Intervention de Cathy Apourceau-Poly

Réunion du 16 novembre 2023 à 10h30
Partage de la valeur au sein de l'entreprise — Vote sur l'ensemble

Photo de Cathy Apourceau-PolyCathy Apourceau-Poly :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 17 avril 2023, Emmanuel Macron déclarait : « J’ai entendu dans les manifestations une opposition à la réforme des retraites, mais aussi une volonté de retrouver du sens dans son travail, d’en améliorer les conditions, d’avoir des carrières qui permettent de progresser dans la vie. […] Ce nouveau pacte de la vie au travail sera construit dans les semaines et les mois qui viennent. »

À ce titre, le Gouvernement s’est empressé de transposer l’accord a minima signé entre les organisations patronales et les organisations syndicales sur le partage de la valeur au sein de l’entreprise.

Lors de nos débats en première lecture, tous nos amendements tendant à compléter, améliorer ou étendre cet accord ont été rejetés par la majorité sénatoriale et le Gouvernement. Il ne fallait voter que l’ANI, juste l’ANI et rien que l’ANI… Voilà les arguments que vous nous avez opposés tout au long de l’examen de ce texte.

La pression du patronat sur la majorité sénatoriale et le Gouvernement est tellement forte que même l’avancement d’une année – à 2024 – de l’obligation du partage de la valeur dans les PME réalisant des bénéfices a été retiré de la version finale de ce projet de loi.

Nous nous souviendrons de cette posture lorsque les négociations sur la nouvelle convention de l’assurance chômage s’achèveront. Elle équivaut à un dénigrement de notre droit constitutionnel d’amendement, et ce au nom du respect d’un texte signé par les organisations syndicales.

Hier, la commission mixte paritaire est parvenue à l’élaboration d’un texte commun. Il est temps d’en tirer les conclusions.

Malgré un projet de loi dont l’objet était de partager la valeur dans l’entreprise, le Gouvernement a réussi l’exploit de ne pas aborder une seule fois le sujet des salaires. Ces derniers sont pourtant, par essence, le résultat des rapports de force dans l’entreprise autour du partage de la richesse créée ; ils créent en outre, dans la durée, des droits permettant ensuite d’accéder à des prestations sociales. Le développement de l’épargne salariale, de l’actionnariat, des primes, de l’intéressement ne pourra jamais s’y substituer, d’autant que, nous le savons, les primes ne sont pas pérennes et qu’elles continuent de dépendre du bon vouloir des entreprises.

Nous l’avions dit en première lecture et je le répète : ces mécanismes ont un important effet de substitution aux salaires, puisqu’ils transforment des augmentations de salaire en primes et en intéressement ; ils engendrent de ce fait une perte de recettes pour la sécurité sociale, et une perte de droits pour les salariés.

C’est la raison pour laquelle, en préambule de l’accord national interprofessionnel, syndicats et patronat se sont accordé sur la phrase suivante : « Les partenaires sociaux réaffirment que le salaire doit rester la forme essentielle de la reconnaissance du travail fourni par les salariés et des compétences mises en œuvre à cet effet. »

Le salaire est le grand oublié de votre texte, monsieur le ministre, de ce texte sur le partage de la richesse créée dans les entreprises. Un véritable partage de la valeur passerait par l’indexation des salaires sur l’inflation, la revalorisation du Smic à 1 600 euros net par mois et la stricte application de l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.

Comme souvent, nous n’attendions rien des annonces du Président de la République, mais nous sommes tout de même déçus.

Pour l’ensemble de ces raisons, les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky voteront contre ce projet de loi.

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