L’Ondam est-il, depuis la crise sanitaire, un outil pilotable ? Non. A-t-il été piloté ? Non plus.
Fallait-il néanmoins en passer par là ? Je pense que oui. Dans un contexte de crise tel que nous n’en avions jamais connu, il était très difficile, mais indispensable, de maintenir des échanges réguliers entre le ministère, les ARS, l’assurance maladie et l’ensemble des acteurs du système de santé. Et, cette année, nous subissons l’impact de l’inflation.
Nous ne manquons toutefois pas de dispositifs. Roselyne Bachelot parle encore avec émotion du printemps 2007 : le Comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie avait alors préconisé des mesures de redressement que le dépassement de l’Ondam imposait, la progression des dépenses de santé dérivant de plus de 0, 5 point par rapport à la trajectoire.
Le comité d’alerte a été mobilisé tout le long de la crise sanitaire et durant l’année 2023. Il a considéré que la situation justifiait de qualifier d’insatisfaisants la gestion et le pilotage de la dépense sociale, l’Ondam étant désormais un outil de constatation bien plus que de pilotage.
Vous contestez par ailleurs, madame la rapporteure, l’augmentation de 3, 2 % du niveau de l’Ondam. Vous pourriez tout aussi bien critiquer – vous le faites implicitement – le fait que le Gouvernement présente au Parlement une rectification de 2, 8 milliards d’euros, ce qui est indéniablement énorme et pourtant indéniablement insuffisant, eu égard au niveau de l’inflation.
Pour ma part, je me suis assigné des objectifs. Je veille à un pilotage extrêmement serré de l’Ondam, car il ne faut pas jeter cet outil avec l’eau du bain. On a connu des périodes, sous des majorités de gauche comme de droite et jusqu’en 2019, où l’on arrivait tant bien que mal, à la fin de l’année, à faire atterrir les dépenses sur l’Ondam.
Bien entendu, les dépenses liées aux soins de ville et aux médicaments sont particulièrement difficiles à maîtriser. Néanmoins, je souhaite que l’Ondam redevienne un outil de pilotage des dépenses d’assurance maladie.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez raison de dire qu’avec une augmentation de 3, 2 % par rapport à 2023, dans un contexte où l’inflation atteint elle-même 3, 2 % – en dépit de relatives bonnes nouvelles sur ce front –, l’Ondam est serré, et qu’il est loin d’être plantureux.
Cependant, je considère qu’il sera de ma responsabilité de le piloter. Le Gouvernement prend ce risque, qui n’a rien d’un pari hasardeux, et, en mai 2024, le comité d’alerte jugera si les dépenses dérivent ou si l’Ondam est correctement piloté.
Je comprends évidemment la position politique consistant à rejeter l’Ondam qui est ici présenté, mais je conteste en partie le procès en insincérité que vous faites à la copie gouvernementale.
Le défi est devant nous, il est simple : réduire la dépense de ville. J’étais ce matin à Lyon aux rencontres d’Avenir Spé, le syndicat des médecins spécialistes. De manière presque paradoxale, nous nous sommes accordés sur le fait qu’il est indispensable de revenir à la notion de pertinence. À l’heure où s’ouvre la négociation conventionnelle, les acteurs de la santé publique savent qu’ils ont tous, peut-être pas pour les mêmes motifs, le même intérêt à s’engager pour la pertinence des actes, compte tenu de l’évolution de la démographie médicale et de l’éventuelle inscription dans la convention d’incitations à réaliser des efforts en ce sens.
C’est pourquoi je fais le pari de la responsabilité. J’ai déjà eu l’occasion hier de vous préciser que responsabilisation n’était pas synonyme de stigmatisation des patients.
J’ai conscience que le défi est loin d’être gagné. Il est en tout cas certain que, d’un point de vue démocratique, il est peu satisfaisant que les parlementaires doivent se contenter de constater le respect ou non de l’Ondam en loi de financement rectificative de la sécurité sociale, en loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale ou, a fortiori, dans la LFSS relative à l’exercice de l’année suivante. À charge, donc, pour l’exécutif de mettre de nouveau en œuvre les dispositifs de pilotage dont s’assortit l’Ondam.
Enfin, la principale critique qui peut être adressée à cet objectif national de dépenses d’assurance maladie a trait à la prise en compte du virage vers la prévention. À la vérité, il est impensable de financer par les recettes pour 2023 la vaccination contre les infections à papillomavirus humain (HPV), alors que celle-ci a vocation à éviter que des milliers de cancers ne se déclarent dans trente ans. Le modèle de financement de la prévention et de l’innovation en santé reste à trouver.
Aussi le défi de cette année, outre celui de la maîtrise des dépenses de l’assurance maladie, est-il de construire le modèle de financement de la prévention. Nous devrons impliquer les organismes complémentaires dans cette réflexion, car ils sont un acteur important en ce domaine.
Pour toutes ces raisons, l’avis du Gouvernement est défavorable sur ces amendements.