizon 2030. Aux 3 000 ETP prévus cette année s'ajouteraient 6 000 recrutements financés en 2024. Cela permettra d'améliorer le taux d'encadrement des Ehpad, mais nous restons bien en deçà des besoins.

Quant au virage domiciliaire, il peine encore à se dessiner malgré les réformes engagées en 2022 et les efforts financiers qui en ont résulté. Des créations massives de places en services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) seraient nécessaires au cours des prochaines années pour répondre à la demande de services à domicile. Toutefois, l'objectif de créer 25 000 places se heurte aux profondes difficultés de recrutement que connaît le secteur.

Dans le champ du handicap, les 50 000 solutions nouvelles, annoncées lors de la dernière Conférence nationale du handicap, restent floues et agrègent des niveaux de prise en charge très divers. Pour 2024, ils incluent des moyens renforcés pour les centres d'action médico-sociale précoce (Camsp).

Afin de faire face aux défis qui se présentent pour la branche, ce PLFSS propose des mesures en demi-teinte.

La situation financière des établissements et des services sociaux et médico-sociaux, singulièrement celle des Ehpad, est préoccupante. Alors qu'une majorité d'établissements sont en déficit, le fonds d'urgence de 100 millions d'euros, prévu pour cette année par le PLFSS, qui concernera les Ehpad et les services à domicile de tous statuts, est nécessaire et bienvenu, mais, rapporté au nombre de structures, il s'apparente à un saupoudrage.

Le texte pourrait néanmoins marquer un tournant en matière de financement des Ehpad, en amorçant la fusion entre la section « soins », actuellement financée par la sécurité sociale, et la section « dépendance », financée par les départements. Cette répartition des ressources et des dépenses des établissements apparaît de moins en moins pertinente compte tenu de l'évolution du profil des personnes accueillies.

L'article 37 du projet de loi vise donc à introduire un régime adapté de financement des Ehpad, dans lequel une section « soins et entretien de l'autonomie » serait subventionnée par un forfait global unique, attribué par l'Agence régionale de santé (ARS) et financé par la branche autonomie. Ce régime, créé de manière pérenne, serait toutefois laissé au choix des départements – une sorte de régime à la carte.

La commission a considéré que cette réforme pourrait, à rebours des objectifs affichés, se traduire par des complexités supplémentaires. Elle propose donc de transformer ce régime adapté de financement en une expérimentation, avant toute généralisation et pérennisation du dispositif. J'ai cru comprendre, madame la ministre, que vous étiez favorable à cette proposition.

Plus largement, la commission appelle à rationaliser les concours financiers de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) aux départements pour les rendre plus lisibles et équitables.

L'article 38 du projet de loi vise à créer un nouveau service de repérage, de diagnostic et d'intervention précoce pour les enfants de moins de six ans susceptibles de présenter un handicap. La commission s'est interrogée sur la valeur ajoutée de ce dispositif, comme sur son articulation avec les plateformes déjà déployées pour prendre en charge les troubles du neuro-développement.

En revanche, mais vous l'avez également évoqué, madame la ministre, aucune solution n'est proposée pour les jeunes adultes maintenus dans des établissements pour enfants au titre de l'amendement Creton. Pour répondre à leur situation, la commission a prévu un dispositif expérimental de transition afin d'accompagner ces jeunes dès l'âge de 16 ans.

J'évoquerai, pour finir, l'article 38 bis, censé garantir le remboursement intégral des fauteuils roulants, mais dont la portée est très incertaine. Madame la ministre, pourriez-vous nous donner des précisions sur les conditions d'application de cette mesure et sur son coût financier ?

Sous ces réserves, la commission invite à approuver l'objectif de dépenses de la branche pour 2024.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu'au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Venons-en à ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

S’il contient quelques propositions intéressantes permettant de corriger les effets de bord ou les oublis de la réforme des retraites, je veux surtout insister ici sur deux mesures d’ampleur.

La première, prévue à l’article 9, consiste en l’adossement des régimes spéciaux fermés au régime général, qui sera désormais chargé d’assurer leur équilibre en lieu et place de l’État, lequel lui attribuera, en compensation, des recettes correspondant aux crédits actuels de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».

En parallèle, l’Agirc-Arrco versera au régime général une contribution correspondant aux cotisations perçues au titre des nouvelles affiliations liées à la fermeture des régimes spéciaux, ce qui me paraît tout à fait légitime dans la mesure où ceux-ci demeurent responsables du paiement des pensions des assurés affiliés avant le 1er septembre.

Ce qui l’est beaucoup moins, en revanche, c’est la seconde contribution demandée à l’Agirc-Arrco au titre des gains que le régime complémentaire tire de la réforme des retraites.

De fait, le Gouvernement lui demande une contribution correspondant aux gains bruts engendrés par la réforme, alors que les partenaires sociaux ont décidé de financer à partir de ces gains la suppression du bonus-malus, la création de droits au titre du dispositif de cumul emploi-retraite et la revalorisation des pensions à un niveau proche de l’inflation.

En outre, après l’abandon du système universel de retraite et de l’unification du recouvrement social, il n’est pas acceptable que le Gouvernement tente une troisième fois de s’imposer aux partenaires sociaux, dont les décisions courageuses ont permis de redresser la trajectoire financière de l’Agirc-Arrco au prix d’efforts importants consentis par les travailleurs.

La commission vous propose donc, mes chers collègues, de témoigner une fois de plus notre attachement au paritarisme, en lui confiant, et à lui seul, la responsabilité de décider de contribuer ou non au financement des déficits du régime général.

La confiance envers les partenaires sociaux, telle est également la position que je vous proposerai d’adopter sur la réforme de l’assiette sociale des travailleurs indépendants, prévue à l’article 10 ter.

Le Gouvernement souhaite en effet assurer la neutralité financière de cette réforme, qui est très attendue des professionnels dans la mesure où elle leur permettra, à niveau global de prélèvements constant, de cotiser davantage et, donc, de se voir accorder des droits supplémentaires.

Pour ce faire, il demande notamment à être habilité à modifier lui-même les taux et les barèmes des cotisations de retraite complémentaire des professionnels libéraux. Là encore, la commission vous invitera à refuser d’accorder une telle autorisation qui non seulement n’a pas sa place dans une loi de financement de la sécurité sociale, mais constituerait également un dangereux précédent.

J’en profite pour déplorer le choix d’inclure dans le texte une réforme d’une telle ampleur, dont le coût brut s’élèverait à 1, 4 milliard d’euros, et ce par voie d’amendement, sans étude d’impact, dans la précipitation la plus totale, alors qu’elle n’a pas vocation à s’appliquer avant 2026. Aucune information ne m’a par ailleurs été communiquée au sujet des professions qui y perdraient en raison de ce nouveau mode de calcul. Il n’est pas acceptable, monsieur le ministre, que la représentation nationale soit contrainte de travailler dans de telles conditions.

Enfin, notre commission a souhaité aller au-delà des quelques mesures proposées par le Gouvernement pour lutter contre la fraude aux prestations sociales. C’est la raison pour laquelle elle vous soumettra un amendement tendant à rendre obligatoire le contrôle biométrique de l’existence des bénéficiaires de pensions de retraite résidant à l’étranger d’ici à trois ans, afin de mettre un terme aux pratiques scandaleuses observées dans un certain nombre de pays, où les ayants droit de retraités décédés depuis longtemps continuent de percevoir leur pension.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, la commission des finances, saisie pour avis, a émis un avis favorable sur ce texte, non parce qu'elle a considéré que la politique menée est la bonne ni parce qu'elle a jugé la trajectoire financière suivie convaincante, mais pour que le Sénat discute de ce texte et l'améliore.

Depuis la crise sanitaire, la situation des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) s'est redressée : un déficit de – seulement… – 8, 8 milliards d'euros est ainsi attendu en 2023. Si l'on peut se réjouir que le déficit se réduise, il est toutefois inquiétant qu'il diminue moins qu'attendu.

La résorption du déficit résulte principalement du dynamisme des recettes, qui est lié à la progression de l'emploi et de la masse salariale.

Cependant, en dépenses, le fameux Ondam connaîtrait un dépassement de 2, 8 milliards d'euros en 2023, qui s'explique notamment par l'évolution des soins de ville.

Ce dépassement intervient alors que les surcoûts imputables à la crise sanitaire se sont considérablement et logiquement réduits : ils ne représentent plus que 900 millions d'euros en 2023. Toutefois, la crise a durablement affecté la trajectoire de l'Ondam, qui s'établit en 2023 à un niveau supérieur de 14, 2 milliards d'euros à celui d'un scénario sans crise et, surtout, sans Ségur de la santé.

En ce qui concerne 2024, la dynamique des recettes ralentirait, contrairement à celle des dépenses, qui s'accroîtrait. En clair, tout ce qu'il ne faut pas faire !

En ce qui concerne les recettes, la moindre progression de la masse salariale du secteur privé ne serait que partiellement compensée par le transfert à la branche autonomie de 0, 15 point de CSG, auparavant affecté à la Cades.

L'objectif de dépenses pour 2024, quant à lui, connaîtrait un véritable rebond.

La hausse des dépenses de la branche maladie devrait en principe être modérée – l'Ondam n'augmenterait que de 2, 95 % par rapport à 2023 –, mais les dépenses de la branche vieillesse devraient être soigneusement surveillées. À ce propos, madame, messieurs les ministres, le sujet des retraites a été quasiment absent de vos interventions – M. Cazenave l'a certes un peu abordé –, ce qui m'a surpris.

Le report de l'âge d'ouverture des droits ne produira que progressivement des effets, alors que les mesures d'accompagnement ont un résultat immédiat. Le solde de la branche se dégraderait ainsi de 4 milliards d'euros en 2024. Le déficit global repartirait à la hausse en 2024 pour s'établir à 11, 1 milliards d'euros.

Il s'agit d'une situation inquiétante dans la mesure où le déficit, c'est de la dette – chacun le sait – et où les conditions de remboursement de la dette sociale se sont sérieusement dégradées ces dernières années. En effet, le taux moyen de refinancement de la Cades a connu une hausse inquiétante, en passant de 0, 62 % au début de l'année 2022 à 1, 93 % aujourd'hui, certains taux approchant même les 3 %.

Dans le même temps, les ressources dont dispose la Cades pour amortir la dette sociale ont diminué : 0, 15 point de CSG lui est retiré en 2024 et le versement du Fonds de réserve pour les retraites passera, à partir de 2025, de 2, 1 milliards à 1, 45 milliard d'euros.

J'en viens aux prévisions pluriannuelles. Le déficit de la sécurité sociale continuerait à se dégrader pour s'établir à 17, 5 milliards d'euros en 2027. Pire, ce scénario défavorable repose sur des hypothèses macroéconomiques de croissance qui ont été jugées « optimistes » par le Haut Conseil des finances publiques. Nous pouvons donc nous attendre à une dégradation encore plus importante.

Concernant la branche maladie, la progression continue des dépenses et les dépassements réguliers de l'Ondam de ville devraient faire l'objet d'une réflexion approfondie. En effet, le Gouvernement se refuse – cela a été patent lors de l'examen du projet de loi de programmation des finances publiques – à envisager sérieusement une régulation des soins de ville. L'avenir de la maîtrise des dépenses d'assurance maladie est donc un impensé de la part du Gouvernement.

Au sujet de la branche vieillesse, il est inquiétant de constater que la réforme des retraites produira vraisemblablement des effets moindres que ce qui était escompté. En particulier – et cela n'a pas été abordé –, la situation de la CNRACL est de plus en plus préoccupante : son déficit ne cesse de s'aggraver, il atteindrait près de 6, 5 milliards d'euros en 2030.

Plus globalement, les déficits cumulés du budget de la sécurité sociale de 2024 à 2027 représenteraient quelque 60 milliards d'euros. Ils pourraient conduire à une nouvelle reprise de dette par la Cades, ce qui repousserait la perspective de son extinction au-delà de 2033.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, vous aurez compris que ma position personnelle sur l'équilibre général du texte est réservée.

Mme la ministre des solidarités et des familles sourit.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Il s’agit d’assurer ensemble, mes chers collègues, l’équité et la justice de notre système de retraite. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP. – M. le rapporteur pour avis applaudit également.)

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

M. Vincent Delahaye, rapporteur pour avis. À défaut, nous continuerons d'être une génération d'égoïstes qui fait financer ses prestations par les générations futures. Cette manière de faire ne m'apparaît ni saine ni morale.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

Applaudissements

Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, comme l'année dernière, le Gouvernement a dû utiliser les dispositions du troisième alinéa de l'article 49 de la Constitution afin que le projet de loi de financement de la sécurité sociale soit adopté par l'Assemblée nationale.

Comme l'année dernière, il en résulte, paradoxalement, des délais d'examen dégradés pour le Sénat. À cet égard, je tiens à saluer nos rapporteurs qui n'ont pas ménagé leurs efforts pour présenter au Sénat, en commission, puis en séance publique, une position cohérente sur ce texte.

Ils ont d'autant plus de mérite que de nombreuses réponses à leurs interrogations leur sont parvenues très tardivement, voire jamais... Je pense, en particulier, aux éléments communiqués au président de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) de l'Assemblée nationale sur les franchises médicales, dont notre rapporteure pour l'assurance maladie n'a jamais obtenu la transmission. Cela ne me semble pas acceptable et contraire à la lettre, comme à l'esprit, de la loi organique.

Enfin, comme l'année dernière, l'engagement de sa responsabilité devant l'Assemblée nationale aurait pu permettre au Gouvernement de soumettre au Sénat un texte resserré sur l'essentiel et présentant des priorités claires. Or, une nouvelle fois, c'est un texte confus et bavard qui nous parvient, certes enrichi de dispositions diverses, mais souvent de faible portée, sans parler des nombreuses demandes de rapport émanant de l'ensemble des groupes politiques.

Sur le fond, les rapporteurs ont déjà présenté la position de la commission.

Madame, messieurs les ministres, vous l'aurez compris, nous souhaitons un débat complet sur ce PLFSS d'autant que l'Assemblée nationale en a été privée.

Nous souhaitons exprimer notre scepticisme au sujet de l'Ondam que vous proposez pour 2024 et notre vive inquiétude face à la dette perpétuelle à laquelle vous semblez condamner la sécurité sociale selon vos propres projections financières.

Nous souhaitons aussi formuler des propositions, tout d'abord, pour renforcer le contrôle du Parlement sur les comptes sociaux – par exemple, en cas de dépassement de l'Ondam ou sur les crédits des agences –, ensuite, pour responsabiliser les différentes parties prenantes dans le domaine de la santé, qu'il s'agisse des patients ou des professionnels.

Nous souhaitons également mieux lutter contre la fraude et nous proposons des mesures ayant trait, d'une part, aux bénéficiaires de pension de retraite établis hors de France, d'autre part, à la carte Vitale biométrique, question récurrente que nous ne voyons pas avancer.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Henno

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, d’une certaine façon, l’avis de la commission est partagé au sujet de la branche famille.

Comme je l’ai dit en commission, nous entendons bien votre allant, votre désir d’agir, madame la ministre. Votre discours sur la natalité et la démographie est doux à nos oreilles, d’autant que notre pays ne comptabilise plus que 700 000 naissances par an contre 850 000 naissances auparavant.

Il est donc nécessaire d’attribuer une forme de priorité à notre politique familiale, a fortiori parce que le groupe UC et la majorité sénatoriale estiment que cette politique a un rôle majeur à jouer pour que la démographie se redresse dans notre pays.

Or, si nous regardons de manière factuelle la politique familiale telle qu’elle est retranscrite dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous sommes tentés de conclure que c’est la grande oubliée.

Dressons un rapide état des lieux : les allocations familiales ne sont toujours pas universelles – elles ne le sont malheureusement plus depuis 2015 – ; la réforme du tiers payant du complément de libre choix du mode de garde (CMG) dit « structure » est encore repoussée ; il n’y a nulle trace dans le texte de la réforme du congé parental, que vous avez pourtant annoncée, madame la ministre – un sujet que nous suivrons avec attention.

Se pose aussi la question de l’attractivité des métiers. J’ajoute – j’ouvre ainsi une parenthèse – que la médecine scolaire, la médecine de protection maternelle et infantile (PMI) comme la médecine du travail sont en crise. Enfin, nous sommes confrontés à une certaine nébuleuse quant à la mise en place annoncée d’un service public de la petite enfance – un objectif que nous partageons –, ainsi qu’à la création de places en crèche et de nouvelles solutions de garde.

En somme, vous nous avez mis en appétit, mais nous n’avons pas grand-chose à nous mettre sous la dent dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Selon les prévisions du Gouvernement, les dépenses de la branche famille devraient s’élever à 58 milliards d’euros, en hausse par rapport à 2022. Cette dynamique est d’abord le résultat de l’indexation des prestations légales et des quelques mesures votées les années précédentes.

Elle intègre également les efforts financiers de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) relatifs aux prestations extralégales en faveur des accueils collectifs. Les dépenses du Fonds national d’action sociale de la branche augmenteraient ainsi de 6, 4 % en 2023.

Enfin, et surtout, la hausse des dépenses traduit le transfert, décidé dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, de 60 % des charges de congé maternité à la Cnaf depuis la branche maladie, ce qui correspond à une amputation de 2 milliards d’euros.

La sécurité sociale parvient de moins en moins à soutenir l’ensemble des ménages au moment de la naissance d’un enfant. Je pense notamment aux familles de la classe moyenne, exclues par les barèmes de prestations, sans pour autant disposer des revenus nécessaires pour réaliser leur désir d’enfant.

Pire, le solde de la branche ne permet pas de dégager les marges de manœuvre suffisantes pour financer les réformes annoncées par le Gouvernement et encore moins les autres réformes nécessaires – c’est l’une de nos préoccupations.

C’est pourquoi un amendement de Mme la rapporteure générale vise à abonder les recettes de la branche famille de 2 milliards d’euros, transférés des comptes de l’assurance maladie. Ainsi, on ne pourra pas nous faire le coup de l’ambition qui ne peut pas se concrétiser faute de moyens.

En ce qui concerne la politique familiale, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale constitue une sorte d’année blanche.

La commission est favorable à l’adoption de l’article 46 bis qui prévoit un assouplissement de la prise du congé de paternité et d’accueil de l’enfant pour les non-salariés agricoles.

L’article 46 ter, quant à lui, prévoit plusieurs ajustements marginaux à la réforme du complément de libre choix du mode de garde. Si la commission est favorable à la plupart d’entre eux, elle souhaite toutefois conserver le dispositif qui permet de tenir compte des horaires atypiques de garde pour des parents travaillant la nuit ou le week-end. Elle a déposé un amendement en ce sens, car elle a jugé que la réforme à venir du CMG devait répondre à l’ensemble des situations familiales.

L’article 46 ter prévoit également de reporter à 2026 l’entrée en vigueur de la réforme du tiers payant du CMG. Or nous souhaitons que cette réforme soit applicable le plus rapidement possible. Il ne s’agirait pas qu’elle soit de nouveau reportée.

L’universalité de la politique familiale ne se décrète pas. C’est comme en amour : seules comptent les preuves ! §Aussi doit-elle s’incarner sous la forme de mesures concrètes. Tant que les allocations familiales ne profiteront pas à toutes les familles de la même manière, et ce pour des raisons budgétaires, il n’y aura pas de politique universelle.

Sachons répondre aux angoisses des familles, pas seulement par des mots, mais aussi par des réformes courageuses et ambitieuses !

Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP. – Mme Solanges Nadille et M. le rapporteur pour avis applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

Nous souhaitons également aider le Gouvernement – oui, l'aider – à ne pas transformer des idées intéressantes en des échecs programmés faute de préparation adéquate. Je pense, bien sûr, à la réforme du financement des hôpitaux, mais aussi à la fusion des sections « soins » et « dépendance » des budgets des Ehpad. Dans un cas, comme dans l'autre, une expérimentation solide nous semble un préalable indispensable à une généralisation.

Nous souhaitons enfin indiquer nos priorités, en particulier en faveur des familles, peu présentes dans ce PLFSS – madame la ministre, si le discours existe, les traductions budgétaires sont plutôt absentes –, mais également en faveur des collectivités territoriales.

Nous avons par exemple entendu, ces derniers jours, les représentants de l'Assemblée des départements de France, qui s'inquiètent de leur situation financière. Madame, messieurs les ministres, nous devons soutenir les départements dans les efforts qu'ils fournissent notamment en matière de dépendance.

Nous marquerons aussi notre respect du paritarisme, en ne permettant pas que le Gouvernement se serve dans les caisses de l'Unédic et de l'Agirc-Arrco.

Enfin, comme notre rapporteure générale l'a indiqué, la commission soumettra à la Haute Assemblée le rétablissement des articles obligatoires de ce PLFSS que l'Assemblée nationale a supprimés et dont la suppression conforme aurait posé un problème constitutionnel manifeste. Néanmoins, elle le fera en proposant une révision de l'Ondam pour 2023, dont le volet hospitalier nous semble encore sous-financé.

J'espère que non seulement le Gouvernement saura y voir une main tendue, mais qu'il saura la saisir, notamment lors de la nouvelle lecture du texte à l'Assemblée nationale.

Pour conclure, je rappelle que nos propositions s'inscrivent dans un cadre strictement budgétaire – c'est un texte financier.

Elles ne sauraient donc remplacer de grandes lois structurantes, seules à même de remettre à plat des secteurs comme la santé ou le grand âge, pour lesquels la confiance des professionnels et des Français dans leur ensemble s'étiole année après année malgré une augmentation des moyens financiers. Un débat de responsabilité à l'égard des générations futures doit avoir lieu – vous l'avez également évoqué, monsieur le rapporteur pour avis.

Il nous semble nécessaire de remettre à plat un certain nombre de choses et de proposer un ensemble structurant de réformes. Il est impossible de se limiter à quelques propositions de loi, quel que soit leur intérêt. Le Gouvernement doit prendre ses responsabilités, les assumer et ensuite les traduire dans les PLFSS. Tel est notre état d'esprit aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées des groupes UC et INDEP, ainsi qu'au banc des commissions.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. le président de la commission applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Richer

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, après une année 2023 marquée par un excédent record de 1, 9 milliard d’euros, la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) connaîtra de nouveau une situation excédentaire en 2024.

Malgré la baisse des taux de cotisation pour la branche, actée lors de la réforme des retraites afin de garantir la neutralité financière pour les employeurs d’une hausse symétrique des taux pour la branche vieillesse, les 17, 1 milliards d’euros de recettes prévisionnelles pour 2024 seront suffisants pour couvrir l’objectif de dépenses de la branche, fixé à 16 milliards d’euros, que je vous inviterai à adopter.

L’excédent structurel de la branche AT-MP peut paraître confortable, voire enviable, au regard de la situation financière d’autres branches.

Je l’entends, mais ce serait méconnaître un principe essentiel : une branche n’a pas davantage vocation à être excédentaire qu’à être déficitaire. Cet excédent structurel est en fait le signe d’une déconnexion à long terme entre les besoins de financement de la branche et ses recettes, illustrée par l’excédent cumulé toujours croissant de la branche, qui atteindra – rendez-vous compte ! – 12, 5 milliards d’euros à l’horizon 2027. Ce sont là autant de contributions réclamées à l’employeur qui ne servent pas leur destination originelle : lutter contre les risques professionnels et indemniser les victimes.

Et pourtant, malgré cette situation structurellement excédentaire, force est de constater que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est, une fois de plus, indigent pour ce qui concerne la branche AT-MP.

Alors que le renforcement de la prévention est au cœur de toutes les revendications, tant chez les organisations patronales que syndicales, le Gouvernement n’a pas jugé bon d’inclure la moindre mesure en la matière dans le texte initial.

Nous attendions – et nous continuerons malheureusement d’attendre… – un changement de paradigme sur la manière dont la prévention est envisagée par la branche.

Croyez-vous, monsieur le ministre, que les spots télévisuels déployés depuis un mois soient suffisants, alors que près d’un million de sinistres restent à déplorer chaque année et que les dépenses de prévention dépassent péniblement 2 % des dépenses de la branche ?

Que faut-il attendre pour que soit mis en œuvre un véritable accompagnement des entreprises en matière de prévention ?

Le succès indéniable des programmes s’inscrivant dans une démarche d’« aller vers », comme TMS-Pros, devrait pourtant conduire à encourager, étendre et développer de telles initiatives.

Pas de prévention donc, mais, à la place, des prélèvements pesant toujours plus sur la branche AT-MP. Il semblerait qu’il soit normal que la branche, parce qu’elle est excédentaire, voie ses ressources siphonnées. Naturellement, la commission s’y oppose et elle propose de revoir à la baisse le transfert de crédits à la branche maladie au titre de la sous-déclaration.

Elle a également déploré le fait que, bien que l’État soit responsable du scandale de l’amiante, le Gouvernement laisse la branche AT-MP augmenter de 50 % en 2024 sa dotation au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Fiva) sans avancer lui-même un centime de plus.

Dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, c’est toutefois une autre mesure qui a concentré tous les débats, mais aussi, et surtout, toutes les critiques. Le Gouvernement était très attendu sur l’article 39, qui devait engager une réforme ambitieuse de la rente AT-MP et transposer un accord national interprofessionnel (ANI) signé à l’unanimité des partenaires sociaux.

Le résultat est décevant, puisque les partenaires sociaux ne se reconnaissent pas dans les modalités de transcription retenues. En court-circuitant le dialogue social, en réclamant un chèque en blanc au Parlement sur une réforme dont tout rester à déterminer, en ignorant les associations, le résultat est là : un article qui, en définitive, ne satisfait quasiment personne et est mal compris et inapplicable en l’état.

L’article 39 a exacerbé les tensions entre partenaires sociaux. En l’absence de consensus, il a été supprimé du texte qui nous a été transmis – et je vous inviterai naturellement à vous prononcer pour la confirmation de cette suppression.

L’ANI doit maintenant faire l’objet, si un consensus venait à être trouvé, d’une transcription intégrale dans un projet de loi ad hoc. Il est possible de retravailler le texte et d’adopter une réforme plus équilibrée sans retarder excessivement le calendrier de mise en œuvre initialement prévu pour l’article 39, fixé à fin 2024, ce qui permettra de répondre ainsi aux inquiétudes des organisations patronales auditionnées. Cette réforme devra convenir à toutes les parties, y compris aux associations de défense des victimes.

Les trois autres articles comportent des mesures utiles, à n’en pas douter, mais dont les répercussions financières sur l’équilibre de la branche AT-MP devraient être modestes : je vous invite à adopter ces mesures, mais à les améliorer en votant les amendements de la commission.

L’article 26 prévoit que les médecins du travail puissent déléguer à des infirmiers qualifiés en santé au travail, dans la limite de leurs compétences et dans un cadre sécurisé par la commission, certains actes du renouvellement périodique de l’examen médical d’aptitude des salariés agricoles bénéficiaires du suivi individuel renforcé. En ce sens, il accroîtra l’accessibilité aux médecins du travail et renforcera l’attractivité des services de santé et de sécurité au travail des caisses de la Mutualité sociale agricole.

L’article 39 bis sécurisera, pour le passé et pour l’avenir, le versement de deux prestations relevant du régime des marins, tandis que l’article 39 ter offrira de nouveaux outils au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante pour lutter contre un non-recours alarmant, qui avoisinerait les 50 % pour les victimes de mésothéliome.

Photo de Alain Marc

Je suis saisi, par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, d'une motion n° 944.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l'article 44, alinéa 3 du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 (77, 2023-2024), considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour la motion.

Photo de Alain Marc

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.

Photo de Cathy Apourceau-Poly

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, alors que nous entamons l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, soit un budget de 640 milliards d'euros, nous avons une pensée pour nos collègues députés qui n'ont pas pu en débattre. Une fois de plus, vous avez préféré un passage en force.

En ayant recours à votre sacro-saint article 49, alinéa 3, de la Constitution pour l'adoption des parties recettes et dépenses, seuls neuf articles sur les cinquante que compte le texte ont finalement été discutés par les députés.

L'absence de majorité parlementaire favorable au Gouvernement ne doit pas masquer la gravité de la situation de la sécurité sociale, victime de vingt ans de privations, d'étatisation, de désinvestissement et de réduction d'effectifs.

Le débat que nous entamons sur le budget de la sécurité sociale pour 2024 sera l'occasion de confronter nos visions de notre modèle social.

Lors de la réunion de la commission des affaires sociales, l'ensemble des groupes politiques, dans leur diversité, ont indiqué qu'il était impossible de continuer ainsi, sans réforme structurelle de la sécurité sociale.

L'hôpital public va mal, la médecine de ville est en crise, les difficultés d'accès aux soins progressent. Pourtant, les dépenses augmentent, se sont étonnés naïvement certains de nos collègues – nous pensons néanmoins qu'ils voteront le PLFSS…

Les gouvernements successifs, qui ont tenté de compresser les dépenses pour satisfaire aux exigences de Bruxelles, ont sous-estimé les conséquences de l'austérité sur notre protection sociale.

Les personnels du secteur sanitaire, médico-social et social, qui acceptaient, depuis des années, des conditions de travail dégradées et des rémunérations insuffisantes, ont craqué. Or, lorsque les personnels n'en peuvent plus, c'est tout un système qui s'effondre.

Ils ont craqué, car leur attachement au service public et le sens de l'intérêt général, qui les faisaient se lever chaque matin, ne suffisaient plus face à la mise en danger des patients.

La violence institutionnelle qui s'exerce sur les personnels qui refusent de continuer de subir une telle surcharge et de telles conditions de travail entraîne des démissions massives. On parle de 15 000 postes vacants chez les praticiens hospitaliers et d'autant pour les infirmières.

Selon la Fédération hospitalière de France, pour améliorer le recrutement, les capacités de formation devraient être augmentées de 20 %, s'agissant des médecins, et de 25 %, pour les personnels paramédicaux.

Quand prendrez-vous de véritables mesures pour pallier ces manques ?

Nous le savons : il faut, entre autres, améliorer les rémunérations, la qualité de vie et les conditions de travail – sans cela, c'est peine perdue ! Ce sont les seules véritables conditions qui permettront de retenir celles et ceux qui exercent aujourd'hui.

Je pense par exemple à Marie-Pierre, 27 ans, infirmière qui a quitté les urgences pédiatriques de l'hôpital Necker, car elle était arrivée à saturation et ne supportait plus la manière dont les patients étaient traités.

Ce témoignage sur le travail à l'hôpital, je l'ai également entendu dans les services médico-sociaux, dans les Ehpad et dans l'ensemble des services sociaux.

Toutefois, comment faire pour améliorer les conditions de travail sans moyens supplémentaires ? Est-ce alors sérieux de laisser miroiter que cela ira mieux demain ?

Les personnels n'en peuvent plus et le Gouvernement, d'un côté, agite le Ségur de l'investissement et, de l'autre, réduit de 500 millions d'euros les dépenses des hôpitaux.

En ajoutant à tout cela le coût de l'énergie et l'inflation, les hôpitaux sont au bord de l'implosion.

Le « en même temps » n'est pas une manière de gouverner, l'entre-deux en matière de santé n'est plus possible : l'austérité ou l'investissement, il faut choisir !

Le Président de la République, qui s'est déclaré favorable à l'organisation de référendums dans notre pays, devrait poser la question directement à nos concitoyennes et à nos concitoyens.

Devons-nous poursuivre les politiques d'austérité et de compression des dépenses de santé, en acceptant de patienter des jours, parfois des semaines, avant d'obtenir un rendez-vous chez un médecin, en acceptant des fermetures de services d'urgence les week-ends, en acceptant d'y attendre des heures entières sur des brancards ?

Ou devons-nous financer les dépenses de santé à la hauteur des besoins, en revalorisant l'Ondam de 10 milliards d'euros net, déduction faite de l'inflation ?

Cette politique n'est pas utopiste ; c'est un choix de société qui repose sur des choix de solidarité et de financement.

Pour financer notre système de sécurité sociale à la hauteur des besoins, nous proposons de revenir sur les exonérations de cotisations.

En 2024, le Gouvernement prévoit d'exonérer les entreprises de 87, 9 milliards d'euros, soit deux fois plus qu'il y a dix ans ; 87, 9 milliards d'euros, c'est autant d'argent public perdu pour les recettes de l'État ; 87, 9 milliards d'euros, c'est autant d'argent supplémentaire pour les patrons et les actionnaires qui n'est consacré ni à des recrutements supplémentaires ni à l'augmentation des salaires.

Le directeur de recherche du CNRS, Bruno Palier, a des mots particulièrement durs sur les politiques d'exonération de cotisations sociales et d'aides aux entreprises. Selon lui, les politiques de baisse du coût du travail se sont révélées inefficaces en matière d'emploi et délétères pour le travail et, depuis 1993, les plans généraux de baisse des cotisations sociales, les allégements Fillon, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi de François Hollande ont eu pour effets de dévaloriser, d'intensifier et d'abîmer le travail en France.

Il faut ajouter à cela un transfert de financement : des cotisations patronales sont remplacées par des compensations partielles de la part de l'État via des fractions de recettes de TVA.

Ainsi, les entreprises ne participent plus au financement de la sécurité sociale en dessous de 3, 5 Smic, tandis que nos concitoyennes et nos concitoyens qui achètent leur baguette de pain financent leur retraite et leur hôpital.

Cette incongruité pourrait nous amener à sourire si, en creux, elle ne remettait pas en cause le pacte social de la nation. Les besoins augmentent et les dépenses continueront inexorablement à progresser avec le vieillissement de la société.

Pour réussir à financer notre système de sécurité sociale, il faut mettre à contribution les revenus financiers des entreprises et moduler leurs cotisations selon les politiques sociales et environnementales qu'elles mettent ou non en place.

Plutôt que de chercher de nouvelles recettes, le Gouvernement réduit les dépenses, en faisant les poches des malades au travers de son projet de doublement des franchises médicales. Selon un sondage Elabe du 2 novembre, 63 % des Français estiment que le doublement de la franchise sur les médicaments n'est pas acceptable et que cela contribuerait à détériorer l'accès à la santé.

Face au risque politique, le Gouvernement recule, mais il ne renonce pas à augmenter le reste à charge des malades par la publication d'un décret dans quelques semaines, ce qui lui évite un débat devant le Parlement…

Cet été, le ministre de l'économie avait dénoncé l'augmentation des dépenses d'indemnités journalières maladie au cours des dernières années. Si la proposition d'augmenter les délais de carence en cas d'arrêt maladie ne figure pas dans le PLFSS 2024, le débat pourrait être rouvert par voie d'amendement, cette année ou l'an prochain.

Ce PLFSS prévoit plusieurs mesures de culpabilisation et de stigmatisation des patients.

Je pense à la limitation à trois jours de la durée des arrêts de travail prescrits lors d'une téléconsultation, alors que six millions de Français n'ont pas de médecin traitant.

Je pense surtout à la suspension du versement des indemnités journalières après un rapport du médecin contrôleur jugeant un arrêt injustifié.

Cette suspension automatique des indemnités journalières versées par la sécurité sociale, à la suite du contrôle mandaté par l'employeur, est scandaleuse. Elle résulte de l'idée selon laquelle la hausse des dépenses d'indemnités journalières serait due à des médecins trop généreux ou à des travailleurs abuseurs.

En réalité, l'augmentation des indemnités journalières s'explique par le vieillissement de la population active. Cette progression perdurera du fait du recul de l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans.

Le contrôle des arrêts maladie indemnisés par l'assurance maladie doit rester l'apanage de cette dernière, avec des garanties de débat et de recours. Le risque de dérive vers une privatisation du contrôle de l'assuré social et l'instrumentalisation par l'employeur de cette procédure à l'égard de salariés en position de fragilité est intolérable.

Pour financer la réforme qui crée France Travail, le Gouvernement prévoit d'effectuer une ponction de 2, 7 milliards d'euros sur les excédents de l'Unédic.

Photo de Xavier Iacovelli

Des excédents dus à la réforme des retraites !

Photo de Chantal Deseyne

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’objectif de dépenses de la branche autonomie pour 2024 est fixé à 39, 9 milliards d’euros par le PLFSS, soit une augmentation de 5, 3 %.

Les perspectives financières de la branche sont temporairement améliorées par l’apport de 0, 15 point supplémentaire de contribution sociale généralisée (CSG) en provenance de la Cades, ce qui représente un surcroît de recettes de 2, 6 milliards d’euros. Ainsi, la branche passerait d’un déficit de 1, 1 milliard d’euros en 2023 à un excédent de 1, 3 milliard en 2024.

Toutefois, cet excédent devrait rapidement s’éroder sous l’effet du dynamisme tendanciel des dépenses. En l’absence de mesures nouvelles, il ne serait plus que de 0, 4 milliard d’euros en 2027. La question des ressources de la branche se posera donc de nouveau dans un avenir proche, dans un contexte de vieillissement de la population et de besoins encore insatisfaits.

Ce contexte exige une croissance du secteur médico-social qui sera difficile à soutenir. Alors que le Gouvernement avait annoncé le recrutement de 50 000 équivalents temps plein (ETP) dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) au cours du quinquennat, cet objectif a été repoussé à l’horizon 2030. Aux 3 000 ETP prévus cette année s’ajouteraient 6 000 recrutements financés en 2024. Cela permettra d’améliorer le taux d’encadrement des Ehpad, mais nous restons bien en deçà des besoins.

Quant au virage domiciliaire, il peine encore à se dessiner malgré les réformes engagées en 2022 et les efforts financiers qui en ont résulté. Des créations massives de places en services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) seraient nécessaires au cours des prochaines années pour répondre à la demande de services à domicile. Toutefois, l’objectif de créer 25 000 places se heurte aux profondes difficultés de recrutement que connaît le secteur.

Dans le champ du handicap, les 50 000 solutions nouvelles, annoncées lors de la dernière Conférence nationale du handicap, restent floues et agrègent des niveaux de prise en charge très divers. Pour 2024, ils incluent des moyens renforcés pour les centres d’action médico-sociale précoce (Camsp).

Afin de faire face aux défis qui se présentent pour la branche, ce PLFSS propose des mesures en demi-teinte.

La situation financière des établissements et des services sociaux et médico-sociaux, singulièrement celle des Ehpad, est préoccupante. Alors qu’une majorité d’établissements sont en déficit, le fonds d’urgence de 100 millions d’euros, prévu pour cette année par le PLFSS, qui concernera les Ehpad et les services à domicile de tous statuts, est nécessaire et bienvenu, mais, rapporté au nombre de structures, il s’apparente à un saupoudrage.

Le texte pourrait néanmoins marquer un tournant en matière de financement des Ehpad, en amorçant la fusion entre la section « soins », actuellement financée par la sécurité sociale, et la section « dépendance », financée par les départements. Cette répartition des ressources et des dépenses des établissements apparaît de moins en moins pertinente compte tenu de l’évolution du profil des personnes accueillies.

L’article 37 du projet de loi vise donc à introduire un régime adapté de financement des Ehpad, dans lequel une section « soins et entretien de l’autonomie » serait subventionnée par un forfait global unique, attribué par l’Agence régionale de santé (ARS) et financé par la branche autonomie. Ce régime, créé de manière pérenne, serait toutefois laissé au choix des départements – une sorte de régime à la carte.

