Intervention de Jocelyne Guidez

Réunion du 13 novembre 2023 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2024 — Discussion générale

Photo de Jocelyne GuidezJocelyne Guidez :

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 qui nous est soumis repose sur des prévisions qui manquent cruellement d'ambition en matière de stabilisation du déficit.

Après l'amélioration résultant de la fin de la crise sanitaire, la forte inflation de 2023 suscite une forte revalorisation des dépenses. Nous ne sommes qu'au début d'une période d'aggravation du déficit.

Cette trajectoire financière inquiétante reste un sujet préoccupant pour l'avenir et les futures générations. Comme vous le savez, mes chers collègues, un hypothétique redressement de cette situation n'est pas concevable sans des choix difficiles en matière de recettes comme de dépenses.

Prendre des décisions importantes fait peur. Cependant, on pourrait regretter de ne pas les avoir prises. Paulo Coelho écrit ainsi : « Attendre fait mal. Oublier fait mal. Mais ne pas savoir quelle décision prendre est la pire des souffrances. »

Nous tenons à saluer le choix des mesures d'économie budgétaire et de régulation des dépenses, enrichies sensiblement par la commission, telles que l'incitation au transport sanitaire partagé, si l'état de santé des patients le permet, ou encore le contrôle des prestations d'arrêts de travail.

Ainsi, la durée d'un arrêt de travail prescrit ou renouvelé par téléconsultation sera limitée à trois jours – une mesure bienvenue, compte tenu des abus avérés. Le groupe Union Centriste vous proposera également un amendement visant à mieux encadrer les plateformes de téléconsultation.

Cette année encore, le PLFSS n'apporte pas de réponse appropriée aux défis posés à notre système de santé. Les mesures relatives à la politique de santé nous semblent être d'une portée très limitée.

Ainsi, au-delà de quelques dispositions concernant le médicament ou la prévention, le texte prétend porter une réforme du financement de l'hôpital qui n'est finalement qu'un trompe-l'œil et qui ne retouche qu'à la marge l'organisation des soins.

Il est pourtant indispensable que les hôpitaux s'engagent sereinement dans une réforme structurelle, selon une ligne claire et avec des ressources sécurisées afin de rééquilibrer les modes de financement.

C'est pourquoi la commission a prévu un report de cette réforme au 1er janvier 2028, au terme d'une expérimentation préalable permettant d'affiner le modèle cible et ainsi améliorer effectivement l'offre de soins.

Nous sommes favorables à la délivrance gratuite en pharmacie de préservatifs pour les moins de 26 ans sans prescription médicale ; il s'agit d'une avancée certaine en matière de prévention des infections sexuellement transmissibles et de grossesses non désirées.

Cependant, on peut regretter que, du fait de l'article 40 de la Constitution, l'amendement du groupe Union Centriste visant à élargir ce dispositif aux personnes handicapées ait été considéré comme irrecevable. La sexualité fait partie intégrante d'un projet de vie et constitue un droit fondamental de la personne en situation de handicap, qui lui permet de nouer des liens sociaux et affectifs et de cultiver l'estime de soi.

En outre, le remboursement intégral des fauteuils roulants dès 2024 est d'une portée incertaine, puisque les conditions d'application de cette mesure sont suspendues aux négociations à venir. J'ai été interpellée par les associations à ce sujet.

Le texte comprend aussi une disposition visant à lutter contre le harcèlement scolaire. Les professionnels de santé des établissements scolaires sont ainsi désormais autorisés à orienter des élèves vers les psychologues du dispositif #MonSoutienPsy.

Concernant la branche vieillesse, la réforme des retraites a permis de réduire d'un tiers son déficit à l'horizon de 2027 ; cependant, elle ne suffit pas à en redresser la trajectoire financière. On estime que la dégradation sera rapide à compter de 2024, avec un déficit prévisionnel de l'ordre de 11 milliards d'euros en 2027. Une telle situation nécessiterait des efforts supplémentaires difficilement acceptables par les Français.

Face à cette réalité indéniable, nous saluons des mesures de bon sens visant à assurer la justice et l'équité du système de retraite. Ainsi, le contrôle biométrique de l'existence des retraités résidant à l'étranger deviendrait obligatoire à compter de 2027, une décision nécessaire pour lutter contre la fraude aux pensions de retraite à l'étranger.

En l'absence d'une politique familiale forte et ambitieuse, nous regrettons vivement que le solde excédentaire de cette branche soit consommé sans que les réformes indispensables soient mises en œuvre. Le contexte de chute inquiétante de la natalité rend nécessaire une prise de conscience collective.

S'agissant de la branche autonomie, ce PLFSS semble marquer un tournant en matière de financement des Ehpad, en amorçant la fusion des sections « soins » et « dépendances ». Ce régime pérenne, qui donne naissance à la nouvelle section « soins et entretiens de l'autonomie », serait toutefois optionnel pour les départements, ce qui pourrait aggraver les disparités territoriales.

Par conséquent, nous soutenons une proposition de la commission consistant à transformer le régime adapté de financement en une expérimentation d'une durée de trois ans, à laquelle pourraient participer dix départements.

Il nous semble aussi nécessaire de clarifier les relations financières entre la CNSA et les départements afin d'en améliorer la lisibilité et la transparence.

Force est de constater que les moyens ne sont pas au rendez-vous pour le virage domiciliaire et que la situation financière des Ehpad reste alarmante. Les raisons en sont multiples : problèmes structurels de gouvernance et de recrutement, hausse des prix et des rémunérations... S'il est bienvenu, le fonds d'urgence de 100 millions d'euros prévu par l'article 3 n'est malheureusement pas à la hauteur des besoins dans le contexte de vieillissement de la population.

Enfin, nous sommes heureux de la création d'un service de repérage, de diagnostic et d'intervention précoce. Il s'agit d'une avancée majeure pour les enfants de moins de six ans présentant un handicap, en particulier un trouble du neuro-développement.

Si nous saluons cette mesure de prévention, nous nous interrogeons sur l'articulation de ce service avec les outils déjà déployés, à savoir les plateformes de coordination et d'orientation (PCO) ou le forfait d'intervention précoce.

À ce jour, nous n'avons d'ailleurs pas obtenu de réponse à nos interrogations sur la situation préoccupante des adultes. La moindre des choses serait d'inscrire dans la loi la limite d'âge de 12 ans.

Nous apprécions aussi le renouvellement de la durée des droits à l'allocation journalière du proche aidant dans la limite d'un an pour des cas de figure précis, et nous proposons un amendement visant à pérenniser des mesures en faveur du répit des aidants.

Le groupe Union Centriste soutiendra ce texte, à condition qu'il soit amélioré par un certain nombre d'amendements.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion