Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, en application de la loi organique du 28 décembre 2021 réformant la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), nous avons à nous prononcer sur le premier projet de loi de finances de fin de gestion. Ce nouveau type de texte permet de recentrer la dernière loi de finances rectificative de l’année sur la régulation des crédits budgétaires. Ainsi, ce projet de loi présente les ajustements de crédits indispensables à la gestion de la fin de l’année et écarte toute disposition fiscale nouvelle, dont la création est réservée au PLF. On ne peut que s’en réjouir.
C’est historique, ou presque : le texte a été adopté par l’Assemblée nationale, qui a dégradé, au passage, de 300 millions d’euros le déficit budgétaire, lequel passe ainsi à 171, 7 millions d’euros.
C’est également historique, mais c’est surtout grave et inquiétant, cet exercice budgétaire marque le passage de la France du vingt-troisième au vingt-cinquième rang sur vingt-sept pays européens en matière d’endettement en 2023. Notre taux d’endettement est en effet désormais le troisième le plus élevé, derrière ceux de la Grèce et de l’Italie.
Vous proposez d’ailleurs, monsieur le ministre, d’augmenter dans ce PLFG les crédits de 3, 8 milliards d’euros pour financer la charge de la dette. C’est le plus important ajustement à la hausse des ouvertures de crédits. J’y reviendrai.
Tout d’abord, comme l’a signalé le rapporteur général, je souhaite donner quitus au Gouvernement pour avoir présenté le premier PLF dont le scénario macroéconomique semble crédible, même si, bien sûr, il n’est pas pleinement satisfaisant pour notre pays : croissance de l’ordre de 1 %, inflation à 4, 9 %, déficit public à 4, 9 % du PIB, dette publique à 109, 7 % du PIB.
Le déficit public, comme la dette publique, incombe très largement, pour ne pas dire quasi exclusivement, aux administrations centrales, c’est-à-dire à l’État. Le déficit budgétaire de celui-ci est en effet supérieur de près de 7 milliards d’euros au montant prévu dans la loi de finances initiale. Nous retrouvons ainsi des niveaux de déficit proches de ceux que l’on a enregistrés lors de la crise sanitaire, confirmant que nous ne sommes toujours pas sortis du « quoi qu’il en coûte » et que nous ne sommes surtout pas entrés dans une gestion « à l’euro près ».
Nos recettes commencent à se tasser, notamment la contribution sur la rente inframarginale de la production d’électricité, tandis que l’IS, encore dynamique, connaît sans doute sa dernière année d’embellie.
Le plus inquiétant, c’est votre gestion erratique. Les ouvertures de crédits de ce PLFG sont révélatrices du défaut de maîtrise de nos dépenses, conséquence de l’absence de réelle réforme structurelle visant à diminuer la dépense publique, laquelle n’est, par-dessus le marché, pas efficace, nos concitoyens nous le disent chaque jour.
Le constat le plus cruel concerne notre dette. Nous y reviendrons sans doute plus en détail dans le cadre de l’examen du PLF 2024, mais nous constatons déjà la nécessité d’ouvrir dès ce PLFG 3, 8 milliards d’euros de crédits nouveaux pour faire face à la charge de la dette, amplifiée par la hausse des taux d’intérêt liée à l’inflation, avant que nous ne connaissions en 2024 l’effet de taux lui-même.
Dans le projet de loi de programmation des finances publiques (LPFP), la charge d’intérêts de la sphère publique est pourtant fixée à 47 milliards d’euros en 2023 et à 84 milliards d’euros en 2027. Cette envolée est très inquiétante. La charge de la dette française pourrait devenir, dès 2025, le premier budget de l’État, devant celui de l’enseignement scolaire. Nous devons, vous devez informer les Français de cette situation, des efforts nécessaires à conduire, des risques que nous encourons, du resserrement brutal de l’intervention publique que cela va nécessiter demain si nous ne commençons pas à faire des efforts.
Hélas, nous en sommes loin, malgré les déclarations de Bruno Le Maire sur les 12 milliards d’euros de réduction de dépenses en 2025…