La commission a considéré que cette réforme pourrait, à rebours des objectifs affichés, se traduire par des complexités supplémentaires. Elle propose donc de transformer ce régime adapté de financement en une expérimentation, avant toute généralisation et pérennisation du dispositif. J’ai cru comprendre, madame la ministre, que vous étiez favorable à cette proposition.

Plus largement, la commission appelle à rationaliser les concours financiers de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) aux départements pour les rendre plus lisibles et équitables.

L’article 38 du projet de loi vise à créer un nouveau service de repérage, de diagnostic et d’intervention précoce pour les enfants de moins de six ans susceptibles de présenter un handicap. La commission s’est interrogée sur la valeur ajoutée de ce dispositif, comme sur son articulation avec les plateformes déjà déployées pour prendre en charge les troubles du neuro-développement.

En revanche, mais vous l’avez également évoqué, madame la ministre, aucune solution n’est proposée pour les jeunes adultes maintenus dans des établissements pour enfants au titre de l’amendement Creton. Pour répondre à leur situation, la commission a prévu un dispositif expérimental de transition afin d’accompagner ces jeunes dès l’âge de 16 ans.

J’évoquerai, pour finir, l’article 38 bis, censé garantir le remboursement intégral des fauteuils roulants, mais dont la portée est très incertaine. Madame la ministre, pourriez-vous nous donner des précisions sur les conditions d’application de cette mesure et sur son coût financier ?

Sous ces réserves, la commission invite à approuver l’objectif de dépenses de la branche pour 2024.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Deseyne

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’objectif de dépenses de la branche autonomie pour 2024 est fixé à 39, 9 milliards d’euros par le PLFSS, soit une augmentation de 5, 3 %.

Les perspectives financières de la branche sont temporairement améliorées par l’apport de 0, 15 point supplémentaire de contribution sociale généralisée (CSG) en provenance de la Cades, ce qui représente un surcroît de recettes de 2, 6 milliards d’euros. Ainsi, la branche passerait d’un déficit de 1, 1 milliard d’euros en 2023 à un excédent de 1, 3 milliard en 2024.

Toutefois, cet excédent devrait rapidement s’éroder sous l’effet du dynamisme tendanciel des dépenses. En l’absence de mesures nouvelles, il ne serait plus que de 0, 4 milliard d’euros en 2027. La question des ressources de la branche se posera donc de nouveau dans un avenir proche, dans un contexte de vieillissement de la population et de besoins encore insatisfaits.

Ce contexte exige une croissance du secteur médico-social qui sera difficile à soutenir. Alors que le Gouvernement avait annoncé le recrutement de 50 000 équivalents temps plein (ETP) dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) au cours du quinquennat, cet objectif a été repoussé à l’horizon de 2030. Aux 3 000 ETP prévus cette année s’ajouteraient 6 000 recrutements financés en 2024. Cela permettra d’améliorer le taux d’encadrement des Ehpad, mais nous restons bien en deçà des besoins.

Quant au virage domiciliaire, il peine encore à se dessiner malgré les réformes engagées en 2022 et les efforts financiers qui en ont résulté. Des créations massives de places en Ssiad seraient nécessaires au cours des prochaines années pour répondre à la demande de services à domicile. Toutefois, l’objectif de créer 25 000 places se heurte aux profondes difficultés de recrutement que connaît le secteur.

Dans le champ du handicap, les 50 000 solutions nouvelles, annoncées lors de la dernière Conférence nationale du handicap, restent floues et agrègent des niveaux de prise en charge très divers. Pour 2024, ils incluent des moyens renforcés pour les centres d’action médico-sociale précoce (Camsp).

Afin de faire face aux défis qui se présentent pour la branche, ce PLFSS propose des mesures en demi-teinte.

La situation financière des établissements et des services sociaux et médico-sociaux, singulièrement celle des Ehpad, est préoccupante. Alors qu’une majorité d’établissements sont en déficit, le fonds d’urgence de 100 millions d’euros, prévu pour cette année par le PLFSS, qui concernera les Ehpad et les services à domicile de tous statuts, est nécessaire et bienvenu, mais, rapporté au nombre de structures, il s’apparente à un saupoudrage.

Le texte pourrait néanmoins marquer un tournant en matière de financement des Ehpad, en amorçant la fusion entre la section « soins », actuellement financée par la sécurité sociale, et la section « dépendance », financée par les départements. Cette répartition des ressources et des dépenses des établissements apparaît de moins en moins pertinente compte tenu de l’évolution du profil des personnes accueillies.

L’article 37 du projet de loi vise donc à introduire un régime adapté de financement des Ehpad, dans lequel une section « soins et entretien de l’autonomie » serait subventionnée par un forfait global unique, attribué par l’Agence régionale de santé (ARS) et financé par la branche autonomie. Ce régime, créé de manière pérenne, serait toutefois laissé au choix des départements – une sorte de régime à la carte.

La commission a considéré que cette réforme pourrait, à rebours des objectifs affichés, se traduire par des complexités supplémentaires. Elle propose donc de transformer ce régime adapté de financement en une expérimentation, avant toute généralisation et pérennisation du dispositif. J’ai cru comprendre, madame la ministre, que vous étiez favorable à cette proposition.

Plus largement, la commission appelle à rationaliser les concours financiers de la CNSA aux départements pour les rendre plus lisibles et équitables.

L’article 38 du projet de loi vise à créer un nouveau service de repérage, de diagnostic et d’intervention précoce pour les enfants de moins de 6 ans susceptibles de présenter un handicap. La commission s’est interrogée sur la valeur ajoutée de ce dispositif, comme sur son articulation avec les plateformes déjà déployées pour prendre en charge les troubles du neurodéveloppement.

En revanche, mais vous l’avez également évoqué, madame la ministre, aucune solution n’est proposée pour les jeunes adultes maintenus dans des établissements pour enfants au titre de l’amendement Creton. Pour répondre à leur situation, la commission a prévu un dispositif expérimental de transition afin d’accompagner ces jeunes dès l’âge de 16 ans.

J’évoquerai, pour finir, l’article 38 bis, censé garantir le remboursement intégral des fauteuils roulants, mais dont la portée est très incertaine. Madame la ministre, pourriez-vous nous donner des précisions sur les conditions d’application de cette mesure et sur son coût financier ?

Sous ces réserves, la commission invite à approuver l’objectif de dépenses de la branche pour 2024.

Photo de Cathy Apourceau-Poly

Ainsi, les économies réalisées sur le dos des chômeurs par la réduction de leurs droits permettront de financer la casse de Pôle emploi. C'est le double effet Kiss Cool de la réforme de l'assurance chômage : tu joues et, dans tous les cas, tu perds !

Le Gouvernement prévoyait aussi la ponction de 3 milliards d'euros sur les comptes de l'Agirc-Arrco. Après la levée de boucliers des organisations syndicales, il a été obligé de reculer, mais nous savons pertinemment qu'il n'a pas définitivement abandonné son projet. Il préfère présenter au Sénat un budget insincère !

Le Gouvernement renforce les contrôles sur les arrêts de travail au lieu de s'attaquer aux 8 milliards d'euros de fraude patronale et de réfléchir aux conditions de travail dans les entreprises.

En conclusion, le mépris du Gouvernement à l'égard du Parlement, le 49.3 à l'Assemblée nationale, l'application de l'article 40 de la Constitution qui fait voler en éclats nos amendements, l'absence de refonte du financement de notre système de sécurité sociale avec un Ondam bien en dessous des besoins, alors qu'il aurait fallu l'indexer sur l'inflation, le manque de mesures concrètes, la stigmatisation des assurés sociaux, toutes ces raisons ne permettent pas de réunir les conditions d'un véritable débat politique.

C'est pourquoi le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky appelle à voter la motion tendant à opposer la question préalable. §

Photo de Alain Marc

Personne ne demande la parole contre la motion ?…

Quel est l'avis de la commission ?

Photo de Alain Marc

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Photo de Elisabeth Doineau

Ma chère collègue, vos premiers mots ont été pour souligner que l'Assemblée nationale avait été privée de débat.

Or, si nous votions votre motion, nous nous en priverions nous-mêmes, alors que vous avez déposé de nombreux amendements qui ne manqueront pas de susciter des discussions… Nous renoncerions ainsi à des moments enrichissants !

La commission émet donc un avis défavorable.

Photo de Vincent Delahaye

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, la commission des finances, saisie pour avis, a émis un avis favorable sur ce texte, non parce qu’elle a considéré que la politique menée est la bonne ni parce qu’elle a jugé la trajectoire financière suivie convaincante, mais pour que le Sénat discute de ce texte et l’améliore.

Depuis la crise sanitaire, la situation des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) s’est redressée : un déficit de – seulement… – 8, 8 milliards d’euros est ainsi attendu en 2023. Si l’on peut se réjouir que le déficit se réduise, il est toutefois inquiétant qu’il diminue moins qu’attendu.

La résorption du déficit résulte principalement du dynamisme des recettes, qui est lié à la progression de l’emploi et de la masse salariale.

Cependant, en dépenses, le fameux Ondam connaîtrait un dépassement de 2, 8 milliards d’euros en 2023, qui s’explique notamment par l’évolution des soins de ville.

Ce dépassement intervient alors que les surcoûts imputables à la crise sanitaire se sont considérablement et logiquement réduits : ils ne représentent plus que 900 millions d’euros en 2023. Toutefois, la crise a durablement affecté la trajectoire de l’Ondam, qui s’établit en 2023 à un niveau supérieur de 14, 2 milliards d’euros à celui d’un scénario sans crise et, surtout, sans Ségur de la santé.

En ce qui concerne 2024, la dynamique des recettes ralentirait, contrairement à celle des dépenses, qui s’accroîtrait. En clair, tout ce qu’il ne faut pas faire !

En ce qui concerne les recettes, la moindre progression de la masse salariale du secteur privé ne serait que partiellement compensée par le transfert à la branche autonomie de 0, 15 point de CSG, auparavant affecté à la Cades.

L’objectif de dépenses pour 2024, quant à lui, connaîtrait un véritable rebond.

La hausse des dépenses de la branche maladie devrait en principe être modérée – l’Ondam n’augmenterait que de 2, 95 % par rapport à 2023 –, mais les dépenses de la branche vieillesse devraient être soigneusement surveillées. À ce propos, madame, messieurs les ministres, le sujet des retraites a été quasiment absent de vos interventions – M. Cazenave l’a certes un peu abordé –, ce qui m’a surpris.

Le report de l’âge d’ouverture des droits ne produira que progressivement des effets, alors que les mesures d’accompagnement ont un résultat immédiat. Le solde de la branche se dégraderait ainsi de 4 milliards d’euros en 2024. Le déficit global repartirait à la hausse en 2024 pour s’établir à 11, 1 milliards d’euros.

Il s’agit d’une situation inquiétante dans la mesure où le déficit, c’est de la dette – chacun le sait – et où les conditions de remboursement de la dette sociale se sont sérieusement dégradées ces dernières années. En effet, le taux moyen de refinancement de la Cades a connu une hausse inquiétante, en passant de 0, 62 % au début de l’année 2022 à 1, 93 % aujourd’hui, certains taux approchant même les 3 %.

Dans le même temps, les ressources dont dispose la Cades pour amortir la dette sociale ont diminué : 0, 15 point de CSG lui est retiré en 2024 et le versement du Fonds de réserve pour les retraites passera, à partir de 2025, de 2, 1 milliards à 1, 45 milliard d’euros.

J’en viens aux prévisions pluriannuelles. Le déficit de la sécurité sociale continuerait à se dégrader pour s’établir à 17, 5 milliards d’euros en 2027. Pire, ce scénario défavorable repose sur des hypothèses macroéconomiques de croissance qui ont été jugées « optimistes » par le Haut Conseil des finances publiques. Nous pouvons donc nous attendre à une dégradation encore plus importante.

Concernant la branche maladie, la progression continue des dépenses et les dépassements réguliers de l’Ondam de ville devraient faire l’objet d’une réflexion approfondie. En effet, le Gouvernement se refuse – cela a été patent lors de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques – à envisager sérieusement une régulation des soins de ville. L’avenir de la maîtrise des dépenses d’assurance maladie est donc un impensé de la part du Gouvernement.

Au sujet de la branche vieillesse, il est inquiétant de constater que la réforme des retraites produira vraisemblablement des effets moindres que ce qui était escompté. En particulier – et cela n’a pas été abordé –, la situation de la CNRACL est de plus en plus préoccupante : son déficit ne cesse de s’aggraver, il atteindrait près de 6, 5 milliards d’euros en 2030.

Plus globalement, les déficits cumulés du budget de la sécurité sociale de 2024 à 2027 représenteraient quelque 60 milliards d’euros. Ils pourraient conduire à une nouvelle reprise de dette par la Cades, ce qui repousserait la perspective de son extinction au-delà de 2033.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, vous aurez compris que ma position personnelle sur l’équilibre général du texte est réservée.

Aurélien Rousseau, ministre

Madame la sénatrice, vous avez employé des mots très forts pour évoquer le supposé mépris du Parlement de la part du Gouvernement, mais je suis toujours surpris, quand on avance cet argument, qu'on fasse ainsi un tri entre les articles de la Constitution qui conviendraient et ceux qui ne conviendraient pas.

Vous défendez aujourd'hui une motion tendant à opposer la question préalable. Certains de vos collègues députés avaient déposé une motion de rejet préalable, du reste votée par les deux extrêmes de l'hémicycle, ce qui aurait eu pour effet de priver l'Assemblée nationale de tout débat…

Mme la ministre des solidarités et des familles sourit.

Thomas Cazenave

Très bien !

Aurélien Rousseau, ministre

M. Aurélien Rousseau, ministre. Les deux extrêmes de l'hémicycle

Photo de Vincent Delahaye

M. Vincent Delahaye, rapporteur pour avis. À défaut, nous continuerons d’être une génération d’égoïstes qui fait financer ses prestations par les générations futures. Cette manière de faire ne m’apparaît ni saine ni morale.

Aurélien Rousseau, ministre

J'entends par ailleurs que vous remettez en cause l'article 40 de la Constitution. Nous aurons du mal à trouver un terrain d'entente de ce point de vue.

Madame la sénatrice, au-delà de ce constat, je tiens à vous répondre sur quatre points.

Premièrement, ce n'est pas pour satisfaire les demandes de Bruxelles que le Gouvernement présente ce PLFSS.

La préoccupation qui m'anime, comme un certain nombre d'orateurs, est précisément à l'opposé de la vôtre : si nous ne parvenons pas à rétablir l'équilibre des comptes de la sécurité sociale en général et de l'assurance maladie en particulier, nous ferons voler en éclats l'idée que l'assurance sociale, l'un des acquis de 1945, est bien le système le plus efficace pour prendre en charge les dépenses liées à la santé, à la vieillesse et à l'autonomie de nos concitoyens.

Aujourd'hui, 82 % des dépenses d'assurance maladie sont pris en charge par l'assurance maladie obligatoire ; les complémentaires en couvrent quant à elles 14 %. Ce n'est pas pour satisfaire Bruxelles !

J'y insiste : si nous laissons le déficit se creuser chaque année, certains esprits bien intentionnés décréteront vite que l'assurance maladie obligatoire est moins performante que les assurances maladie complémentaires – or, aujourd'hui, celles-ci ne se cantonnent malheureusement pas aux mutuelles.

Maintenir un système d'assurance sociale viable et robuste : telle est la priorité du Gouvernement.

Deuxièmement, vous affirmez que le présent texte ne déploie pas de moyens supplémentaires. Les chiffres eux-mêmes vous contredisent – je suis au regret de vous le signaler. L'Ondam fixé pour 2024 dépasse de 8 milliards d'euros celui de 2023.

Photo de Alain Marc

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

Aurélien Rousseau, ministre

Je vous en donne acte, nous demandons à l'hôpital un effort de l'ordre de 500 millions d'euros au titre des achats, mais nous finançons aussi de nombreuses actions en sa faveur. Je ne citerai que les dernières mesures annoncées, lesquelles portent sur le travail de nuit ainsi que sur le travail des samedis et dimanches : à elles seules, ces mesures, financées par l'Ondam, coûtent plus de 1 milliard d'euros.

Je rappelle que les soignants hospitaliers ont connu, ces dernières années, les plus fortes hausses de traitement accordées depuis trente ans. Ainsi les rémunérations du public ont-elles retrouvé le niveau du privé. Je parle notamment des professionnels paramédicaux et des praticiens hospitaliers, non de certaines activités libérales, qui sont évidemment beaucoup plus lucratives.

Vous insistez avec raison sur la qualité de vie des soignants et sur leurs perspectives professionnelles ; nous avons précisément ouvert ces chantiers.

Les mesures que nous avons prises en faveur de l'attractivité nous permettent aujourd'hui de rouvrir des lits. Or rouvrir des lits, c'est permettre les remplacements. Permettre les remplacements, c'est permettre les départs en formation. Et permettre les départs en formation, c'est offrir de véritables évolutions professionnelles. Pour moi, tout cela s'appelle le progrès.

Troisièmement, au sujet des exonérations, force est de constater un désaccord très profond entre nous.

Vous évoquez les exonérations de charges, que vous évaluez à 87 milliards d'euros. Mais si, à l'heure actuelle, notre système de sécurité sociale est viable, c'est parce que le chômage est tombé à 7 %. Nous en étions encore très loin il y a quelques années.

Pour une partie d'entre nous, nous avons vécu pendant des décennies avec le chômage de masse. D'ailleurs, nous ne mesurons pas encore complètement combien sa disparition transforme nos réalités sociales, notamment le rapport au travail.

Le meilleur moyen de maintenir tel qu'il est notre système de sécurité sociale solidaire, reposant sur la contribution des salariés et des employeurs, c'est le plein emploi ; et le plein emploi, c'est le cap que le Gouvernement ne cesse de tenir.

En la matière, il suffit de quelques décisions pour balayer tous les efforts accomplis. Voilà pourquoi nous restons fidèles à notre ligne.

À cet égard, M. le ministre chargé des comptes publics a évoqué un certain nombre de mesures prises au titre des recettes, notamment le gel des fameux « bandeaux famille », qui permettra d'économiser plus de 600 millions d'euros.

Comme beaucoup, j'ai grandi avec l'idée que le chômage de masse serait irréversible. Or, si le taux de chômage baissait encore de deux points, aucune des branches de la sécurité sociale ne serait en déficit.

Quatrièmement et enfin, vous associez à tort responsabilisation, culpabilisation et stigmatisation.

Quand, à patientèle égale, un médecin prescrit quatre fois plus d'arrêts de travail que la moyenne de ses confrères, je n'estime pas qu'il est nécessairement fautif. En revanche, je considère que l'assurance maladie est en droit d'aller l'interroger afin de comprendre ce dont il retourne.

De même, j'ai demandé à l'assurance maladie de me signaler les entreprises où les arrêts maladie explosent.

Photo de Philippe Mouiller

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, comme l’année dernière, le Gouvernement a dû utiliser les dispositions du troisième alinéa de l’article 49 de la Constitution afin que le projet de loi de financement de la sécurité sociale soit adopté par l’Assemblée nationale.

Comme l’année dernière, il en résulte, paradoxalement, des délais d’examen dégradés pour le Sénat. À cet égard, je tiens à saluer nos rapporteurs qui n’ont pas ménagé leurs efforts pour présenter au Sénat, en commission, puis en séance publique, une position cohérente sur ce texte.

Ils ont d’autant plus de mérite que de nombreuses réponses à leurs interrogations leur sont parvenues très tardivement, voire jamais… Je pense, en particulier, aux éléments communiqués au président de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) de l’Assemblée nationale sur les franchises médicales, dont notre rapporteure pour l’assurance maladie n’a jamais obtenu la transmission. Cela ne me semble pas acceptable et contraire à la lettre, comme à l’esprit, de la loi organique.

Enfin, comme l’année dernière, l’engagement de sa responsabilité devant l’Assemblée nationale aurait pu permettre au Gouvernement de soumettre au Sénat un texte resserré sur l’essentiel et présentant des priorités claires. Or, une nouvelle fois, c’est un texte confus et bavard qui nous parvient, certes enrichi de dispositions diverses, mais souvent de faible portée, sans parler des nombreuses demandes de rapport émanant de l’ensemble des groupes politiques.

Sur le fond, les rapporteurs ont déjà présenté la position de la commission.

Madame, messieurs les ministres, vous l’aurez compris, nous souhaitons un débat complet sur ce PLFSS d’autant que l’Assemblée nationale en a été privée.

Nous souhaitons exprimer notre scepticisme au sujet de l’Ondam que vous proposez pour 2024 et notre vive inquiétude face à la dette perpétuelle à laquelle vous semblez condamner la sécurité sociale selon vos propres projections financières.

Nous souhaitons aussi formuler des propositions, tout d’abord, pour renforcer le contrôle du Parlement sur les comptes sociaux – par exemple, en cas de dépassement de l’Ondam ou sur les crédits des agences –, ensuite, pour responsabiliser les différentes parties prenantes dans le domaine de la santé, qu’il s’agisse des patients ou des professionnels.

Nous souhaitons également mieux lutter contre la fraude et nous proposons des mesures ayant trait, d’une part, aux bénéficiaires de pension de retraite établis hors de France, d’autre part, à la carte Vitale biométrique, question récurrente que nous ne voyons pas avancer.

Aurélien Rousseau, ministre

Au total, deux cents entreprises ont été repérées. Nous allons engager un dialogue avec elles pour comprendre ce qui se passe.

Nous ne stigmatisons ni les médecins, ni les assurés sociaux, ni les entreprises : nous agissons en faveur d'une responsabilisation collective. À cet égard, il ne me semble pas choquant que l'assurance maladie examine telle ou telle situation de plus près.

De même, je m'étonne de ce que vous dites au sujet des prescriptions d'arrêts par téléconsultation. Si vous avez lu le présent texte en intégralité, ce dont je ne doute pas, vous l'aurez nécessairement noté : la limitation à trois jours ne s'applique pas si l'on n'a pas de médecin traitant ou si l'on apporte la preuve que l'on n'a pas réussi à trouver de médecin. Cela étant, nous devons nous doter des moyens de contrôler efficacement le business auquel donne lieu l'essor des téléconsultations.

Madame la sénatrice, en résumé, ce budget est tout sauf insincère.

Au terme de cette discussion générale, M. le ministre chargé des comptes publics aura sans doute l'occasion d'y revenir. L'an dernier, lors de l'examen du précédent projet de loi de financement de la sécurité sociale, nombre de prévisions de croissance ont été jugées totalement insincères. Elles se sont pourtant révélées bonnes…

Photo de Philippe Mouiller

Nous souhaitons également aider le Gouvernement – oui, l’aider – à ne pas transformer des idées intéressantes en des échecs programmés faute de préparation adéquate. Je pense, bien sûr, à la réforme du financement des hôpitaux, mais aussi à la fusion des sections « soins » et « dépendance » des budgets des Ehpad. Dans un cas, comme dans l’autre, une expérimentation solide nous semble un préalable indispensable à une généralisation.

Nous souhaitons enfin indiquer nos priorités, en particulier en faveur des familles, peu présentes dans ce PLFSS – madame la ministre, si le discours existe, les traductions budgétaires sont plutôt absentes –, mais également en faveur des collectivités territoriales.

Nous avons par exemple entendu, ces derniers jours, les représentants de l’Assemblée des départements de France, qui s’inquiètent de leur situation financière. Madame, messieurs les ministres, nous devons soutenir les départements dans les efforts qu’ils fournissent notamment en matière de dépendance.

Nous marquerons aussi notre respect du paritarisme, en ne permettant pas que le Gouvernement se serve dans les caisses de l’Unédic et de l’Agirc-Arrco.

Enfin, comme notre rapporteure générale l’a indiqué, la commission soumettra à la Haute Assemblée le rétablissement des articles obligatoires de ce PLFSS que l’Assemblée nationale a supprimés et dont la suppression conforme aurait posé un problème constitutionnel manifeste. Néanmoins, elle le fera en proposant une révision de l’Ondam pour 2023, dont le volet hospitalier nous semble encore sous-financé.

J’espère que non seulement le Gouvernement saura y voir une main tendue, mais qu’il saura la saisir, notamment lors de la nouvelle lecture du texte à l’Assemblée nationale.

Pour conclure, je rappelle que nos propositions s’inscrivent dans un cadre strictement budgétaire – c’est un texte financier.

Elles ne sauraient donc remplacer de grandes lois structurantes, seules à même de remettre à plat des secteurs comme la santé ou le grand âge, pour lesquels la confiance des professionnels et des Français dans leur ensemble s’étiole année après année malgré une augmentation des moyens financiers. Un débat de responsabilité à l’égard des générations futures doit avoir lieu – vous l’avez également évoqué, monsieur le rapporteur pour avis.

Il nous semble nécessaire de remettre à plat un certain nombre de choses et de proposer un ensemble structurant de réformes. Il est impossible de se limiter à quelques propositions de loi, quel que soit leur intérêt. Le Gouvernement doit prendre ses responsabilités, les assumer et ensuite les traduire dans les PLFSS. Tel est notre état d’esprit aujourd’hui.

Thomas Cazenave

Tout à fait !

Aurélien Rousseau, ministre

Pour qu'un système fonctionne, il faut aussi savoir lui faire confiance.

En conclusion, le Gouvernement est évidemment défavorable à cette motion.

Photo de Alain Marc

Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.

Photo de Alain Marc

La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.

Question préalable

Debut de section - PermalienPhoto de Anne SOUYRIS

Pénuries de médicaments, sous-rémunération des professionnels de santé, progression des déserts médicaux : face à de tels problèmes, il faut investir résolument dans la santé des Français.

Or le présent texte n'engage pas le virage économique et écologique nécessaire à la prévention et à l'adaptation au changement climatique ; il ne garantit pas le financement soutenable de la sécurité sociale, gage de sa préservation à long terme.

L'heure est à l'investissement massif en faveur de notre sécurité sociale ; ce n'est pas le cas. C'est pourquoi les élus du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires voteront cette motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Je suis saisi, par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, d’une motion n° 944.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 3 du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 (77, 2023-2024), considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Cathy Apourceau-Poly

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, alors que nous entamons l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, soit un budget de 640 milliards d’euros, nous avons une pensée pour nos collègues députés qui n’ont pas pu en débattre. Une fois de plus, vous avez préféré un passage en force.

En ayant recours à votre sacro-saint article 49, alinéa 3, de la Constitution pour l’adoption des parties recettes et dépenses, seuls neuf articles sur les cinquante que compte le texte ont finalement été discutés par les députés.

L’absence de majorité parlementaire favorable au Gouvernement ne doit pas masquer la gravité de la situation de la sécurité sociale, victime de vingt ans de privations, d’étatisation, de désinvestissement et de réduction d’effectifs.

Le débat que nous entamons sur le budget de la sécurité sociale pour 2024 sera l’occasion de confronter nos visions de notre modèle social.

Lors de la réunion de la commission des affaires sociales, l’ensemble des groupes politiques, dans leur diversité, ont indiqué qu’il était impossible de continuer ainsi, sans réforme structurelle de la sécurité sociale.

L’hôpital public va mal, la médecine de ville est en crise, les difficultés d’accès aux soins progressent. Pourtant, les dépenses augmentent, se sont étonnés naïvement certains de nos collègues – nous pensons néanmoins qu’ils voteront le PLFSS…

Les gouvernements successifs, qui ont tenté de compresser les dépenses pour satisfaire aux exigences de Bruxelles, ont sous-estimé les conséquences de l’austérité sur notre protection sociale.

Les personnels du secteur sanitaire, médico-social et social, qui acceptaient, depuis des années, des conditions de travail dégradées et des rémunérations insuffisantes, ont craqué. Or, lorsque les personnels n’en peuvent plus, c’est tout un système qui s’effondre.

Ils ont craqué, car leur attachement au service public et le sens de l’intérêt général, qui les faisaient se lever chaque matin, ne suffisaient plus face à la mise en danger des patients.

La violence institutionnelle qui s’exerce sur les personnels qui refusent de continuer de subir une telle surcharge et de telles conditions de travail entraîne des démissions massives. On parle de 15 000 postes vacants chez les praticiens hospitaliers et d’autant pour les infirmières.

Selon la Fédération hospitalière de France, pour améliorer le recrutement, les capacités de formation devraient être augmentées de 20 %, s’agissant des médecins, et de 25 %, pour les personnels paramédicaux.

Quand prendrez-vous de véritables mesures pour pallier ces manques ?

Nous le savons : il faut, entre autres, améliorer les rémunérations, la qualité de vie et les conditions de travail – sans cela, c’est peine perdue ! Ce sont les seules véritables conditions qui permettront de retenir celles et ceux qui exercent aujourd’hui.

Je pense par exemple à Marie-Pierre, 27 ans, infirmière qui a quitté les urgences pédiatriques de l’hôpital Necker, car elle était arrivée à saturation et ne supportait plus la manière dont les patients étaient traités.

Ce témoignage sur le travail à l’hôpital, je l’ai également entendu dans les services médico-sociaux, dans les Ehpad et dans l’ensemble des services sociaux.

Toutefois, comment faire pour améliorer les conditions de travail sans moyens supplémentaires ? Est-ce alors sérieux de laisser miroiter que cela ira mieux demain ?

Les personnels n’en peuvent plus et le Gouvernement, d’un côté, agite le Ségur de l’investissement et, de l’autre, réduit de 500 millions d’euros les dépenses des hôpitaux.

En ajoutant à tout cela le coût de l’énergie et l’inflation, les hôpitaux sont au bord de l’implosion.

Le « en même temps » n’est pas une manière de gouverner, l’entre-deux en matière de santé n’est plus possible : l’austérité ou l’investissement, il faut choisir !

Le Président de la République, qui s’est déclaré favorable à l’organisation de référendums dans notre pays, devrait poser la question directement à nos concitoyennes et à nos concitoyens.

Devons-nous poursuivre les politiques d’austérité et de compression des dépenses de santé, en acceptant de patienter des jours, parfois des semaines, avant d’obtenir un rendez-vous chez un médecin, en acceptant des fermetures de services d’urgence les week-ends, en acceptant d’y attendre des heures entières sur des brancards ?

Ou devons-nous financer les dépenses de santé à la hauteur des besoins, en revalorisant l’Ondam de 10 milliards d’euros net, déduction faite de l’inflation ?

Cette politique n’est pas utopiste ; c’est un choix de société qui repose sur des choix de solidarité et de financement.

Pour financer notre système de sécurité sociale à la hauteur des besoins, nous proposons de revenir sur les exonérations de cotisations.

En 2024, le Gouvernement prévoit d’exonérer les entreprises de 87, 9 milliards d’euros, soit deux fois plus qu’il y a dix ans ; 87, 9 milliards d’euros, c’est autant d’argent public perdu pour les recettes de l’État ; 87, 9 milliards d’euros, c’est autant d’argent supplémentaire pour les patrons et les actionnaires qui n’est consacré ni à des recrutements supplémentaires ni à l’augmentation des salaires.

Le directeur de recherche du CNRS, Bruno Palier, a des mots particulièrement durs sur les politiques d’exonération de cotisations sociales et d’aides aux entreprises. Selon lui, les politiques de baisse du coût du travail se sont révélées inefficaces en matière d’emploi et délétères pour le travail et, depuis 1993, les plans généraux de baisse des cotisations sociales, les allégements Fillon, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi de François Hollande ont eu pour effets de dévaloriser, d’intensifier et d’abîmer le travail en France.

Il faut ajouter à cela un transfert de financement : des cotisations patronales sont remplacées par des compensations partielles de la part de l’État via des fractions de recettes de TVA.

Ainsi, les entreprises ne participent plus au financement de la sécurité sociale en dessous de 3, 5 Smic, tandis que nos concitoyennes et nos concitoyens qui achètent leur baguette de pain financent leur retraite et leur hôpital.

Cette incongruité pourrait nous amener à sourire si, en creux, elle ne remettait pas en cause le pacte social de la nation. Les besoins augmentent et les dépenses continueront inexorablement à progresser avec le vieillissement de la société.

Pour réussir à financer notre système de sécurité sociale, il faut mettre à contribution les revenus financiers des entreprises et moduler leurs cotisations selon les politiques sociales et environnementales qu’elles mettent ou non en place.

Plutôt que de chercher de nouvelles recettes, le Gouvernement réduit les dépenses, en faisant les poches des malades au travers de son projet de doublement des franchises médicales. Selon un sondage Elabe du 2 novembre, 63 % des Français estiment que le doublement de la franchise sur les médicaments n’est pas acceptable et que cela contribuerait à détériorer l’accès à la santé.

Face au risque politique, le Gouvernement recule, mais il ne renonce pas à augmenter le reste à charge des malades par la publication d’un décret dans quelques semaines, ce qui lui évite un débat devant le Parlement…

Cet été, le ministre de l’économie avait dénoncé l’augmentation des dépenses d’indemnités journalières maladie au cours des dernières années. Si la proposition d’augmenter les délais de carence en cas d’arrêt maladie ne figure pas dans le PLFSS 2024, le débat pourrait être rouvert par voie d’amendement, cette année ou l’an prochain.

Ce PLFSS prévoit plusieurs mesures de culpabilisation et de stigmatisation des patients.

Je pense à la limitation à trois jours de la durée des arrêts de travail prescrits lors d’une téléconsultation, alors que six millions de Français n’ont pas de médecin traitant.

Je pense surtout à la suspension du versement des indemnités journalières après un rapport du médecin contrôleur jugeant un arrêt injustifié.

Cette suspension automatique des indemnités journalières versées par la sécurité sociale, à la suite du contrôle mandaté par l’employeur, est scandaleuse. Elle résulte de l’idée selon laquelle la hausse des dépenses d’indemnités journalières serait due à des médecins trop généreux ou à des travailleurs abuseurs.

En réalité, l’augmentation des indemnités journalières s’explique par le vieillissement de la population active. Cette progression perdurera du fait du recul de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans.

Le contrôle des arrêts maladie indemnisés par l’assurance maladie doit rester l’apanage de cette dernière, avec des garanties de débat et de recours. Le risque de dérive vers une privatisation du contrôle de l’assuré social et l’instrumentalisation par l’employeur de cette procédure à l’égard de salariés en position de fragilité est intolérable.

Pour financer la réforme qui crée France Travail, le Gouvernement prévoit d’effectuer une ponction de 2, 7 milliards d’euros sur les excédents de l’Unédic.

Debut de section - PermalienPhoto de Cathy Apourceau-Poly

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, alors que nous entamons l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, soit un budget de 640 milliards d’euros, nous avons une pensée pour nos collègues députés qui n’ont pas pu en débattre. Une fois de plus, vous avez préféré un passage en force.

En ayant recours à votre sacro-saint article 49, alinéa 3, de la Constitution pour l’adoption des parties recettes et dépenses, seuls neuf articles sur les cinquante que compte le texte ont finalement été discutés par les députés.

L’absence de majorité parlementaire favorable au Gouvernement ne doit pas masquer la gravité de la situation de la sécurité sociale, victime de vingt ans de privations, d’étatisation, de désinvestissement et de réduction d’effectifs.

Le débat que nous entamons sur le budget de la sécurité sociale pour 2024 sera l’occasion de confronter nos visions de notre modèle social.

Lors de la réunion de la commission des affaires sociales, l’ensemble des groupes politiques, dans leur diversité, ont indiqué qu’il était impossible de continuer ainsi, sans réforme structurelle de la sécurité sociale.

L’hôpital public va mal, la médecine de ville est en crise, les difficultés d’accès aux soins progressent. Pourtant, les dépenses augmentent, se sont étonnés naïvement certains de nos collègues – nous pensons néanmoins qu’ils voteront le PLFSS…

Les gouvernements successifs, qui ont tenté de compresser les dépenses pour satisfaire aux exigences de Bruxelles, ont sous-estimé les conséquences de l’austérité sur notre protection sociale.

Les personnels du secteur sanitaire, médico-social et social, qui acceptaient, depuis des années, des conditions de travail dégradées et des rémunérations insuffisantes, ont craqué. Or, lorsque les personnels n’en peuvent plus, c’est tout un système qui s’effondre.

Ils ont craqué, car leur attachement au service public et le sens de l’intérêt général, qui les faisaient se lever chaque matin, ne suffisaient plus face à la mise en danger des patients.

La violence institutionnelle qui s’exerce sur les personnels qui refusent de continuer de subir une telle surcharge et de telles conditions de travail entraîne des démissions massives. On parle de 15 000 postes vacants chez les praticiens hospitaliers et d’autant pour les infirmières.

Selon la Fédération hospitalière de France, pour améliorer le recrutement, les capacités de formation devraient être augmentées de 20 %, s’agissant des médecins, et de 25 %, pour les personnels paramédicaux.

Quand prendrez-vous de véritables mesures pour pallier ces manques ?

Nous le savons : il faut, entre autres, améliorer les rémunérations, la qualité de vie et les conditions de travail – sans cela, c’est peine perdue ! Ce sont les seules véritables conditions qui permettront de retenir celles et ceux qui exercent aujourd’hui.

Je pense par exemple à Marie-Pierre, 27 ans, infirmière qui a quitté les urgences pédiatriques de l’hôpital Necker, car elle était arrivée à saturation et ne supportait plus la manière dont les patients étaient traités.

Ce témoignage sur le travail à l’hôpital, je l’ai également entendu dans les services médico-sociaux, dans les Ehpad et dans l’ensemble des services sociaux.

Toutefois, comment faire pour améliorer les conditions de travail sans moyens supplémentaires ? Est-ce alors sérieux de laisser miroiter que cela ira mieux demain ?

Les personnels n’en peuvent plus et le Gouvernement, d’un côté, agite le Ségur de l’investissement et, de l’autre, réduit de 500 millions d’euros les dépenses des hôpitaux.

En ajoutant à tout cela le coût de l’énergie et l’inflation, les hôpitaux sont au bord de l’implosion.

Le « en même temps » n’est pas une manière de gouverner, l’entre-deux en matière de santé n’est plus possible : l’austérité ou l’investissement, il faut choisir !

Le Président de la République, qui s’est déclaré favorable à l’organisation de référendums dans notre pays, devrait poser la question directement à nos concitoyennes et à nos concitoyens.

Devons-nous poursuivre les politiques d’austérité et de compression des dépenses de santé, en acceptant de patienter des jours, parfois des semaines, avant d’obtenir un rendez-vous chez un médecin, en acceptant des fermetures de services d’urgence les week-ends, en acceptant d’y attendre des heures entières sur des brancards ?

Ou devons-nous financer les dépenses de santé à la hauteur des besoins, en revalorisant l’Ondam de 10 milliards d’euros net, déduction faite de l’inflation ?

Cette politique n’est pas utopiste ; c’est un choix de société qui repose sur des choix de solidarité et de financement.

Pour financer notre système de sécurité sociale à la hauteur des besoins, nous proposons de revenir sur les exonérations de cotisations.

En 2024, le Gouvernement prévoit d’exonérer les entreprises de 87, 9 milliards d’euros, soit deux fois plus qu’il y a dix ans ; 87, 9 milliards d’euros, c’est autant d’argent public perdu pour les recettes de l’État ; 87, 9 milliards d’euros, c’est autant d’argent supplémentaire pour les patrons et les actionnaires qui n’est consacré ni à des recrutements supplémentaires ni à l’augmentation des salaires.

Le directeur de recherche du CNRS, Bruno Palier, a des mots particulièrement durs sur les politiques d’exonération de cotisations sociales et d’aides aux entreprises. Selon lui, les politiques de baisse du coût du travail se sont révélées inefficaces en matière d’emploi et délétères pour le travail et, depuis 1993, les plans généraux de baisse des cotisations sociales, les allégements Fillon, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi de François Hollande ont eu pour effets de dévaloriser, d’intensifier et d’abîmer le travail en France.

Il faut ajouter à cela un transfert de financement : des cotisations patronales sont remplacées par des compensations partielles de la part de l’État via des fractions de recettes de TVA.

Ainsi, les entreprises ne participent plus au financement de la sécurité sociale en dessous de 3, 5 Smic, tandis que nos concitoyennes et nos concitoyens qui achètent leur baguette de pain financent leur retraite et leur hôpital.

Cette incongruité pourrait nous amener à sourire si, en creux, elle ne remettait pas en cause le pacte social de la Nation. Les besoins augmentent et les dépenses continueront inexorablement à progresser avec le vieillissement de la société.

Pour réussir à financer notre système de sécurité sociale, il faut mettre à contribution les revenus financiers des entreprises et moduler leurs cotisations selon les politiques sociales et environnementales qu’elles mettent ou non en place.

Plutôt que de chercher de nouvelles recettes, le Gouvernement réduit les dépenses, en faisant les poches des malades au travers de son projet de doublement des franchises médicales. Selon un sondage Elabe du 2 novembre, 63 % des Français estiment que le doublement de la franchise sur les médicaments n’est pas acceptable et que cela contribuerait à détériorer l’accès à la santé.

Face au risque politique, le Gouvernement recule, mais il ne renonce pas à augmenter le reste à charge des malades par la publication d’un décret dans quelques semaines, ce qui lui évite un débat devant le Parlement…

Cet été, le ministre de l’économie avait dénoncé l’augmentation des dépenses d’indemnités journalières maladie au cours des dernières années. Si la proposition d’augmenter les délais de carence en cas d’arrêt maladie ne figure pas dans le PLFSS 2024, le débat pourrait être rouvert par voie d’amendement, cette année ou l’an prochain.

Ce PLFSS prévoit plusieurs mesures de culpabilisation et de stigmatisation des patients.

Je pense à la limitation à trois jours de la durée des arrêts de travail prescrits lors d’une téléconsultation, alors que six millions de Français n’ont pas de médecin traitant.

Je pense surtout à la suspension du versement des indemnités journalières après un rapport du médecin contrôleur jugeant un arrêt injustifié.

Cette suspension automatique des indemnités journalières versées par la sécurité sociale, à la suite du contrôle mandaté par l’employeur, est scandaleuse. Elle résulte de l’idée selon laquelle la hausse des dépenses d’indemnités journalières serait due à des médecins trop généreux ou à des travailleurs abuseurs.

En réalité, l’augmentation des indemnités journalières s’explique par le vieillissement de la population active. Cette progression perdurera du fait du recul de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans.

Le contrôle des arrêts maladie indemnisés par l’assurance maladie doit rester l’apanage de cette dernière, avec des garanties de débat et de recours. Le risque de dérive vers une privatisation du contrôle de l’assuré social et l’instrumentalisation par l’employeur de cette procédure à l’égard de salariés en position de fragilité est intolérable.

Pour financer la réforme qui crée France Travail, le Gouvernement prévoit d’effectuer une ponction de 2, 7 milliards d’euros sur les excédents de l’Unédic.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Ma chère collègue, le règlement n'autorise qu'une seule explication de vote par groupe.

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix la motion n° 944, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Iacovelli

Des excédents dus à la réforme des retraites !

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Cathy Apourceau-Poly

Ainsi, les économies réalisées sur le dos des chômeurs par la réduction de leurs droits permettront de financer la casse de Pôle emploi. C’est le double effet Kiss Cool de la réforme de l’assurance chômage : tu joues et, dans tous les cas, tu perds !

Le Gouvernement prévoyait aussi la ponction de 3 milliards d’euros sur les comptes de l’Agirc-Arrco. Après la levée de boucliers des organisations syndicales, il a été obligé de reculer, mais nous savons pertinemment qu’il n’a pas définitivement abandonné son projet. Il préfère présenter au Sénat un budget insincère !

Le Gouvernement renforce les contrôles sur les arrêts de travail au lieu de s’attaquer aux 8 milliards d’euros de fraude patronale et de réfléchir aux conditions de travail dans les entreprises.

En conclusion, le mépris du Gouvernement à l’égard du Parlement, le 49.3 à l’Assemblée nationale, l’application de l’article 40 de la Constitution qui fait voler en éclats nos amendements, l’absence de refonte du financement de notre système de sécurité sociale avec un Ondam bien en dessous des besoins, alors qu’il aurait fallu l’indexer sur l’inflation, le manque de mesures concrètes, la stigmatisation des assurés sociaux, toutes ces raisons ne permettent pas de réunir les conditions d’un véritable débat politique.

C’est pourquoi le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky appelle à voter la motion tendant à opposer la question préalable.

Debut de section - PermalienPhoto de Cathy Apourceau-Poly

Ainsi, les économies réalisées sur le dos des chômeurs par la réduction de leurs droits permettront de financer la casse de Pôle emploi. C’est le « double effet Kiss Cool » de la réforme de l’assurance chômage : tu joues et, dans tous les cas, tu perds !

Le Gouvernement prévoyait aussi la ponction de 3 milliards d’euros sur les comptes de l’Agirc-Arrco. Après la levée de boucliers des organisations syndicales, il a été obligé de reculer, mais nous savons pertinemment qu’il n’a pas définitivement abandonné son projet. Il préfère présenter au Sénat un budget insincère !

Le Gouvernement renforce les contrôles sur les arrêts de travail au lieu de s’attaquer aux 8 milliards d’euros de fraude patronale et de réfléchir aux conditions de travail dans les entreprises.

En conclusion, le mépris du Gouvernement à l’égard du Parlement, le 49.3 à l’Assemblée nationale, l’application de l’article 40 de la Constitution qui fait voler en éclats nos amendements, l’absence de refonte du financement de notre système de sécurité sociale avec un Ondam bien en dessous des besoins, alors qu’il aurait fallu l’indexer sur l’inflation, le manque de mesures concrètes, la stigmatisation des assurés sociaux, toutes ces raisons ne permettent pas de réunir les conditions d’un véritable débat politique.

C’est pourquoi le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky appelle à voter la motion tendant à opposer la question préalable.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Personne ne demande la parole contre la motion ?…

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 42 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Ma chère collègue, vos premiers mots ont été pour souligner que l’Assemblée nationale avait été privée de débat.

Or, si nous votions votre motion, nous nous en priverions nous-mêmes, alors que vous avez déposé de nombreux amendements qui ne manqueront pas de susciter des discussions… Nous renoncerions ainsi à des moments enrichissants !

La commission émet donc un avis défavorable.

Photo de Alain Marc

M. le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Anne Souyris.

Aurélien Rousseau

Madame la sénatrice, vous avez employé des mots très forts pour évoquer le supposé mépris du Parlement de la part du Gouvernement, mais je suis toujours surpris, quand on avance cet argument, qu’on fasse ainsi un tri entre les articles de la Constitution qui conviendraient et ceux qui ne conviendraient pas.

Vous défendez aujourd’hui une motion tendant à opposer la question préalable. Certains de vos collègues députés avaient déposé une motion de rejet préalable, du reste votée par les deux extrêmes de l’hémicycle, ce qui aurait eu pour effet de priver l’Assemblée nationale de tout débat…

Photo de Anne SOUYRIS

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, assurer à toutes les citoyennes et à tous les citoyens « des moyens d'existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer » : c'est l'objectif de la sécurité sociale, tel qu'énoncé par le Conseil national de la Résistance.

Cette protection majeure est définie plus largement encore dans le préambule de la Constitution de 1946, qui garantit « à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé ».

Notre sécurité sociale s'est construite à l'abri de ce fronton républicain. Mais l'édifice, qui est l'un des plus protecteurs au monde, est aujourd'hui en train de se fissurer. Il suffit pour s'en convaincre de consulter les pronostics, établis par le Gouvernement lui-même, des déficits attendus de notre assurance maladie d'ici à 2027.

Face à ces chiffres, nous aurions bien entendu besoin d'un grand bouleversement. Madame, messieurs les ministres, je sais que vous souhaitez, comme moi, le sauvetage de ce formidable outil, garant de notre droit fondamental à la santé.

Un certain nombre d'avancées sont accomplies, qu'il s'agisse de la prévention, avec les campagnes de vaccination contre les infections à papillomavirus humain (HPV), de la santé scolaire ou encore des financements. Le présent texte renforce ainsi le combat contre la financiarisation de notre système de santé, notamment en remettant en cause la tarification à l'acte à l'hôpital – la portée cette décision est certes limitée, mais il s'agit d'un premier pas.

Cela étant, la logique reste la même. On constate, qui plus est, une inadéquation majeure entre l'augmentation de l'Ondam et l'inflation. En résulte une véritable mise en danger, non seulement de la médecine de ville, mais aussi de notre hôpital.

Lorsque les services publics ou associatifs de secteur 1 voient leur budget diminuer, les plus précaires d'entre nous, de plus en plus nombreux, n'ont d'autre choix que de se tourner vers les dispositifs publics d'aide sociale et sanitaire. Autant dire que nous sommes inquiets.

Chacun sait que l'hôpital public ne tient que par l'engagement remarquable des soignantes et des soignants. Mais, en la matière, que nous propose le Gouvernement ? À vrai dire, une non-trajectoire de dépenses réaliste et soutenable.

Monsieur Cazenave, ce n'est pas la lutte contre la fraude individuelle qui sauvera notre solidarité. En ce sens, vos propositions sont autant de cache-misère.

Je ne puis qu'y insister : l'Ondam 2024, qui progresse de 3, 2 % par rapport à l'objectif rectifié pour 2023, ne prend pas en compte l'inflation, située entre 4 % et 5 %. Il manque à ce PLFSS plus de 1 milliard d'euros pour financer les établissements de santé et 400 millions d'euros pour financer intégralement les mesures de revalorisation du Ségur de la santé.

Il y a quelques semaines, dans cet hémicycle, avant l'examen du triste projet de loi relatif à l'immigration, nous débattions de la démocratie sanitaire dans nos territoires. Je saluais alors l'esprit d'ouverture dont le Gouvernement faisait preuve à cette occasion : quel dommage qu'il n'ait pas adopté la même attitude pour l'examen de ce PLFSS, rejeté par les organisations syndicales et critiqué par les grandes structures associatives !

Ce PLFSS – est-ce véritablement une surprise ? – n'amorce aucun virage majeur pour faire face aux transformations planétaires et renouveler notre sécurité sociale vers le mieux-disant.

En faveur de la transition écologique et de la justice sociale, l'on ne fera rien sans des investissements majeurs. Vous le savez, monsieur Cazenave, mais vous regardez ailleurs… Pourtant, il me semble que nous vivons sur la même planète ! Vous auriez pu faire le choix de l'action et relever le défi.

Pour améliorer la santé dans notre pays, pour retrouver les jours heureux et faire face aux défis contemporains, il eût été possible d'aligner à nouveau, dans notre système de sécurité sociale, nos liens de dépendances en matière de santé et nos conditions d'existence ; autrement dit, de proposer que les responsables de nos maladies, des pollutions ou encore du changement climatique deviennent les contributeurs de la transformation de la sécurité sociale.

Pour paraphraser une chanson entendue bien des fois lors des manifestations contre la réforme des retraites, oui, nous devons mieux répartir les richesses ; oui, nous devons trouver de nouvelles recettes. Mais, pour cela, il faut cesser de faire payer les plus pauvres, qui – rappelons-le – sont ceux qui bénéficient le moins de nos droits sociaux, et garantir enfin l'équité.

Taxons les dividendes, les superprofits et les sociétés pétrolières. Taxons ceux et celles qui polluent le plus et qui profitent le plus des crises, non pas parce que nous voulons les sanctionner, mais parce que, dans une démocratie digne de ce nom, ils et elles doivent participer, réparer, préparer notre avenir à tous et toutes à la mesure des moyens qu'ils et elles ont à leur disposition.

Nous y sommes : mettons enfin à contribution les plus riches et les grands pollueurs, au nom d'une égalité républicaine à laquelle – j'ose l'espérer – nous aspirons tous et toutes.

On trouve quand même, dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, quelques mesures de progrès ; elles sont certes maigres, mais elles ont le mérite d'exister. Je pense notamment à la gratuité des préservatifs et des protections périodiques, ainsi qu'à la campagne de vaccination contre le papillomavirus dans les établissements scolaires – bravo !

Toutefois, monsieur Rousseau, j'interroge une nouvelle fois le Gouvernement : pourquoi restreindre ces deux premières mesures aux moins de 26 ans ? Pourquoi ne pas assumer un objectif vaccinal au-delà des établissements publics ? Je suis sûre que vous saurez m'entendre, au moins sur ces points-là, car je vous sais sensible aux inégalités femmes-hommes et à la grande précarité.

Si nous disons « mieux vaut tard que jamais », nous prenons soin d'ajouter « peut mieux faire ». C'est dans un esprit démocratique de responsabilité et de dialogue que les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ont proposé d'améliorer ces dispositifs.

Je regrette que tant de nos amendements aient été jugés irrecevables au titre de l'article 40 de la Constitution et j'appelle le Gouvernement à s'emparer de nos propositions.

Nous proposions en particulier d'améliorer l'information relative au vaccin HPV, ainsi que de rendre gratuits les contraceptifs et les protections périodiques pour les plus précaires, sans critère d'âge.

Le présent texte s'attache à préciser les modalités des rendez-vous de prévention annoncés l'année dernière. Nous vous proposerons d'affiner ces dispositifs pour y inclure clairement, d'une part, la santé environnementale et, de l'autre, les besoins de santé des personnes les plus précaires et les plus éloignées du soin du fait de discriminations, comme les minorités de genre ou d'orientation sexuelle et les travailleuses et travailleurs du sexe.

La lutte contre les addictions est un autre angle mort de ce PLFSS. Il nous faut revenir à la loi Évin et interdire la publicité pour l'alcool…

Aurélien Rousseau

(Brouhaha sur les travées des groupes CRCE-K et GEST.) ont voté, que vous le vouliez ou non, mesdames, messieurs les sénateurs, la motion de rejet préalable qui, à quelques voix près, n’a pas été adoptée.

Photo de Anne SOUYRIS

Mme Anne Souyris . Nous le savons tous dans cet hémicycle : l'alcool tue plus de cent personnes par jour en France. Une régulation est indispensable : nous ne pouvons pas laisser tant de nos enfants sombrer dans l'alcoolisme.

Aurélien Rousseau

Les deux extrêmes de l’hémicycle §

J’entends par ailleurs que vous remettez en cause l’article 40 de la Constitution. Nous aurons du mal à trouver un terrain d’entente de ce point de vue.

Madame la sénatrice, au-delà de ce constat, je tiens à vous répondre sur quatre points.

Premièrement, ce n’est pas pour satisfaire les demandes de Bruxelles que le Gouvernement présente ce PLFSS.

La préoccupation qui m’anime, comme un certain nombre d’orateurs, est précisément à l’opposé de la vôtre : si nous ne parvenons pas à rétablir l’équilibre des comptes de la sécurité sociale en général et de l’assurance maladie en particulier, nous ferons voler en éclats l’idée que l’assurance sociale, l’un des acquis de 1945, est bien le système le plus efficace pour prendre en charge les dépenses liées à la santé, à la vieillesse et à l’autonomie de nos concitoyens.

Aujourd’hui, 82 % des dépenses d’assurance maladie sont pris en charge par l’assurance maladie obligatoire ; les complémentaires en couvrent quant à elles 14 %. Ce n’est pas pour satisfaire Bruxelles !

J’y insiste : si nous laissons le déficit se creuser chaque année, certains esprits bien intentionnés décréteront vite que l’assurance maladie obligatoire est moins performante que les assurances maladie complémentaires – or, aujourd’hui, celles-ci ne se cantonnent malheureusement pas aux mutuelles.

Maintenir un système d’assurance sociale viable et robuste : telle est la priorité du Gouvernement.

Deuxièmement, vous affirmez que le présent texte ne déploie pas de moyens supplémentaires. Les chiffres eux-mêmes vous contredisent – je suis au regret de vous le signaler. L’Ondam fixé pour 2024 dépasse de 8 milliards d’euros celui de 2023.

Debut de section - Permalien
Aurélien Rousseau

Les deux extrêmes de l’hémicycle §

J’entends par ailleurs que vous remettez en cause l’article 40 de la Constitution. Nous aurons du mal à trouver un terrain d’entente de ce point de vue.

Madame la sénatrice, au-delà de ce constat, je tiens à vous répondre sur quatre points.

Premièrement, ce n’est pas pour satisfaire les demandes de Bruxelles que le Gouvernement présente ce PLFSS.

La préoccupation qui m’anime, comme un certain nombre d’orateurs, est précisément à l’opposé de la vôtre : si nous ne parvenons pas à rétablir l’équilibre des comptes de la sécurité sociale en général et de l’assurance maladie en particulier, nous ferons voler en éclats l’idée que l’assurance sociale, l’un des acquis de 1945, est bien le système le plus efficace pour prendre en charge les dépenses liées à la santé, à la vieillesse et à l’autonomie de nos concitoyens.

Aujourd’hui, 82 % des dépenses d’assurance maladie sont prises en charge par l’assurance maladie obligatoire ; les complémentaires en couvrent quant à elles 14 %. Ce n’est pas pour satisfaire Bruxelles !

J’y insiste : si nous laissons le déficit se creuser chaque année, certains esprits bien intentionnés décréteront vite que l’assurance maladie obligatoire est moins performante que les assurances maladie complémentaires – or, aujourd’hui, celles-ci ne se cantonnent malheureusement pas aux mutuelles.

Maintenir un système d’assurance sociale viable et robuste : telle est la priorité du Gouvernement.

Deuxièmement, vous affirmez que le présent texte ne déploie pas de moyens supplémentaires. Les chiffres eux-mêmes vous contredisent – je suis au regret de vous le signaler. L’Ondam fixé pour 2024 dépasse de 8 milliards d’euros celui de 2023.

Aurélien Rousseau

Je vous en donne acte, nous demandons à l’hôpital un effort de l’ordre de 500 millions d’euros au titre des achats, mais nous finançons aussi de nombreuses actions en sa faveur. Je ne citerai que les dernières mesures annoncées, lesquelles portent sur le travail de nuit ainsi que sur le travail des samedis et dimanches : à elles seules, ces mesures, financées par l’Ondam, coûtent plus de 1 milliard d’euros.

Je rappelle que les soignants hospitaliers ont connu, ces dernières années, les plus fortes hausses de traitement accordées depuis trente ans. Ainsi les rémunérations du public ont-elles retrouvé le niveau du privé. Je parle notamment des professionnels paramédicaux et des praticiens hospitaliers, non de certaines activités libérales, qui sont évidemment beaucoup plus lucratives.

Vous insistez avec raison sur la qualité de vie des soignants et sur leurs perspectives professionnelles ; nous avons précisément ouvert ces chantiers.

Les mesures que nous avons prises en faveur de l’attractivité nous permettent aujourd’hui de rouvrir des lits. Or rouvrir des lits, c’est permettre les remplacements. Permettre les remplacements, c’est permettre les départs en formation. Et permettre les départs en formation, c’est offrir de véritables évolutions professionnelles. Pour moi, tout cela s’appelle le progrès.

Troisièmement, au sujet des exonérations, force est de constater un désaccord très profond entre nous.

Vous évoquez les exonérations de charges, que vous évaluez à 87 milliards d’euros. Mais si, à l’heure actuelle, notre système de sécurité sociale est viable, c’est parce que le chômage est tombé à 7 %. Nous en étions encore très loin il y a quelques années.

Pour une partie d’entre nous, nous avons vécu pendant des décennies avec le chômage de masse. D’ailleurs, nous ne mesurons pas encore complètement combien sa disparition transforme nos réalités sociales, notamment le rapport au travail.

Le meilleur moyen de maintenir tel qu’il est notre système de sécurité sociale solidaire, reposant sur la contribution des salariés et des employeurs, c’est le plein emploi ; et le plein emploi, c’est le cap que le Gouvernement ne cesse de tenir.

En la matière, il suffit de quelques décisions pour balayer tous les efforts accomplis. Voilà pourquoi nous restons fidèles à notre ligne.

À cet égard, M. le ministre chargé des comptes publics a évoqué un certain nombre de mesures prises au titre des recettes, notamment le gel des fameux « bandeaux famille », qui permettra d’économiser plus de 600 millions d’euros.

Comme beaucoup, j’ai grandi avec l’idée que le chômage de masse serait irréversible. Or, si le taux de chômage baissait encore de deux points, aucune des branches de la sécurité sociale ne serait en déficit.

Quatrièmement et enfin, vous associez à tort responsabilisation, culpabilisation et stigmatisation.

Quand, à patientèle égale, un médecin prescrit quatre fois plus d’arrêts de travail que la moyenne de ses confrères, je n’estime pas qu’il est nécessairement fautif. En revanche, je considère que l’assurance maladie est en droit d’aller l’interroger afin de comprendre ce dont il retourne.

De même, j’ai demandé à l’assurance maladie de me signaler les entreprises où les arrêts maladie explosent.

Photo de Anne SOUYRIS

Mme Anne Souyris . Enfin, j'invite solennellement le Gouvernement à examiner les mesures que nous défendons en faveur des plus précaires. Je pense en particulier aux bénéficiaires de l'aide médicale de l'État (AME),

Aurélien Rousseau

Au total, deux cents entreprises ont été repérées. Nous allons engager un dialogue avec elles pour comprendre ce qui se passe.

Nous ne stigmatisons ni les médecins, ni les assurés sociaux, ni les entreprises : nous agissons en faveur d’une responsabilisation collective. À cet égard, il ne me semble pas choquant que l’assurance maladie examine telle ou telle situation de plus près.

De même, je m’étonne de ce que vous dites au sujet des prescriptions d’arrêts par téléconsultation. Si vous avez lu le présent texte en intégralité, ce dont je ne doute pas, vous l’aurez nécessairement noté : la limitation à trois jours ne s’applique pas si l’on n’a pas de médecin traitant ou si l’on apporte la preuve que l’on n’a pas réussi à trouver de médecin. Cela étant, nous devons nous doter des moyens de contrôler efficacement le business auquel donne lieu l’essor des téléconsultations.

Madame la sénatrice, en résumé, ce budget est tout sauf insincère.

Au terme de cette discussion générale, M. le ministre chargé des comptes publics aura sans doute l’occasion d’y revenir. L’an dernier, lors de l’examen du précédent projet de loi de financement de la sécurité sociale, nombre de prévisions de croissance ont été jugées totalement insincères. Elles se sont pourtant révélées bonnes…

Photo de Alain Marc

Mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir respecter le temps de parole qui vous est imparti.

La parole est à Mme Céline Brulin.

Thomas Cazenave

Tout à fait !

Photo de Céline Brulin

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, notre hôpital est en situation d'urgence absolue et la moitié de nos Ehpad publics est en déficit. La médecine de ville continue de reculer dans nos territoires et les indicateurs de santé de la France se dégradent.

Cette situation devrait appeler une stratégie nationale de santé, une loi de programmation, un grand effort de formation et de revalorisation en faveur des métiers de l'accompagnement et de la santé. Il s'agit là d'une priorité de nos concitoyens.

Loin de cela, le PLFSS pour 2024 s'inscrit dans la droite ligne des précédents budgets de la sécurité sociale, avec la réduction des dépenses pour seul cap – comme si ce qui n'a pas fonctionné hier devait miraculeusement résoudre les problèmes demain.

Quand la commission des comptes de la sécurité sociale estime à 4 % la progression des dépenses de santé, ce PLFSS ne prévoit que 3, 2 % de hausse. Quand, pour répondre aux besoins constatés, sans rattrapage du retard accumulé, l'Ondam devrait augmenter de 9, 5 milliards d'euros, il évolue de 8 milliards. Avec une inflation estimée par la Banque de France à 2, 6 %, la progression réelle des dépenses de santé risque donc d'être quasi nulle.

Selon la Fédération hospitalière de France (FHF), il manque 2 milliards d'euros en 2023 et 2 milliards d'euros de nouveau en 2024 pour que les hôpitaux puissent faire face à l'inflation et à l'augmentation des coûts de l'énergie ; en guise de quoi le Gouvernement leur inflige 500 millions d'euros d'économies.

« Nous allons vers la mort lente du service public de santé », déclare le président de la FHF en lançant l'alerte : le Ségur de la santé, la hausse du point d'indice des fonctionnaires et les mesures d'attractivité relatives au travail de nuit ne sont pas entièrement compensés. Dès lors, les hôpitaux sont contraints de financer ces décisions avec de l'argent qu'ils n'ont pas. Or, selon une étude récente, 50 % des soignants ne recommanderaient pas leur métier : les efforts en faveur de l'attractivité de ces professions ne sont clairement pas derrière nous.

Les jeunes sont attirés par les études de santé, mais Parcoursup brise maintes volontés et masque un certain nombre de réalités. Au total, 30 % des étudiants infirmiers abandonnent leur projet professionnel au cours de leur formation – ce chiffre doit nous amener à nous interroger.

Une autre étude, menée par des équipes de l'Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) et de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), avance qu'une nuit passée sur un brancard augmente de 40 % le risque de mortalité des patients âgés.

Oui, l'hôpital va mal ; et, pour obtenir un rendez-vous chez un généraliste, il faut désormais accomplir un véritable parcours du combattant.

Depuis la suppression du numerus clausus, nous formerions 15 % de médecins supplémentaires, mais, pour faire face à nos besoins, il faudrait en former 30 % de plus ! Il faut des moyens en conséquence, notamment pour nos universités.

Le développement des centres de santé est une arme pour lutter contre les déserts médicaux. Il devrait dès lors être favorisé. Les collectivités territoriales qui, de plus en plus nombreuses, s'orientent dans cette voie devraient quant à elles être mieux soutenues.

En outre, monsieur le ministre, pourquoi refuser de rétablir l'obligation de garde pour les médecins libéraux ? Pourquoi refuser de contraindre les médecins en secteur 2 et les établissements privés à participer davantage à la permanence des soins ?

Un bon tiers des Français sont confrontés à des pénuries de médicaments. Les préconisations formulées par la commission d'enquête menée par notre ancienne collègue Laurence Cohen et par notre collègue Sonia de La Provôté mériteraient d'être prises en compte ; mais vous préférez réduire la contribution de l'industrie pharmaceutique à l'assurance maladie, y compris pour les industriels qui délocalisent leurs productions.

J'y insiste, il est urgent de retrouver des capacités publiques de production de médicaments essentiels aujourd'hui en rupture de stock.

Vous stigmatisez les malades : vous autorisez des médecins payés par les employeurs à les contrôler et à les sanctionner, en refusant d'analyser avec discernement les raisons de l'augmentation des indemnités journalières. Si le Gouvernement avait véritablement pour but de lutter contre la fraude, il s'attaquerait aux 8 milliards d'euros de fraude patronale.

Aurélien Rousseau

Pour qu’un système fonctionne, il faut aussi savoir lui faire confiance.

En conclusion, le Gouvernement est évidemment défavorable à cette motion.

Photo de Alain Marc

La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.

Photo de Céline Brulin

Avec l'amendement de notre collègue député Marc Ferracci, retenu par le Gouvernement après utilisation du 49.3, vous entendez revenir sur les exonérations de cotisations sur les salaires supérieurs à 2, 5 Smic.

Démonstration est faite que ces exonérations ne sont plus tenables, ni économiquement ni socialement. Mais, en les concentrant sur les plus bas salaires, vous aggraverez encore le tassement des rémunérations, à l'heure où une part croissante de nos concitoyens ne parvient plus à joindre les deux bouts.

Aussi, nous proposons d'assortir ces exonérations de contreparties en matière salariale, environnementale ou d'égalité professionnelle. C'est d'ailleurs le souhait émis par les organisations syndicales lors de la récente conférence sociale.

Alors qu'elles n'ont aucun résultat positif sur l'emploi et les salaires, ces exonérations grèvent les dépenses publiques de près de 90 milliards d'euros. Je sais que ce chiffre vous fait sourciller, mais il figure à l'annexe 4 de votre texte.

C'est d'ailleurs incroyable de voir avec quelle énergie certains ici veulent conditionner, par exemple, le revenu de solidarité active (RSA) à l'accomplissement d'heures d'activités, tout en refusant de solliciter la moindre contrepartie des entreprises.

À défaut d'un projet de loi relatif au grand âge, ce PLFSS devrait aussi être l'occasion de lancer les recrutements massifs dont ont besoin les Ehpad pour atteindre l'objectif d'un professionnel pour un résident. On en est loin ! On est même loin des annonces présidentielles de 50 000 recrutements d'ici à la fin du quinquennat. Les embauches se sont limitées à 3 000 cette année et ne sont prévues qu'à hauteur de 6 000 l'an prochain : à un tel rythme, nous ne sommes même pas sûrs d'atteindre 50 000 recrutements en 2030…

Au titre de la branche famille, le Gouvernement prévoit d'utiliser les excédents dégagés grâce aux différentes réductions des prestations familiales pour financer la création du service public de la petite enfance.

À nos yeux, les entreprises doivent contribuer au financement d'un tel service ; l'État ne doit pas, une nouvelle fois, faire peser l'effort sur les seules collectivités territoriales.

Nous aurons l'occasion de revenir sur la branche AT-MP et sur le coup de Jarnac infligé aux victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles.

Enfin, j'évoquerai la branche vieillesse.

La réforme des retraites était censée « garantir l'équilibre du système ». Les résultats financiers pour 2024 traduisent en réalité une aggravation du déficit de l'ordre de 4 milliards d'euros. Cette réforme est donc inefficace – je crois me souvenir que nous l'avions dit ! – et les prétendues mesures d'accompagnement, comme la pension à 1 200 euros minimum, se sont volatilisées, laissant place à une revalorisation moyenne de 30 euros mensuels pour les plus faibles retraites…

En définitive, le PLFSS pour 2024 est à l'image de cette réforme des retraites : on demande encore et toujours des efforts à nos concitoyens, en formulant la vaine promesse d'améliorer les comptes publics, pour constater qu'il n'en est rien et demander de nouveaux sacrifices. Faut-il vraiment s'entêter dans cette voie, qui ressemble de plus en plus à une impasse ?

Souhaitons que le débat qui s'ouvre aujourd'hui permette de montrer que d'autres logiques peuvent être développées pour assurer la protection sociale du XXIe siècle, que nos concitoyens sont en droit d'attendre.

Photo de Anne SOUYRIS

Pénuries de médicaments, sous-rémunération des professionnels de santé, progression des déserts médicaux : face à de tels problèmes, il faut investir résolument dans la santé des Français.

Or le présent texte n’engage pas le virage économique et écologique nécessaire à la prévention et à l’adaptation au changement climatique ; il ne garantit pas le financement soutenable de la sécurité sociale, gage de sa préservation à long terme.

L’heure est à l’investissement massif en faveur de notre sécurité sociale ; ce n’est pas le cas. C’est pourquoi les élus du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires voteront cette motion.

Photo de Raymonde Poncet Monge

Je demande la parole, monsieur le président !

Photo de Guylène PANTEL

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, au nom du groupe du RDSE, je tiens tout d'abord à remercier M. le président de la commission, ainsi que Mmes et MM. les rapporteurs. Ils nous ont permis d'entamer ces débats dans la clarté ; or la tâche n'était pas simple.

Avant tout, il me paraît primordial de rappeler le contexte politique et social dans lequel nous étudions le présent texte. En effet, le PLFSS pour 2024 doit être appréhendé à l'aune de crises importantes, qui se cumulent.

Cette année encore, je crains que ce texte ne soit véritablement examiné et débattu que par le Sénat. Une telle situation démontre une fois de plus tout l'intérêt du travail de la Haute Assemblée, quand certains persistent à remettre en cause le bicamérisme.

Par ailleurs, de vives tensions perdurent au cœur même de notre système de santé et de protection sociale.

Les professionnels des hôpitaux publics déplorent encore bon nombre de situations critiques ; en résultent des fermetures de services, qui ont un impact négatif indéniable sur les usagers.

Du côté de la médecine libérale, le mécontentement est également palpable. Il est notamment alimenté par les négociations tarifaires avec l'assurance maladie.

À la fin du mois de septembre dernier, les discussions du Gouvernement avec les partenaires sociaux au sujet des 68 milliards d'euros de réserve de la retraite complémentaire Agirc-Arrco n'ont pas été de nature à rassurer les syndicats et le patronat, qui gèrent ce régime paritairement. L'apaisement devait pourtant être de rigueur, après un début d'année particulièrement agité autour de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 portant réforme des retraites.

Parallèlement, les difficultés de recrutement et de fidélisation du personnel des établissements sociaux et médico-sociaux entament la motivation des équipes, qu'elles soient chargées de tâches d'exécution ou de direction. À ce sujet, les iniquités de traitement, notamment salariales, entre les corps de métier du public et du privé sont souvent dénoncées.

Entre autres éléments de contexte, j'évoquerai enfin les diverses enquêtes journalistiques dédiées aux dérives de la financiarisation d'un certain nombre de services essentiels, allant de la petite enfance au grand âge. En somme, nous serions face à un système lucratif fondé sur le profit, sacrifiant souvent la qualité de l'accompagnement de nos enfants et de nos aînés.

Ainsi, les défis pour 2024 ne manquent pas ; nous devons nous doter d'un budget de la sécurité sociale à la hauteur de la situation sans pour autant aggraver le déficit, indicateur fondamental de la soutenabilité du système.

Or – nos différents rapporteurs l'ont rappelé à juste titre –, si l'on en croit les prévisions, les déficits des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) devraient repartir à la hausse, passant de 8, 8 milliards d'euros en 2023 à 11, 2 milliards d'euros en 2024.

Les élus du RDSE sont profondément attachés à la pensée ayant inspiré la création du système de sécurité sociale en France, sur le modèle bismarckien, en 1945. Ils s'associent, partant, aux inquiétudes de leurs collègues quant à la trajectoire financière des régimes.

Dans cet esprit, nous regrettons le manque de réflexions relatives à une réforme structurelle de la sécurité sociale, de même que la faiblesse des pistes visant à stabiliser les recettes.

En revanche, au-delà de l'équilibre financier de la sécurité sociale, sur lequel beaucoup d'éléments pertinents ont été abordés en commission, notre groupe salue, sur le fond, quelques grandes avancées pour la qualité de vie des Français.

Nous sommes notamment très satisfaits du volet relatif à la prévention, qui érige des politiques publiques permettant de maintenir nos concitoyens en bonne santé, en leur donnant les moyens de s'informer et de suivre leur santé, de même que des outils visant à améliorer leur hygiène de vie.

Nous pensons à la gratuité des préservatifs pour les moins de 26 ans – population touchée par les infections sexuellement transmissibles et les grossesses non désirées –, ainsi qu'à l'article 19, qui acte la prise en charge des protections réutilisables pour les femmes de moins de 26 ans et les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire (C2S).

Le lancement de la campagne nationale de vaccination contre les papillomavirus humains (HPV) dès la classe de cinquième est également une bonne mesure. Dans le monde, un tiers des jeunes hommes de plus de 15 ans est porteur d'un papillomavirus et environ 20 % sont atteints d'un type de HPV susceptible d'engendrer un cancer. Il y a donc urgence à agir, raison pour laquelle l'article 17 est naturellement le bienvenu.

En outre, nous saluons le premier pas vers la réforme de la tarification à l'activité (T2A) des hôpitaux, pour ce qui concerne les activités de médecine, de chirurgie et d'obstétrique. Il était temps, car nous percevions depuis trop longtemps déjà les limites de ce mode de financement. L'hôpital a plus que jamais besoin d'un filet de sécurité budgétaire diversifié. Pour ce faire, nous devons absolument plafonner la part de la T2A.

Le temps étant compté, je ne m'éterniserai pas davantage, bien qu'il y ait beaucoup à dire sur des sujets sous-explorés, tels que le grand âge, avec une trajectoire démographique de la France qui soulève de nombreuses questions.

Nous aurons l'occasion, mes collègues du groupe du RDSE et moi-même, de défendre nos amendements et de nous prononcer sur les propositions de nos collègues au cours des prochains jours, qui s'annoncent riches en débats.

Photo de Alain Marc

Ma chère collègue, le règlement n’autorise qu’une seule explication de vote par groupe.

Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix la motion n° 944, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Photo de Solanges NADILLE

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous nous retrouvons cette semaine pour un temps fort de notre année de travaux, l'examen du budget de la sécurité sociale pour 2024. Cette année encore, notre système de santé a connu des difficultés et a dû faire face à un contexte inflationniste ayant entraîné une augmentation des coûts de fonctionnement.

L'enjeu pour le Gouvernement était clair : ne pas laisser cette hausse des coûts mettre en péril les établissements de santé, tout en permettant aux personnels soignants de gagner dignement leur vie, avec le risque de voir s'évaporer les avancées du Ségur du fait d'une augmentation du coût de la vie. S'ajoute à cela la nécessaire marche en avant pour la modernisation du système de santé et la meilleure prise en charge des patients.

Madame la ministre, messieurs les ministres, comme si la liste des contraintes n'était pas déjà assez complexe, il vous faut, bien sûr, ne pas laisser filer les déficits et trouver des économies dans les différentes branches.

Dans ce jeu d'équilibriste, vous parvenez à dégager plusieurs avancées pour nos concitoyens, et l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour 2024 en témoigne, avec une augmentation de 3, 2 %, soit une hausse supérieure à l'inflation, et un montant de 8 milliards d'euros de dépenses supplémentaires. Dans le même temps, vous prévoyez 3, 5 milliards d'euros d'économies, en axant votre politique sur une maîtrise des dépenses de soins de ville et une responsabilisation de l'ensemble des acteurs.

Plusieurs mesures dans le domaine de la santé doivent être saluées.

Tout d'abord, un réel renforcement de la prévention, souvent parent pauvre des politiques de santé, est amorcé : généralisation de la vaccination contre les infections à papillomavirus, prise en charge intégrale des protections périodiques et des préservatifs pour les moins de 26 ans, réorganisation des rendez-vous de prévention aux âges clés.

Cette action est nécessaire pour enclencher un changement culturel dans notre pays. La prévention permet une meilleure prise en charge, plus précoce, des pathologies pour un coût plus faible pour l'assurance maladie. La politique, c'est prévoir à long terme et, par ce biais, vous accomplissez un pas décisif pour la santé de nos concitoyens pour les prochaines années.

De plus, nous nous dotons de nouveaux moyens pour assurer la continuité de l'accès des patients aux médicaments, dans un contexte de pénurie. En 2023, 37 % des Français ont déclaré être touchés par cette difficulté. Face à l'augmentation de la demande mondiale et des tensions sur les chaînes d'approvisionnement, nous devons agir !

Pour ce faire, nous soutenons votre proposition d'une délivrance à l'unité des antibiotiques en rupture de stock, en lien avec les pharmaciens.

