La santé doit-elle être conditionnée par les « contraintes » qui s’imposent à la personne ? Telle est la question que pose cet amendement. Car n’oublions pas qu’en parlant d’alimentation, nous parlons avant tout de santé. Les liens entre l’alimentation et la santé sont désormais clairement établis, qu’il s’agisse des maladies cardiovasculaires, de certains cancers, du diabète de type 2 ou de l’obésité, laquelle touche 14 % des adultes en France et se répand à un rythme qui nous rapproche de la situation observée aux États-Unis, où l’obésité peut atteindre 30 % de la population dans certains États.
Le choix alimentaire dont parle le Gouvernement est donc en fait un choix sanitaire, qui ne peut dépendre de contraintes économiques. Or, le constat est sans appel et admis par le Gouvernement lui-même, tant dans l’exposé des motifs que dans l’étude d’impact de ce projet de loi : l’accès à l’alimentation reste encore un enjeu pour les populations les plus défavorisées. « La fracture alimentaire est une réalité, et qui risque de se renforcer. Le prix est encore l’élément déterminant de l’achat et les restrictions que s’imposent certaines catégories de population hypothèquent leur santé future et celle de leurs enfants. »
Cet amendement vise donc à garantir sans restriction le respect pour tous des principes posés par l’article 1er.
Nous avons pris note des ambitions du Gouvernement : ainsi, M. le ministre a rappelé en plusieurs occasions qu’aujourd’hui faire de l’alimentation une priorité était une nécessité, un défi que la France se devait de relever ; il a aussi été dit qu’il était nécessaire de concevoir un soutien public à l’alimentation de tous les Français pour garantir que celle-ci soit décente et de qualité.
Mais que valent les ambitions du Gouvernement si elles se nourrissent des inégalités en affirmant vouloir les combattre ?
Subordonner les choix alimentaires aux contraintes économiques, c’est perpétuer la fracture sociale dans l’assiette des Français, au moment où la crise les touche de plein fouet et où l’on demande, encore et toujours, aux plus défavorisés de payer pour des erreurs qui ne sont pas les leurs.
À travers cet amendement, nous proposons simplement d’avoir une politique alimentaire ambitieuse et volontariste.
Reconnaître un droit à la sécurité alimentaire pour tous, c’est reconnaître l’importance de l’alimentation pour la santé des Français. C’est reconnaître que la prévention est la meilleure arme pour stopper l’expansion des maladies liées à la nutrition inadéquate des Français. C’est reconnaître qu’aujourd’hui les personnes en difficulté économique ne peuvent faire les choix alimentaires garantissant leur santé et celle de leurs enfants. Enfin, reconnaître un droit à la sécurité alimentaire pour tous, c’est rappeler le sens du collectif et de la solidarité entre les citoyens.
Au contraire, faire référence aux « contraintes » économiques, c’est consolider une inégalité de fait, c’est avouer son échec face à la fracture sociale. Un tel manque d’ambition serait inadmissible au regard des chiffres de la malnutrition en France. Le Gouvernement doit nous montrer qu’il ne se contente plus de gérer les inégalités sociales, quand il n’est pas en train de les créer, mais qu’il se donne les moyens de ses ambitions, les moyens de combattre ces inégalités.