Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, assurer à toutes les citoyennes et à tous les citoyens « des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer » : c’est l’objectif de la sécurité sociale, tel qu’énoncé par le Conseil national de la Résistance.
Cette protection majeure est définie plus largement encore dans le préambule de la Constitution de 1946, qui garantit « à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé ».
Notre sécurité sociale s’est construite à l’abri de ce fronton républicain. Mais l’édifice, qui est l’un des plus protecteurs au monde, est aujourd’hui en train de se fissurer. Il suffit pour s’en convaincre de consulter les pronostics, établis par le Gouvernement lui-même, des déficits attendus de notre assurance maladie d’ici à 2027.
Face à ces chiffres, nous aurions bien entendu besoin d’un grand bouleversement. Madame, messieurs les ministres, je sais que vous souhaitez, comme moi, le sauvetage de ce formidable outil, garant de notre droit fondamental à la santé.
Un certain nombre d’avancées sont accomplies, qu’il s’agisse de la prévention, avec les campagnes de vaccination contre les infections à papillomavirus humain (HPV), de la santé scolaire ou encore des financements. Le présent texte renforce ainsi le combat contre la financiarisation de notre système de santé, notamment en remettant en cause la tarification à l’acte à l’hôpital – la portée cette décision est certes limitée, mais il s’agit d’un premier pas.
Cela étant, la logique reste la même. On constate, qui plus est, une inadéquation majeure entre l’augmentation de l’Ondam et l’inflation. En résulte une véritable mise en danger, non seulement de la médecine de ville, mais aussi de notre hôpital.
Lorsque les services publics ou associatifs de secteur 1 voient leur budget diminuer, les plus précaires d’entre nous, de plus en plus nombreux, n’ont d’autre choix que de se tourner vers les dispositifs publics d’aide sociale et sanitaire. Autant dire que nous sommes inquiets.
Chacun sait que l’hôpital public ne tient que par l’engagement remarquable des soignantes et des soignants. Mais, en la matière, que nous propose le Gouvernement ? À vrai dire, une non-trajectoire de dépenses réaliste et soutenable.
Monsieur Cazenave, ce n’est pas la lutte contre la fraude individuelle qui sauvera notre solidarité. En ce sens, vos propositions sont autant de cache-misère.
Je ne puis qu’y insister : l’Ondam 2024, qui progresse de 3, 2 % par rapport à l’objectif rectifié pour 2023, ne prend pas en compte l’inflation, située entre 4 % et 5 %. Il manque à ce PLFSS plus de 1 milliard d’euros pour financer les établissements de santé et 400 millions d’euros pour financer intégralement les mesures de revalorisation du Ségur de la santé.
Il y a quelques semaines, dans cet hémicycle, avant l’examen du triste projet de loi relatif à l’immigration, nous débattions de la démocratie sanitaire dans nos territoires. Je saluais alors l’esprit d’ouverture dont le Gouvernement faisait preuve à cette occasion : quel dommage qu’il n’ait pas adopté la même attitude pour l’examen de ce PLFSS, rejeté par les organisations syndicales et critiqué par les grandes structures associatives !
Ce PLFSS – est-ce véritablement une surprise ? – n’amorce aucun virage majeur pour faire face aux transformations planétaires et renouveler notre sécurité sociale vers le mieux-disant.
En faveur de la transition écologique et de la justice sociale, l’on ne fera rien sans des investissements majeurs. Vous le savez, monsieur Cazenave, mais vous regardez ailleurs… Pourtant, il me semble que nous vivons sur la même planète ! Vous auriez pu faire le choix de l’action et relever le défi.
Pour améliorer la santé dans notre pays, pour retrouver les jours heureux et faire face aux défis contemporains, il eût été possible d’aligner à nouveau, dans notre système de sécurité sociale, nos liens de dépendances en matière de santé et nos conditions d’existence ; autrement dit, de proposer que les responsables de nos maladies, des pollutions ou encore du changement climatique deviennent les contributeurs de la transformation de la sécurité sociale.
Pour paraphraser une chanson entendue bien des fois lors des manifestations contre la réforme des retraites, oui, nous devons mieux répartir les richesses ; oui, nous devons trouver de nouvelles recettes. Mais, pour cela, il faut cesser de faire payer les plus pauvres, qui – rappelons-le – sont ceux qui bénéficient le moins de nos droits sociaux, et garantir enfin l’équité.
Taxons les dividendes, les superprofits et les sociétés pétrolières. Taxons ceux et celles qui polluent le plus et qui profitent le plus des crises, non pas parce que nous voulons les sanctionner, mais parce que, dans une démocratie digne de ce nom, ils et elles doivent participer, réparer, préparer notre avenir à tous et toutes à la mesure des moyens qu’ils et elles ont à leur disposition.
Nous y sommes : mettons enfin à contribution les plus riches et les grands pollueurs, au nom d’une égalité républicaine à laquelle – j’ose l’espérer – nous aspirons tous et toutes.
On trouve quand même, dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, quelques mesures de progrès ; elles sont certes maigres, mais elles ont le mérite d’exister. Je pense notamment à la gratuité des préservatifs et des protections périodiques, ainsi qu’à la campagne de vaccination contre le papillomavirus dans les établissements scolaires – bravo !
Toutefois, monsieur Rousseau, j’interroge une nouvelle fois le Gouvernement : pourquoi restreindre ces deux premières mesures aux moins de 26 ans ? Pourquoi ne pas assumer un objectif vaccinal au-delà des établissements publics ? Je suis sûre que vous saurez m’entendre, au moins sur ces points-là, car je vous sais sensible aux inégalités femmes-hommes et à la grande précarité.
Si nous disons « mieux vaut tard que jamais », nous prenons soin d’ajouter « peut mieux faire ». C’est dans un esprit démocratique de responsabilité et de dialogue que les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ont proposé d’améliorer ces dispositifs.
Je regrette que tant de nos amendements aient été jugés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution et j’appelle le Gouvernement à s’emparer de nos propositions.
Nous proposions en particulier d’améliorer l’information relative au vaccin HPV, ainsi que de rendre gratuits les contraceptifs et les protections périodiques pour les plus précaires, sans critère d’âge.
Le présent texte s’attache à préciser les modalités des rendez-vous de prévention annoncés l’année dernière. Nous vous proposerons d’affiner ces dispositifs pour y inclure clairement, d’une part, la santé environnementale et, de l’autre, les besoins de santé des personnes les plus précaires et les plus éloignées du soin du fait de discriminations, comme les minorités de genre ou d’orientation sexuelle et les travailleuses et travailleurs du sexe.
La lutte contre les addictions est un autre angle mort de ce PLFSS. Il nous faut revenir à la loi Évin et interdire la publicité pour l’alcool…