Mais, pour éviter que la solution de l'urgence ne se transforme en principe, il faudra, dans le même temps, continuer votre travail de relocalisation de la production sur le territoire national. C'est un véritable enjeu de souveraineté et une obligation morale pour la protection de nos concitoyens.

Sans vouloir être exhaustive sur les mesures que contient ce texte, je veux, enfin, mettre en avant votre proposition d'étendre l'attribution simplifiée de la complémentaire santé solidaire à un certain nombre de bénéficiaires de minima sociaux, dont l'allocation aux adultes handicapés. Cette simplification doit être saluée, car elle réduira le non-recours et garantira à ces publics un meilleur accès aux soins.

Dans le cadre de l'examen de ce texte, le groupe RDPI portera un certain nombre de points au débat, notamment concernant la lutte contre l'obésité et l'accès aux produits sucrés, mais également sur la question du financement des politiques de santé dans les territoires ultramarins, sujet sur lequel nous sommes prêts à avancer de manière concertée avec le Gouvernement.

Pour finir, je voudrais affirmer, madame la ministre, messieurs les ministres, que nous soutiendrons votre proposition de budget, que nous trouvons responsable et ambitieuse, ainsi que les mesures qui iront dans le sens d'un meilleur accès aux soins pour les patients. §

Photo de Alain Marc

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Photo de Bernard Jomier

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, pour la septième fois depuis qu'Emmanuel Macron est à l'Élysée, nous étudions le budget de la sécurité sociale présenté par son gouvernement.

Pour la septième fois, il est en déficit. Et, lorsque le chef de l'État quittera l'Élysée, il sera, selon la trajectoire prévue par le Gouvernement, toujours en déficit – il le sera même encore plus qu'aujourd'hui.

Cette trajectoire est inédite. Le Gouvernement ne parvient pas à rétablir les comptes. Et, de fait, il fragilise la sécurité sociale dans ses fondements, puisqu'il projette l'idée que notre système n'est pas soutenable, pas tenable dans la durée.

Nous avons beaucoup débattu, au printemps, de la première masse financière de ce budget, le système de retraite. Je ne m'y attarderai pas : ma collègue Monique Lubin y reviendra.

Qu'en est-il du budget santé du pays ?

Il progresse, cette année, de 3, 2 %, soit un peu plus que l'inflation prévue, après une année 2023 marquée par une progression inférieure à l'inflation.

Cependant, cette hausse doit intégrer de nombreux effets de revalorisations, tellement importants qu'ils consommeront plus de 90 % de cette augmentation et qu'il ne restera quasiment rien pour faire face à l'inflation et à la nécessité d'apporter les améliorations, diverses et variées, que requiert le fonctionnement de notre système de santé.

Ce budget 2024, s'il était respecté – ce qu'à peu près personne ne croit –, financerait moins de soins que celui de 2023, le coût de ceux-ci progressant plus vite que l'enveloppe allouée.

On apprend à l'école primaire que l'on achète moins de tomates en année N+1 avec 12 euros qu'en année N avec 10 euros si le prix du kilo est, dans l'intervalle, passé de 5 à 7 euros. Messieurs les ministres, madame la ministre, c'est exactement ce qui se passe avec votre budget !

Depuis des années, vous tracez le même sillon, celui de la contrainte de l'offre pour comprimer la dépense. Cette politique a démontré son inefficacité et elle crée de la désespérance chez les personnels du soin. Elle fait naître chez ces derniers le sentiment qu'ils ne peuvent remplir leur mission dans de bonnes conditions, les poussant à partir. Nous manquons de médecins généralistes. Nous manquons de professionnels à l'hôpital. Une pénurie s'installe et la surcharge de travail, chez ceux qui restent, suscite de nouveaux départs, ce qui alimente la pénurie.

L'inefficacité se lit d'abord dans les résultats. Que demande-t-on à un système de santé, si ce n'est de faire progresser l'état de santé de sa population ? Or nos grands indicateurs de santé se dégradent.

Après la mortalité infantile, qui progresse – lentement, mais sûrement – depuis quelques années et nous relègue à un niveau moyen au regard des autres pays, c'est au tour de l'espérance de vie à la naissance, qui fut longtemps l'une des toutes meilleures au monde, de flancher : nous passons de la sixième à la treizième place des pays de l'OCDE.

Des résultats de santé publique qui se dégradent, des déficits qui se creusent, tout cela dans la durée : que faut-il de plus pour comprendre que quelque chose ne fonctionne pas et que l'heure est à un véritable changement ?

Si vous étiez tentés, madame la ministre, messieurs les ministres, par un simple rétablissement des comptes, vous avez l'embarras du choix : réduire les allégements et exonérations non compensés, voire y mettre fin ; annuler tout ou partie du transfert de la dette covid de l'État à la Cades ; décider de nouvelles recettes…

Nous vous appelons toutefois à plus d'ambition et à affronter la réalité : les dépenses de santé progressent plus vite que la richesse nationale sous l'effet de facteurs structurels que nous connaissons bien et auxquels nous n'avons d'autre choix que de nous adapter.

Notre pays ne parvient pas à suivre cette hausse. Il le fait d'autant moins qu'il gaspille trop de ressources et qu'il investit trop peu dans la prévention.

Le budget santé du pays est ainsi construit à partir d'une forme de conservatisme mâtiné d'une lecture financière inefficace.

Certes, l'Ondam n'a jamais été une construction de santé publique, mais il se révèle désormais comme un obstacle à des démarches de santé. Si nous poursuivons ainsi, les indicateurs de santé continueront à se dégrader et les pénuries à se perpétrer.

Changer, madame la ministre, messieurs les ministres, c'est construire autrement notre budget. C'est délibérer sur nos objectifs avant de délibérer sur les moyens.

C'est délibérer sur des priorités dans chaque département, en fonction des besoins de santé de la population. C'est, ensuite, délibérer au Parlement sur des objectifs nationaux de santé que nous nous assignons. Et c'est, après seulement, allouer les moyens en fonction des choix effectués, car, oui – nous ne disons pas le contraire –, il y aura toujours des choix à faire.

Changer, c'est faire beaucoup plus de prévention.

C'est l'activité physique et l'activité physique adaptée qui doivent se déployer.

C'est une lutte énergique contre les polluants, dont certains – je pense aux perturbateurs endocriniens – compromettent tout progrès de notre espérance de vie en bonne santé.

C'est la réduction de la consommation d'alcool, sur laquelle brasseurs et viticulteurs ont toujours une objection et le Président de la République une complaisance.

Photo de Alain Marc

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 42 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Photo de Bernard Jomier

C'est la lutte contre le tabagisme, désavouée l'an dernier par le ministre chargé des comptes publics, Gabriel Attal, de retour du congrès des buralistes.

C'est la santé mentale. C'est l'alimentation. C'est la santé au travail.

Changer, madame la ministre, messieurs les ministres, c'est, enfin, constater que le mouvement de financiarisation qui frappe le secteur de la santé est un danger pour les fondements de notre protection sociale.

Les ressources provenant des assurés sociaux sont détournées vers la rémunération d'actionnaires. La rentabilité prend le pas sur la pertinence des soins. Conjuguée à un mode de rémunération trop centré sur les actes, la financiarisation invalide toute politique visant à l'efficience et à la permanence des soins. Elle s'impose aussi, parce que de nombreux secteurs du soin souffrent d'un déficit d'investissement ; elle profite, en cela, de budgets de ce type, trop à courte vue.

Il devient urgent de poser des limites pour éviter de voir notre système solidaire régresser encore.

Vous l'avez compris, madame la ministre, messieurs les ministres, nous estimons que le budget que vous nous présentez nous maintient dans une impasse. Alors que la crise sanitaire qui a surgi en 2020 est derrière nous, la promesse présidentielle est oubliée. Rien ne change.

Alors qu'il faudrait réunir un large accord politique pour rénover en profondeur notre protection sociale et notre système de santé, la faiblesse de votre base politique empêche le Parlement de remplir pleinement son rôle. Les contournements tels que le Conseil national de la refondation ne règlent rien.

Le résultat est là : votre gouvernement paraît dépassé par les enjeux de la protection sociale.

Discussion générale

Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Michel Masset et Mme Raymonde Poncet Monge applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Anne Souyris.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, le PLFSS 20204 est, hélas, dans la triste continuité de ses prédécesseurs.

Il ne contient aucune réforme majeure et continue de mélanger les genres, entre loi de financement et loi d'organisation de la santé. C'est évidemment la meilleure façon d'entretenir la confusion.

Or nous sommes parvenus à la croisée des chemins, ce moment précis où, en fonction des décisions prises, nous refonderons notre modèle, en l'adaptant, le modernisant, ou, au contraire, nous continuerons à le condamner et à le transformer en un système américanisé, via les assureurs privés, la financiarisation de certains secteurs et l'ubérisation de la santé.

Aujourd'hui, déjà, des sociétés étrangères achètent des cliniques, des centres de santé et se financent, ainsi, avec l'argent de l'assurance maladie. Quelles réponses apportons-nous ?

Depuis des années, nous dénonçons le manque d'ambition, de vision prospective et réformatrice des différents gouvernements, leur approche comptable, leur recours à tout un arsenal de stratagèmes qui relèvent davantage de la fuite en avant que de la prise en considération des enjeux des professionnels, des patients et de l'organisation du système de protection sociale, au travers notamment de son financement.

Je pourrais aujourd'hui, au mot près, à la virgule près, tenir les mêmes propos que l'an passé. Pourquoi ne pas avoir eu la volonté, dès ce PLFSS, de refonder la gouvernance de la santé, en proposant par exemple une loi de programmation sanitaire pour la durée du mandat présidentiel ?

Madame la ministre, messieurs les ministres, pourquoi ne pas donner ne serait-ce qu'un signe de votre volonté d'avoir une stratégie de santé fondée sur l'évaluation territoriale des besoins de santé et sur des objectifs territoriaux de santé ?

Pourquoi ne pas marquer votre volonté de mettre en place une vraie démocratie locale et sanitaire au centre du fonctionnement de l'hôpital, rééquilibrer le management entre la médecine et l'administration et développer une gouvernance autonome ?

Pourquoi ne pas permettre la mise en place des patients experts ?

Pourquoi ne pas assurer aux professionnels libéraux qu'ils soient garants des missions territoriales de santé ?

Pourquoi ne pas proposer une restructuration de la permanence des soins ambulatoires, afin de garantir la pertinence des urgences hospitalières ?

Pourquoi ne pas réviser les ordonnances Debré pour permettre un meilleur ancrage territorial des hôpitaux ?

Le fait de soulever les mêmes interrogations et de n'avoir pas davantage de réponses n'est pas de bon augure. Le temps nous est compté. Il y a urgence.

Vous me permettrez d'insister particulièrement sur le financement, qui est l'objet de ce texte. Sa réforme est la condition sine qua non pour dégager de réelles marges de manœuvre financières, tout en améliorant notablement la performance de notre système de santé.

Aujourd'hui, la multiplicité des intervenants entraîne une hausse des frais de gestion exponentielle, et cette évolution démontre l'ampleur des économies réalisables grâce à une réforme du financement.

Nous devons non seulement réfléchir sérieusement, mais aussi mettre en œuvre le plus rapidement possible un mode de financement par un assureur unique par prestation de santé.

Des économies substantielles seraient ainsi réalisées, qui pourraient être réinjectées au profit d'une optimisation de l'ensemble de notre système de santé, de ses bénéficiaires, de ses acteurs, de ses financeurs.

Cela permettrait de développer une vraie politique de prévention, tout en garantissant la pérennité de notre système, fondé sur la solidarité.

Vous conviendrez avec moi que ce principe est aujourd'hui battu en brèche. Les inégalités sont plus nombreuses et plus flagrantes.

La privatisation accrue de notre système et le développement des réseaux participent à une transformation insidieuse, voire pernicieuse, de l'accès aux soins. Un système à deux vitesses n'est plus un spectre. C'est une réalité, chaque jour plus marquée.

Enfin, comment ne pas évoquer la situation des hôpitaux ? Je veux aborder ici la question du financement, dont le volet lié à la tarification à l'activité – la fameuse T2A – est souvent stigmatisé.

Dans un récent rapport, la Cour des comptes a rappelé la volonté du Président de la République, puis du ministre chargé de la santé, en janvier 2023, de réformer le financement des établissements de santé. La tarification à l'activité a été présentée comme « condamnée », même s'il est envisagé d'en conserver une part.

Une fois ce rappel fait, la Cour analyse le rôle joué par la T2A dans la maîtrise des coûts, d'une part, et dans l'amélioration de l'organisation des soins et le pilotage des établissements de santé, d'autre part.

Force est de constater que les objectifs qui lui étaient assignés en termes d'équité et de transparence des financements ont été atteints et demeurent indispensables.

Bien sûr, le système est perfectible et doit être amélioré, notamment pour les soins non programmables et pour les soins critiques, mais gardons-nous de retomber dans les travers que provoque un système axé essentiellement sur des dotations.

Ce PLFSS, monsieur le ministre, propose peu de mesures de rénovation. Les déficits se creusent. Combien de temps encore allons-nous tout mettre en œuvre pour conduire notre système de santé dans le mur ?

Mes chers collègues, nous ne pouvons pas accepter plus longtemps d'être les fossoyeurs de notre pacte social.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et sur des travées des groupes UC et SER. – Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne SOUYRIS

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, assurer à toutes les citoyennes et à tous les citoyens « des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer » : c’est l’objectif de la sécurité sociale, tel qu’énoncé par le Conseil national de la Résistance.

Cette protection majeure est définie plus largement encore dans le préambule de la Constitution de 1946, qui garantit « à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé ».

Notre sécurité sociale s’est construite à l’abri de ce fronton républicain. Mais l’édifice, qui est l’un des plus protecteurs au monde, est aujourd’hui en train de se fissurer. Il suffit pour s’en convaincre de consulter les pronostics, établis par le Gouvernement lui-même, des déficits attendus de notre assurance maladie d’ici à 2027.

Face à ces chiffres, nous aurions bien entendu besoin d’un grand bouleversement. Madame, messieurs les ministres, je sais que vous souhaitez, comme moi, le sauvetage de ce formidable outil, garant de notre droit fondamental à la santé.

Un certain nombre d’avancées sont accomplies, qu’il s’agisse de la prévention, avec les campagnes de vaccination contre les infections à papillomavirus humain (HPV), de la santé scolaire ou encore des financements. Le présent texte renforce ainsi le combat contre la financiarisation de notre système de santé, notamment en remettant en cause la tarification à l’acte à l’hôpital – la portée cette décision est certes limitée, mais il s’agit d’un premier pas.

Cela étant, la logique reste la même. On constate, qui plus est, une inadéquation majeure entre l’augmentation de l’Ondam et l’inflation. En résulte une véritable mise en danger, non seulement de la médecine de ville, mais aussi de notre hôpital.

Lorsque les services publics ou associatifs de secteur 1 voient leur budget diminuer, les plus précaires d’entre nous, de plus en plus nombreux, n’ont d’autre choix que de se tourner vers les dispositifs publics d’aide sociale et sanitaire. Autant dire que nous sommes inquiets.

Chacun sait que l’hôpital public ne tient que par l’engagement remarquable des soignantes et des soignants. Mais, en la matière, que nous propose le Gouvernement ? À vrai dire, une non-trajectoire de dépenses réaliste et soutenable.

Monsieur Cazenave, ce n’est pas la lutte contre la fraude individuelle qui sauvera notre solidarité. En ce sens, vos propositions sont autant de cache-misère.

Je ne puis qu’y insister : l’Ondam 2024, qui progresse de 3, 2 % par rapport à l’objectif rectifié pour 2023, ne prend pas en compte l’inflation, située entre 4 % et 5 %. Il manque à ce PLFSS plus de 1 milliard d’euros pour financer les établissements de santé et 400 millions d’euros pour financer intégralement les mesures de revalorisation du Ségur de la santé.

Il y a quelques semaines, dans cet hémicycle, avant l’examen du triste projet de loi relatif à l’immigration, nous débattions de la démocratie sanitaire dans nos territoires. Je saluais alors l’esprit d’ouverture dont le Gouvernement faisait preuve à cette occasion : quel dommage qu’il n’ait pas adopté la même attitude pour l’examen de ce PLFSS, rejeté par les organisations syndicales et critiqué par les grandes structures associatives !

Ce PLFSS – est-ce véritablement une surprise ? – n’amorce aucun virage majeur pour faire face aux transformations planétaires et renouveler notre sécurité sociale vers le mieux-disant.

En faveur de la transition écologique et de la justice sociale, l’on ne fera rien sans des investissements majeurs. Vous le savez, monsieur Cazenave, mais vous regardez ailleurs… Pourtant, il me semble que nous vivons sur la même planète ! Vous auriez pu faire le choix de l’action et relever le défi.

Pour améliorer la santé dans notre pays, pour retrouver les jours heureux et faire face aux défis contemporains, il eût été possible d’aligner à nouveau, dans notre système de sécurité sociale, nos liens de dépendances en matière de santé et nos conditions d’existence ; autrement dit, de proposer que les responsables de nos maladies, des pollutions ou encore du changement climatique deviennent les contributeurs de la transformation de la sécurité sociale.

Pour paraphraser une chanson entendue bien des fois lors des manifestations contre la réforme des retraites, oui, nous devons mieux répartir les richesses ; oui, nous devons trouver de nouvelles recettes. Mais, pour cela, il faut cesser de faire payer les plus pauvres, qui – rappelons-le – sont ceux qui bénéficient le moins de nos droits sociaux, et garantir enfin l’équité.

Taxons les dividendes, les superprofits et les sociétés pétrolières. Taxons ceux et celles qui polluent le plus et qui profitent le plus des crises, non pas parce que nous voulons les sanctionner, mais parce que, dans une démocratie digne de ce nom, ils et elles doivent participer, réparer, préparer notre avenir à tous et toutes à la mesure des moyens qu’ils et elles ont à leur disposition.

Nous y sommes : mettons enfin à contribution les plus riches et les grands pollueurs, au nom d’une égalité républicaine à laquelle – j’ose l’espérer – nous aspirons tous et toutes.

On trouve quand même, dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, quelques mesures de progrès ; elles sont certes maigres, mais elles ont le mérite d’exister. Je pense notamment à la gratuité des préservatifs et des protections périodiques, ainsi qu’à la campagne de vaccination contre le papillomavirus dans les établissements scolaires – bravo !

Toutefois, monsieur Rousseau, j’interroge une nouvelle fois le Gouvernement : pourquoi restreindre ces deux premières mesures aux moins de 26 ans ? Pourquoi ne pas assumer un objectif vaccinal au-delà des établissements publics ? Je suis sûre que vous saurez m’entendre, au moins sur ces points-là, car je vous sais sensible aux inégalités femmes-hommes et à la grande précarité.

Si nous disons « mieux vaut tard que jamais », nous prenons soin d’ajouter « peut mieux faire ». C’est dans un esprit démocratique de responsabilité et de dialogue que les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ont proposé d’améliorer ces dispositifs.

Je regrette que tant de nos amendements aient été jugés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution et j’appelle le Gouvernement à s’emparer de nos propositions.

Nous proposions en particulier d’améliorer l’information relative au vaccin HPV, ainsi que de rendre gratuits les contraceptifs et les protections périodiques pour les plus précaires, sans critère d’âge.

Le présent texte s’attache à préciser les modalités des rendez-vous de prévention annoncés l’année dernière. Nous vous proposerons d’affiner ces dispositifs pour y inclure clairement, d’une part, la santé environnementale et, de l’autre, les besoins de santé des personnes les plus précaires et les plus éloignées du soin du fait de discriminations, comme les minorités de genre ou d’orientation sexuelle et les travailleuses et travailleurs du sexe.

La lutte contre les addictions est un autre angle mort de ce PLFSS. Il nous faut revenir à la loi Évin et interdire la publicité pour l’alcool…

Debut de section - PermalienPhoto de Christopher SZCZUREK

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, abîmés par la crise sanitaire, par des décennies de mauvais choix, la sécurité sociale et notre système de santé, qui étaient auparavant une fierté nationale et étaient réputés pour être parmi les meilleurs au monde, ne sont plus que l'ombre d'eux-mêmes.

Notre hôpital public et nos urgences sont en ruine, avec une dégradation des conditions d'accueil et de prise en charge des patients, en dépit du dévouement de nos soignants. À l'épuisement des professionnels de santé et au déficit des vocations s'ajoute une baisse ininterrompue des capacités d'accueil dans les hôpitaux.

Mes chers collègues, la réalité est édifiante. L'espérance de vie recule désormais dans notre pays. La mortalité infantile, l'un des indicateurs attestant le plus de l'état d'un système social, revient à la hausse, avec évidemment autant de drames familiaux.

Enfin, il n'est plus un territoire, rural comme urbain, qui ne connaisse pas une dégradation de l'accès aux soins et 30 % de la population française vit désormais dans un désert médical.

Après ce sombre constat, les solutions portées par ce PLFSS paraissent sous-dimensionnées et l'optimisme gouvernemental confine à la déconnexion.

Des mesures efficaces pour financer notre système de santé existent. Le Rassemblement national proposera des amendements pour faire rentrer et économiser l'argent qui manque cruellement à nos soignants et à nos hôpitaux.

À ce sujet, nous nous félicitons de la transposition, dans ce PLFSS, de mesures portées par Marine Le Pen lors de l'élection présidentielle. Ainsi, nous accueillons favorablement la réforme de la T2A, un système qui contraint l'hôpital public à s'aligner sur les méthodes du privé. Le principe de délivrance à l'unité des médicaments nous apparaît également être une mesure de santé publique et de santé financière bienvenue.

Néanmoins, malgré ces quelques lueurs, les manquements sont légion.

Le Rassemblement national défendra la mise en place d'une réelle politique de souveraineté pharmaceutique par la réindustrialisation du secteur et par une politique d'État stratège appuyée sur les grands groupes pharmaceutiques tricolores.

Il est également temps de rationaliser la technostructure de la santé. La suppression des ARS, échelons inutiles, coûteux et plus que jamais délégitimés par leur gestion catastrophique de la crise sanitaire, est une nécessité pour redéployer les efforts de l'État et donner aux médecins et aux soignants un vrai pouvoir de gestion et d'action au sein de leurs établissements.

Nos amendements appuieront également la nécessaire lutte contre la fraude sociale, évaluée entre 7 milliards et 21 milliards d'euros selon les services de l'assurance maladie.

Enfin, le présent PLFSS est une nouvelle occasion manquée de définir de réelles mesures pour accompagner les Français dans les défis démographiques de notre temps. Ainsi, nous déplorons l'absence d'un réel plan grand âge, centré sur les aidants et sur le maintien à domicile des personnes en situation de dépendance.

Madame la ministre, messieurs les ministres, le contestable article 30 de votre projet de loi participera à éloigner ces personnes du soin par l'augmentation des coûts du transport individualisé. Les personnes handicapées seront également lourdement affectées par cette mesure, les contraignant d'autant plus dans un accès aux soins plus difficile et plus coûteux pour eux comme pour leurs familles.

À ce titre, les acteurs de la Conférence nationale du handicap ont alerté sur le décalage persistant entre les moyens alloués et les besoins des personnes en situation de handicap.

Mes chers collègues, les sénateurs du Rassemblement national soutiendront toutes les mesures allant dans le bon sens : celui de la protection sociale la plus étendue pour les Français et celui du pragmatisme gestionnaire.

Dans cette chambre, il n'y a pas de 49.3. Profitons-en pour débattre, ce dont l'Assemblée nationale a été privée !

Debut de section - PermalienPhoto de Anne SOUYRIS

Mme Anne Souyris. Nous le savons tous dans cet hémicycle : l’alcool tue plus de cent personnes par jour en France. Une régulation est indispensable : nous ne pouvons pas laisser tant de nos enfants sombrer dans l’alcoolisme.

M. Joshua Hochart applaudit.

Murmures sur les travées des groupes Les Républicains et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, le PLFSS 2024 prévoit 641 milliards d'euros de dépenses et 630 milliards d'euros de recettes.

L'Ondam s'élève à 255 milliards d'euros, soit 50 milliards d'euros supplémentaires par rapport à 2019 : cela représente une augmentation de 3, 2 %, soit 8 milliards d'euros par rapport à 2023.

Malgré cette hausse importante, la situation risque d'être difficile pour les hôpitaux et pour le secteur médico-social, qui subissent de plein fouet l'inflation et qui doivent augmenter les salaires et réaliser des investissements.

Il en est de même, à mes yeux, de la prise en charge de la dépendance.

Néanmoins, ce texte contient plusieurs avancées, que nous encourageons : des mesures de lutte contre la fraude aux cotisations sociales ; la vaccination contre les papillomavirus humains ; la prise en charge des préservatifs et des protections périodiques ; la possibilité de délivrance, par les pharmaciens et après réalisation d'un test, de médicaments pour certaines cystites et les angines ; une simplification des démarches d'attribution de la C2S ; un meilleur repérage pour les enfants et de meilleures conditions d'accueil ; un dépistage accru ; la prise en charge à 100 % des fauteuils pour les personnes handicapées ; des bilans de prévention ; des mesures contre les pénuries de médicaments.

Sur ce dernier point, monsieur le ministre, il est absolument fondamental de trouver des solutions pour relocaliser la fabrication de médicaments en France et en Europe. Voilà vingt ans, l'Europe était le premier producteur et exportateur de médicaments.

Concernant la dépendance, sujet sur lequel j'interviendrai plus longuement, vous avez manifesté l'intention de créer 25 000 places en services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) d'ici à 2030.

En effet, le nombre de seniors de plus de 85 ans va doubler entre 2020 et 2040, et celui des personnes en perte d'autonomie va passer de 1, 4 million à 2 millions.

Si vous voulez voir le virage domiciliaire annoncé se réaliser – nous y sommes favorables –, c'est dès maintenant et d'ici à 2027 qu'il faut essayer de créer ces 25 000 places en Ssiad et en résidences autonomie.

Dans les Ehpad, vous prévoyez une diminution du taux d'institutionnalisation des personnes dépendantes – il passerait de 41 % à 37 % –, ce qui va entraîner une augmentation très importante de la dépendance globale, avec un GIR moyen pondéré (GMP) qui s'établira entre 750 et 800.

Nous avons voté la loi du 7 août 2020 créant une cinquième branche de la sécurité sociale, qui indique que la perte d'autonomie est un risque assuré par la nation à chacun.

Les PLFSS 2022 et 2023 ont respectivement apporté 200 millions et 300 millions d'euros, ce qui fait, sur deux ans, 1, 2 emploi par Ehpad – il y en a 7 500.

Madame la ministre, messieurs les ministres, en 2025 et 2026, les annonces du Président de la République doivent être appliquées, même si je comprends les difficultés budgétaires.

L'objectif était de créer 50 000 emplois supplémentaires sur le quinquennat, dont 10 000 d'ici à 2024. Il est nécessaire d'en créer encore 20 000 en 2025 et autant en 2026. C'est le minimum indispensable ; d'après mes calculs, cela permettra cinq emplois supplémentaires en moyenne par Ehpad et d'augmenter ainsi de quinze minutes par jour le temps passé auprès de chaque résident. Nous devons avoir cette ambition.

Il me paraît également nécessaire que les sections « soins » et « dépendance » des budgets des Ehpad soient fusionnées, comme le propose l'article 37. Cependant, celui-ci ne prévoit cette fusion que sur la base du volontariat, ce qui pourra entraîner des disparités entre les départements et ne me semble pas conforme à l'esprit de la loi.

Il est aussi nécessaire, parallèlement, que les départements ne rétrocèdent pas à la CNSA l'intégralité de ce qu'ils perçoivent au titre des GIR 5 et 6. Il faut leur donner les moyens de renforcer le maintien à domicile.

J'ai déposé un amendement visant à revenir sur l'obligation de fusion prévue entre les Ssiad et les services d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad), afin de tenir compte de ce qui fonctionne bien dans les territoires – il faut être pragmatique !

Pour ce qui concerne l'hôpital, la diminution de la tarification à l'activité, la sécurisation de l'Établissement français du sang, l'augmentation des primes de nuit et de dimanche – comme en Ehpad – ainsi que des gardes des médecins vont tout à fait dans le bon sens.

La création de services de médecine polyvalente en aval des urgences est demandée pour désengorger celles-ci. Cela me semble également une nécessité, monsieur le ministre, tout comme, bien sûr, la renégociation avec les professionnels et l'augmentation des effectifs médicaux et paramédicaux.

Je signale également les problèmes qu'occasionne la fermeture de deux cent cinquante pharmacies par an en milieu rural.

J'avais également déposé un amendement d'appel tendant à renforcer les soins palliatifs dans chaque département, afin de pouvoir mieux prendre en charge les malades et leur famille à domicile, en Ehpad ou à l'hôpital. Je regrette qu'il ait été déclaré irrecevable.

Il en a malheureusement été de même de mon amendement permettant que les six derniers mois de la quatrième année d'internat puissent être effectués avec un médecin référent seulement – il n'y a pas de médecins maîtres de stage partout –, de ma proposition pour qu'un pharmacien d'officine puisse être pharmacien référent en Ehpad et de mon amendement relatif aux lits de pédopsychiatrie dans tous les départements, dont le manque représente une difficulté majeure pour les centres départementaux de l'enfance, qui se retrouvent à gérer des situations extrêmement difficiles, avec des enfants présentant des troubles du comportement.

Enfin, le retour à l'âge de départ à la retraite à 64 ans va permettre une évolution vers l'équilibre de la branche vieillesse dans les années 2032.

Comme le Sénat l'avait proposé, il est important d'adapter ce texte avec les partenaires sociaux pour tenir compte des carrières longues, de la pénibilité, de la maternité et de la revalorisation des petites pensions. Il faut aussi agir contre la fraude.

En conclusion, la sécurité sociale représente la colonne vertébrale de notre République et ce PLFSS propose des avancées indéniables, parmi lesquelles le rééquilibrage du budget par une meilleure maîtrise des dépenses et l'augmentation du nombre d'emplois cotisants grâce à la compétitivité des entreprises.

Comme vous l'avez indiqué, monsieur le ministre, si le taux de chômage était de 5 %, comme en Allemagne, il n'y aurait plus de déficit. Cela doit rester un objectif afin de ne pas mettre en péril notre système de protection sociale. §

Debut de section - PermalienPhoto de Anne SOUYRIS

Mme Anne Souyris. Enfin, j’invite solennellement le Gouvernement à examiner les mesures que nous défendons en faveur des plus précaires. Je pense en particulier aux bénéficiaires de l’aide médicale de l’État (AME),

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, je citerai deux chiffres en exergue de mon propos : 509 milliards d'euros et 647 milliards d'euros. Ils correspondent respectivement aux dépenses réalisées en 2019 et à celles qui sont prévues en 2024 pour les régimes obligatoires de sécurité sociale, soit plus de 130 milliards d'euros de dépenses supplémentaires en cinq ans !

Durant ces années de crise sanitaire, nous avons déployé des moyens inédits pour protéger les Français, qu'il s'agisse de leur pouvoir d'achat ou de leur santé, « quoiqu'il en coûte ». Mais cette politique a bel et bien un coût, que je viens de rappeler brutalement.

Or « notre responsabilité est d'assurer la pérennité de notre modèle social », avez-vous indiqué, monsieur le ministre – vous avez raison. L'examen de ce PLFSS me laisse néanmoins perplexe.

Certes, ce texte traduit un effort d'amélioration des rémunérations des personnels de santé en établissement ou en ville et renforce les effectifs des Ehpad comme de l'aide à domicile. Nous saluons ces avancées, ainsi que votre volonté de mettre fin au tout T2A à l'hôpital et de lutter contre les pénuries de médicaments.

Le texte amorce également un virage encore un peu timide en faveur de la prévention. Ma collègue Jocelyne Guidez commentera plus précisément l'ensemble de ces mesures, qui sont nécessaires, mais qui n'effacent pas nos doutes quant à la soutenabilité à long terme du système.

Je m'attacherai, quant à moi, à vous proposer des solutions à la hauteur des déficits récurrents des branches maladie et vieillesse, plus ambitieuses, donc, que celles qui figurent dans ce projet de loi.

Concernant l'assurance maladie, vous comptez économiser 3, 5 milliards d'euros, notamment sur les médicaments et les produits de santé, les soins dentaires, la biologie et même les indemnités journalières, qui ont beaucoup progressé. Nous y sommes favorables, comme nous soutenons le principe de revenir sur certaines exonérations de cotisation pour les salaires compris entre 2, 5 et 3, 5 Smic.

Pour autant, le pilotage des comptes sociaux ne saurait se limiter à augmenter ou à réduire les dépenses.

Vous faites de la lutte contre la fraude sociale un chantier prioritaire – je m'en réjouis. Nous vous approuvons sur ce point, mais les objectifs que vous fixez me paraissent insuffisants.

Ainsi, pour l'assurance maladie, la fraude se situe entre 5 et 10 milliards d'euros, selon les estimations, d'ailleurs toujours incomplètes, de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) – nous attendons impatiemment leur mise à jour. Avec 500 millions d'euros détectés, nous sommes très loin du compte.

En matière de cotisations et de contributions, la Cour des comptes estime le montant de la fraude entre 6 et 8 milliards d'euros ; votre objectif est d'atteindre 5 milliards d'euros d'ici à 2027.

Quant aux fraudes aux prestations familiales et vieillesse, les clichés ont la vie dure, mais elles sont les mieux connues et les mieux combattues.

Pour autant, la vigilance reste de mise, car les fraudeurs, aux méthodes de plus en plus sophistiquées, profitent souvent de nos outils lacunaires, ainsi que Nathalie Goulet l'a souvent démontré. N'oublions pas que la lutte contre la fraude sociale est un puissant levier de réduction des déficits.

Sur le même thème, il m'est difficile de ne pas évoquer l'indispensable travail à poursuivre sur la pertinence des soins. Il ne s'agit pas de nous lancer dans une chasse aux sorcières, mais l'OCDE évalue à 20 % – soit 50 milliards d'euros ! – le montant des dépenses d'assurance maladie concernant des actes inutiles ou redondants.

Nous bénéficions de ces actes en tant que patients, souvent en radiologie ou en biologie, mais ils n'en constituent pas moins des pratiques abusives et surtout délétères pour les comptes sociaux.

La contrainte et la fermeté ne semblent pas caractériser la démarche de votre gouvernement sur ce point : les guides de bonne pratique ne suffiront pas, sauf à s'appuyer réellement sur le dossier médical partagé (DMP), qu'il faut généraliser sans tarder.

Un mot également sur la trésorerie de l'Acoss – l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, devenue Urssaf Caisse nationale – laquelle, sans transfert vers la Cades de ses déficits cumulés, se trouverait en tension extrême. Or la Cades ne pouvant recevoir que 8, 8 milliards d'euros de dette supplémentaire, il convient de réviser son plafond, ainsi que le calendrier de remboursement.

Abordons la branche vieillesse. Vous avez tenté de récupérer 1 milliard d'euros à l'Agirc-Arrco au titre de la réforme ; à mon sens, votre méthode n'était pas la bonne.

Je vous suggère plutôt de négocier avec les partenaires sociaux un swap, d'un montant à déterminer, entre les cotisations des employeurs à la retraite complémentaire et leurs cotisations à la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav).

En outre, pourquoi ne pas confier aux partenaires sociaux, excellents gestionnaires d'une Agirc-Arrco aux 68 milliards d'euros de réserve, la gouvernance et la gestion de la Cnav ? Il s'agirait en quelque sorte d'un retour aux sources.

Avant de conclure, je souhaite vous alerter sur la cinquième branche. La trajectoire financière est bonne : nous sommes à mi-chemin, avec le transfert de 0, 15 point de CSG depuis la Cades, mais la quasi-totalité des Ehpad et tous les services autonomie à domicile (SAD) et Ssiad sont – vous le savez – au bord du gouffre.

À ce titre, le fonds de 100 millions d'euros est insuffisant, il en faut au moins cinq à dix fois plus, et immédiatement, madame la ministre.

Pour conclure, à l'instar du professeur Bizard et de quelques-uns de mes collègues, dont Alain Milon, je vous propose de mettre fin au double étage assurantiel. En passant à un assureur unique par prestation de santé ou pour l'ensemble des prestations, nous basculerions dans un modèle vertueux de maîtrise des dépenses de santé, nous permettant de réinjecter plusieurs milliards d'euros dans les caisses et d'améliorer ainsi la santé des Français. Cela reviendrait, au fond, à assurer la mission essentielle de la sécurité sociale !

Mme Catherine Conconne acquiesce.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir respecter le temps de parole qui vous est imparti.

La parole est à Mme Céline Brulin.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Iacovelli

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce PLFSS est un texte de responsabilité, si l'on considère les engagements pris en matière de prévention en santé et d'accès aux soins, comme l'a rappelé ma collègue Solanges Nadille.

En effet, pour 2024, le choix de l'efficience a été fait et ce budget apporte des réponses concrètes pour consolider notre système de santé, tout en assurant un équilibre financier pérenne.

Comme les précédents, ce budget 2024 prévoit également des moyens importants en matière de solidarité, notamment en soutien à notre politique familiale. L'objectif de dépenses de la branche famille est ainsi fixé à 58 milliards d'euros, en hausse de 2, 7 milliards par rapport à 2023.

Ces moyens significatifs doivent nous permettre de financer les mesures et les travaux engagés au cours des dernières années : le chantier des mille premiers jours de l'enfant, l'allongement du congé paternité, la réforme du complément de mode de garde, le soutien aux familles monoparentales et la revalorisation de l'allocation de soutien familial (ASF).

Ainsi, les fonds alloués à la politique familiale augmenteront en 2024, notamment pour lancer le chantier du service public de la petite enfance, auquel 6 milliards d'euros seront consacrés jusqu'en 2027, de manière à garantir à tout parent l'accès à une solution d'accueil sûre, de qualité, géographiquement proche et financièrement accessible pour son enfant, en crèche ou auprès d'une assistante maternelle.

L'objectif est donc à la fois de revaloriser les professionnels de la petite enfance et de soutenir l'investissement dans les crèches, d'assurer leur fonctionnement et d'engager la dynamique d'ouverture des 200 000 solutions d'accueil manquantes, en accueil collectif comme individuel.

Citons également la réforme du congé parental, qui nous tient particulièrement à cœur, madame la ministre.

Autant d'avancées que nous sommes fiers de soutenir, aux côtés du Gouvernement.

Nous saluons aussi la traduction dans ce PLFSS des engagements pris en matière de handicap, en particulier ceux que le Président de la République a annoncés lors de la dernière Conférence nationale du handicap, notamment le déploiement de 50 000 solutions d'accompagnement.

J'ai aussi à l'esprit les enfants en situation de handicap placés à l'aide sociale à l'enfance, auxquels nous devons garantir une prise en charge adaptée.

Les dix mille adultes qui sont actuellement maintenus dans des établissements pour enfants grâce à l'amendement Creton doivent pouvoir en sortir – il y va de leur dignité et de leur autonomie.

C'est pourquoi nous devrons trouver des solutions avec les départements afin de respecter la volonté des adultes en situation de handicap et de leurs familles et ainsi de libérer près de 15 % des places existantes dans les instituts médico-éducatifs (IME).

