Intervention de Aurélien Rousseau

Réunion du 13 novembre 2023 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2024 — Discussion générale

Aurélien Rousseau :

Je veux tout d’abord remercier M. le sénateur Laurent Burgoa, lequel, dans sa sagesse gardoise, a montré la ligne de crête entre la nécessaire maîtrise des dépenses et l’attention que nous devons porter aux besoins des plus fragiles d’entre nous.

Peut-être ne l’avons-nous pas dit suffisamment, alors même que nous devons naturellement à la représentation nationale une trajectoire de financement claire et transparente à moyen terme, nous avons pour objectif de réduire les dépenses de la médecine de ville, plus particulièrement de médicaments, par une régulation portant sur la pertinence des actes et des différents soins. Ce sujet est au cœur de la négociation conventionnelle qui s’ouvrira à partir de demain.

Madame la rapporteure générale, madame la sénatrice Jocelyne Guidez, même si un déficit de 9 milliards d’euros sur les 255 milliards d’euros de dépenses d’assurance maladie pourrait faire rêver en comparaison avec le budget de l’État, nous ne pouvons pas nous dire que nous finirons, en fin de période, avec un tel déficit.

Les propos tenus sur la réforme de la tarification à l’activité, qualifiée de « trompeuse », « inaboutie » ou « en trompe-l’œil », me paraissent contradictoires avec la proposition de reporter cette réforme à 2028. Nous devons nous lancer dans la réforme de la T2A, dont il est question depuis sa création ! Nous proposons un dispositif cohérent comportant trois briques de tarification, conformément à une demande qui revient de manière récurrente lors de chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Si nous renvoyions le sujet à l’année prochaine, certains sénateurs – et pas seulement le sénateur Milon – pourraient alors refaire le même discours que cette année ! Nous devons nous lancer dans cette réforme, mais évidemment nous l’évaluerons et nous l’ajusterons. J’ai la conviction que, si nous attendions d’avoir le système de tarification parfait, qui ne ferait ni perdant ni gagnant et aurait toutes les vertus, nous attendrions longtemps !

S’agissant de la financiarisation, je veux souligner le travail effectué à l’Assemblée nationale, notamment sur l’initiative de Stéphanie Rist, pour modifier la tarification et le financement de la radiothérapie et de la dialyse, qui sont deux des secteurs dans lesquels, on le sait, les effets de la financiarisation se font particulièrement sentir.

Je ne crois pas que, dans le champ de la prévention, les mesures que nous présentons soient « cosmétiques ». J’avais entendu le même terme, lorsque le Président de la République avait annoncé la gratuité des préservatifs ou la prise en compte de la précarité menstruelle. Quand on voit le volume que ces mesures représentent, on comprend que cela répond à une véritable demande.

Certes, je ne prétends pas que le virage de la prévention soit définitivement pris, mais je pense sincèrement que ce texte et tout ce qui, depuis quelques mois, est porté par le Gouvernement – je pense notamment à la vaccination et à la prévention de certaines pathologies – témoignent d’une nouvelle orientation.

Monsieur Jomier, madame Lassarade, il est sans doute vrai que, d’un point de vue structurel, l’Ondam n’est pas l’outil le plus adapté pour avancer en matière de prévention – ce n’est pas un indicateur de santé publique. Par exemple, en finançant aujourd’hui la vaccination contre les infections au papillomavirus, on évite des cancers de l’utérus qui seraient apparus dans trente ans.

C’est vrai, il y a un chantier à conduire pour bâtir une réforme structurelle de la prévention. À mes yeux, c’est l’explication majeure des reculs que nous enregistrons, notamment en matière de mortalité infantile et d’espérance de vie en bonne santé. Le tout curatif ne répondra pas à la situation. Les inégalités sociales de santé doivent être prises en compte.

Je remercie d’ailleurs les sénatrices Pantel et Nadille d’avoir souligné que ces mesures de prévention ne sont pas accessoires.

Nous reviendrons sans doute au cours du débat sur les mesures concrètes prises en matière de médicaments. Pour répondre aux propos tenus par Mme Nadille, je dirai simplement que, si nous disposions dès aujourd’hui des mesures prévues dans ce PLFSS, cela nous serait très précieux. Je pense notamment au transfert des pouvoirs de police sanitaire à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).

Monsieur Delahaye, vous avez lié d’une certaine façon le Ségur de la santé et la crise. Je ne mets pas tout à fait sur le même plan ces deux éléments, car je pense que le Ségur constituait une condition pour sortir de la crise.

En tout cas, dans le domaine de la santé, les effets structurels de la crise du covid ne sont pas derrière nous. Je pense notamment à la situation en matière de santé mentale, qui devra être, selon moi, au cœur du PLFSS pour 2025. Nous le sentons tous, de ce point de vue, quelque chose s’est profondément dégradé dans notre pays depuis quelques années.

MM. Mouiller et Milon ainsi que Mme Imbert sont revenus sur la nécessité d’avoir une grande loi structurante sur la santé.

En vous écoutant, monsieur Milon, je me disais que chacun rêve d’avoir une grande loi à son nom. Pour ma part, je souhaite qu’on avance sur les conseils territoriaux de santé (CTS) – ce point a été évoqué dans le cadre de l’examen de la proposition de loi Valletoux –, sur la réorganisation de la gouvernance à l’hôpital ou encore sur le service d’accès aux soins (SAS) – 85 % de la population sera couverte en fin d’année. En outre, nous avons cassé la courbe des patients en affection de longue durée (ALD) qui n’ont pas de médecin traitant.

Je vous rejoins, monsieur Milon, s’agissant des ordonnances Debré. Certains chantiers législatifs sont devant nous. On entre parfois au Parlement avec l’idée de construire une cathédrale et on en ressort avec une chapelle de montagne, ce qui peut être aussi beau, mais pas forcément plus utile.

Je le redis, madame Souyris, monsieur Chasseing, nous adapterons, en fonction des retours, tous les dispositifs d’accompagnement de la vaccination contre les virus HPV. Je veux aussi préciser, s’agissant de la précarité menstruelle, que nous avons étendu le dispositif aux bénéficiaires de la C2S.

Je le redis également, la santé mentale et la santé des femmes seront deux axes forts du projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’an prochain. Nous en sommes, à ce stade, au milieu du chemin.

Par ailleurs, je vous indique que je présenterai dans quelques semaines le plan national de lutte contre le tabagisme. Des annonces, qui ne sont pas neutres, seront faites, notamment en matière de prix.

Pour finir, vous avez évoqué, madame Brulin, notre cap, qui serait selon vous une réduction des dépenses. Si tel était le cas, cela se verrait sans doute un peu plus !

Toutefois, je vous rejoins sur deux points.

Tout d’abord, il convient de comprendre ce qui se passe dans les instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi), dans la mesure où 30 % des étudiants s’arrêtent en cours de formation.

Ensuite, si le projet de loi de financement de la sécurité sociale est un texte ambitieux, il n’est pas tout ! Vous avez ainsi évoqué, madame la sénatrice, la question de la permanence des soins. Or, grâce à la bienveillance de Mme la rapporteure, le Sénat a adopté, dans le cadre de la proposition de loi Valletoux, une mesure relative à la permanence des soins en établissements de santé, qui me semble constituer une réponse à ce que vous avez évoqué.

Je suis désolé d’avoir été à la fois trop court et trop long, ce qui caractérise d’une certaine façon les PLFSS…

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