Intervention de Corinne Feret

Réunion du 13 novembre 2023 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2024 — Discussion générale

Photo de Corinne FeretCorinne Feret :

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, je souhaite me faire le porte-voix des élus, des maires en premier chef, qui, partout, et pas seulement dans mon département du Calvados, tirent la sonnette d'alarme et exhortent le Gouvernement à agir pour sauver leurs Ehpad.

Ils demandent, comme nous, en vain, PLFSS après PLFSS, des financements pérennes à la hauteur des besoins, alors que le vote d'une loi grand âge, annoncé depuis 2018, est sans cesse repoussé.

Ce n'est certainement pas la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France qui permettra de faire face à l'ensemble des conséquences du vieillissement de nos concitoyens, aux questions liées à la perte d'autonomie, à la dépendance, mais aussi au manque d'attractivité des métiers du secteur social et médico-social.

Il s'agit pourtant d'un véritable enjeu de société, d'un défi que nous devons relever dès aujourd'hui et non demain. Quand allez-vous prendre la mesure du constat d'urgence que dressent les responsables des Ehpad et des services d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad) partout en France ? Comprenez-vous que l'annonce, cet été, d'un soutien de 100 millions d'euros pour soulager les structures est en totale déconnexion avec la réalité des besoins ?

Les Français aspirent légitimement à bien vieillir chez eux. Pour ce faire, le Gouvernement affirme déployer un « virage domiciliaire ». Pourtant, nous connaissons tous ici la réalité en la matière : les associations d'aide à domicile sont en souffrance, contraintes de refuser des prises en charge par manque de personnel.

Durant sa dernière campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait fait la promesse de créer 50 000 postes supplémentaires en Ehpad en cinq ans, alors que la FHF estimait les besoins à au moins 100 000.

Le PLFSS de l'an dernier, au lieu de créer 10 000 postes, comme on pouvait légitimement s'y attendre, n'en avait budgété que 3 000 ; cette année, vous n'en prévoyez que 6 000, ce qui n'est certainement pas de nature à améliorer les conditions d'accompagnement de nos aînés.

Nouveau rebondissement : la Première ministre ne parle plus de l'échéance de 2027, mais évoque 50 000 postes en 2030. Il n'est pas sérieux de repousser la réalisation de cette promesse présidentielle, au risque d'apporter une énième preuve de l'engagement insuffisant de ce gouvernement sur le grand âge.

Que de temps perdu depuis 2020 et la création officielle de la cinquième branche de la sécurité sociale, relative à l'autonomie ! Vous aurez beau faire valoir que celle-ci est excédentaire, personne n'est dupe de la réalité de la situation et de l'urgence qu'il y a à agir.

Déjà, en 2019, année de remise du rapport Libault, il était préconisé d'augmenter l'effort en faveur du grand âge de 9 milliards d'euros par an. Nous en sommes loin !

Pour ce qui concerne la branche accidents du travail et maladies professionnelles, les choses ne peuvent pas bien se passer : vous encouragez l'ubérisation du travail, la sous-protection sociale et les sous-revenus associés ; vous repoussez à 64 ans l'âge de départ à la retraite de travailleurs usés, qui aspirent légitimement au repos ; et vous refusez de réintégrer les quatre critères de pénibilité que vous avez supprimés.

Les seules mesures que prévoit votre budget visent à traquer les arrêts maladie, à traiter les malades comme des fraudeurs et les médecins comme des complices. C'est dire !

Je conclurai en évoquant la branche famille, pour rappeler que les chiffres de la natalité publiés par l'Insee en septembre dernier sont alarmants. Seul un renforcement significatif des moyens alloués à la politique familiale permettra d'inverser la dynamique déclinante de la démocratie française.

L'ouverture d'au moins 200 000 places en crèche est toujours nécessaire, alors que des milliers de foyers voient leur désir de parentalité menacé par le manque de solutions de garde.

En somme, ce budget de la sécurité sociale n'est pas à la hauteur des enjeux et des décisions que nous devrions prendre sans attendre davantage. Répondre aux besoins des assurés sociaux, des patients et des ayants droit, voilà ce qui manque cruellement dans ce PLFSS ! §

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