Enfin notre groupe portera un certain nombre d'amendements pour nos concitoyens et pour nos territoires. En particulier, nous souhaitons soutenir nos compatriotes ultramarins par une véritable politique de la famille et de soutien à la parentalité. La forte prévalence outre-mer de familles monoparentales et en situation de précarité doit nous interpeller collectivement.

Pour ce qui concerne les pensions de réversion, nous porterons l'extension de leur bénéfice aux couples pacsés ; plus largement, nous entendons lancer une réflexion afin de prendre en compte la diversité des unions dans notre pays.

La question de la réversion des pensions pour les adultes orphelins et handicapés est tout aussi importante pour leur autonomie une fois leurs parents disparus. Nous défendrons des amendements en ce sens.

Enfin, pour lutter contre le surpoids, l'obésité et les maladies associées, notamment chez les enfants, nous porterons un certain nombre d'amendements contre les produits transformés issus de l'industrie agroalimentaire, mais aussi visant à limiter le taux de sucre, qui empoissonne nos enfants et suscite des dépenses supplémentaires pour l'assurance maladie.

Le groupe RDPI soutiendra pleinement les mesures et l'orientation de ce budget, auquel le débat parlementaire apportera son lot d'avancées positives pour nos compatriotes.

Il s'agit d'un budget sérieux, qui répond au double objectif de réduction du déficit et de protection des Français ; d'un budget ambitieux, qui apporte des réponses concrètes aux familles et aux personnes en situation de handicap ; d'un budget, enfin, de justice sociale, qui finance des progrès nouveaux et fait le choix de renforcer le volet prévention de notre système de santé. §

Debut de section - PermalienPhoto de Céline Brulin

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, notre hôpital est en situation d’urgence absolue et la moitié de nos Ehpad publics est en déficit. La médecine de ville continue de reculer dans nos territoires et les indicateurs de santé de la France se dégradent.

Cette situation devrait appeler une stratégie nationale de santé, une loi de programmation, un grand effort de formation et de revalorisation en faveur des métiers de l’accompagnement et de la santé. Il s’agit là d’une priorité de nos concitoyens.

Loin de cela, le PLFSS pour 2024 s’inscrit dans la droite ligne des précédents budgets de la sécurité sociale, avec la réduction des dépenses pour seul cap – comme si ce qui n’a pas fonctionné hier devait miraculeusement résoudre les problèmes demain.

Quand la commission des comptes de la sécurité sociale estime à 4 % la progression des dépenses de santé, ce PLFSS ne prévoit que 3, 2 % de hausse. Quand, pour répondre aux besoins constatés, sans rattrapage du retard accumulé, l’Ondam devrait augmenter de 9, 5 milliards d’euros, il évolue de 8 milliards. Avec une inflation estimée par la Banque de France à 2, 6 %, la progression réelle des dépenses de santé risque donc d’être quasi nulle.

Selon la Fédération hospitalière de France (FHF), il manque 2 milliards d’euros en 2023 et 2 milliards d’euros de nouveau en 2024 pour que les hôpitaux puissent faire face à l’inflation et à l’augmentation des coûts de l’énergie ; en guise de quoi le Gouvernement leur inflige 500 millions d’euros d’économies.

« Nous allons vers la mort lente du service public de santé », déclare le président de la FHF en lançant l’alerte : le Ségur de la santé, la hausse du point d’indice des fonctionnaires et les mesures d’attractivité relatives au travail de nuit ne sont pas entièrement compensés. Dès lors, les hôpitaux sont contraints de financer ces décisions avec de l’argent qu’ils n’ont pas. Or, selon une étude récente, 50 % des soignants ne recommanderaient pas leur métier : les efforts en faveur de l’attractivité de ces professions ne sont clairement pas derrière nous.

Les jeunes sont attirés par les études de santé, mais Parcoursup brise maintes volontés et masque un certain nombre de réalités. Au total, 30 % des étudiants infirmiers abandonnent leur projet professionnel au cours de leur formation – ce chiffre doit nous amener à nous interroger.

Une autre étude, menée par des équipes de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) et de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), avance qu’une nuit passée sur un brancard augmente de 40 % le risque de mortalité des patients âgés.

Oui, l’hôpital va mal ; et, pour obtenir un rendez-vous chez un généraliste, il faut désormais accomplir un véritable parcours du combattant.

Depuis la suppression du numerus clausus, nous formerions 15 % de médecins supplémentaires, mais, pour faire face à nos besoins, il faudrait en former 30 % de plus ! Il faut des moyens en conséquence, notamment pour nos universités.

Le développement des centres de santé est une arme pour lutter contre les déserts médicaux. Il devrait dès lors être favorisé. Les collectivités territoriales qui, de plus en plus nombreuses, s’orientent dans cette voie devraient quant à elles être mieux soutenues.

En outre, monsieur le ministre, pourquoi refuser de rétablir l’obligation de garde pour les médecins libéraux ? Pourquoi refuser de contraindre les médecins en secteur 2 et les établissements privés à participer davantage à la permanence des soins ?

Un bon tiers des Français sont confrontés à des pénuries de médicaments. Les préconisations formulées par la commission d’enquête menée par notre ancienne collègue Laurence Cohen et par notre collègue Sonia de La Provôté mériteraient d’être prises en compte ; mais vous préférez réduire la contribution de l’industrie pharmaceutique à l’assurance maladie, y compris pour les industriels qui délocalisent leurs productions.

J’y insiste, il est urgent de retrouver des capacités publiques de production de médicaments essentiels aujourd’hui en rupture de stock.

Vous stigmatisez les malades : vous autorisez des médecins payés par les employeurs à les contrôler et à les sanctionner, en refusant d’analyser avec discernement les raisons de l’augmentation des indemnités journalières. Si le Gouvernement avait véritablement pour but de lutter contre la fraude, il s’attaquerait aux 8 milliards d’euros de fraude patronale.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Feret

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, je souhaite me faire le porte-voix des élus, des maires en premier chef, qui, partout, et pas seulement dans mon département du Calvados, tirent la sonnette d'alarme et exhortent le Gouvernement à agir pour sauver leurs Ehpad.

Ils demandent, comme nous, en vain, PLFSS après PLFSS, des financements pérennes à la hauteur des besoins, alors que le vote d'une loi grand âge, annoncé depuis 2018, est sans cesse repoussé.

Ce n'est certainement pas la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France qui permettra de faire face à l'ensemble des conséquences du vieillissement de nos concitoyens, aux questions liées à la perte d'autonomie, à la dépendance, mais aussi au manque d'attractivité des métiers du secteur social et médico-social.

Il s'agit pourtant d'un véritable enjeu de société, d'un défi que nous devons relever dès aujourd'hui et non demain. Quand allez-vous prendre la mesure du constat d'urgence que dressent les responsables des Ehpad et des services d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad) partout en France ? Comprenez-vous que l'annonce, cet été, d'un soutien de 100 millions d'euros pour soulager les structures est en totale déconnexion avec la réalité des besoins ?

Les Français aspirent légitimement à bien vieillir chez eux. Pour ce faire, le Gouvernement affirme déployer un « virage domiciliaire ». Pourtant, nous connaissons tous ici la réalité en la matière : les associations d'aide à domicile sont en souffrance, contraintes de refuser des prises en charge par manque de personnel.

Durant sa dernière campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait fait la promesse de créer 50 000 postes supplémentaires en Ehpad en cinq ans, alors que la FHF estimait les besoins à au moins 100 000.

Le PLFSS de l'an dernier, au lieu de créer 10 000 postes, comme on pouvait légitimement s'y attendre, n'en avait budgété que 3 000 ; cette année, vous n'en prévoyez que 6 000, ce qui n'est certainement pas de nature à améliorer les conditions d'accompagnement de nos aînés.

Nouveau rebondissement : la Première ministre ne parle plus de l'échéance de 2027, mais évoque 50 000 postes en 2030. Il n'est pas sérieux de repousser la réalisation de cette promesse présidentielle, au risque d'apporter une énième preuve de l'engagement insuffisant de ce gouvernement sur le grand âge.

Que de temps perdu depuis 2020 et la création officielle de la cinquième branche de la sécurité sociale, relative à l'autonomie ! Vous aurez beau faire valoir que celle-ci est excédentaire, personne n'est dupe de la réalité de la situation et de l'urgence qu'il y a à agir.

Déjà, en 2019, année de remise du rapport Libault, il était préconisé d'augmenter l'effort en faveur du grand âge de 9 milliards d'euros par an. Nous en sommes loin !

Pour ce qui concerne la branche accidents du travail et maladies professionnelles, les choses ne peuvent pas bien se passer : vous encouragez l'ubérisation du travail, la sous-protection sociale et les sous-revenus associés ; vous repoussez à 64 ans l'âge de départ à la retraite de travailleurs usés, qui aspirent légitimement au repos ; et vous refusez de réintégrer les quatre critères de pénibilité que vous avez supprimés.

Les seules mesures que prévoit votre budget visent à traquer les arrêts maladie, à traiter les malades comme des fraudeurs et les médecins comme des complices. C'est dire !

Je conclurai en évoquant la branche famille, pour rappeler que les chiffres de la natalité publiés par l'Insee en septembre dernier sont alarmants. Seul un renforcement significatif des moyens alloués à la politique familiale permettra d'inverser la dynamique déclinante de la démocratie française.

L'ouverture d'au moins 200 000 places en crèche est toujours nécessaire, alors que des milliers de foyers voient leur désir de parentalité menacé par le manque de solutions de garde.

En somme, ce budget de la sécurité sociale n'est pas à la hauteur des enjeux et des décisions que nous devrions prendre sans attendre davantage. Répondre aux besoins des assurés sociaux, des patients et des ayants droit, voilà ce qui manque cruellement dans ce PLFSS ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Florence Lassarade

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, adopté grâce à l'article 49.3 à l'Assemblée nationale, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 prévoit plus de 640 milliards d'euros de dépenses, soit une hausse de 30 milliards d'euros par rapport à 2023. Cela donne le vertige !

Il fixe un Ondam à 254, 9 milliards d'euros, soit une hausse de 3, 2 % par rapport à 2023, alors que l'inflation sera à près de 5 %. Cette trajectoire peu crédible ainsi qu'une couverture lacunaire du contexte inflationniste ont conduit la commission des affaires sociales à rejeter l'Ondam pour 2024.

Il est regrettable de constater que ce texte abandonne tout objectif de retour à l'équilibre des régimes obligatoires de base.

Avec un Ondam à plus de 250 milliards d'euros, les Français sont en droit d'attendre un système de santé plus performant. La hausse des dépenses en 2024 concernera essentiellement le secteur hospitalier. Pourtant, l'Ondam ne permettra pas de répondre à la crise de l'hôpital public ni à celle des Ehpad.

Autre constat : un Ondam de plus de 250 milliards d'euros ne suffit pas à enrayer la dégradation de certains indicateurs de santé.

Ainsi, la mortalité infantile progresse en France depuis une dizaine d'années, alors qu'elle continue de diminuer en Europe. Ce taux devrait être une priorité du Gouvernement. Un certain nombre de solutions ont été mises en place dans les pays d'Europe du Nord, notamment une augmentation des effectifs dans les maternités.

Lors de votre audition par la commission des affaires sociales, vous avez parlé, monsieur le ministre, d'un « virage structurel de la prévention ». Pour autant on ne distingue pas un tel mouvement dans ce texte. Je salue néanmoins quelques mesures : lancement d'une campagne de vaccination contre le papillomavirus ou gratuité des préservatifs pour les assurés de moins de 26 ans. Cependant, rien de tout cela n'est « structurel », pour reprendre votre terme.

Monsieur le ministre, le compte n'y est pas ; ce PLFSS est très insuffisant, il manque d'une véritable ambition.

Ensuite, je suis réservée quant à l'intégration de certains dispositifs de contrôle, qui pourraient s'avérer pénalisants pour les malades du cancer. Pour lutter contre la fraude, par exemple, l'article 27 entend réguler les dépenses en matière d'indemnités journalières pour maladie. Je souhaite attirer votre attention sur deux difficultés quant à l'application de cette mesure.

Tout d'abord, les médecins libéraux considèrent que la suspension automatique des indemnités journalières après contre-visite médicale des médecins contrôleurs est une remise en cause de leur compétence de prescription ; ensuite, avec le dispositif que vous proposez, comment pourra-t-on préserver les personnes atteintes de cancer d'une potentielle instrumentalisation de cette procédure par leur employeur ?

De même, l'article 28 vise à limiter à trois jours la durée des arrêts de travail prescrits en téléconsultation. C'est une mesure bienvenue, compte tenu des abus avérés. Toutefois, cela risque de creuser les inégalités pour les personnes atteintes de cancer dans les zones sous-dotées en médecins généralistes. Comment imposer un déplacement à une personne en plein traitement dont les effets secondaires peuvent être sévères ? Nous proposerons des amendements pour corriger ces injustices.

Enfin, les médecins libéraux ne se retrouvent pas dans ce PLFSS. Sans eux, pourtant, comment envisager le virage ambulatoire et le virage domiciliaire ?

Last but not least, les économies prévues permettront-elles enfin d'envisager une hausse du prix de la consultation ?

Le vieillissement de la population, la prise en charge des maladies chroniques, les progrès de la médecine et la mise en place du « virage structurel de la prévention », que vous appelez de vos vœux, nécessitent des réformes ambitieuses et une plus grande rigueur.

Ce PLFSS se fonde sur des prévisions économiques particulièrement optimistes et la commission des affaires sociales du Sénat propose de le revoir largement. Nous allons en débattre et l'améliorer, mais dans le cadre de nos prérogatives, qui restent limitées.

Debut de section - PermalienPhoto de Céline Brulin

Avec l’amendement de notre collègue député Marc Ferracci, retenu par le Gouvernement après utilisation du 49.3, vous entendez revenir sur les exonérations de cotisations sur les salaires supérieurs à 2, 5 Smic.

Démonstration est faite que ces exonérations ne sont plus tenables, ni économiquement ni socialement. Mais, en les concentrant sur les plus bas salaires, vous aggraverez encore le tassement des rémunérations, à l’heure où une part croissante de nos concitoyens ne parvient plus à joindre les deux bouts.

Aussi, nous proposons d’assortir ces exonérations de contreparties en matière salariale, environnementale ou d’égalité professionnelle. C’est d’ailleurs le souhait émis par les organisations syndicales lors de la récente conférence sociale.

Alors qu’elles n’ont aucun résultat positif sur l’emploi et les salaires, ces exonérations grèvent les dépenses publiques de près de 90 milliards d’euros. Je sais que ce chiffre vous fait sourciller, mais il figure à l’annexe 4 de votre texte.

C’est d’ailleurs incroyable de voir avec quelle énergie certains ici veulent conditionner, par exemple, le revenu de solidarité active (RSA) à l’accomplissement d’heures d’activités, tout en refusant de solliciter la moindre contrepartie des entreprises.

À défaut d’un projet de loi relatif au grand âge, ce PLFSS devrait aussi être l’occasion de lancer les recrutements massifs dont ont besoin les Ehpad pour atteindre l’objectif d’un professionnel pour un résident. On en est loin ! On est même loin des annonces présidentielles de 50 000 recrutements d’ici à la fin du quinquennat. Les embauches se sont limitées à 3 000 cette année et ne sont prévues qu’à hauteur de 6 000 l’an prochain : à un tel rythme, nous ne sommes même pas sûrs d’atteindre 50 000 recrutements en 2030…

Au titre de la branche famille, le Gouvernement prévoit d’utiliser les excédents dégagés grâce aux différentes réductions des prestations familiales pour financer la création du service public de la petite enfance.

À nos yeux, les entreprises doivent contribuer au financement d’un tel service ; l’État ne doit pas, une nouvelle fois, faire peser l’effort sur les seules collectivités territoriales.

Nous aurons l’occasion de revenir sur la branche AT-MP et sur le coup de Jarnac infligé aux victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles.

Enfin, j’évoquerai la branche vieillesse.

La réforme des retraites était censée « garantir l’équilibre du système ». Les résultats financiers pour 2024 traduisent en réalité une aggravation du déficit de l’ordre de 4 milliards d’euros. Cette réforme est donc inefficace – je crois me souvenir que nous l’avions dit ! – et les prétendues mesures d’accompagnement, comme la pension à 1 200 euros minimum, se sont volatilisées, laissant place à une revalorisation moyenne de 30 euros mensuels pour les plus faibles retraites…

En définitive, le PLFSS pour 2024 est à l’image de cette réforme des retraites : on demande encore et toujours des efforts à nos concitoyens, en formulant la vaine promesse d’améliorer les comptes publics, pour constater qu’il n’en est rien et demander de nouveaux sacrifices. Faut-il vraiment s’entêter dans cette voie, qui ressemble de plus en plus à une impasse ?

Souhaitons que le débat qui s’ouvre aujourd’hui permette de montrer que d’autres logiques peuvent être développées pour assurer la protection sociale du XXIe siècle, que nos concitoyens sont en droit d’attendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jocelyne Guidez

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 qui nous est soumis repose sur des prévisions qui manquent cruellement d'ambition en matière de stabilisation du déficit.

Après l'amélioration résultant de la fin de la crise sanitaire, la forte inflation de 2023 suscite une forte revalorisation des dépenses. Nous ne sommes qu'au début d'une période d'aggravation du déficit.

Cette trajectoire financière inquiétante reste un sujet préoccupant pour l'avenir et les futures générations. Comme vous le savez, mes chers collègues, un hypothétique redressement de cette situation n'est pas concevable sans des choix difficiles en matière de recettes comme de dépenses.

Prendre des décisions importantes fait peur. Cependant, on pourrait regretter de ne pas les avoir prises. Paulo Coelho écrit ainsi : « Attendre fait mal. Oublier fait mal. Mais ne pas savoir quelle décision prendre est la pire des souffrances. »

Nous tenons à saluer le choix des mesures d'économie budgétaire et de régulation des dépenses, enrichies sensiblement par la commission, telles que l'incitation au transport sanitaire partagé, si l'état de santé des patients le permet, ou encore le contrôle des prestations d'arrêts de travail.

Ainsi, la durée d'un arrêt de travail prescrit ou renouvelé par téléconsultation sera limitée à trois jours – une mesure bienvenue, compte tenu des abus avérés. Le groupe Union Centriste vous proposera également un amendement visant à mieux encadrer les plateformes de téléconsultation.

Cette année encore, le PLFSS n'apporte pas de réponse appropriée aux défis posés à notre système de santé. Les mesures relatives à la politique de santé nous semblent être d'une portée très limitée.

Ainsi, au-delà de quelques dispositions concernant le médicament ou la prévention, le texte prétend porter une réforme du financement de l'hôpital qui n'est finalement qu'un trompe-l'œil et qui ne retouche qu'à la marge l'organisation des soins.

Il est pourtant indispensable que les hôpitaux s'engagent sereinement dans une réforme structurelle, selon une ligne claire et avec des ressources sécurisées afin de rééquilibrer les modes de financement.

C'est pourquoi la commission a prévu un report de cette réforme au 1er janvier 2028, au terme d'une expérimentation préalable permettant d'affiner le modèle cible et ainsi améliorer effectivement l'offre de soins.

Nous sommes favorables à la délivrance gratuite en pharmacie de préservatifs pour les moins de 26 ans sans prescription médicale ; il s'agit d'une avancée certaine en matière de prévention des infections sexuellement transmissibles et de grossesses non désirées.

Cependant, on peut regretter que, du fait de l'article 40 de la Constitution, l'amendement du groupe Union Centriste visant à élargir ce dispositif aux personnes handicapées ait été considéré comme irrecevable. La sexualité fait partie intégrante d'un projet de vie et constitue un droit fondamental de la personne en situation de handicap, qui lui permet de nouer des liens sociaux et affectifs et de cultiver l'estime de soi.

En outre, le remboursement intégral des fauteuils roulants dès 2024 est d'une portée incertaine, puisque les conditions d'application de cette mesure sont suspendues aux négociations à venir. J'ai été interpellée par les associations à ce sujet.

Le texte comprend aussi une disposition visant à lutter contre le harcèlement scolaire. Les professionnels de santé des établissements scolaires sont ainsi désormais autorisés à orienter des élèves vers les psychologues du dispositif #MonSoutienPsy.

Concernant la branche vieillesse, la réforme des retraites a permis de réduire d'un tiers son déficit à l'horizon de 2027 ; cependant, elle ne suffit pas à en redresser la trajectoire financière. On estime que la dégradation sera rapide à compter de 2024, avec un déficit prévisionnel de l'ordre de 11 milliards d'euros en 2027. Une telle situation nécessiterait des efforts supplémentaires difficilement acceptables par les Français.

Face à cette réalité indéniable, nous saluons des mesures de bon sens visant à assurer la justice et l'équité du système de retraite. Ainsi, le contrôle biométrique de l'existence des retraités résidant à l'étranger deviendrait obligatoire à compter de 2027, une décision nécessaire pour lutter contre la fraude aux pensions de retraite à l'étranger.

En l'absence d'une politique familiale forte et ambitieuse, nous regrettons vivement que le solde excédentaire de cette branche soit consommé sans que les réformes indispensables soient mises en œuvre. Le contexte de chute inquiétante de la natalité rend nécessaire une prise de conscience collective.

S'agissant de la branche autonomie, ce PLFSS semble marquer un tournant en matière de financement des Ehpad, en amorçant la fusion des sections « soins » et « dépendances ». Ce régime pérenne, qui donne naissance à la nouvelle section « soins et entretiens de l'autonomie », serait toutefois optionnel pour les départements, ce qui pourrait aggraver les disparités territoriales.

Par conséquent, nous soutenons une proposition de la commission consistant à transformer le régime adapté de financement en une expérimentation d'une durée de trois ans, à laquelle pourraient participer dix départements.

Il nous semble aussi nécessaire de clarifier les relations financières entre la CNSA et les départements afin d'en améliorer la lisibilité et la transparence.

Force est de constater que les moyens ne sont pas au rendez-vous pour le virage domiciliaire et que la situation financière des Ehpad reste alarmante. Les raisons en sont multiples : problèmes structurels de gouvernance et de recrutement, hausse des prix et des rémunérations... S'il est bienvenu, le fonds d'urgence de 100 millions d'euros prévu par l'article 3 n'est malheureusement pas à la hauteur des besoins dans le contexte de vieillissement de la population.

Enfin, nous sommes heureux de la création d'un service de repérage, de diagnostic et d'intervention précoce. Il s'agit d'une avancée majeure pour les enfants de moins de six ans présentant un handicap, en particulier un trouble du neuro-développement.

Si nous saluons cette mesure de prévention, nous nous interrogeons sur l'articulation de ce service avec les outils déjà déployés, à savoir les plateformes de coordination et d'orientation (PCO) ou le forfait d'intervention précoce.

À ce jour, nous n'avons d'ailleurs pas obtenu de réponse à nos interrogations sur la situation préoccupante des adultes. La moindre des choses serait d'inscrire dans la loi la limite d'âge de 12 ans.

Nous apprécions aussi le renouvellement de la durée des droits à l'allocation journalière du proche aidant dans la limite d'un an pour des cas de figure précis, et nous proposons un amendement visant à pérenniser des mesures en faveur du répit des aidants.

Le groupe Union Centriste soutiendra ce texte, à condition qu'il soit amélioré par un certain nombre d'amendements.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Guylène PANTEL

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, au nom du groupe du RDSE, je tiens tout d’abord à remercier M. le président de la commission, ainsi que Mmes et MM. les rapporteurs. Ils nous ont permis d’entamer ces débats dans la clarté ; or la tâche n’était pas simple.

Avant tout, il me paraît primordial de rappeler le contexte politique et social dans lequel nous étudions le présent texte. En effet, le PLFSS pour 2024 doit être appréhendé à l’aune de crises importantes, qui se cumulent.

Cette année encore, je crains que ce texte ne soit véritablement examiné et débattu que par le Sénat. Une telle situation démontre une fois de plus tout l’intérêt du travail de la Haute Assemblée, quand certains persistent à remettre en cause le bicamérisme.

Par ailleurs, de vives tensions perdurent au cœur même de notre système de santé et de protection sociale.

Les professionnels des hôpitaux publics déplorent encore bon nombre de situations critiques ; en résultent des fermetures de services, qui ont un impact négatif indéniable sur les usagers.

Du côté de la médecine libérale, le mécontentement est également palpable. Il est notamment alimenté par les négociations tarifaires avec l’assurance maladie.

À la fin du mois de septembre dernier, les discussions du Gouvernement avec les partenaires sociaux au sujet des 68 milliards d’euros de réserve de la retraite complémentaire Agirc-Arrco n’ont pas été de nature à rassurer les syndicats et le patronat, qui gèrent ce régime paritairement. L’apaisement devait pourtant être de rigueur, après un début d’année particulièrement agité autour de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 portant réforme des retraites.

Parallèlement, les difficultés de recrutement et de fidélisation du personnel des établissements sociaux et médico-sociaux entament la motivation des équipes, qu’elles soient chargées de tâches d’exécution ou de direction. À ce sujet, les iniquités de traitement, notamment salariales, entre les corps de métier du public et du privé sont souvent dénoncées.

Entre autres éléments de contexte, j’évoquerai enfin les diverses enquêtes journalistiques dédiées aux dérives de la financiarisation d’un certain nombre de services essentiels, allant de la petite enfance au grand âge. En somme, nous serions face à un système lucratif fondé sur le profit, sacrifiant souvent la qualité de l’accompagnement de nos enfants et de nos aînés.

Ainsi, les défis pour 2024 ne manquent pas ; nous devons nous doter d’un budget de la sécurité sociale à la hauteur de la situation sans pour autant aggraver le déficit, indicateur fondamental de la soutenabilité du système.

Or – nos différents rapporteurs l’ont rappelé à juste titre –, si l’on en croit les prévisions, les déficits des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) devraient repartir à la hausse, passant de 8, 8 milliards d’euros en 2023 à 11, 2 milliards d’euros en 2024.

Les élus du RDSE sont profondément attachés à la pensée ayant inspiré la création du système de sécurité sociale en France, sur le modèle bismarckien, en 1945. Ils s’associent, partant, aux inquiétudes de leurs collègues quant à la trajectoire financière des régimes.

Dans cet esprit, nous regrettons le manque de réflexions relatives à une réforme structurelle de la sécurité sociale, de même que la faiblesse des pistes visant à stabiliser les recettes.

En revanche, au-delà de l’équilibre financier de la sécurité sociale, sur lequel beaucoup d’éléments pertinents ont été abordés en commission, notre groupe salue, sur le fond, quelques grandes avancées pour la qualité de vie des Français.

Nous sommes notamment très satisfaits du volet relatif à la prévention, qui érige des politiques publiques permettant de maintenir nos concitoyens en bonne santé, en leur donnant les moyens de s’informer et de suivre leur santé, de même que des outils visant à améliorer leur hygiène de vie.

Nous pensons à la gratuité des préservatifs pour les moins de 26 ans – population touchée par les infections sexuellement transmissibles et les grossesses non désirées –, ainsi qu’à l’article 19, qui acte la prise en charge des protections réutilisables pour les femmes de moins de 26 ans et les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire (C2S).

Le lancement de la campagne nationale de vaccination contre les papillomavirus humains (HPV) dès la classe de cinquième est également une bonne mesure. Dans le monde, un tiers des jeunes hommes de plus de 15 ans est porteur d’un papillomavirus et environ 20 % sont atteints d’un type de HPV susceptible d’engendrer un cancer. Il y a donc urgence à agir, raison pour laquelle l’article 17 est naturellement le bienvenu.

En outre, nous saluons le premier pas vers la réforme de la tarification à l’activité (T2A) des hôpitaux, pour ce qui concerne les activités de médecine, de chirurgie et d’obstétrique. Il était temps, car nous percevions depuis trop longtemps déjà les limites de ce mode de financement. L’hôpital a plus que jamais besoin d’un filet de sécurité budgétaire diversifié. Pour ce faire, nous devons absolument plafonner la part de la T2A.

Le temps étant compté, je ne m’éterniserai pas davantage, bien qu’il y ait beaucoup à dire sur des sujets sous-explorés, tels que le grand âge, avec une trajectoire démographique de la France qui soulève de nombreuses questions.

Nous aurons l’occasion, mes collègues du groupe du RDSE et moi-même, de défendre nos amendements et de nous prononcer sur les propositions de nos collègues au cours des prochains jours, qui s’annoncent riches en débats.

Debut de section - PermalienPhoto de Guylène PANTEL

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, au nom du groupe du RDSE, je tiens tout d’abord à remercier M. le président de la commission, ainsi que Mmes et MM. les rapporteurs. Ils nous ont permis d’entamer ces débats dans la clarté ; or la tâche n’était pas simple.

Avant tout, il me paraît primordial de rappeler le contexte politique et social dans lequel nous étudions le présent texte. En effet, le PLFSS pour 2024 doit être appréhendé à l’aune de crises importantes, qui se cumulent.

Cette année encore, je crains que ce texte ne soit véritablement examiné et débattu que par le Sénat. Une telle situation démontre une fois de plus tout l’intérêt du travail de la Haute Assemblée, quand certains persistent à remettre en cause le bicamérisme.

Par ailleurs, de vives tensions perdurent au cœur même de notre système de santé et de protection sociale.

Les professionnels des hôpitaux publics déplorent encore bon nombre de situations critiques ; en résultent des fermetures de services, qui ont un impact négatif indéniable sur les usagers.

Du côté de la médecine libérale, le mécontentement est également palpable. Il est notamment alimenté par les négociations tarifaires avec l’assurance maladie.

À la fin du mois de septembre dernier, les discussions du Gouvernement avec les partenaires sociaux au sujet des 68 milliards d’euros de réserve de la retraite complémentaire Agirc-Arrco n’ont pas été de nature à rassurer les syndicats et le patronat, qui gèrent ce régime paritairement. L’apaisement devait pourtant être de rigueur, après un début d’année particulièrement agité autour de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 portant réforme des retraites.

Parallèlement, les difficultés de recrutement et de fidélisation du personnel des établissements sociaux et médico-sociaux entament la motivation des équipes, qu’elles soient chargées de tâches d’exécution ou de direction. À ce sujet, les iniquités de traitement, notamment salariales, entre les corps de métier du public et du privé sont souvent dénoncées.

Entre autres éléments de contexte, j’évoquerai enfin les diverses enquêtes journalistiques dédiées aux dérives de la financiarisation d’un certain nombre de services essentiels, allant de la petite enfance au grand âge. En somme, nous serions face à un système lucratif fondé sur le profit, sacrifiant souvent la qualité de l’accompagnement de nos enfants et de nos aînés.

Ainsi, les défis pour 2024 ne manquent pas ; nous devons nous doter d’un budget de la sécurité sociale à la hauteur de la situation sans pour autant aggraver le déficit, indicateur fondamental de la soutenabilité du système.

Or – nos différents rapporteurs l’ont rappelé à juste titre –, si l’on en croit les prévisions, les déficits des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et du FSV devraient repartir à la hausse, passant de 8, 8 milliards d’euros en 2023 à 11, 2 milliards d’euros en 2024.

Les élus du RDSE sont profondément attachés à la pensée ayant inspiré la création du système de sécurité sociale en France, sur le modèle bismarckien, en 1945. Ils s’associent, partant, aux inquiétudes de leurs collègues quant à la trajectoire financière des régimes.

Dans cet esprit, nous regrettons le manque de réflexions relatives à une réforme structurelle de la sécurité sociale, de même que la faiblesse des pistes visant à stabiliser les recettes.

En revanche, au-delà de l’équilibre financier de la sécurité sociale, sur lequel beaucoup d’éléments pertinents ont été abordés en commission, notre groupe salue, sur le fond, quelques grandes avancées pour la qualité de vie des Français.

Nous sommes notamment très satisfaits du volet relatif à la prévention, qui érige des politiques publiques permettant de maintenir nos concitoyens en bonne santé, en leur donnant les moyens de s’informer et de suivre leur santé, de même que des outils visant à améliorer leur hygiène de vie.

Nous pensons à la gratuité des préservatifs pour les moins de 26 ans – population touchée par les infections sexuellement transmissibles et les grossesses non désirées –, ainsi qu’à l’article 19, qui acte la prise en charge des protections réutilisables pour les femmes de moins de 26 ans et les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire (C2S).

Le lancement de la campagne nationale de vaccination contre les papillomavirus humains dès la classe de cinquième est également une bonne mesure. Dans le monde, un tiers des jeunes hommes de plus de 15 ans est porteur d’un papillomavirus et environ 20 % sont atteints d’un type de HPV susceptible d’engendrer un cancer. Il y a donc urgence à agir, raison pour laquelle l’article 17 est naturellement le bienvenu.

En outre, nous saluons le premier pas vers la réforme de la tarification à l’activité (T2A) des hôpitaux, pour ce qui concerne les activités de médecine, de chirurgie et d’obstétrique. Il était temps, car nous percevions depuis trop longtemps déjà les limites de ce mode de financement. L’hôpital a plus que jamais besoin d’un filet de sécurité budgétaire diversifié. Pour ce faire, nous devons absolument plafonner la part de la T2A.

Le temps étant compté, je ne m’éterniserai pas davantage, bien qu’il y ait beaucoup à dire sur des sujets sous-explorés, tels que le grand âge, avec une trajectoire démographique de la France qui soulève de nombreuses questions.

Nous aurons l’occasion, mes collègues du groupe du RDSE et moi-même, de défendre nos amendements et de nous prononcer sur les propositions de nos collègues au cours des prochains jours, qui s’annoncent riches en débats.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Lubin

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce que contient le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 sur la question des retraites ne laisse pas de m'interpeller. Le Gouvernement y fait la démonstration que sa politique en la matière relève d'une navigation à vue.

Nous sommes préoccupés par la volonté de l'exécutif de voir la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) devenir comptable de son propre équilibre, après avoir absorbé les déficits des régimes spéciaux.

Il semble en effet que la question de la pérennité de la prise en charge par l'État des compensations relatives aux régimes spéciaux se pose. L'article 9 du présent projet de loi prévoit de fait que le régime général se substitue à l'État pour équilibrer en dernier ressort les régimes fermés.

Une clé de TVA serait prévue afin de compenser le coût de cette prise en charge ; elle serait calculée à partir des crédits actuels de la mission « Régimes sociaux et de retraite ». Il nous semble que cela dessine un avenir particulièrement flou pour la Cnav.

Nous sommes par ailleurs totalement opposés à la volonté de l'État de puiser dans les réserves de l'Agirc-Arrco. Cette dernière a constitué ses réserves par sa bonne gestion dans le cadre d'un paritarisme rigoureux. Cela a exigé de la part de ses bénéficiaires des efforts sensibles, qui ne sauraient être sanctionnés par une ponction décidée unilatéralement par le Gouvernement.

Concernant les résultats des régimes de retraite sur lesquels j'aurai l'occasion de revenir lorsque nous étudierons l'article ad hoc, je souhaite tout d'abord faire un rappel, peut-être évident, mais néanmoins utile. Le PLFSS, par essence, n'englobe pas les retraites complémentaires ; je le précise dans le cas où certains seraient tentés de procéder à des comparaisons hasardeuses.

On continue de lancer à la figure des citoyens des milliards d'euros qui finissent par ne plus avoir beaucoup de sens, qui plus est à des échéances variables – 2027 ou 2030...

À regarder ces chiffres de près, les régimes obligatoires de base afficheraient des déficits de 14 milliards à 17 milliards d'euros en 2027 et la réforme ferait économiser 7 milliards d'euros d'ici à 2027, soit dans quatre ans. Il resterait donc encore 14 milliards d'euros de déficit, ou 17 milliards d'euros selon les prévisions, et cela sans les excédents des caisses complémentaires – je le précise de nouveau. Nous serions donc très loin des équilibres annoncés par la réforme.

Pourquoi ne pas décider, une fois pour toutes, de la part du PIB que nous consacrerions aux retraites afin de rendre le débat plus clair ? Cela nous permettrait d'assumer les excédents, ce qui est bien évidemment facile, et les déficits.

En tout état de cause, il nous revient de nous accorder sur des étalons de mesure à même de permettre aux citoyens de comprendre et de se positionner dans ce débat. Nous devons aussi trouver ensemble, avec les partenaires sociaux, les moyens de permettre à notre système de retraite de surmonter les conséquences d'une situation économique ou démographique dégradée qui pourrait se faire jour.

La protection de notre système de retraite mérite mieux que des réformes poussées par des intérêts soumis aux aléas de la politique politicienne. Si des efforts devaient être faits, ils ne doivent pas être toujours portés par les mêmes ! §

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Laurence Rossignol applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Khalifé KHALIFÉ

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, quand on est empreint d'optimisme, il est particulièrement décevant de commencer un mandat de sénateur en examinant, après la chétive proposition de loi Valletoux visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels, un PLFSS qui a depuis longtemps renoncé à sa vocation de 1996.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 est le premier texte budgétaire qu'il m'est donné d'examiner. Le professionnel de santé que je suis ne peut cacher son insatisfaction face à un texte qui ne provoque pas le déclic qui permettrait à nos professionnels de sortir du doute et à nos concitoyens du désarroi. L'exercice n'est pas facile, monsieur le ministre, je vous le concède d'emblée.

Sur l'aspect financier, comment considérer ce PFLSS comme un texte budgétaire, alors qu'il est marqué par l'absence d'une trajectoire claire et – plus inquiétant encore – par un certain flou dans sa construction, ainsi que par des incertitudes sur les prévisions pour 2027 ?

Alors que l'inflation reste forte et que son impact n'avait pas suffisamment été pris en compte l'année dernière, le projet 2024 ne couvre pas non plus l'ensemble des coûts.

Certes, la progression de l'Ondam de 3, 2 % est apparemment une bonne chose. Mais l'annonce de 3, 7 milliards d'euros d'économies, malgré les mesures prévues, laisse planer un doute sur la sincérité des comptes – j'espère me tromper, monsieur le ministre.

Malgré un énorme budget de 250 milliards d'euros consacré à la santé, pourquoi ce texte n'apporte-t-il pas de réponse aux interrogations des usagers et aux craintes des professionnels ?

Quels sont les objectifs de ce projet ? À l'image de la proposition de loi Valletoux, ce texte souffre d'un manque cruel d'ambitions structurelles et certaines des dispositions proposées manquent de pertinence. Je prendrai pour exemple l'article 24 : quel est l'intérêt de mobiliser les chirurgiens-dentistes pour assurer la régulation au centre 15 des soins dentaires, alors qu'une expertise en psychiatrie, voire en pédiatrie, serait bien plus nécessaire ?

Au-delà de l'aspect purement financier, ce texte doit tirer les leçons des constats d'hier et des vécus d'aujourd'hui, en évitant d'ajouter des couches à un millefeuille déjà bien épais.

L'absence chronique de mesures concrètes contribue largement au déficit et favorise aujourd'hui la financiarisation de la médecine, mouvement que nous déplorons tous.

Madame la ministre, messieurs les ministres, je caresse l'espoir que des amendements proposés par le Sénat puissent être adoptés, comme cela fut le cas lors de l'examen de la proposition de loi Valletoux.

