Lors de l’examen en deuxième lecture de ce projet de loi, nous avons présenté avec force nos amendements, non pour le plaisir de faire durer les débats, mais parce qu’il s’agit d’un texte symbolique, très chargé idéologiquement, et ce de votre propre choix. Il était bien sûr de notre responsabilité d’y répondre, en fonction tant de nos propres engagements que des engagements de personnes et d’associations actives dans le domaine de l’aide aux immigrés.
Nous vous l’avons dit, nous considérons que votre politique de l’immigration est pour le moins inefficace et que ce projet de loi n’est qu’un énième texte inutile.
Ce projet de loi pose de nombreux problèmes, y compris constitutionnels. Vous ne serez donc pas étonnés que nous déposions un recours auprès du Conseil constitutionnel, sur plusieurs sujets : la limitation des pouvoirs du juge, la modification de nombreux délais, dont nous avons débattu notamment au cours de la séance d’hier, la limitation de l’aide juridictionnelle, et j’en passe.
Plusieurs points restent en quelque sorte des sujets de contentieux.
C’est le cas de l’article 17 ter, tendant à limiter l’accès de l’étranger malade à l’autorisation de séjour de longue durée. Je peux vous assurer que l’émotion suscitée par le vote de la majorité sur cette question n’est pas près de s’éteindre, et qu’elle vous suivra.
C’est aussi le cas de l’interdiction de retour, que nous avons qualifié de « bannissement », un mot lourd de sens qui fait penser au capitaine Dreyfus…
Je pense également aux « mariages gris », à l’inversion de l’ordre d’intervention des juges judiciaire et administratif, à la création de zones d’attente à géométrie variable, à la visioconférence et à la limitation de l’aide juridictionnelle devant la CNDA.
Le débat en première lecture avait certes été marqué par la confrontation de deux approches, mais nous avions eu le sentiment que le Sénat, y compris grâce à certaines interventions du rapporteur ainsi qu’aux votes exprimés par la commission des lois et la majorité, avait fait évoluer le texte et l’avait amélioré sur un certain nombre de points.
Mais après ! À l’Assemblée nationale, le texte a été entièrement raboté par un groupe de députés aux positions extrémistes qui brandissent leur drapeau dès qu’il s’agit d’évoquer ces questions, avec le soutien bénévolent du Gouvernement, qui a introduit subrepticement plusieurs amendements. Nous ne sommes pas dupes de la stratégie adoptée : le texte qui est revenu au Sénat en deuxième lecture était évidemment défiguré.
Nous avons constaté, avec une certaine tristesse, que la commission des lois ainsi que la majorité n’avaient pas voulu se dresser contre ces modifications désastreuses, et que la recherche d’un compromis avait été négociée en vue de préparer la prochaine commission mixte paritaire.
Je le dis sans amertume, un seul de nos amendements a été adopté : présenté hier par Mme Tasca, il tendait à modifier un titre… Voilà le résultat de plusieurs dizaines d’heures de débat ! Cela signifie-t-il que nous avons toujours tort ?
Cela augure bien mal des travaux de la commission mixte paritaire et de la mise en œuvre de la politique d’immigration dans notre pays, au cours des prochains mois !
Pour notre part, nous avons présenté notre politique en la matière, et j’espère que nous serons bientôt en position de la mettre en œuvre.