Intervention de Aurélien Rousseau

Réunion du 16 novembre 2023 à 14h30
Financement de la sécurité sociale pour 2024 — Après l'article 25, amendement 992

Aurélien Rousseau :

Je n’hésite pas à émettre un avis défavorable sur l’amendement n° 992 rectifié, qui me paraît à la fois peu opérant et peu conforme à la réalité. Pour ceux qui s’y connaissent, en pharmacie, la dispensation à l’unité est un défi logistique et de sécurité sanitaire. Basculer de la possibilité à l’obligation me paraît donc prématuré.

Je suis quelque peu tourmenté au sujet des autres amendements, car je suis convaincu sur le fond.

Je serais tenté d’émettre un avis favorable et de m’en remettre à un décret visant à préciser les conditions de sécurité sanitaire, notamment parce que les industriels n’ont pas forcément prévu le conditionnement permettant de faire les découpages pour dispenser leurs produits à l’unité. Il s’agirait ainsi d’une disposition législative d’appel nécessitant ensuite un cadrage extrêmement strict en termes de sécurité, d’autant, cela vient d’être dit, que les pharmaciens ne sont pas les seuls à dispenser des produits médicaux.

J’émets donc un avis favorable, mais en précisant explicitement devant le Sénat que nous devrons mettre en place, par décret, après avis de la HAS, les conditions de délivrance. Quoi qu’il en soit, il est important d’envoyer un signal pour mettre un terme au gaspillage en la matière. Nos armoires à pharmacie sont quelquefois trop remplies de choses dont nous n’avons pas forcément besoin.

Monsieur le président de la commission, vous m’avez posé une question sur les dispositifs médicaux. Sont-ils dans la charte ? J’ai reçu la semaine dernière tous les industriels et les acteurs de la chaîne du médicament. Cette année, nous ne sommes pas, comme l’an dernier, dans une gestion de la pénurie. Je pense aux médicaments génériques, qui ne sont pas innovants. Nous avons sur le territoire national les stocks nécessaires.

En revanche, nous constatons une dérégulation totale du système de distribution du médicament, avec notamment, des pharmaciens – disant cela, je ne leur jette pas la pierre, car leur comportement est parfaitement rationnel – qui essaient d’obtenir directement auprès des industriels les doses, en particulier d’amoxicilline. S’ils les stockent, ce n’est pas pour le plaisir, mais parce qu’ils souhaitent pouvoir répondre à la demande. Dans ce cadre, les industriels privilégient souvent, quant à eux, les plus grosses officines au détriment des pharmacies rurales, qui se retrouvent alors en pénurie.

J’ai demandé la semaine dernière à la présidente de l’ordre des pharmaciens de me remettre sous dix jours une charte. Je souhaite en revenir au rôle structurant du grossiste répartiteur : c’est à lui de passer les commandes à l’industriel. Je propose donc grosso modo le retour à une répartition à 80/20 ou à 70/30, à savoir que 80 % de médicaments sont commandés par le grossiste répartiteur auprès de l’industriel, le reste étant commandé en direct. Les grossistes répartiteurs ont fait la preuve de leur efficacité.

J’inclus dans cette procédure les molécules sensibles, mais aussi certains dispositifs médicaux. Nous rencontrons en effet aujourd’hui sur certains produits, comme les médicaments pédiatriques, conditionnés souvent en flacons en verre ou en pipettes, un problème d’approvisionnement. Nous mettons donc aussi ces médicaments sous surveillance. Tous les acteurs de la chaîne ont compris, il me semble, leurs responsabilités.

En tout état de cause, je vous présenterai un dispositif visant à renforcer les compétences de police sanitaire de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), notamment pour prendre la main en cas de dérégulation. Aujourd’hui, cette possibilité n’existe pas. Notre seule solution, à l’heure actuelle, est de faire du name and shame – tous les industriels et tous les acteurs l’ont compris. Si la charte n’est pas « mordante », je donnerai à voir aux Français l’état de la situation, en pointant les responsabilités de chacun…

Je suis donc favorable à ces amendements, à l’exception de l’amendement n° 992 rectifié.

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