En ce qui concerne l'innovation et la prospective, ce PLFSS, comme l'exige tout projet dit futuriste, consacre quelques mesures utiles, tel le recours aux expérimentations de l'article 51. Mais ces dispositions sont insuffisantes.

La prévention, malgré des propositions que nous saluons, reste le parent pauvre de la politique de santé.

Par ailleurs, quelle est la place de l'innovation dans ce texte ? Alors que le rapport commandé par Mme la Première ministre est paru au mois d'août, ce PLFSS ne semble pas en tenir clairement compte, en particulier concernant les produits innovants. Enfin, qu'en est-il de la réinternalisation de la production des produits pharmaceutiques ?

Pour conclure, il est de notre responsabilité collective – nous en prendrons notre part, monsieur le ministre – de mettre fin à cette fuite en avant. Plus que jamais, une réforme structurelle pour une maîtrise médicalisée, et non pas seulement comptable, de nos dépenses de soins est nécessaire pour redonner confiance aux usagers et aux professionnels.

Cette réforme passera par trois points : optimiser et sécuriser le parcours des patients ; évaluer les pratiques professionnelles et la pertinence des soins ; et surtout, tout faire pour assurer une diminution des surcoûts liés à la non-qualité.

Madame la ministre, messieurs les ministres, comme tout professionnel de santé en responsabilité, j'ai longtemps observé avec beaucoup d'admiration la construction des PLFSS. Je l'imaginais, malgré sa complexité, les interventions et les lobbys, comme un document rigoureux, un pilote traçant la trajectoire de notre système de santé. Force est de constater que nous sommes malheureusement loin d'une telle réalité, et ma déception est à la hauteur de mes attentes.

Permettez-moi de terminer par une note d'espoir, à la suite de vos déclarations respectives de cet après-midi. Si je suis tenté d'y croire, la réalisation de ces mesures nécessitera une volonté sans faille. §

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à Mme Solanges Nadille.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Do AESCHLIMANN

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 intervient dans un contexte de crises multidimensionnelles paroxystiques, qui a envahi l'entier périmètre des comptes sociaux de la France.

Comment ne pas entendre la détresse des malades et le désarroi de nos soignants ? Comment ne pas voir la précarité qui fragilise et fragmente les familles ? Comment ne pas sentir les souffrances de nos aînés, isolés, démunis ou en perte d'autonomie ?

Face à ces crises, les Français exigent des réponses, ils attendent des solutions. Or, à cet égard, il existe à ce stade un grand écart entre les discours volontaristes du Gouvernement et les actes budgétaires.

La branche famille en fournit un exemple flagrant, avec un projet de budget 2024 quasiment blanc, sans vraie mesure pour remédier aux difficultés éprouvées. Pourtant, il y a urgence. La natalité est en baisse constante depuis dix ans, et 2023 pourrait être la pire année depuis 1945, avec moins de 700 000 naissances.

Madame la ministre Aurore Bergé, vous déclariez récemment que la relance de la natalité est la priorité absolue de votre ministère. Vos mots sont forts et nous avons très envie de vous croire. Toutefois, ils ne trouvent aucun écho dans cette proposition budgétaire, qui enjambe 2024 pour un grand nombre de mesures.

S'agissant de l'offre de garde, le service public de la petite enfance est en gestation. Il est prévu de le faire porter par les communes, qui sont déjà asphyxiées financièrement et confrontées à la pénurie de personnel qualifié.

La réalité, aujourd'hui, c'est que les communes ferment des sections et réduisent l'amplitude horaire des crèches pour respecter les taux d'encadrement. Nous saluons les assouplissements apportés au complément de libre choix du mode de garde, mais nous regrettons que les 93 000 familles concernées doivent attendre 2026 pour obtenir le tiers payant, qui était déjà promis dans le budget pour 2019.

Enfin, à l'heure où diverses études montrent que le désir d'enfant est élevé, le décrochage de la natalité interpelle. Au fond, si les Françaises et les Français ont moins d'enfants, ce n'est pas par choix, mais du fait d'une appréhension légitime de l'avenir et d'une politique familiale qui échoue à les rassurer et les soutenir.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Solanges NADILLE

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous nous retrouvons cette semaine pour un temps fort de notre année de travaux, l’examen du budget de la sécurité sociale pour 2024. Cette année encore, notre système de santé a connu des difficultés et a dû faire face à un contexte inflationniste ayant entraîné une augmentation des coûts de fonctionnement.

L’enjeu pour le Gouvernement était clair : ne pas laisser cette hausse des coûts mettre en péril les établissements de santé, tout en permettant aux personnels soignants de gagner dignement leur vie, avec le risque de voir s’évaporer les avancées du Ségur du fait d’une augmentation du coût de la vie. S’ajoute à cela la nécessaire marche en avant pour la modernisation du système de santé et la meilleure prise en charge des patients.

Madame la ministre, messieurs les ministres, comme si la liste des contraintes n’était pas déjà assez complexe, il vous faut, bien sûr, ne pas laisser filer les déficits et trouver des économies dans les différentes branches.

Dans ce jeu d’équilibriste, vous parvenez à dégager plusieurs avancées pour nos concitoyens, et l’objectif national de dépenses d’assurance maladie pour 2024 en témoigne, avec une augmentation de 3, 2 %, soit une hausse supérieure à l’inflation, et un montant de 8 milliards d’euros de dépenses supplémentaires. Dans le même temps, vous prévoyez 3, 5 milliards d’euros d’économies, en axant votre politique sur une maîtrise des dépenses de soins de ville et une responsabilisation de l’ensemble des acteurs.

Plusieurs mesures dans le domaine de la santé doivent être saluées.

Tout d’abord, un réel renforcement de la prévention, souvent parent pauvre des politiques de santé, est amorcé : généralisation de la vaccination contre les infections à papillomavirus, prise en charge intégrale des protections périodiques et des préservatifs pour les moins de 26 ans, réorganisation des rendez-vous de prévention aux âges clés.

Cette action est nécessaire pour enclencher un changement culturel dans notre pays. La prévention permet une meilleure prise en charge, plus précoce, des pathologies pour un coût plus faible pour l’assurance maladie. La politique, c’est prévoir à long terme et, par ce biais, vous accomplissez un pas décisif pour la santé de nos concitoyens pour les prochaines années.

De plus, nous nous dotons de nouveaux moyens pour assurer la continuité de l’accès des patients aux médicaments, dans un contexte de pénurie. En 2023, 37 % des Français ont déclaré être touchés par cette difficulté. Face à l’augmentation de la demande mondiale et des tensions sur les chaînes d’approvisionnement, nous devons agir !

Pour ce faire, nous soutenons votre proposition d’une délivrance à l’unité des antibiotiques en rupture de stock, en lien avec les pharmaciens.

Mais, pour éviter que la solution de l’urgence ne se transforme en principe, il faudra, dans le même temps, continuer votre travail de relocalisation de la production sur le territoire national. C’est un véritable enjeu de souveraineté et une obligation morale pour la protection de nos concitoyens.

Sans vouloir être exhaustive sur les mesures que contient ce texte, je veux, enfin, mettre en avant votre proposition d’étendre l’attribution simplifiée de la complémentaire santé solidaire à un certain nombre de bénéficiaires de minima sociaux, dont l’allocation aux adultes handicapés. Cette simplification doit être saluée, car elle réduira le non-recours et garantira à ces publics un meilleur accès aux soins.

Dans le cadre de l’examen de ce texte, le groupe RDPI portera un certain nombre de points au débat, notamment concernant la lutte contre l’obésité et l’accès aux produits sucrés, mais également sur la question du financement des politiques de santé dans les territoires ultramarins, sujet sur lequel nous sommes prêts à avancer de manière concertée avec le Gouvernement.

Pour finir, je voudrais affirmer, madame la ministre, messieurs les ministres, que nous soutiendrons votre proposition de budget, que nous trouvons responsable et ambitieuse, ainsi que les mesures qui iront dans le sens d’un meilleur accès aux soins pour les patients.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Do AESCHLIMANN

La réforme du congé parental est une autre illustration de l'écart entre vos discours et vos actes. L'heure n'est plus à un énième rapport, comme le suggère l'article 46 quater, dont la finalité, on peut l'imaginer, est de gagner du temps. Au fond, tout est déjà sur la table ! C'est pourquoi j'ai déposé un amendement visant à annuler la commande de ce rapport.

Il est grand temps de revenir sur les funestes réformes de François Hollande qui a réduit la politique familiale à une politique sociale. Il est urgent de rompre avec cet héritage, qui a démantelé la politique familiale et causé l'effondrement des naissances en France. §

Ne vous en déplaise, mes chers collègues, c'est bien le cas ! §La demande de la droite sénatoriale est claire : ayons le courage de renouer avec les recettes qui ont fait le succès de la natalité française.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, pour la septième fois depuis qu’Emmanuel Macron est à l’Élysée, nous étudions le budget de la sécurité sociale présenté par son gouvernement.

Pour la septième fois, il est en déficit. Et, lorsque le chef de l’État quittera l’Élysée, il sera, selon la trajectoire prévue par le Gouvernement, toujours en déficit – il le sera même encore plus qu’aujourd’hui.

Cette trajectoire est inédite. Le Gouvernement ne parvient pas à rétablir les comptes. Et, de fait, il fragilise la sécurité sociale dans ses fondements, puisqu’il projette l’idée que notre système n’est pas soutenable, pas tenable dans la durée.

Nous avons beaucoup débattu, au printemps, de la première masse financière de ce budget, le système de retraite. Je ne m’y attarderai pas : ma collègue Monique Lubin y reviendra.

Qu’en est-il du budget santé du pays ?

Il progresse, cette année, de 3, 2 %, soit un peu plus que l’inflation prévue, après une année 2023 marquée par une progression inférieure à l’inflation.

Cependant, cette hausse doit intégrer de nombreux effets de revalorisations, tellement importants qu’ils consommeront plus de 90 % de cette augmentation et qu’il ne restera quasiment rien pour faire face à l’inflation et à la nécessité d’apporter les améliorations, diverses et variées, que requiert le fonctionnement de notre système de santé.

Ce budget 2024, s’il était respecté – ce qu’à peu près personne ne croit –, financerait moins de soins que celui de 2023, le coût de ceux-ci progressant plus vite que l’enveloppe allouée.

On apprend à l’école primaire que l’on achète moins de tomates en année N+1 avec 12 euros qu’en année N avec 10 euros si le prix du kilo est, dans l’intervalle, passé de 5 à 7 euros. Messieurs les ministres, madame la ministre, c’est exactement ce qui se passe avec votre budget !

Depuis des années, vous tracez le même sillon, celui de la contrainte de l’offre pour comprimer la dépense. Cette politique a démontré son inefficacité et elle crée de la désespérance chez les personnels du soin. Elle fait naître chez ces derniers le sentiment qu’ils ne peuvent remplir leur mission dans de bonnes conditions, les poussant à partir. Nous manquons de médecins généralistes. Nous manquons de professionnels à l’hôpital. Une pénurie s’installe et la surcharge de travail, chez ceux qui restent, suscite de nouveaux départs, ce qui alimente la pénurie.

L’inefficacité se lit d’abord dans les résultats. Que demande-t-on à un système de santé, si ce n’est de faire progresser l’état de santé de sa population ? Or nos grands indicateurs de santé se dégradent.

Après la mortalité infantile, qui progresse – lentement, mais sûrement – depuis quelques années et nous relègue à un niveau moyen au regard des autres pays, c’est au tour de l’espérance de vie à la naissance, qui fut longtemps l’une des toutes meilleures au monde, de flancher : nous passons de la sixième à la treizième place des pays de l’OCDE.

Des résultats de santé publique qui se dégradent, des déficits qui se creusent, tout cela dans la durée : que faut-il de plus pour comprendre que quelque chose ne fonctionne pas et que l’heure est à un véritable changement ?

Si vous étiez tentés, madame la ministre, messieurs les ministres, par un simple rétablissement des comptes, vous avez l’embarras du choix : réduire les allégements et exonérations non compensés, voire y mettre fin ; annuler tout ou partie du transfert de la dette covid de l’État à la Cades ; décider de nouvelles recettes…

Nous vous appelons toutefois à plus d’ambition et à affronter la réalité : les dépenses de santé progressent plus vite que la richesse nationale sous l’effet de facteurs structurels que nous connaissons bien et auxquels nous n’avons d’autre choix que de nous adapter.

Notre pays ne parvient pas à suivre cette hausse. Il le fait d’autant moins qu’il gaspille trop de ressources et qu’il investit trop peu dans la prévention.

Le budget santé du pays est ainsi construit à partir d’une forme de conservatisme mâtiné d’une lecture financière inefficace.

Certes, l’Ondam n’a jamais été une construction de santé publique, mais il se révèle désormais comme un obstacle à des démarches de santé. Si nous poursuivons ainsi, les indicateurs de santé continueront à se dégrader et les pénuries à se perpétrer.

Changer, madame la ministre, messieurs les ministres, c’est construire autrement notre budget. C’est délibérer sur nos objectifs avant de délibérer sur les moyens.

C’est délibérer sur des priorités dans chaque département, en fonction des besoins de santé de la population. C’est, ensuite, délibérer au Parlement sur des objectifs nationaux de santé que nous nous assignons. Et c’est, après seulement, allouer les moyens en fonction des choix effectués, car, oui – nous ne disons pas le contraire –, il y aura toujours des choix à faire.

Changer, c’est faire beaucoup plus de prévention.

C’est l’activité physique et l’activité physique adaptée qui doivent se déployer.

C’est une lutte énergique contre les polluants, dont certains – je pense aux perturbateurs endocriniens – compromettent tout progrès de notre espérance de vie en bonne santé.

C’est la réduction de la consommation d’alcool, sur laquelle brasseurs et viticulteurs ont toujours une objection et le Président de la République une complaisance.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Do AESCHLIMANN

Laissons aussi aux familles la liberté de prévoir ce qui est le plus adapté à leur vie professionnelle et à leur projet parental.

Telles sont les mesures de soutien que les familles attendent. Madame la ministre, j'ai entendu et apprécié votre intervention dans le cadre de votre audition par la commission des affaires sociales. Je le sais, vous partagez, au fond, ces convictions. §

Des amendements ont été déposés par la majorité sénatoriale pour que ce budget ne soit pas un rendez-vous manqué. §

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

C’est la lutte contre le tabagisme, désavouée l’an dernier par le ministre chargé des comptes publics, Gabriel Attal, de retour du congrès des buralistes.

C’est la santé mentale. C’est l’alimentation. C’est la santé au travail.

Changer, madame la ministre, messieurs les ministres, c’est, enfin, constater que le mouvement de financiarisation qui frappe le secteur de la santé est un danger pour les fondements de notre protection sociale.

Les ressources provenant des assurés sociaux sont détournées vers la rémunération d’actionnaires. La rentabilité prend le pas sur la pertinence des soins. Conjuguée à un mode de rémunération trop centré sur les actes, la financiarisation invalide toute politique visant à l’efficience et à la permanence des soins. Elle s’impose aussi, parce que de nombreux secteurs du soin souffrent d’un déficit d’investissement ; elle profite, en cela, de budgets de ce type, trop à courte vue.

Il devient urgent de poser des limites pour éviter de voir notre système solidaire régresser encore.

Vous l’avez compris, madame la ministre, messieurs les ministres, nous estimons que le budget que vous nous présentez nous maintient dans une impasse. Alors que la crise sanitaire qui a surgi en 2020 est derrière nous, la promesse présidentielle est oubliée. Rien ne change.

Alors qu’il faudrait réunir un large accord politique pour rénover en profondeur notre protection sociale et notre système de santé, la faiblesse de votre base politique empêche le Parlement de remplir pleinement son rôle. Les contournements tels que le Conseil national de la refondation ne règlent rien.

Le résultat est là : votre gouvernement paraît dépassé par les enjeux de la protection sociale.

Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Michel Masset et Mme Raymonde Poncet Monge applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Burgoa

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous y sommes : en cette fin d'année est venu le temps d'échanger sur les différents budgets pour 2024. Ces débats sont toujours très attendus, tant il s'agit là du nerf de la guerre.

Chacun se présente à nous, parlementaires, et à vous, membres du Gouvernement, avec sa liste de doléances.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Burgoa

Il s'agit alors de ne jamais perdre de vue l'intérêt général ; il y va de la crédibilité de notre institution.

En effet, comment pourrions-nous, au moment de l'examen des budgets, suggérer toujours plus de dépenses pour tel et tel secteur et, ensuite, durant le reste de l'année, réclamer plus d'économies ?

Présenter un budget, ce n'est pas simplement administrer : c'est prioriser, renoncer, abonder ; en un mot, c'est gouverner.

Il s'agit d'ajuster notre budget à nos différents besoins ou plutôt, en l'occurrence, à nos urgences. Plus encore, il s'agit, j'en formule le vœu, d'être capable de retrouver une certaine liberté d'action. Car c'est de cela que nous parlons : de notre capacité à agir, à changer le quotidien des Français et à les protéger.

En déplacement dans le Gard, lors de mon premier mandat, un élu m'avait dit : « Monsieur le sénateur, nous ne manquons pas de têtes, nous manquons de bras ».

Aujourd'hui, je le constate moi-même : des études, des rapports, des commissions, nous en avons, et de qualité. Il reste à les mettre en œuvre ! Je redoute le jour où nos discussions seront aussi caricaturales qu'à l'Assemblée nationale. En effet, dans tous nos départements, quelles que soient nos sensibilités politiques, nous faisons les mêmes constats.

Tout comme nos concitoyens réfléchissent parfois à deux fois avant de se rendre au commissariat, de peur de s'engager dans une procédure trop longue qui ne les empêchera pas de croiser leur agresseur, ils réfléchissent également à deux fois avant de prendre un rendez-vous médical qui, ils le savent, sera souvent fixé des mois plus tard et à plusieurs dizaines de kilomètres.

Dans certains quartiers de France, nos concitoyens pensent à mettre leurs enfants dans un établissement privé, non pas pour une quelconque éducation religieuse ni même pour une qualité prétendument supérieure, mais simplement – rendez-vous compte ! – pour la garantie d'une plus grande sécurité.

De la même manière, certains de nos concitoyens ne se tournent plus vers l'hôpital public, mais s'adressent directement au secteur privé ou associatif. C'est notre contrat républicain qui est ainsi rongé.

Pourtant, la France demeure l'un des pays dans lesquels les prélèvements obligatoires sont les plus importants. Elle se hisse même au sommet du classement en zone euro. Alors, de grâce, ne disons pas que les Français sont réfractaires à l'impôt. Disons plutôt qu'ils nous réclament l'efficacité tant espérée de nos politiques.

Le personnel médical est à bout de souffle, nous le savons depuis des années, et, s'ils sont attachés à leur mission, nous devons l'être tout autant, si ce n'est plus.

Lorsque l'on siège à droite de cet hémicycle et que l'on invite à réduire le train de vie de l'État, on nous répond parfois : comment ? Vous souhaitez encore moins de lits dans les hôpitaux, moins d'infirmiers ? Mais, mes chers amis, c'est tout l'inverse ! S'il nous faut être plus assidus, c'est justement pour avoir plus d'hôpitaux, plus d'infirmiers, et pour que les professionnels soient mieux rémunérés. Qu'imaginer d'autre ?

On s'engage toujours dans la vie politique pour les plus modestes et les plus fragiles. D'ailleurs, et c'est parfois contre-intuitif, même pour lutter contre les fraudes de toutes sortes, il nous faut plus de moyens.

Il y a donc des réformes structurelles à mener. Par ailleurs, disons-le, il y a sans nul doute des économies à faire dans tout un tas de structures ad hoc et de comités Théodule, si utiles qu'ils passent sous les radars, si nombreux qu'ils grèvent nos budgets.

Telle est la vue générale que je tenais à partager avec vous. Nos débats seront longs. Je fais pleinement confiance, avec l'ensemble de mon groupe, à nos rapporteurs et au président de la commission des affaires sociales pour veiller à ce que cet esprit se traduise tout au long de nos votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, le PLFSS 20204 est, hélas, dans la triste continuité de ses prédécesseurs.

Il ne contient aucune réforme majeure et continue de mélanger les genres, entre loi de financement et loi d’organisation de la santé. C’est évidemment la meilleure façon d’entretenir la confusion.

Or nous sommes parvenus à la croisée des chemins, ce moment précis où, en fonction des décisions prises, nous refonderons notre modèle, en l’adaptant, le modernisant, ou, au contraire, nous continuerons à le condamner et à le transformer en un système américanisé, via les assureurs privés, la financiarisation de certains secteurs et l’ubérisation de la santé.

Aujourd’hui, déjà, des sociétés étrangères achètent des cliniques, des centres de santé et se financent, ainsi, avec l’argent de l’assurance maladie. Quelles réponses apportons-nous ?

Depuis des années, nous dénonçons le manque d’ambition, de vision prospective et réformatrice des différents gouvernements, leur approche comptable, leur recours à tout un arsenal de stratagèmes qui relèvent davantage de la fuite en avant que de la prise en considération des enjeux des professionnels, des patients et de l’organisation du système de protection sociale, au travers notamment de son financement.

Je pourrais aujourd’hui, au mot près, à la virgule près, tenir les mêmes propos que l’an passé. Pourquoi ne pas avoir eu la volonté, dès ce PLFSS, de refonder la gouvernance de la santé, en proposant par exemple une loi de programmation sanitaire pour la durée du mandat présidentiel ?

Madame la ministre, messieurs les ministres, pourquoi ne pas donner ne serait-ce qu’un signe de votre volonté d’avoir une stratégie de santé fondée sur l’évaluation territoriale des besoins de santé et sur des objectifs territoriaux de santé ?

Pourquoi ne pas marquer votre volonté de mettre en place une vraie démocratie locale et sanitaire au centre du fonctionnement de l’hôpital, rééquilibrer le management entre la médecine et l’administration et développer une gouvernance autonome ?

Pourquoi ne pas permettre la mise en place des patients experts ?

Pourquoi ne pas assurer aux professionnels libéraux qu’ils soient garants des missions territoriales de santé ?

Pourquoi ne pas proposer une restructuration de la permanence des soins ambulatoires, afin de garantir la pertinence des urgences hospitalières ?

Pourquoi ne pas réviser les ordonnances Debré pour permettre un meilleur ancrage territorial des hôpitaux ?

Le fait de soulever les mêmes interrogations et de n’avoir pas davantage de réponses n’est pas de bon augure. Le temps nous est compté. Il y a urgence.

Vous me permettrez d’insister particulièrement sur le financement, qui est l’objet de ce texte. Sa réforme est la condition sine qua non pour dégager de réelles marges de manœuvre financières, tout en améliorant notablement la performance de notre système de santé.

Aujourd’hui, la multiplicité des intervenants entraîne une hausse des frais de gestion exponentielle, et cette évolution démontre l’ampleur des économies réalisables grâce à une réforme du financement.

Nous devons non seulement réfléchir sérieusement, mais aussi mettre en œuvre le plus rapidement possible un mode de financement par un assureur unique par prestation de santé.

Des économies substantielles seraient ainsi réalisées, qui pourraient être réinjectées au profit d’une optimisation de l’ensemble de notre système de santé, de ses bénéficiaires, de ses acteurs, de ses financeurs.

Cela permettrait de développer une vraie politique de prévention, tout en garantissant la pérennité de notre système, fondé sur la solidarité.

Vous conviendrez avec moi que ce principe est aujourd’hui battu en brèche. Les inégalités sont plus nombreuses et plus flagrantes.

La privatisation accrue de notre système et le développement des réseaux participent à une transformation insidieuse, voire pernicieuse, de l’accès aux soins. Un système à deux vitesses n’est plus un spectre. C’est une réalité, chaque jour plus marquée.

Enfin, comment ne pas évoquer la situation des hôpitaux ? Je veux aborder ici la question du financement, dont le volet lié à la tarification à l’activité – la fameuse T2A – est souvent stigmatisé.

Dans un récent rapport, la Cour des comptes a rappelé la volonté du Président de la République, puis du ministre chargé de la santé, en janvier 2023, de réformer le financement des établissements de santé. La tarification à l’activité a été présentée comme « condamnée », même s’il est envisagé d’en conserver une part.

Une fois ce rappel fait, la Cour analyse le rôle joué par la T2A dans la maîtrise des coûts, d’une part, et dans l’amélioration de l’organisation des soins et le pilotage des établissements de santé, d’autre part.

Force est de constater que les objectifs qui lui étaient assignés en termes d’équité et de transparence des financements ont été atteints et demeurent indispensables.

Bien sûr, le système est perfectible et doit être amélioré, notamment pour les soins non programmables et pour les soins critiques, mais gardons-nous de retomber dans les travers que provoque un système axé essentiellement sur des dotations.

Ce PLFSS, monsieur le ministre, propose peu de mesures de rénovation. Les déficits se creusent. Combien de temps encore allons-nous tout mettre en œuvre pour conduire notre système de santé dans le mur ?

Mes chers collègues, nous ne pouvons pas accepter plus longtemps d’être les fossoyeurs de notre pacte social.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, le PLFSS 20204 est, hélas ! dans la triste continuité de ses prédécesseurs.

Il ne contient aucune réforme majeure et continue de mélanger les genres, entre loi de financement et loi d’organisation de la santé. C’est évidemment la meilleure façon d’entretenir la confusion.

Or nous sommes parvenus à la croisée des chemins, ce moment précis où, en fonction des décisions prises, nous refonderons notre modèle, en l’adaptant, le modernisant, ou, au contraire, nous continuerons à le condamner et à le transformer en un système américanisé, via les assureurs privés, la financiarisation de certains secteurs et l’ubérisation de la santé.

Aujourd’hui, déjà, des sociétés étrangères achètent des cliniques, des centres de santé et se financent, ainsi, avec l’argent de l’assurance maladie. Quelles réponses apportons-nous ?

Depuis des années, nous dénonçons le manque d’ambition, de vision prospective et réformatrice des différents gouvernements, leur approche comptable, leur recours à tout un arsenal de stratagèmes qui relèvent davantage de la fuite en avant que de la prise en considération des enjeux des professionnels, des patients et de l’organisation du système de protection sociale, au travers notamment de son financement.

Je pourrais aujourd’hui, au mot près, à la virgule près, tenir les mêmes propos que l’an passé. Pourquoi ne pas avoir eu la volonté, dès ce PLFSS, de refonder la gouvernance de la santé, en proposant par exemple une loi de programmation sanitaire pour la durée du mandat présidentiel ?

Madame la ministre, messieurs les ministres, pourquoi ne pas donner ne serait-ce qu’un signe de votre volonté d’avoir une stratégie de santé fondée sur l’évaluation territoriale des besoins de santé et sur des objectifs territoriaux de santé ?

Pourquoi ne pas marquer votre volonté de mettre en place une vraie démocratie locale et sanitaire au centre du fonctionnement de l’hôpital, rééquilibrer le management entre la médecine et l’administration et développer une gouvernance autonome ?

Pourquoi ne pas permettre la mise en place des patients experts ?

Pourquoi ne pas assurer aux professionnels libéraux qu’ils soient garants des missions territoriales de santé ?

Pourquoi ne pas proposer une restructuration de la permanence des soins ambulatoires, afin de garantir la pertinence des urgences hospitalières ?

Pourquoi ne pas réviser les ordonnances Debré pour permettre un meilleur ancrage territorial des hôpitaux ?

Le fait de soulever les mêmes interrogations et de n’avoir pas davantage de réponses n’est pas de bon augure. Le temps nous est compté. Il y a urgence.

Vous me permettrez d’insister particulièrement sur le financement, qui est l’objet de ce texte. Sa réforme est la condition sine qua non pour dégager de réelles marges de manœuvre financières, tout en améliorant notablement la performance de notre système de santé.

Aujourd’hui, la multiplicité des intervenants entraîne une hausse des frais de gestion exponentielle, et cette évolution démontre l’ampleur des économies réalisables grâce à une réforme du financement.

Nous devons non seulement réfléchir sérieusement, mais aussi mettre en œuvre le plus rapidement possible un mode de financement par un assureur unique par prestation de santé.

Des économies substantielles seraient ainsi réalisées, qui pourraient être réinjectées au profit d’une optimisation de l’ensemble de notre système de santé, de ses bénéficiaires, de ses acteurs, de ses financeurs.

Cela permettrait de développer une vraie politique de prévention, tout en garantissant la pérennité de notre système, fondé sur la solidarité.

Vous conviendrez avec moi que ce principe est aujourd’hui battu en brèche. Les inégalités sont plus nombreuses et plus flagrantes.

La privatisation accrue de notre système et le développement des réseaux participent à une transformation insidieuse, voire pernicieuse, de l’accès aux soins. Un système à deux vitesses n’est plus un spectre. C’est une réalité, chaque jour plus marquée.

Enfin, comment ne pas évoquer la situation des hôpitaux ? Je veux aborder ici la question du financement, dont le volet lié à la tarification à l’activité – la fameuse T2A – est souvent stigmatisé.

Dans un récent rapport, la Cour des comptes a rappelé la volonté du Président de la République, puis du ministre chargé de la santé, en janvier 2023, de réformer le financement des établissements de santé. La tarification à l’activité a été présentée comme « condamnée », même s’il est envisagé d’en conserver une part.

Une fois ce rappel fait, la Cour analyse le rôle joué par la T2A dans la maîtrise des coûts, d’une part, et dans l’amélioration de l’organisation des soins et le pilotage des établissements de santé, d’autre part.

Force est de constater que les objectifs qui lui étaient assignés en termes d’équité et de transparence des financements ont été atteints et demeurent indispensables.

Bien sûr, le système est perfectible et doit être amélioré, notamment pour les soins non programmables et pour les soins critiques, mais gardons-nous de retomber dans les travers que provoque un système axé essentiellement sur des dotations.

Ce PLFSS, monsieur le ministre, propose peu de mesures de rénovation. Les déficits se creusent. Combien de temps encore allons-nous tout mettre en œuvre pour conduire notre système de santé dans le mur ?

Mes chers collègues, nous ne pouvons pas accepter plus longtemps d’être les fossoyeurs de notre pacte social.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi qu'au banc des commissions.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et sur des travées des groupes UC et SER. – Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.

Applaudissements sur les travées d u groupe Les Républicains et sur des travées des groupes UC et SER. – Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

J'invite les ministres à faire preuve de concision dans leurs réponses afin que nous puissions suspendre la séance à vingt heures, car la commission des affaires sociales doit se réunir pour examiner les amendements.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Aurélien Rousseau, ministre

Je veux tout d'abord remercier M. le sénateur Laurent Burgoa, lequel, dans sa sagesse gardoise, a montré la ligne de crête entre la nécessaire maîtrise des dépenses et l'attention que nous devons porter aux besoins des plus fragiles d'entre nous.

Peut-être ne l'avons-nous pas dit suffisamment, alors même que nous devons naturellement à la représentation nationale une trajectoire de financement claire et transparente à moyen terme, nous avons pour objectif de réduire les dépenses de la médecine de ville, plus particulièrement de médicaments, par une régulation portant sur la pertinence des actes et des différents soins. Ce sujet est au cœur de la négociation conventionnelle qui s'ouvrira à partir de demain.

Madame la rapporteure générale, madame la sénatrice Jocelyne Guidez, même si un déficit de 9 milliards d'euros sur les 255 milliards d'euros de dépenses d'assurance maladie pourrait faire rêver en comparaison avec le budget de l'État, nous ne pouvons pas nous dire que nous finirons, en fin de période, avec un tel déficit.

Les propos tenus sur la réforme de la tarification à l'activité, qualifiée de « trompeuse », « inaboutie » ou « en trompe-l'œil », me paraissent contradictoires avec la proposition de reporter cette réforme à 2028. Nous devons nous lancer dans la réforme de la T2A, dont il est question depuis sa création ! Nous proposons un dispositif cohérent comportant trois briques de tarification, conformément à une demande qui revient de manière récurrente lors de chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Si nous renvoyions le sujet à l'année prochaine, certains sénateurs – et pas seulement le sénateur Milon – pourraient alors refaire le même discours que cette année ! Nous devons nous lancer dans cette réforme, mais évidemment nous l'évaluerons et nous l'ajusterons. J'ai la conviction que, si nous attendions d'avoir le système de tarification parfait, qui ne ferait ni perdant ni gagnant et aurait toutes les vertus, nous attendrions longtemps !

S'agissant de la financiarisation, je veux souligner le travail effectué à l'Assemblée nationale, notamment sur l'initiative de Stéphanie Rist, pour modifier la tarification et le financement de la radiothérapie et de la dialyse, qui sont deux des secteurs dans lesquels, on le sait, les effets de la financiarisation se font particulièrement sentir.

Je ne crois pas que, dans le champ de la prévention, les mesures que nous présentons soient « cosmétiques ». J'avais entendu le même terme, lorsque le Président de la République avait annoncé la gratuité des préservatifs ou la prise en compte de la précarité menstruelle. Quand on voit le volume que ces mesures représentent, on comprend que cela répond à une véritable demande.

Certes, je ne prétends pas que le virage de la prévention soit définitivement pris, mais je pense sincèrement que ce texte et tout ce qui, depuis quelques mois, est porté par le Gouvernement – je pense notamment à la vaccination et à la prévention de certaines pathologies – témoignent d'une nouvelle orientation.

Monsieur Jomier, madame Lassarade, il est sans doute vrai que, d'un point de vue structurel, l'Ondam n'est pas l'outil le plus adapté pour avancer en matière de prévention – ce n'est pas un indicateur de santé publique. Par exemple, en finançant aujourd'hui la vaccination contre les infections au papillomavirus, on évite des cancers de l'utérus qui seraient apparus dans trente ans.

C'est vrai, il y a un chantier à conduire pour bâtir une réforme structurelle de la prévention. À mes yeux, c'est l'explication majeure des reculs que nous enregistrons, notamment en matière de mortalité infantile et d'espérance de vie en bonne santé. Le tout curatif ne répondra pas à la situation. Les inégalités sociales de santé doivent être prises en compte.

Je remercie d'ailleurs les sénatrices Pantel et Nadille d'avoir souligné que ces mesures de prévention ne sont pas accessoires.

Nous reviendrons sans doute au cours du débat sur les mesures concrètes prises en matière de médicaments. Pour répondre aux propos tenus par Mme Nadille, je dirai simplement que, si nous disposions dès aujourd'hui des mesures prévues dans ce PLFSS, cela nous serait très précieux. Je pense notamment au transfert des pouvoirs de police sanitaire à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).

Monsieur Delahaye, vous avez lié d'une certaine façon le Ségur de la santé et la crise. Je ne mets pas tout à fait sur le même plan ces deux éléments, car je pense que le Ségur constituait une condition pour sortir de la crise.

En tout cas, dans le domaine de la santé, les effets structurels de la crise du covid ne sont pas derrière nous. Je pense notamment à la situation en matière de santé mentale, qui devra être, selon moi, au cœur du PLFSS 2025. Nous le sentons tous, de ce point de vue, quelque chose s'est profondément dégradé dans notre pays depuis quelques années.

MM. Mouiller et Milon ainsi que Mme Imbert sont revenus sur la nécessité d'avoir une grande loi structurante sur la santé.

En vous écoutant, monsieur Milon, je me disais que chacun rêve d'avoir une grande loi à son nom. Pour ma part, je souhaite qu'on avance sur les conseils territoriaux de santé (CTS) – ce point a été évoqué dans le cadre de l'examen de la proposition de loi Valletoux –, sur la réorganisation de la gouvernance à l'hôpital ou encore sur le service d'accès aux soins (SAS) – 85 % de la population sera couverte en fin d'année. En outre, nous avons cassé la courbe des patients en affection de longue durée (ALD) qui n'ont pas de médecin traitant.

Je vous rejoins, monsieur Milon, s'agissant des ordonnances Debré. Certains chantiers législatifs sont devant nous. On entre parfois au Parlement avec l'idée de construire une cathédrale et on en ressort avec une chapelle de montagne, ce qui peut être aussi beau, mais pas forcément plus utile.

Je le redis, madame Souyris, monsieur Chasseing, nous adapterons, en fonction des retours, tous les dispositifs d'accompagnement de la vaccination contre les virus HPV. Je veux aussi préciser, s'agissant de la précarité menstruelle, que nous avons étendu le dispositif aux bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire (C2S).

Je le redis également, la santé mentale et la santé des femmes seront deux axes forts du projet de loi de financement de la sécurité sociale de l'an prochain. Nous en sommes, à ce stade, au milieu du chemin.

Par ailleurs, je vous indique que je présenterai dans quelques semaines le plan national de lutte contre le tabagisme. Des annonces, qui ne sont pas neutres, seront faites, notamment en matière de prix.

Pour finir, vous avez évoqué, madame Brulin, notre cap, qui serait selon vous une réduction des dépenses. Si tel était le cas, cela se verrait sans doute un peu plus !

Toutefois, je vous rejoins sur deux points.

Tout d'abord, il convient de comprendre ce qui se passe dans les instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi), dans la mesure où 30 % des étudiants s'arrêtent en cours de formation.

Ensuite, si le projet de loi de financement de la sécurité sociale est un texte ambitieux, il n'est pas tout ! Vous avez ainsi évoqué, madame la sénatrice, la question de la permanence des soins. Or, grâce à la bienveillance de Mme la rapporteure, le Sénat a adopté, dans le cadre de la proposition de loi Valletoux, une mesure relative à la permanence des soins en établissements de santé, qui me semble constituer une réponse à ce que vous avez évoqué.

Je suis désolé d'avoir été à la fois trop court et trop long, ce qui caractérise d'une certaine façon les PLFSS…

Debut de section - PermalienPhoto de Christopher SZCZUREK

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, abîmés par la crise sanitaire, par des décennies de mauvais choix, la sécurité sociale et notre système de santé, qui étaient auparavant une fierté nationale et étaient réputés pour être parmi les meilleurs au monde, ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes.

Notre hôpital public et nos urgences sont en ruine, avec une dégradation des conditions d’accueil et de prise en charge des patients, en dépit du dévouement de nos soignants. À l’épuisement des professionnels de santé et au déficit des vocations s’ajoute une baisse ininterrompue des capacités d’accueil dans les hôpitaux.

Mes chers collègues, la réalité est édifiante. L’espérance de vie recule désormais dans notre pays. La mortalité infantile, l’un des indicateurs attestant le plus de l’état d’un système social, revient à la hausse, avec évidemment autant de drames familiaux.

Enfin, il n’est plus un territoire, rural comme urbain, qui ne connaisse pas une dégradation de l’accès aux soins et 30 % de la population française vit désormais dans un désert médical.

Après ce sombre constat, les solutions portées par ce PLFSS paraissent sous-dimensionnées et l’optimisme gouvernemental confine à la déconnexion.

Des mesures efficaces pour financer notre système de santé existent. Le Rassemblement national proposera des amendements pour faire rentrer et économiser l’argent qui manque cruellement à nos soignants et à nos hôpitaux.

À ce sujet, nous nous félicitons de la transposition, dans ce PLFSS, de mesures portées par Marine Le Pen lors de l’élection présidentielle. Ainsi, nous accueillons favorablement la réforme de la T2A, un système qui contraint l’hôpital public à s’aligner sur les méthodes du privé. Le principe de délivrance à l’unité des médicaments nous apparaît également être une mesure de santé publique et de santé financière bienvenue.

