Intervention de Marie-Agnès Labarre

Réunion du 14 avril 2011 à 9h30
Immigration intégration et nationalité — Vote sur l'ensemble

Photo de Marie-Agnès LabarreMarie-Agnès Labarre :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, une fois encore, le Gouvernement affiche ses priorités. Alors que plus de 8 millions de personnes vivent, en France, sous le seuil de pauvreté et que le chômage explose, la droite continue de se focaliser sur son fonds de commerce habituel : le repli sur soi et le rejet de l’autre.

Il n’y a rien d’étonnant à cela. Le projet ultralibéral a toujours marché sur deux jambes : d’un côté, la dérèglementation de toutes les règles de protection sociale, visant à mieux pressuriser les travailleurs et à augmenter les profits d’une poignée de nantis, de l’autre, une politique sécuritaire de stigmatisation des immigrés.

L’UMP utilise toujours ses vieilles recettes. Il n’y a rien d’étonnant, dès lors, à ce que le Gouvernement annonce, au moment où le projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité est en discussion au Sénat, la disparition partielle de l’impôt de solidarité sur la fortune.

Voilà donc votre projet de société : la précarité pour tous les travailleurs, la libre circulation des capitaux au profit d’une minorité de rentiers, et la fermeture des frontières aux êtres humains contraints, pour des raisons sociales, humanitaires, voire écologiques, de s’arracher à leur terre.

Alors que les révolutions arabes ouvrent un nouveau chemin pour l’humanité tout entière, vous envoyez un message xénophobe à ces peuples en mouvement.

Au final, ce énième texte relatif à l’immigration est celui du racisme libéré, qui légitime l’idée d’une immigration coupable de tous les dégâts causés par les politiques libérales. Vos politiques libérales !

Ce texte marque le renforcement de l’immigration choisie, qui illustre votre conception inhumaine de la question. Pour vous, les immigrés sont des marchandises comme les autres. Encore que… : lorsqu’il s’agit réellement de marchandises, vous prônez l’ouverture complète des frontières !

Ce texte, qui instaure une peine de bannissement valable dans toute l’Union européenne, marque le retour à l’Ancien Régime.

Il met en œuvre une suspicion généralisée à l’encontre des étrangers, notamment au travers du durcissement des conditions d’accès à la nationalité par le mariage.

Accepter ce texte, c’est se soumettre aux déviances d’un gouvernement xénophobe, qui pourra décider par circulaire quels immigrés auront le droit de se faire soigner et lesquels devront retourner mourir dans leurs pays.

Bref, votre texte va à l’encontre de notre conception de la France républicaine. Pour nous, la France est belle lorsqu’elle est métissée. Nous devons faire France de tout bois : la France révolutionnaire, la République de 1793 accordait la nationalité française à tous ceux qui résidaient depuis un an sur le territoire.

Voilà ce que représente pour nous la France. C’est au nom de cette conception que je voterai contre le présent texte.

Vous décidez de rompre cette tradition républicaine en faisant fi de la réalité. Vous ne tenez même pas compte des rapports que vous avez vous-mêmes commandés. Une équipe de chercheurs de l’université de Lille a ainsi réalisé, en 2009, pour le compte du ministère des affaires sociales, une étude dont il ressort que l’immigration présente un solde positif de 12, 4 milliards d’euros pour les finances publiques – les immigrés cotisent davantage qu’ils ne consomment de prestations –, auquel il faut ajouter d’autres apports, pas toujours monétaires, mais d’une grande importance sociale et économique : les immigrés occupent l’immense majorité des emplois dont peu de Français veulent. Dans cette optique, le Conseil d’orientation des retraites, dont vous vantiez pourtant les rapports lors de la récente réforme des retraites, qui a imposé aux Français deux années de travail supplémentaires, a calculé que l’entrée de 50 000 nouveaux immigrés par an permettrait de réduire le déficit des retraites à hauteur de 0, 5 point de PIB. Ironie de l’histoire, c’est le coût des expulsions – 609 millions d’euros pour l’année 2009, soit 21 000 euros par expulsion – qui est notamment pointé par la commission des finances du Sénat.

Telle est la réalité de l’immigration en France, voilà ce qu’elle nous apporte à tous. Mais vous êtes obnubilés par le Front national et sa mise en scène nauséabonde. Sur ce point, vous pouvez être rassurés, chers collègues de la majorité : en votant cette loi, vous contribuerez – à l’instar de M. le ministre, qui a déjà reçu sa carte d’adhérent de prestige de ce parti

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