Néanmoins, malgré ces quelques lueurs, les manquements sont légion.

Le Rassemblement national défendra la mise en place d’une réelle politique de souveraineté pharmaceutique par la réindustrialisation du secteur et par une politique d’État stratège appuyée sur les grands groupes pharmaceutiques tricolores.

Il est également temps de rationaliser la technostructure de la santé. La suppression des ARS, échelons inutiles, coûteux et plus que jamais délégitimés par leur gestion catastrophique de la crise sanitaire, est une nécessité pour redéployer les efforts de l’État et donner aux médecins et aux soignants un vrai pouvoir de gestion et d’action au sein de leurs établissements.

Nos amendements appuieront également la nécessaire lutte contre la fraude sociale, évaluée entre 7 milliards et 21 milliards d’euros selon les services de l’assurance maladie.

Enfin, le présent PLFSS est une nouvelle occasion manquée de définir de réelles mesures pour accompagner les Français dans les défis démographiques de notre temps. Ainsi, nous déplorons l’absence d’un réel plan grand âge, centré sur les aidants et sur le maintien à domicile des personnes en situation de dépendance.

Madame la ministre, messieurs les ministres, le contestable article 30 de votre projet de loi participera à éloigner ces personnes du soin par l’augmentation des coûts du transport individualisé. Les personnes handicapées seront également lourdement affectées par cette mesure, les contraignant d’autant plus dans un accès aux soins plus difficile et plus coûteux pour eux comme pour leurs familles.

À ce titre, les acteurs de la Conférence nationale du handicap ont alerté sur le décalage persistant entre les moyens alloués et les besoins des personnes en situation de handicap.

Mes chers collègues, les sénateurs du Rassemblement national soutiendront toutes les mesures allant dans le bon sens : celui de la protection sociale la plus étendue pour les Français et celui du pragmatisme gestionnaire.

Dans cette chambre, il n’y a pas de 49.3. Profitons-en pour débattre, ce dont l’Assemblée nationale a été privée !

M. Joshua Hochart applaudit.

Debut de section - Permalien
Aurore Bergé, ministre

S'agissant des enjeux liés à l'autonomie, il est vrai que la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France et la stratégie interministérielle que nous présenterons vendredi n'épuisent pas le sujet, à savoir l'adaptation de l'ensemble de notre société au vieillissement.

C'est la raison pour laquelle je souhaite que nous puissions travailler ensemble à une loi d'orientation, qui s'intéressera plus particulièrement aux questions de financement.

En la matière, plusieurs éléments se cumulent. Je pense au fonds d'urgence, qui n'est pas là pour répondre aux enjeux structurels d'un certain nombre de nos établissements, en particulier les Ehpad, mais doit permettre de cartographier notre territoire, établissement par établissement, pour connaître les établissements qui sont en difficulté conjoncturelle et ceux qui sont en difficulté structurelle. Il s'agit de proposer un véritable parcours résidentiel, qui manque aujourd'hui.

À cela s'ajoute une mesure en PLFSS 2024, qui abondera les caisses des départements, via la CNSA, à hauteur de 150 millions d'euros supplémentaires. Cette disposition utile permettra aux départements de faire face au financement de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH).

Mais nous devons aller plus loin ; c'est pour cela que nous proposons la fusion des sections. Je constate, madame la rapporteure, que les avis sur le sujet sont divers. Pour ma part, je crois beaucoup à la différenciation et au processus d'expérimentation. Une expérimentation permet une évaluation avant toute – éventuelle – généralisation.

Je n'ai pas posé comme préalable l'idée de la généralisation, d'autant que l'on incite les départements à s'engager dans des mesures d'innovation et qu'on leur demande de se montrer pilotes en la matière. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement sera favorable aux amendements posant le principe d'une expérimentation.

Par ailleurs, il y aura bien une réforme en 2025 des fonds de concours. Nous aurons donc une première évolution en 2024 et une vraie réforme en 2025.

En ce qui concerne les contrôles, nous avons augmenté les effectifs des ARS de 120 équivalents temps plein (ETP) de manière à garantir qu'en deux ans l'intégralité des Ehpad aura été contrôlée. Nous avons également prévu en loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 l'obligation de tenir une comptabilité analytique, ce qui n'était pas le cas pour les établissements privés lucratifs. Cette mesure nous permettra aussi d'obtenir des résultats.

Le service public de la petite enfance (SPPE) est une première brique, mais il n'est pas non plus la réponse à toutes les questions qui se posent. Pour autant, il fallait bien un pilote. Nous ne laissons pas les collectivités locales seules, puisque la convention d'objectifs et de moyens signée entre l'État et la Cnaf prévoit le financement et l'accompagnement de l'effort demandé. Je sais que vous attendez des preuves d'amour et pas uniquement des mots d'amour. Entre 2023 et 2027, pour les structures de la petite enfance, 1, 5 milliard d'euros supplémentaires viendront s'ajouter aux investissements déjà réalisés, notamment par la Cnaf.

Le congé familial, je l'espère, sera considéré comme une autre preuve d'amour. J'entends les remarques qui ont été formulées sur la demande de rapport. J'ai annoncé que l'objectif était réalisable pour 2025 – je crois qu'il faut donner de la visibilité aux familles.

Il s'agit de redonner de la liberté, une possibilité de choix, des droits aux familles pour garantir aux parents qu'ils pourront s'occuper de leurs enfants dans des conditions sereines. Nous voulons lutter contre toutes les causes qui sont à l'origine de l'écart grandissant entre le désir d'enfant et le nombre d'enfants.

C'est toute la question d'une politique familiale universelle. Nous entendons créer de nouveaux droits et, qu'il s'agisse de la réforme du CMG ou du congé familial, c'est bien l'ensemble des familles qui seront concernées. Aucune famille ne sera exclue des dispositifs.

Permettez-moi également de lever un malentendu. J'ai entendu dire que ce budget actait une baisse des allocations. C'est l'inverse, puisque l'ensemble des prestations familiales sera revalorisé en avril de 4, 6 %, soit 1 milliard d'euros supplémentaires d'engagement de l'État.

En ce qui concerne la question du handicap, sur les 50 000 nouvelles solutions, ma priorité absolue concernera avant tout les adultes en situation de handicap. Ces derniers ne sauraient être maintenus, pour des raisons évidentes de dignité, mais aussi d'organisation et de justice, dans des établissements qui sont dédiés à nos enfants. Nous agirons évidemment en ce sens.

Enfin, afin de ne laisser subsister aucune ambiguïté, les fauteuils roulants seront bien pris en charge à 100 % par l'État. Le reste à charge sera donc de zéro pour les familles, que le fauteuil coûte 3 000 euros ou qu'il en coûte 30 000. Il s'agit d'une petite révolution. Les familles seront ainsi délestées d'un poids financier, mais aussi d'un poids moral.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, le PLFSS 2024 prévoit 641 milliards d’euros de dépenses et 630 milliards d’euros de recettes.

L’Ondam s’élève à 255 milliards d’euros, soit 50 milliards d’euros supplémentaires par rapport à 2019 : cela représente une augmentation de 3, 2 %, soit 8 milliards d’euros par rapport à 2023.

Malgré cette hausse importante, la situation risque d’être difficile pour les hôpitaux et pour le secteur médico-social, qui subissent de plein fouet l’inflation et qui doivent augmenter les salaires et réaliser des investissements.

Il en est de même, à mes yeux, de la prise en charge de la dépendance.

Néanmoins, ce texte contient plusieurs avancées, que nous encourageons : des mesures de lutte contre la fraude aux cotisations sociales ; la vaccination contre les papillomavirus humains ; la prise en charge des préservatifs et des protections périodiques ; la possibilité de délivrance, par les pharmaciens et après réalisation d’un test, de médicaments pour certaines cystites et les angines ; une simplification des démarches d’attribution de la C2S ; un meilleur repérage pour les enfants et de meilleures conditions d’accueil ; un dépistage accru ; la prise en charge à 100 % des fauteuils pour les personnes handicapées ; des bilans de prévention ; des mesures contre les pénuries de médicaments.

Sur ce dernier point, monsieur le ministre, il est absolument fondamental de trouver des solutions pour relocaliser la fabrication de médicaments en France et en Europe. Voilà vingt ans, l’Europe était le premier producteur et exportateur de médicaments.

Concernant la dépendance, sujet sur lequel j’interviendrai plus longuement, vous avez manifesté l’intention de créer 25 000 places en services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) d’ici à 2030.

En effet, le nombre de seniors de plus de 85 ans va doubler entre 2020 et 2040, et celui des personnes en perte d’autonomie va passer de 1, 4 million à 2 millions.

Si vous voulez voir le virage domiciliaire annoncé se réaliser – nous y sommes favorables –, c’est dès maintenant et d’ici à 2027 qu’il faut essayer de créer ces 25 000 places en Ssiad et en résidences autonomie.

Dans les Ehpad, vous prévoyez une diminution du taux d’institutionnalisation des personnes dépendantes – il passerait de 41 % à 37 % –, ce qui va entraîner une augmentation très importante de la dépendance globale, avec un GIR moyen pondéré (GMP) qui s’établira entre 750 et 800.

Nous avons voté la loi du 7 août 2020 créant une cinquième branche de la sécurité sociale, qui indique que la perte d’autonomie est un risque assuré par la nation à chacun.

Les PLFSS 2022 et 2023 ont respectivement apporté 200 millions et 300 millions d’euros, ce qui fait, sur deux ans, 1, 2 emploi par Ehpad – il y en a 7 500.

Madame la ministre, messieurs les ministres, en 2025 et 2026, les annonces du Président de la République doivent être appliquées, même si je comprends les difficultés budgétaires.

L’objectif était de créer 50 000 emplois supplémentaires sur le quinquennat, dont 10 000 d’ici à 2024. Il est nécessaire d’en créer encore 20 000 en 2025 et autant en 2026. C’est le minimum indispensable ; d’après mes calculs, cela permettra cinq emplois supplémentaires en moyenne par Ehpad et d’augmenter ainsi de quinze minutes par jour le temps passé auprès de chaque résident. Nous devons avoir cette ambition.

Il me paraît également nécessaire que les sections « soins » et « dépendance » des budgets des Ehpad soient fusionnées, comme le propose l’article 37. Cependant, celui-ci ne prévoit cette fusion que sur la base du volontariat, ce qui pourra entraîner des disparités entre les départements et ne me semble pas conforme à l’esprit de la loi.

Il est aussi nécessaire, parallèlement, que les départements ne rétrocèdent pas à la CNSA l’intégralité de ce qu’ils perçoivent au titre des GIR 5 et 6. Il faut leur donner les moyens de renforcer le maintien à domicile.

J’ai déposé un amendement visant à revenir sur l’obligation de fusion prévue entre les Ssiad et les services d’aide et d’accompagnement à domicile (Saad), afin de tenir compte de ce qui fonctionne bien dans les territoires – il faut être pragmatique !

Pour ce qui concerne l’hôpital, la diminution de la tarification à l’activité, la sécurisation de l’Établissement français du sang, l’augmentation des primes de nuit et de dimanche – comme en Ehpad – ainsi que des gardes des médecins vont tout à fait dans le bon sens.

La création de services de médecine polyvalente en aval des urgences est demandée pour désengorger celles-ci. Cela me semble également une nécessité, monsieur le ministre, tout comme, bien sûr, la renégociation avec les professionnels et l’augmentation des effectifs médicaux et paramédicaux.

Je signale également les problèmes qu’occasionne la fermeture de deux cent cinquante pharmacies par an en milieu rural.

J’avais également déposé un amendement d’appel tendant à renforcer les soins palliatifs dans chaque département, afin de pouvoir mieux prendre en charge les malades et leur famille à domicile, en Ehpad ou à l’hôpital. Je regrette qu’il ait été déclaré irrecevable.

Il en a malheureusement été de même de mon amendement permettant que les six derniers mois de la quatrième année d’internat puissent être effectués avec un médecin référent seulement – il n’y a pas de médecins maîtres de stage partout –, de ma proposition pour qu’un pharmacien d’officine puisse être pharmacien référent en Ehpad et de mon amendement relatif aux lits de pédopsychiatrie dans tous les départements, dont le manque représente une difficulté majeure pour les centres départementaux de l’enfance, qui se retrouvent à gérer des situations extrêmement difficiles, avec des enfants présentant des troubles du comportement.

Enfin, le retour à l’âge de départ à la retraite à 64 ans va permettre une évolution vers l’équilibre de la branche vieillesse dans les années 2032.

Comme le Sénat l’avait proposé, il est important d’adapter ce texte avec les partenaires sociaux pour tenir compte des carrières longues, de la pénibilité, de la maternité et de la revalorisation des petites pensions. Il faut aussi agir contre la fraude.

En conclusion, la sécurité sociale représente la colonne vertébrale de notre République et ce PLFSS propose des avancées indéniables, parmi lesquelles le rééquilibrage du budget par une meilleure maîtrise des dépenses et l’augmentation du nombre d’emplois cotisants grâce à la compétitivité des entreprises.

Comme vous l’avez indiqué, monsieur le ministre, si le taux de chômage était de 5 %, comme en Allemagne, il n’y aurait plus de déficit. Cela doit rester un objectif afin de ne pas mettre en péril notre système de protection sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, le PLFSS 2024 prévoit 641 milliards d’euros de dépenses et 630 milliards d’euros de recettes.

L’Ondam s’élève à 255 milliards d’euros, soit 50 milliards d’euros supplémentaires par rapport à 2019 : cela représente une augmentation de 3, 2 %, soit 8 milliards d’euros par rapport à 2023.

Malgré cette hausse importante, la situation risque d’être difficile pour les hôpitaux et pour le secteur médico-social, qui subissent de plein fouet l’inflation et qui doivent augmenter les salaires et réaliser des investissements.

Il en est de même, à mes yeux, de la prise en charge de la dépendance.

Néanmoins, ce texte contient plusieurs avancées, que nous encourageons : des mesures de lutte contre la fraude aux cotisations sociales ; la vaccination contre les papillomavirus humains ; la prise en charge des préservatifs et des protections périodiques ; la possibilité de délivrance, par les pharmaciens et après réalisation d’un test, de médicaments pour certaines cystites et les angines ; une simplification des démarches d’attribution de la C2S ; un meilleur repérage pour les enfants et de meilleures conditions d’accueil ; un dépistage accru ; la prise en charge à 100 % des fauteuils pour les personnes handicapées ; des bilans de prévention ; des mesures contre les pénuries de médicaments.

Sur ce dernier point, monsieur le ministre, il est absolument fondamental de trouver des solutions pour relocaliser la fabrication de médicaments en France et en Europe. Voilà vingt ans, l’Europe était le premier producteur et exportateur de médicaments.

Concernant la dépendance, sujet sur lequel j’interviendrai plus longuement, vous avez manifesté l’intention de créer 25 000 places en Ssiad d’ici à 2030.

En effet, le nombre de seniors de plus de 85 ans va doubler entre 2020 et 2040, et celui des personnes en perte d’autonomie va passer de 1, 4 million à 2 millions.

Si vous voulez voir le virage domiciliaire annoncé se réaliser – nous y sommes favorables –, c’est dès maintenant et d’ici à 2027 qu’il faut essayer de créer ces 25 000 places en Ssiad et en résidences autonomie.

Dans les Ehpad, vous prévoyez une diminution du taux d’institutionnalisation des personnes dépendantes – il passerait de 41 % à 37 % –, ce qui va entraîner une augmentation très importante de la dépendance globale, avec un GIR moyen pondéré (GMP) qui s’établira entre 750 et 800.

Nous avons voté la loi du 7 août 2020 créant une cinquième branche de la sécurité sociale, qui indique que la perte d’autonomie est un risque assuré par la Nation à chacun.

Les PLFSS pour 2022 et pour 2023 ont respectivement apporté 200 millions et 300 millions d’euros, ce qui fait, sur deux ans, 1, 2 emploi par Ehpad – il y en a 7 500.

Madame la ministre, messieurs les ministres, en 2025 et 2026, les annonces du Président de la République doivent être appliquées, même si je comprends les difficultés budgétaires.

L’objectif était de créer 50 000 emplois supplémentaires sur le quinquennat, dont 10 000 d’ici à 2024. Il est nécessaire d’en créer encore 20 000 en 2025 et autant en 2026. C’est le minimum indispensable ; d’après mes calculs, cela permettra cinq emplois supplémentaires en moyenne par Ehpad et d’augmenter ainsi de quinze minutes par jour le temps passé auprès de chaque résident. Nous devons avoir cette ambition.

Il me paraît également nécessaire que les sections « soins » et « dépendance » des budgets des Ehpad soient fusionnées, comme le propose l’article 37. Cependant, celui-ci ne prévoit cette fusion que sur la base du volontariat, ce qui pourra entraîner des disparités entre les départements et ne me semble pas conforme à l’esprit de la loi.

Il est aussi nécessaire, parallèlement, que les départements ne rétrocèdent pas à la CNSA l’intégralité de ce qu’ils perçoivent au titre des GIR 5 et 6. Il faut leur donner les moyens de renforcer le maintien à domicile.

J’ai déposé un amendement visant à revenir sur l’obligation de fusion prévue entre les Ssiad et les services d’aide et d’accompagnement à domicile (Saad), afin de tenir compte de ce qui fonctionne bien dans les territoires – il faut être pragmatique !

Pour ce qui concerne l’hôpital, la diminution de la tarification à l’activité, la sécurisation de l’Établissement français du sang, l’augmentation des primes de nuit et de dimanche – comme en Ehpad – ainsi que des gardes des médecins vont tout à fait dans le bon sens.

La création de services de médecine polyvalente en aval des urgences est demandée pour désengorger celles-ci. Cela me semble également une nécessité, monsieur le ministre, tout comme, bien sûr, la renégociation avec les professionnels et l’augmentation des effectifs médicaux et paramédicaux.

Je signale également les problèmes qu’occasionne la fermeture de deux cent cinquante pharmacies par an en milieu rural.

J’avais également déposé un amendement d’appel tendant à renforcer les soins palliatifs dans chaque département, afin de pouvoir mieux prendre en charge les malades et leur famille à domicile, en Ehpad ou à l’hôpital. Je regrette qu’il ait été déclaré irrecevable.

Il en a malheureusement été de même de mon amendement permettant que les six derniers mois de la quatrième année d’internat puissent être effectués avec un médecin référent seulement – il n’y a pas de médecins maîtres de stage partout –, de ma proposition pour qu’un pharmacien d’officine puisse être pharmacien référent en Ehpad et de mon amendement relatif aux lits de pédopsychiatrie dans tous les départements, dont le manque représente une difficulté majeure pour les centres départementaux de l’enfance, qui se retrouvent à gérer des situations extrêmement difficiles, avec des enfants présentant des troubles du comportement.

Enfin, le retour à l’âge de départ à la retraite à 64 ans va permettre une évolution vers l’équilibre de la branche vieillesse dans les années 2032.

Comme le Sénat l’avait proposé, il est important d’adapter ce texte avec les partenaires sociaux pour tenir compte des carrières longues, de la pénibilité, de la maternité et de la revalorisation des petites pensions. Il faut aussi agir contre la fraude.

En conclusion, la sécurité sociale représente la colonne vertébrale de notre République et ce PLFSS propose des avancées indéniables, parmi lesquelles le rééquilibrage du budget par une meilleure maîtrise des dépenses et l’augmentation du nombre d’emplois cotisants grâce à la compétitivité des entreprises.

Comme vous l’avez indiqué, monsieur le ministre, si le taux de chômage était de 5 %, comme en Allemagne, il n’y aurait plus de déficit. Cela doit rester un objectif afin de ne pas mettre en péril notre système de protection sociale.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave, ministre délégué

De très nombreuses questions relèvent de sujets financiers. Je vous propose, pour respecter votre demande, monsieur le président, d'y répondre lors de l'examen des tout premiers articles du texte. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La discussion générale est close.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.

La séance est suspendue.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Mathieu Darnaud .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, je citerai deux chiffres en exergue de mon propos : 509 milliards d’euros et 647 milliards d’euros. Ils correspondent respectivement aux dépenses réalisées en 2019 et à celles qui sont prévues en 2024 pour les régimes obligatoires de sécurité sociale, soit plus de 130 milliards d’euros de dépenses supplémentaires en cinq ans !

Durant ces années de crise sanitaire, nous avons déployé des moyens inédits pour protéger les Français, qu’il s’agisse de leur pouvoir d’achat ou de leur santé, « quoiqu’il en coûte ». Mais cette politique a bel et bien un coût, que je viens de rappeler brutalement.

Or « notre responsabilité est d’assurer la pérennité de notre modèle social », avez-vous indiqué, monsieur le ministre – vous avez raison. L’examen de ce PLFSS me laisse néanmoins perplexe.

Certes, ce texte traduit un effort d’amélioration des rémunérations des personnels de santé en établissement ou en ville et renforce les effectifs des Ehpad comme de l’aide à domicile. Nous saluons ces avancées, ainsi que votre volonté de mettre fin au tout T2A à l’hôpital et de lutter contre les pénuries de médicaments.

Le texte amorce également un virage encore un peu timide en faveur de la prévention. Ma collègue Jocelyne Guidez commentera plus précisément l’ensemble de ces mesures, qui sont nécessaires, mais qui n’effacent pas nos doutes quant à la soutenabilité à long terme du système.

Je m’attacherai, quant à moi, à vous proposer des solutions à la hauteur des déficits récurrents des branches maladie et vieillesse, plus ambitieuses, donc, que celles qui figurent dans ce projet de loi.

Concernant l’assurance maladie, vous comptez économiser 3, 5 milliards d’euros, notamment sur les médicaments et les produits de santé, les soins dentaires, la biologie et même les indemnités journalières, qui ont beaucoup progressé. Nous y sommes favorables, comme nous soutenons le principe de revenir sur certaines exonérations de cotisation pour les salaires compris entre 2, 5 et 3, 5 Smic.

Pour autant, le pilotage des comptes sociaux ne saurait se limiter à augmenter ou à réduire les dépenses.

Vous faites de la lutte contre la fraude sociale un chantier prioritaire – je m’en réjouis. Nous vous approuvons sur ce point, mais les objectifs que vous fixez me paraissent insuffisants.

Ainsi, pour l’assurance maladie, la fraude se situe entre 5 et 10 milliards d’euros, selon les estimations, d’ailleurs toujours incomplètes, de la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) – nous attendons impatiemment leur mise à jour. Avec 500 millions d’euros détectés, nous sommes très loin du compte.

En matière de cotisations et de contributions, la Cour des comptes estime le montant de la fraude entre 6 et 8 milliards d’euros ; votre objectif est d’atteindre 5 milliards d’euros d’ici à 2027.

Quant aux fraudes aux prestations familiales et vieillesse, les clichés ont la vie dure, mais elles sont les mieux connues et les mieux combattues.

Pour autant, la vigilance reste de mise, car les fraudeurs, aux méthodes de plus en plus sophistiquées, profitent souvent de nos outils lacunaires, ainsi que Nathalie Goulet l’a souvent démontré. N’oublions pas que la lutte contre la fraude sociale est un puissant levier de réduction des déficits.

Sur le même thème, il m’est difficile de ne pas évoquer l’indispensable travail à poursuivre sur la pertinence des soins. Il ne s’agit pas de nous lancer dans une chasse aux sorcières, mais l’OCDE évalue à 20 % – soit 50 milliards d’euros ! – le montant des dépenses d’assurance maladie concernant des actes inutiles ou redondants.

Nous bénéficions de ces actes en tant que patients, souvent en radiologie ou en biologie, mais ils n’en constituent pas moins des pratiques abusives et surtout délétères pour les comptes sociaux.

La contrainte et la fermeté ne semblent pas caractériser la démarche de votre gouvernement sur ce point : les guides de bonne pratique ne suffiront pas, sauf à s’appuyer réellement sur le dossier médical partagé (DMP), qu’il faut généraliser sans tarder.

Un mot également sur la trésorerie de l’Acoss – l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, devenue Urssaf Caisse nationale – laquelle, sans transfert vers la Cades de ses déficits cumulés, se trouverait en tension extrême. Or la Cades ne pouvant recevoir que 8, 8 milliards d’euros de dette supplémentaire, il convient de réviser son plafond, ainsi que le calendrier de remboursement.

Abordons la branche vieillesse. Vous avez tenté de récupérer 1 milliard d’euros à l’Agirc-Arrco au titre de la réforme ; à mon sens, votre méthode n’était pas la bonne.

Je vous suggère plutôt de négocier avec les partenaires sociaux un swap, d’un montant à déterminer, entre les cotisations des employeurs à la retraite complémentaire et leurs cotisations à la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav).

En outre, pourquoi ne pas confier aux partenaires sociaux, excellents gestionnaires d’une Agirc-Arrco aux 68 milliards d’euros de réserve, la gouvernance et la gestion de la Cnav ? Il s’agirait en quelque sorte d’un retour aux sources.

Avant de conclure, je souhaite vous alerter sur la cinquième branche. La trajectoire financière est bonne : nous sommes à mi-chemin, avec le transfert de 0, 15 point de CSG depuis la Cades, mais la quasi-totalité des Ehpad et tous les services autonomie à domicile (SAD) et Ssiad sont – vous le savez – au bord du gouffre.

À ce titre, le fonds de 100 millions d’euros est insuffisant, il en faut au moins cinq à dix fois plus, et immédiatement, madame la ministre.

Pour conclure, à l’instar du professeur Bizard et de quelques-uns de mes collègues, dont Alain Milon, je vous propose de mettre fin au double étage assurantiel. En passant à un assureur unique par prestation de santé ou pour l’ensemble des prestations, nous basculerions dans un modèle vertueux de maîtrise des dépenses de santé, nous permettant de réinjecter plusieurs milliards d’euros dans les caisses et d’améliorer ainsi la santé des Français. Cela reviendrait, au fond, à assurer la mission essentielle de la sécurité sociale !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, je citerai deux chiffres en exergue de mon propos : 509 milliards d’euros et 647 milliards d’euros. Ils correspondent respectivement aux dépenses réalisées en 2019 et à celles qui sont prévues en 2024 pour les régimes obligatoires de sécurité sociale, soit plus de 130 milliards d’euros de dépenses supplémentaires en cinq ans !

Durant ces années de crise sanitaire, nous avons déployé des moyens inédits pour protéger les Français, qu’il s’agisse de leur pouvoir d’achat ou de leur santé, « quoi qu’il en coûte ». Mais cette politique a bel et bien un coût, que je viens de rappeler brutalement.

Or « notre responsabilité est d’assurer la pérennité de notre modèle social », avez-vous indiqué, monsieur le ministre – vous avez raison. L’examen de ce PLFSS me laisse néanmoins perplexe.

Certes, ce texte traduit un effort d’amélioration des rémunérations des personnels de santé en établissement ou en ville et renforce les effectifs des Ehpad comme de l’aide à domicile. Nous saluons ces avancées, ainsi que votre volonté de mettre fin au tout T2A à l’hôpital et de lutter contre les pénuries de médicaments.

Le texte amorce également un virage encore un peu timide en faveur de la prévention. Ma collègue Jocelyne Guidez commentera plus précisément l’ensemble de ces mesures, qui sont nécessaires, mais qui n’effacent pas nos doutes quant à la soutenabilité à long terme du système.

Je m’attacherai, quant à moi, à vous proposer des solutions à la hauteur des déficits récurrents des branches maladie et vieillesse, plus ambitieuses, donc, que celles qui figurent dans ce projet de loi.

Concernant l’assurance maladie, vous comptez économiser 3, 5 milliards d’euros, notamment sur les médicaments et les produits de santé, les soins dentaires, la biologie et même les indemnités journalières, qui ont beaucoup progressé. Nous y sommes favorables, comme nous soutenons le principe de revenir sur certaines exonérations de cotisation pour les salaires compris entre 2, 5 et 3, 5 Smic.

Pour autant, le pilotage des comptes sociaux ne saurait se limiter à augmenter ou à réduire les dépenses.

Vous faites de la lutte contre la fraude sociale un chantier prioritaire – je m’en réjouis. Nous vous approuvons sur ce point, mais les objectifs que vous fixez me paraissent insuffisants.

Ainsi, pour l’assurance maladie, la fraude se situe entre 5 et 10 milliards d’euros, selon les estimations, d’ailleurs toujours incomplètes, de la Caisse nationale de l’assurance maladie – nous attendons impatiemment leur mise à jour. Avec 500 millions d’euros détectés, nous sommes très loin du compte.

En matière de cotisations et de contributions, la Cour des comptes estime le montant de la fraude entre 6 et 8 milliards d’euros ; votre objectif est d’atteindre 5 milliards d’euros d’ici à 2027.

Quant aux fraudes aux prestations familiales et vieillesse, les clichés ont la vie dure, mais elles sont les mieux connues et les mieux combattues.

Pour autant, la vigilance reste de mise, car les fraudeurs, aux méthodes de plus en plus sophistiquées, profitent souvent de nos outils lacunaires, ainsi que Nathalie Goulet l’a souvent démontré. N’oublions pas que la lutte contre la fraude sociale est un puissant levier de réduction des déficits.

Sur le même thème, il m’est difficile de ne pas évoquer l’indispensable travail à poursuivre sur la pertinence des soins. Il ne s’agit pas de nous lancer dans une chasse aux sorcières, mais l’OCDE évalue à 20 % – soit 50 milliards d’euros ! – le montant des dépenses d’assurance maladie concernant des actes inutiles ou redondants.

Nous bénéficions de ces actes en tant que patients, souvent en radiologie ou en biologie, mais ils n’en constituent pas moins des pratiques abusives et surtout délétères pour les comptes sociaux.

La contrainte et la fermeté ne semblent pas caractériser la démarche de votre gouvernement sur ce point : les guides de bonne pratique ne suffiront pas, sauf à s’appuyer réellement sur le dossier médical partagé (DMP), qu’il faut généraliser sans tarder.

Un mot également sur la trésorerie de l’Acoss – l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, devenue Urssaf Caisse nationale – laquelle, sans transfert vers la Cades de ses déficits cumulés, se trouverait en tension extrême. Or la Cades ne pouvant recevoir que 8, 8 milliards d’euros de dette supplémentaire, il convient de réviser son plafond, ainsi que le calendrier de remboursement.

Abordons la branche vieillesse. Vous avez tenté de récupérer 1 milliard d’euros à l’Agirc-Arrco au titre de la réforme ; à mon sens, votre méthode n’était pas la bonne.

Je vous suggère plutôt de négocier avec les partenaires sociaux un swap, d’un montant à déterminer, entre les cotisations des employeurs à la retraite complémentaire et leurs cotisations à la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav).

En outre, pourquoi ne pas confier aux partenaires sociaux, excellents gestionnaires d’une Agirc-Arrco aux 68 milliards d’euros de réserve, la gouvernance et la gestion de la Cnav ? Il s’agirait en quelque sorte d’un retour aux sources.

Avant de conclure, je souhaite vous alerter sur la cinquième branche. La trajectoire financière est bonne : nous sommes à mi-chemin, avec le transfert de 0, 15 point de CSG depuis la Cades, mais la quasi-totalité des Ehpad et tous les services autonomie à domicile (SAD) et Ssiad sont – vous le savez – au bord du gouffre.

À ce titre, le fonds de 100 millions d’euros est insuffisant, il en faut au moins cinq à dix fois plus, et immédiatement, madame la ministre.

Pour conclure, à l’instar du professeur Bizard et de quelques-uns de mes collègues, dont Alain Milon, je vous propose de mettre fin au double étage assurantiel. En passant à un assureur unique par prestation de santé ou pour l’ensemble des prestations, nous basculerions dans un modèle vertueux de maîtrise des dépenses de santé, nous permettant de réinjecter plusieurs milliards d’euros dans les caisses et d’améliorer ainsi la santé des Français. Cela reviendrait, au fond, à assurer la mission essentielle de la sécurité sociale !

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Iacovelli

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce PLFSS est un texte de responsabilité, si l’on considère les engagements pris en matière de prévention en santé et d’accès aux soins, comme l’a rappelé ma collègue Solanges Nadille.

En effet, pour 2024, le choix de l’efficience a été fait et ce budget apporte des réponses concrètes pour consolider notre système de santé, tout en assurant un équilibre financier pérenne.

Comme les précédents, ce budget 2024 prévoit également des moyens importants en matière de solidarité, notamment en soutien à notre politique familiale. L’objectif de dépenses de la branche famille est ainsi fixé à 58 milliards d’euros, en hausse de 2, 7 milliards par rapport à 2023.

Ces moyens significatifs doivent nous permettre de financer les mesures et les travaux engagés au cours des dernières années : le chantier des mille premiers jours de l’enfant, l’allongement du congé paternité, la réforme du complément de mode de garde, le soutien aux familles monoparentales et la revalorisation de l’allocation de soutien familial (ASF).

Ainsi, les fonds alloués à la politique familiale augmenteront en 2024, notamment pour lancer le chantier du service public de la petite enfance, auquel 6 milliards d’euros seront consacrés jusqu’en 2027, de manière à garantir à tout parent l’accès à une solution d’accueil sûre, de qualité, géographiquement proche et financièrement accessible pour son enfant, en crèche ou auprès d’une assistante maternelle.

L’objectif est donc à la fois de revaloriser les professionnels de la petite enfance et de soutenir l’investissement dans les crèches, d’assurer leur fonctionnement et d’engager la dynamique d’ouverture des 200 000 solutions d’accueil manquantes, en accueil collectif comme individuel.

Citons également la réforme du congé parental, qui nous tient particulièrement à cœur, madame la ministre.

Autant d’avancées que nous sommes fiers de soutenir, aux côtés du Gouvernement.

Nous saluons aussi la traduction dans ce PLFSS des engagements pris en matière de handicap, en particulier ceux que le Président de la République a annoncés lors de la dernière Conférence nationale du handicap, notamment le déploiement de 50 000 solutions d’accompagnement.

J’ai aussi à l’esprit les enfants en situation de handicap placés à l’aide sociale à l’enfance, auxquels nous devons garantir une prise en charge adaptée.

Les dix mille adultes qui sont actuellement maintenus dans des établissements pour enfants grâce à l’amendement Creton doivent pouvoir en sortir – il y va de leur dignité et de leur autonomie.

C’est pourquoi nous devrons trouver des solutions avec les départements afin de respecter la volonté des adultes en situation de handicap et de leurs familles et ainsi de libérer près de 15 % des places existantes dans les instituts médico-éducatifs (IME).

Enfin notre groupe portera un certain nombre d’amendements pour nos concitoyens et pour nos territoires. En particulier, nous souhaitons soutenir nos compatriotes ultramarins par une véritable politique de la famille et de soutien à la parentalité. La forte prévalence outre-mer de familles monoparentales et en situation de précarité doit nous interpeller collectivement.

Pour ce qui concerne les pensions de réversion, nous porterons l’extension de leur bénéfice aux couples pacsés ; plus largement, nous entendons lancer une réflexion afin de prendre en compte la diversité des unions dans notre pays.

La question de la réversion des pensions pour les adultes orphelins et handicapés est tout aussi importante pour leur autonomie une fois leurs parents disparus. Nous défendrons des amendements en ce sens.

Enfin, pour lutter contre le surpoids, l’obésité et les maladies associées, notamment chez les enfants, nous porterons un certain nombre d’amendements contre les produits transformés issus de l’industrie agroalimentaire, mais aussi visant à limiter le taux de sucre, qui empoissonne nos enfants et suscite des dépenses supplémentaires pour l’assurance maladie.

Le groupe RDPI soutiendra pleinement les mesures et l’orientation de ce budget, auquel le débat parlementaire apportera son lot d’avancées positives pour nos compatriotes.

Il s’agit d’un budget sérieux, qui répond au double objectif de réduction du déficit et de protection des Français ; d’un budget ambitieux, qui apporte des réponses concrètes aux familles et aux personnes en situation de handicap ; d’un budget, enfin, de justice sociale, qui finance des progrès nouveaux et fait le choix de renforcer le volet prévention de notre système de santé.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Feret

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, je souhaite me faire le porte-voix des élus, des maires en premier chef, qui, partout, et pas seulement dans mon département du Calvados, tirent la sonnette d’alarme et exhortent le Gouvernement à agir pour sauver leurs Ehpad.

Ils demandent, comme nous, en vain, PLFSS après PLFSS, des financements pérennes à la hauteur des besoins, alors que le vote d’une loi grand âge, annoncé depuis 2018, est sans cesse repoussé.

Ce n’est certainement pas la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France qui permettra de faire face à l’ensemble des conséquences du vieillissement de nos concitoyens, aux questions liées à la perte d’autonomie, à la dépendance, mais aussi au manque d’attractivité des métiers du secteur social et médico-social.

Il s’agit pourtant d’un véritable enjeu de société, d’un défi que nous devons relever dès aujourd’hui et non demain. Quand allez-vous prendre la mesure du constat d’urgence que dressent les responsables des Ehpad et des Saad partout en France ? Comprenez-vous que l’annonce, cet été, d’un soutien de 100 millions d’euros pour soulager les structures est en totale déconnexion avec la réalité des besoins ?

Les Français aspirent légitimement à bien vieillir chez eux. Pour ce faire, le Gouvernement affirme déployer un « virage domiciliaire ». Pourtant, nous connaissons tous ici la réalité en la matière : les associations d’aide à domicile sont en souffrance, contraintes de refuser des prises en charge par manque de personnel.

Durant sa dernière campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait fait la promesse de créer 50 000 postes supplémentaires en Ehpad en cinq ans, alors que la FHF estimait les besoins à au moins 100 000.

Le PLFSS de l’an dernier, au lieu de créer 10 000 postes, comme on pouvait légitimement s’y attendre, n’en avait budgété que 3 000 ; cette année, vous n’en prévoyez que 6 000, ce qui n’est certainement pas de nature à améliorer les conditions d’accompagnement de nos aînés.

Nouveau rebondissement : la Première ministre ne parle plus de l’échéance de 2027, mais évoque 50 000 postes en 2030. Il n’est pas sérieux de repousser la réalisation de cette promesse présidentielle, au risque d’apporter une énième preuve de l’engagement insuffisant de ce gouvernement sur le grand âge.

Que de temps perdu depuis 2020 et la création officielle de la cinquième branche de la sécurité sociale, relative à l’autonomie ! Vous aurez beau faire valoir que celle-ci est excédentaire, personne n’est dupe de la réalité de la situation et de l’urgence qu’il y a à agir.

Déjà, en 2019, année de remise du rapport Libault, il était préconisé d’augmenter l’effort en faveur du grand âge de 9 milliards d’euros par an. Nous en sommes loin !

Pour ce qui concerne la branche accidents du travail et maladies professionnelles, les choses ne peuvent pas bien se passer : vous encouragez l’ubérisation du travail, la sous-protection sociale et les sous-revenus associés ; vous reportez à 64 ans l’âge de départ à la retraite de travailleurs usés, qui aspirent légitimement au repos ; et vous refusez de réintégrer les quatre critères de pénibilité que vous avez supprimés.

Les seules mesures que prévoit votre budget visent à traquer les arrêts maladie, à traiter les malades comme des fraudeurs et les médecins comme des complices. C’est dire !

Je conclurai en évoquant la branche famille, pour rappeler que les chiffres de la natalité publiés par l’Insee en septembre dernier sont alarmants. Seul un renforcement significatif des moyens alloués à la politique familiale permettra d’inverser la dynamique déclinante de la démocratie française.

L’ouverture d’au moins 200 000 places en crèche est toujours nécessaire, alors que des milliers de foyers voient leur désir de parentalité menacé par le manque de solutions de garde.

En somme, ce budget de la sécurité sociale n’est pas à la hauteur des enjeux et des décisions que nous devrions prendre sans attendre davantage. Répondre aux besoins des assurés sociaux, des patients et des ayants droit, voilà ce qui manque cruellement dans ce PLFSS !

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Florence Lassarade

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, adopté grâce à l’article 49.3 à l’Assemblée nationale, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 prévoit plus de 640 milliards d’euros de dépenses, soit une hausse de 30 milliards d’euros par rapport à 2023. Cela donne le vertige !

Il fixe un Ondam à 254, 9 milliards d’euros, soit une hausse de 3, 2 % par rapport à 2023, alors que l’inflation sera à près de 5 %. Cette trajectoire peu crédible ainsi qu’une couverture lacunaire du contexte inflationniste ont conduit la commission des affaires sociales à rejeter l’Ondam pour 2024.

Il est regrettable de constater que ce texte abandonne tout objectif de retour à l’équilibre des régimes obligatoires de base.

Avec un Ondam à plus de 250 milliards d’euros, les Français sont en droit d’attendre un système de santé plus performant. La hausse des dépenses en 2024 concernera essentiellement le secteur hospitalier. Pourtant, l’Ondam ne permettra pas de répondre à la crise de l’hôpital public ni à celle des Ehpad.

Autre constat : un Ondam de plus de 250 milliards d’euros ne suffit pas à enrayer la dégradation de certains indicateurs de santé.

Ainsi, la mortalité infantile progresse en France depuis une dizaine d’années, alors qu’elle continue de diminuer en Europe. Ce taux devrait être une priorité du Gouvernement. Un certain nombre de solutions ont été mises en place dans les pays d’Europe du Nord, notamment une augmentation des effectifs dans les maternités.

Lors de votre audition par la commission des affaires sociales, vous avez parlé, monsieur le ministre, d’un « virage structurel de la prévention ». Pour autant on ne distingue pas un tel mouvement dans ce texte. Je salue néanmoins quelques mesures : lancement d’une campagne de vaccination contre le papillomavirus ou gratuité des préservatifs pour les assurés de moins de 26 ans. Cependant, rien de tout cela n’est « structurel », pour reprendre votre terme.

Monsieur le ministre, le compte n’y est pas ; ce PLFSS est très insuffisant, il manque d’une véritable ambition.

Ensuite, je suis réservée quant à l’intégration de certains dispositifs de contrôle, qui pourraient s’avérer pénalisants pour les malades du cancer. Pour lutter contre la fraude, par exemple, l’article 27 entend réguler les dépenses en matière d’indemnités journalières pour maladie. Je souhaite attirer votre attention sur deux difficultés quant à l’application de cette mesure.

Tout d’abord, les médecins libéraux considèrent que la suspension automatique des indemnités journalières après contre-visite médicale des médecins contrôleurs est une remise en cause de leur compétence de prescription ; ensuite, avec le dispositif que vous proposez, comment pourra-t-on préserver les personnes atteintes de cancer d’une potentielle instrumentalisation de cette procédure par leur employeur ?

De même, l’article 28 vise à limiter à trois jours la durée des arrêts de travail prescrits en téléconsultation. C’est une mesure bienvenue, compte tenu des abus avérés. Toutefois, cela risque de creuser les inégalités pour les personnes atteintes de cancer dans les zones sous-dotées en médecins généralistes. Comment imposer un déplacement à une personne en plein traitement dont les effets secondaires peuvent être sévères ? Nous proposerons des amendements pour corriger ces injustices.

Enfin, les médecins libéraux ne se retrouvent pas dans ce PLFSS. Sans eux, pourtant, comment envisager le virage ambulatoire et le virage domiciliaire ?

Last but not least, les économies prévues permettront-elles enfin d’envisager une hausse du prix de la consultation ?

Le vieillissement de la population, la prise en charge des maladies chroniques, les progrès de la médecine et la mise en place du « virage structurel de la prévention », que vous appelez de vos vœux, nécessitent des réformes ambitieuses et une plus grande rigueur.

Ce PLFSS se fonde sur des prévisions économiques particulièrement optimistes et la commission des affaires sociales du Sénat propose de le revoir largement. Nous allons en débattre et l’améliorer, mais dans le cadre de nos prérogatives, qui restent limitées.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jocelyne Guidez

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 qui nous est soumis repose sur des prévisions qui manquent cruellement d’ambition en matière de stabilisation du déficit.

Après l’amélioration résultant de la fin de la crise sanitaire, la forte inflation de 2023 suscite une forte revalorisation des dépenses. Nous ne sommes qu’au début d’une période d’aggravation du déficit.

Cette trajectoire financière inquiétante reste un sujet préoccupant pour l’avenir et les futures générations. Comme vous le savez, mes chers collègues, un hypothétique redressement de cette situation n’est pas concevable sans des choix difficiles en matière de recettes comme de dépenses.

Prendre des décisions importantes fait peur. Cependant, on pourrait regretter de ne pas les avoir prises. Paulo Coelho écrit ainsi : « Attendre fait mal. Oublier fait mal. Mais ne pas savoir quelle décision prendre est la pire des souffrances. »

Nous tenons à saluer le choix des mesures d’économie budgétaire et de régulation des dépenses, enrichies sensiblement par la commission, telles que l’incitation au transport sanitaire partagé, si l’état de santé des patients le permet, ou encore le contrôle des prestations d’arrêts de travail.

Ainsi, la durée d’un arrêt de travail prescrit ou renouvelé par téléconsultation sera limitée à trois jours – une mesure bienvenue, compte tenu des abus avérés. Le groupe Union Centriste vous proposera également un amendement visant à mieux encadrer les plateformes de téléconsultation.

Cette année encore, le PLFSS n’apporte pas de réponse appropriée aux défis posés à notre système de santé. Les mesures relatives à la politique de santé nous semblent être d’une portée très limitée.

Ainsi, au-delà de quelques dispositions concernant le médicament ou la prévention, le texte prétend porter une réforme du financement de l’hôpital qui n’est finalement qu’un trompe-l’œil et qui ne retouche qu’à la marge l’organisation des soins.

Il est pourtant indispensable que les hôpitaux s’engagent sereinement dans une réforme structurelle, selon une ligne claire et avec des ressources sécurisées afin de rééquilibrer les modes de financement.

C’est pourquoi la commission a prévu un report de cette réforme au 1er janvier 2028, au terme d’une expérimentation préalable permettant d’affiner le modèle cible et ainsi améliorer effectivement l’offre de soins.

Nous sommes favorables à la délivrance gratuite en pharmacie de préservatifs pour les moins de 26 ans sans prescription médicale ; il s’agit d’une avancée certaine en matière de prévention des infections sexuellement transmissibles et de grossesses non désirées.

Cependant, on peut regretter que, du fait de l’article 40 de la Constitution, l’amendement du groupe Union Centriste visant à élargir ce dispositif aux personnes handicapées ait été considéré comme irrecevable. La sexualité fait partie intégrante d’un projet de vie et constitue un droit fondamental de la personne en situation de handicap, qui lui permet de nouer des liens sociaux et affectifs et de cultiver l’estime de soi.

En outre, le remboursement intégral des fauteuils roulants dès 2024 est d’une portée incertaine, puisque les conditions d’application de cette mesure sont suspendues aux négociations à venir. J’ai été interpellée par les associations à ce sujet.

Le texte comprend aussi une disposition visant à lutter contre le harcèlement scolaire. Les professionnels de santé des établissements scolaires sont ainsi désormais autorisés à orienter des élèves vers les psychologues du dispositif #MonSoutienPsy.

Concernant la branche vieillesse, la réforme des retraites a permis de réduire d’un tiers son déficit à l’horizon de 2027 ; cependant, elle ne suffit pas à en redresser la trajectoire financière. On estime que la dégradation sera rapide à compter de 2024, avec un déficit prévisionnel de l’ordre de 11 milliards d’euros en 2027. Une telle situation nécessiterait des efforts supplémentaires difficilement acceptables par les Français.

Face à cette réalité indéniable, nous saluons des mesures de bon sens visant à assurer la justice et l’équité du système de retraite. Ainsi, le contrôle biométrique de l’existence des retraités résidant à l’étranger deviendrait obligatoire à compter de 2027, une décision nécessaire pour lutter contre la fraude aux pensions de retraite à l’étranger.

En l’absence d’une politique familiale forte et ambitieuse, nous regrettons vivement que le solde excédentaire de cette branche soit consommé sans que les réformes indispensables soient mises en œuvre. Le contexte de chute inquiétante de la natalité rend nécessaire une prise de conscience collective.

S’agissant de la branche autonomie, ce PLFSS semble marquer un tournant en matière de financement des Ehpad, en amorçant la fusion des sections « soins » et « dépendances ». Ce régime pérenne, qui donne naissance à la nouvelle section « soins et entretiens de l’autonomie », serait toutefois optionnel pour les départements, ce qui pourrait aggraver les disparités territoriales.

Par conséquent, nous soutenons une proposition de la commission consistant à transformer le régime adapté de financement en une expérimentation d’une durée de trois ans, à laquelle pourraient participer dix départements.

Il nous semble aussi nécessaire de clarifier les relations financières entre la CNSA et les départements afin d’en améliorer la lisibilité et la transparence.

Force est de constater que les moyens ne sont pas au rendez-vous pour le virage domiciliaire et que la situation financière des Ehpad reste alarmante. Les raisons en sont multiples : problèmes structurels de gouvernance et de recrutement, hausse des prix et des rémunérations… S’il est bienvenu, le fonds d’urgence de 100 millions d’euros prévu par l’article 3 n’est malheureusement pas à la hauteur des besoins dans le contexte de vieillissement de la population.

Enfin, nous sommes heureux de la création d’un service de repérage, de diagnostic et d’intervention précoce. Il s’agit d’une avancée majeure pour les enfants de moins de 6 ans présentant un handicap, en particulier un trouble du neurodéveloppement.

Si nous saluons cette mesure de prévention, nous nous interrogeons sur l’articulation de ce service avec les outils déjà déployés, à savoir les plateformes de coordination et d’orientation (PCO) ou le forfait d’intervention précoce.

À ce jour, nous n’avons d’ailleurs pas obtenu de réponse à nos interrogations sur la situation préoccupante des adultes. La moindre des choses serait d’inscrire dans la loi la limite d’âge de 12 ans.

Nous apprécions aussi le renouvellement de la durée des droits à l’allocation journalière du proche aidant dans la limite d’un an pour des cas de figure précis, et nous proposons un amendement visant à pérenniser des mesures en faveur du répit des aidants.

Le groupe Union Centriste soutiendra ce texte, à condition qu’il soit amélioré par un certain nombre d’amendements.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Lubin

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce que contient le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 sur la question des retraites ne laisse pas de m’interpeller. Le Gouvernement y fait la démonstration que sa politique en la matière relève d’une navigation à vue.

Nous sommes préoccupés par la volonté de l’exécutif de voir la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav) devenir comptable de son propre équilibre, après avoir absorbé les déficits des régimes spéciaux.

Il semble en effet que la question de la pérennité de la prise en charge par l’État des compensations relatives aux régimes spéciaux se pose. L’article 9 du présent projet de loi prévoit de fait que le régime général se substitue à l’État pour équilibrer en dernier ressort les régimes fermés.

Une clé de TVA serait prévue afin de compenser le coût de cette prise en charge ; elle serait calculée à partir des crédits actuels de la mission « Régimes sociaux et de retraite ». Il nous semble que cela dessine un avenir particulièrement flou pour la Cnav.

Nous sommes par ailleurs totalement opposés à la volonté de l’État de puiser dans les réserves de l’Agirc-Arrco. Cette dernière a constitué ses réserves par sa bonne gestion dans le cadre d’un paritarisme rigoureux. Cela a exigé de la part de ses bénéficiaires des efforts sensibles, qui ne sauraient être sanctionnés par une ponction décidée unilatéralement par le Gouvernement.

Concernant les résultats des régimes de retraite sur lesquels j’aurai l’occasion de revenir lorsque nous étudierons l’article ad hoc, je souhaite tout d’abord faire un rappel, peut-être évident, mais néanmoins utile. Le PLFSS, par essence, n’englobe pas les retraites complémentaires ; je le précise dans le cas où certains seraient tentés de procéder à des comparaisons hasardeuses.

On continue de lancer à la figure des citoyens des milliards d’euros qui finissent par ne plus avoir beaucoup de sens, qui plus est à des échéances variables – 2027 ou 2030…

À regarder ces chiffres de près, les régimes obligatoires de base afficheraient des déficits de 14 milliards à 17 milliards d’euros en 2027 et la réforme ferait économiser 7 milliards d’euros d’ici à 2027, soit dans quatre ans. Il resterait donc encore 14 milliards d’euros de déficit, ou 17 milliards d’euros selon les prévisions, et cela sans les excédents des caisses complémentaires – je le précise de nouveau. Nous serions donc très loin des équilibres annoncés par la réforme.

Pourquoi ne pas décider, une fois pour toutes, de la part du PIB que nous consacrerions aux retraites afin de rendre le débat plus clair ? Cela nous permettrait d’assumer les excédents, ce qui est bien évidemment facile, et les déficits.

En tout état de cause, il nous revient de nous accorder sur des étalons de mesure à même de permettre aux citoyens de comprendre et de se positionner dans ce débat. Nous devons aussi trouver ensemble, avec les partenaires sociaux, les moyens de permettre à notre système de retraite de surmonter les conséquences d’une situation économique ou démographique dégradée qui pourrait se faire jour.

La protection de notre système de retraite mérite mieux que des réformes poussées par des intérêts soumis aux aléas de la politique politicienne. Si des efforts devaient être faits, ils ne doivent pas être toujours portés par les mêmes !

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à M. Khalifé Khalifé.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Khalifé KHALIFÉ

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, quand on est empreint d’optimisme, il est particulièrement décevant de commencer un mandat de sénateur en examinant, après la chétive proposition de loi Valletoux visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels, un PLFSS qui a depuis longtemps renoncé à sa vocation de 1996.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 est le premier texte budgétaire qu’il m’est donné d’examiner. Le professionnel de santé que je suis ne peut cacher son insatisfaction face à un texte qui ne provoque pas le déclic qui permettrait à nos professionnels de sortir du doute et à nos concitoyens du désarroi. L’exercice n’est pas facile, monsieur le ministre, je vous le concède d’emblée.

Sur l’aspect financier, comment considérer ce PLFSS comme un texte budgétaire, alors qu’il est marqué par l’absence d’une trajectoire claire et – plus inquiétant encore – par un certain flou dans sa construction, ainsi que par des incertitudes sur les prévisions pour 2027 ?

Alors que l’inflation reste forte et que son impact n’avait pas suffisamment été pris en compte l’année dernière, le projet 2024 ne couvre pas non plus l’ensemble des coûts.

Certes, la progression de l’Ondam de 3, 2 % est apparemment une bonne chose. Mais l’annonce de 3, 7 milliards d’euros d’économies, malgré les mesures prévues, laisse planer un doute sur la sincérité des comptes – j’espère me tromper, monsieur le ministre.

Malgré un énorme budget de 250 milliards d’euros consacré à la santé, pourquoi ce texte n’apporte-t-il pas de réponse aux interrogations des usagers et aux craintes des professionnels ?

Quels sont les objectifs de ce projet ? À l’image de la proposition de loi Valletoux, ce texte souffre d’un manque cruel d’ambitions structurelles et certaines des dispositions proposées manquent de pertinence. Je prendrai pour exemple l’article 24 : quel est l’intérêt de mobiliser les chirurgiens-dentistes pour assurer la régulation au centre 15 des soins dentaires, alors qu’une expertise en psychiatrie, voire en pédiatrie, serait bien plus nécessaire ?

Au-delà de l’aspect purement financier, ce texte doit tirer les leçons des constats d’hier et des vécus d’aujourd’hui, en évitant d’ajouter des couches à un millefeuille déjà bien épais.

L’absence chronique de mesures concrètes contribue largement au déficit et favorise aujourd’hui la financiarisation de la médecine, mouvement que nous déplorons tous.

Madame la ministre, messieurs les ministres, je caresse l’espoir que des amendements proposés par le Sénat puissent être adoptés, comme cela fut le cas lors de l’examen de la proposition de loi Valletoux.

En ce qui concerne l’innovation et la prospective, ce PLFSS, comme l’exige tout projet dit futuriste, consacre quelques mesures utiles, tel le recours aux expérimentations de l’article 51. Mais ces dispositions sont insuffisantes.

La prévention, malgré des propositions que nous saluons, reste le parent pauvre de la politique de santé.

Par ailleurs, quelle est la place de l’innovation dans ce texte ? Alors que le rapport commandé par Mme la Première ministre est paru au mois d’août, ce PLFSS ne semble pas en tenir clairement compte, en particulier concernant les produits innovants. Enfin, qu’en est-il de la réinternalisation de la production des produits pharmaceutiques ?

Pour conclure, il est de notre responsabilité collective – nous en prendrons notre part, monsieur le ministre – de mettre fin à cette fuite en avant. Plus que jamais, une réforme structurelle pour une maîtrise médicalisée, et non pas seulement comptable, de nos dépenses de soins est nécessaire pour redonner confiance aux usagers et aux professionnels.

Cette réforme passera par trois points : optimiser et sécuriser le parcours des patients ; évaluer les pratiques professionnelles et la pertinence des soins ; et surtout, tout faire pour assurer une diminution des surcoûts liés à la non-qualité.

Madame la ministre, messieurs les ministres, comme tout professionnel de santé en responsabilité, j’ai longtemps observé avec beaucoup d’admiration la construction des PLFSS. Je l’imaginais, malgré sa complexité, les interventions et les lobbys, comme un document rigoureux, un pilote traçant la trajectoire de notre système de santé. Force est de constater que nous sommes malheureusement loin d’une telle réalité, et ma déception est à la hauteur de mes attentes.

Permettez-moi de terminer par une note d’espoir, à la suite de vos déclarations respectives de cet après-midi. Si je suis tenté d’y croire, la réalisation de ces mesures nécessitera une volonté sans faille.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Do AESCHLIMANN

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 intervient dans un contexte de crises multidimensionnelles paroxystiques, qui a envahi l’entier périmètre des comptes sociaux de la France.

Comment ne pas entendre la détresse des malades et le désarroi de nos soignants ? Comment ne pas voir la précarité qui fragilise et fragmente les familles ? Comment ne pas sentir les souffrances de nos aînés, isolés, démunis ou en perte d’autonomie ?

Face à ces crises, les Français exigent des réponses, ils attendent des solutions. Or, à cet égard, il existe à ce stade un grand écart entre les discours volontaristes du Gouvernement et les actes budgétaires.

La branche famille en fournit un exemple flagrant, avec un projet de budget 2024 quasiment blanc, sans vraie mesure pour remédier aux difficultés éprouvées. Pourtant, il y a urgence. La natalité est en baisse constante depuis dix ans, et 2023 pourrait être la pire année depuis 1945, avec moins de 700 000 naissances.

Madame la ministre Aurore Bergé, vous déclariez récemment que la relance de la natalité est la priorité absolue de votre ministère. Vos mots sont forts et nous avons très envie de vous croire. Toutefois, ils ne trouvent aucun écho dans cette proposition budgétaire, qui enjambe 2024 pour un grand nombre de mesures.

S’agissant de l’offre de garde, le service public de la petite enfance est en gestation. Il est prévu de le faire porter par les communes, qui sont déjà asphyxiées financièrement et confrontées à la pénurie de personnel qualifié.

La réalité, aujourd’hui, c’est que les communes ferment des sections et réduisent l’amplitude horaire des crèches pour respecter les taux d’encadrement. Nous saluons les assouplissements apportés au complément de libre choix du mode de garde, mais nous regrettons que les 93 000 familles concernées doivent attendre 2026 pour obtenir le tiers payant, qui était déjà promis dans le budget pour 2019.

Enfin, à l’heure où diverses études montrent que le désir d’enfant est élevé, le décrochage de la natalité interpelle. Au fond, si les Françaises et les Français ont moins d’enfants, ce n’est pas par choix, mais du fait d’une appréhension légitime de l’avenir et d’une politique familiale qui échoue à les rassurer et les soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Do AESCHLIMANN

La réforme du congé parental est une autre illustration de l’écart entre vos discours et vos actes. L’heure n’est plus à un énième rapport, comme le suggère l’article 46 quater, dont la finalité, on peut l’imaginer, est de gagner du temps. Au fond, tout est déjà sur la table ! C’est pourquoi j’ai déposé un amendement visant à annuler la commande de ce rapport.

Il est grand temps de revenir sur les funestes réformes de François Hollande qui a réduit la politique familiale à une politique sociale. Il est urgent de rompre avec cet héritage, qui a démantelé la politique familiale et causé l’effondrement des naissances en France.

Vives protestations sur les travées du groupe SER. – Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Do AESCHLIMANN

Ne vous en déplaise, mes chers collègues, c’est bien le cas ! §La demande de la droite sénatoriale est claire : ayons le courage de renouer avec les recettes qui ont fait le succès de la natalité française.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Do AESCHLIMANN

Mme Marie-Do Aeschlimann. Rétablissons au plus vite l’universalité des allocations familiales, pour toutes les familles, dès le premier enfant. Réindexons les prestations sur l’inflation, dès le mois de janvier 2024. Déplafonnons le quotient familial.

Exclamations sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Do AESCHLIMANN

Laissons aussi aux familles la liberté de prévoir ce qui est le plus adapté à leur vie professionnelle et à leur projet parental.

Telles sont les mesures de soutien que les familles attendent. Madame la ministre, j’ai entendu et apprécié votre intervention dans le cadre de votre audition par la commission des affaires sociales. Je le sais, vous partagez, au fond, ces convictions.

Marques d ’ ironies sur les travées des groupes SER et CRCE-K.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Do AESCHLIMANN

(Brouhaha sur les travées du groupe SER.) Saisissez la main tendue ! Soyez fidèle à cette belle promesse d’avenir qu’est la famille.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Do AESCHLIMANN

Des amendements ont été déposés par la majorité sénatoriale pour que ce budget ne soit pas un rendez-vous manqué. §

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Burgoa

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous y sommes : en cette fin d’année est venu le temps d’échanger sur les différents budgets pour 2024. Ces débats sont toujours très attendus, tant il s’agit là du nerf de la guerre.

Chacun se présente à nous, parlementaires, et à vous, membres du Gouvernement, avec sa liste de doléances.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Burgoa

Il s’agit alors de ne jamais perdre de vue l’intérêt général ; il y va de la crédibilité de notre institution.

En effet, comment pourrions-nous, au moment de l’examen des budgets, suggérer toujours plus de dépenses pour tel et tel secteur et, ensuite, durant le reste de l’année, réclamer plus d’économies ?

Présenter un budget, ce n’est pas simplement administrer : c’est prioriser, renoncer, abonder ; en un mot, c’est gouverner.

Il s’agit d’ajuster notre budget à nos différents besoins ou plutôt, en l’occurrence, à nos urgences. Plus encore, il s’agit, j’en formule le vœu, d’être capable de retrouver une certaine liberté d’action. Car c’est de cela que nous parlons : de notre capacité à agir, à changer le quotidien des Français et à les protéger.

En déplacement dans le Gard, lors de mon premier mandat, un élu m’avait dit : « Monsieur le sénateur, nous ne manquons pas de têtes, nous manquons de bras. »

Aujourd’hui, je le constate moi-même : des études, des rapports, des commissions, nous en avons, et de qualité. Il reste à les mettre en œuvre ! Je redoute le jour où nos discussions seront aussi caricaturales qu’à l’Assemblée nationale. En effet, dans tous nos départements, quelles que soient nos sensibilités politiques, nous faisons les mêmes constats.

Tout comme nos concitoyens réfléchissent parfois à deux fois avant de se rendre au commissariat, de peur de s’engager dans une procédure trop longue qui ne les empêchera pas de croiser leur agresseur, ils réfléchissent également à deux fois avant de prendre un rendez-vous médical qui, ils le savent, sera souvent fixé des mois plus tard et à plusieurs dizaines de kilomètres.

Dans certains quartiers de France, nos concitoyens pensent à mettre leurs enfants dans un établissement privé, non pas pour une quelconque éducation religieuse ni même pour une qualité prétendument supérieure, mais simplement – rendez-vous compte ! – pour la garantie d’une plus grande sécurité.

De la même manière, certains de nos concitoyens ne se tournent plus vers l’hôpital public, mais s’adressent directement au secteur privé ou associatif. C’est notre contrat républicain qui est ainsi rongé.

Pourtant, la France demeure l’un des pays dans lesquels les prélèvements obligatoires sont les plus importants. Elle se hisse même au sommet du classement en zone euro. Alors, de grâce, ne disons pas que les Français sont réfractaires à l’impôt. Disons plutôt qu’ils nous réclament l’efficacité tant espérée de nos politiques.

Le personnel médical est à bout de souffle, nous le savons depuis des années, et, s’ils sont attachés à leur mission, nous devons l’être tout autant, si ce n’est plus.

Lorsque l’on siège à droite de cet hémicycle et que l’on invite à réduire le train de vie de l’État, on nous répond parfois : comment ? Vous souhaitez encore moins de lits dans les hôpitaux, moins d’infirmiers ? Mais, mes chers amis, c’est tout l’inverse ! S’il nous faut être plus assidus, c’est justement pour avoir plus d’hôpitaux, plus d’infirmiers, et pour que les professionnels soient mieux rémunérés. Qu’imaginer d’autre ?

On s’engage toujours dans la vie politique pour les plus modestes et les plus fragiles. D’ailleurs, et c’est parfois contre-intuitif, même pour lutter contre les fraudes de toutes sortes, il nous faut plus de moyens.

Il y a donc des réformes structurelles à mener. Par ailleurs, disons-le, il y a sans nul doute des économies à faire dans tout un tas de structures ad hoc et de comités Théodule, si utiles qu’ils passent sous les radars, si nombreux qu’ils grèvent nos budgets.

Telle est la vue générale que je tenais à partager avec vous. Nos débats seront longs. Je fais pleinement confiance, avec l’ensemble de mon groupe, à nos rapporteurs et au président de la commission des affaires sociales pour veiller à ce que cet esprit se traduise tout au long de nos votes.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

J’invite les ministres à faire preuve de concision dans leurs réponses afin que nous puissions suspendre la séance à vingt heures, car la commission des affaires sociales doit se réunir pour examiner les amendements.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Aurélien Rousseau

Je veux tout d’abord remercier M. le sénateur Laurent Burgoa, lequel, dans sa sagesse gardoise, a montré la ligne de crête entre la nécessaire maîtrise des dépenses et l’attention que nous devons porter aux besoins des plus fragiles d’entre nous.

Peut-être ne l’avons-nous pas dit suffisamment, alors même que nous devons naturellement à la représentation nationale une trajectoire de financement claire et transparente à moyen terme, nous avons pour objectif de réduire les dépenses de la médecine de ville, plus particulièrement de médicaments, par une régulation portant sur la pertinence des actes et des différents soins. Ce sujet est au cœur de la négociation conventionnelle qui s’ouvrira à partir de demain.

Madame la rapporteure générale, madame la sénatrice Jocelyne Guidez, même si un déficit de 9 milliards d’euros sur les 255 milliards d’euros de dépenses d’assurance maladie pourrait faire rêver en comparaison avec le budget de l’État, nous ne pouvons pas nous dire que nous finirons, en fin de période, avec un tel déficit.

Les propos tenus sur la réforme de la tarification à l’activité, qualifiée de « trompeuse », « inaboutie » ou « en trompe-l’œil », me paraissent contradictoires avec la proposition de reporter cette réforme à 2028. Nous devons nous lancer dans la réforme de la T2A, dont il est question depuis sa création ! Nous proposons un dispositif cohérent comportant trois briques de tarification, conformément à une demande qui revient de manière récurrente lors de chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Si nous renvoyions le sujet à l’année prochaine, certains sénateurs – et pas seulement le sénateur Milon – pourraient alors refaire le même discours que cette année ! Nous devons nous lancer dans cette réforme, mais évidemment nous l’évaluerons et nous l’ajusterons. J’ai la conviction que, si nous attendions d’avoir le système de tarification parfait, qui ne ferait ni perdant ni gagnant et aurait toutes les vertus, nous attendrions longtemps !

S’agissant de la financiarisation, je veux souligner le travail effectué à l’Assemblée nationale, notamment sur l’initiative de Stéphanie Rist, pour modifier la tarification et le financement de la radiothérapie et de la dialyse, qui sont deux des secteurs dans lesquels, on le sait, les effets de la financiarisation se font particulièrement sentir.

Je ne crois pas que, dans le champ de la prévention, les mesures que nous présentons soient « cosmétiques ». J’avais entendu le même terme, lorsque le Président de la République avait annoncé la gratuité des préservatifs ou la prise en compte de la précarité menstruelle. Quand on voit le volume que ces mesures représentent, on comprend que cela répond à une véritable demande.

Certes, je ne prétends pas que le virage de la prévention soit définitivement pris, mais je pense sincèrement que ce texte et tout ce qui, depuis quelques mois, est porté par le Gouvernement – je pense notamment à la vaccination et à la prévention de certaines pathologies – témoignent d’une nouvelle orientation.

Monsieur Jomier, madame Lassarade, il est sans doute vrai que, d’un point de vue structurel, l’Ondam n’est pas l’outil le plus adapté pour avancer en matière de prévention – ce n’est pas un indicateur de santé publique. Par exemple, en finançant aujourd’hui la vaccination contre les infections au papillomavirus, on évite des cancers de l’utérus qui seraient apparus dans trente ans.

C’est vrai, il y a un chantier à conduire pour bâtir une réforme structurelle de la prévention. À mes yeux, c’est l’explication majeure des reculs que nous enregistrons, notamment en matière de mortalité infantile et d’espérance de vie en bonne santé. Le tout curatif ne répondra pas à la situation. Les inégalités sociales de santé doivent être prises en compte.

Je remercie d’ailleurs les sénatrices Pantel et Nadille d’avoir souligné que ces mesures de prévention ne sont pas accessoires.

Nous reviendrons sans doute au cours du débat sur les mesures concrètes prises en matière de médicaments. Pour répondre aux propos tenus par Mme Nadille, je dirai simplement que, si nous disposions dès aujourd’hui des mesures prévues dans ce PLFSS, cela nous serait très précieux. Je pense notamment au transfert des pouvoirs de police sanitaire à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).

Monsieur Delahaye, vous avez lié d’une certaine façon le Ségur de la santé et la crise. Je ne mets pas tout à fait sur le même plan ces deux éléments, car je pense que le Ségur constituait une condition pour sortir de la crise.

En tout cas, dans le domaine de la santé, les effets structurels de la crise du covid ne sont pas derrière nous. Je pense notamment à la situation en matière de santé mentale, qui devra être, selon moi, au cœur du PLFSS pour 2025. Nous le sentons tous, de ce point de vue, quelque chose s’est profondément dégradé dans notre pays depuis quelques années.

MM. Mouiller et Milon ainsi que Mme Imbert sont revenus sur la nécessité d’avoir une grande loi structurante sur la santé.

En vous écoutant, monsieur Milon, je me disais que chacun rêve d’avoir une grande loi à son nom. Pour ma part, je souhaite qu’on avance sur les conseils territoriaux de santé (CTS) – ce point a été évoqué dans le cadre de l’examen de la proposition de loi Valletoux –, sur la réorganisation de la gouvernance à l’hôpital ou encore sur le service d’accès aux soins (SAS) – 85 % de la population sera couverte en fin d’année. En outre, nous avons cassé la courbe des patients en affection de longue durée (ALD) qui n’ont pas de médecin traitant.

Je vous rejoins, monsieur Milon, s’agissant des ordonnances Debré. Certains chantiers législatifs sont devant nous. On entre parfois au Parlement avec l’idée de construire une cathédrale et on en ressort avec une chapelle de montagne, ce qui peut être aussi beau, mais pas forcément plus utile.

Je le redis, madame Souyris, monsieur Chasseing, nous adapterons, en fonction des retours, tous les dispositifs d’accompagnement de la vaccination contre les virus HPV. Je veux aussi préciser, s’agissant de la précarité menstruelle, que nous avons étendu le dispositif aux bénéficiaires de la C2S.

Je le redis également, la santé mentale et la santé des femmes seront deux axes forts du projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’an prochain. Nous en sommes, à ce stade, au milieu du chemin.

Par ailleurs, je vous indique que je présenterai dans quelques semaines le plan national de lutte contre le tabagisme. Des annonces, qui ne sont pas neutres, seront faites, notamment en matière de prix.

Pour finir, vous avez évoqué, madame Brulin, notre cap, qui serait selon vous une réduction des dépenses. Si tel était le cas, cela se verrait sans doute un peu plus !

Toutefois, je vous rejoins sur deux points.

Tout d’abord, il convient de comprendre ce qui se passe dans les instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi), dans la mesure où 30 % des étudiants s’arrêtent en cours de formation.

Ensuite, si le projet de loi de financement de la sécurité sociale est un texte ambitieux, il n’est pas tout ! Vous avez ainsi évoqué, madame la sénatrice, la question de la permanence des soins. Or, grâce à la bienveillance de Mme la rapporteure, le Sénat a adopté, dans le cadre de la proposition de loi Valletoux, une mesure relative à la permanence des soins en établissements de santé, qui me semble constituer une réponse à ce que vous avez évoqué.

Je suis désolé d’avoir été à la fois trop court et trop long, ce qui caractérise d’une certaine façon les PLFSS…

Debut de section - Permalien
Aurore Bergé

Mme Aurore Bergé, ministre. Je prendrai la parole pour trois minutes, afin de laisser le temps à Thomas Cazenave de vous répondre en quarante-cinq secondes sur la branche AT-MP, l’Agirc-Arrco et les retraites…

Sourires.

Debut de section - Permalien
Aurore Bergé

S’agissant des enjeux liés à l’autonomie, il est vrai que la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France et la stratégie interministérielle que nous présenterons vendredi n’épuisent pas le sujet, à savoir l’adaptation de l’ensemble de notre société au vieillissement.

C’est la raison pour laquelle je souhaite que nous puissions travailler ensemble à une loi d’orientation, qui s’intéressera plus particulièrement aux questions de financement.

En la matière, plusieurs éléments se cumulent. Je pense au fonds d’urgence, qui n’est pas là pour répondre aux enjeux structurels d’un certain nombre de nos établissements, en particulier les Ehpad, mais doit permettre de cartographier notre territoire, établissement par établissement, pour connaître les établissements qui sont en difficulté conjoncturelle et ceux qui sont en difficulté structurelle. Il s’agit de proposer un véritable parcours résidentiel, qui manque aujourd’hui.

À cela s’ajoute une mesure en PLFSS 2024, qui abondera les caisses des départements, via la CNSA, à hauteur de 150 millions d’euros supplémentaires. Cette disposition utile permettra aux départements de faire face au financement de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH).

Mais nous devons aller plus loin ; c’est pour cela que nous proposons la fusion des sections. Je constate, madame la rapporteure, que les avis sur le sujet sont divers. Pour ma part, je crois beaucoup à la différenciation et au processus d’expérimentation. Une expérimentation permet une évaluation avant toute – éventuelle – généralisation.

Je n’ai pas posé comme préalable l’idée de la généralisation, d’autant que l’on incite les départements à s’engager dans des mesures d’innovation et qu’on leur demande de se montrer pilotes en la matière. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement sera favorable aux amendements posant le principe d’une expérimentation.

Par ailleurs, il y aura bien une réforme en 2025 des fonds de concours. Nous aurons donc une première évolution en 2024 et une vraie réforme en 2025.

En ce qui concerne les contrôles, nous avons augmenté les effectifs des ARS de 120 équivalents temps plein (ETP) de manière à garantir qu’en deux ans l’intégralité des Ehpad aura été contrôlée. Nous avons également prévu en loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 l’obligation de tenir une comptabilité analytique, ce qui n’était pas le cas pour les établissements privés lucratifs. Cette mesure nous permettra aussi d’obtenir des résultats.

Le service public de la petite enfance (SPPE) est une première brique, mais il n’est pas non plus la réponse à toutes les questions qui se posent. Pour autant, il fallait bien un pilote. Nous ne laissons pas les collectivités locales seules, puisque la convention d’objectifs et de moyens signée entre l’État et la Cnaf prévoit le financement et l’accompagnement de l’effort demandé. Je sais que vous attendez des preuves d’amour et pas uniquement des mots d’amour. Entre 2023 et 2027, pour les structures de la petite enfance, 1, 5 milliard d’euros supplémentaires viendront s’ajouter aux investissements déjà réalisés, notamment par la Cnaf.

Le congé familial, je l’espère, sera considéré comme une autre preuve d’amour. J’entends les remarques qui ont été formulées sur la demande de rapport. J’ai annoncé que l’objectif était réalisable pour 2025 – je crois qu’il faut donner de la visibilité aux familles.

Il s’agit de redonner de la liberté, une possibilité de choix, des droits aux familles pour garantir aux parents qu’ils pourront s’occuper de leurs enfants dans des conditions sereines. Nous voulons lutter contre toutes les causes qui sont à l’origine de l’écart grandissant entre le désir d’enfant et le nombre d’enfants.

C’est toute la question d’une politique familiale universelle. Nous entendons créer de nouveaux droits et, qu’il s’agisse de la réforme du CMG ou du congé familial, c’est bien l’ensemble des familles qui seront concernées. Aucune famille ne sera exclue des dispositifs.

Permettez-moi également de lever un malentendu. J’ai entendu dire que ce budget actait une baisse des allocations. C’est l’inverse, puisque l’ensemble des prestations familiales sera revalorisé en avril de 4, 6 %, soit 1 milliard d’euros supplémentaires d’engagement de l’État.

En ce qui concerne la question du handicap, sur les 50 000 nouvelles solutions, ma priorité absolue concernera avant tout les adultes en situation de handicap. Ces derniers ne sauraient être maintenus, pour des raisons évidentes de dignité, mais aussi d’organisation et de justice, dans des établissements qui sont dédiés à nos enfants. Nous agirons évidemment en ce sens.

Enfin, afin de ne laisser subsister aucune ambiguïté, les fauteuils roulants seront bien pris en charge à 100 % par l’État. Le reste à charge sera donc de zéro pour les familles, que le fauteuil coûte 3 000 euros ou qu’il en coûte 30 000. Il s’agit d’une petite révolution. Les familles seront ainsi délestées d’un poids financier, mais aussi d’un poids moral.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave

De très nombreuses questions relèvent de sujets financiers. Je vous propose, pour respecter votre demande, monsieur le président, d’y répondre lors de l’examen des tout premiers articles du texte. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Debut de section - Permalien
Aurore Bergé

Mme Aurore Bergé, ministre. Voilà comment se faire applaudir !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La discussion générale est close.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Mathieu Darnaud.

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