Monsieur Zocchetto, je remercie le groupe de l'Union centriste-UDF pour son soutien déterminé à l'action résolue du Gouvernement.
Parmi vos nombreuses remarques, qui témoignent d'une analyse très pertinente, je voudrais souligner un point particulièrement important : la nécessité d'inscrire notre action dans un cadre européen.
Vous vous êtes inquiété du fait que le Parlement européen n'avançait pas à un rythme suffisant concernant la conservation des données. Voilà une douzaine de jours, j'étais à Bruxelles pour le sommet des vingt-cinq ministres de l'intérieur de l'Union européenne pour défendre nos positions au nom du ministre d'État. Aux côtés de l'Espagne, de l'Italie et de la Grande-Bretagne, nous avons contribué largement à faire adopter à l'unanimité des vingt-cinq pays de l'Union européenne, sous la présidence britannique, une motion permettant une avancée importante en matière de conservation des données techniques par les opérateurs de communications. La position arrêtée à cette occasion est de passer de six mois minimum à vingt-quatre mois maximum.
Pour vous rassurer quant à l'inquiétude qui est la vôtre, je veux vous dire qu'aujourd'hui même le Parlement européen s'est prononcé dans le même sens par un vote - je l'indique, car il est très significatif - de 378 voix contre 197. Ce score écrasant permet aujourd'hui au Parlement, dans le prolongement des vingt-cinq ministres de l'intérieur, de progresser sur la directive relative à la rétention des données par les opérateurs de télécommunications.
Qu'on ne me dise pas ici que cela constituerait une privation fondamentale d'un certain nombre de libertés ! La majorité des parlementaires européens et les gouvernements des Vingt-cinq à l'unanimité, alors qu'un grand nombre d'entre eux sont d'obédience politique bien différente, ont souhaité avancer au même rythme et dans des proportions aussi importantes.
Bien que M. Badinter ne soit pas présent, je veux lui dire que j'ai écouté attentivement son analyse, avec le respect qui est dû à l'ancien président du Conseil constitutionnel.
Je tiens à affirmer, avec une certaine solennité que le Gouvernement partage la préoccupation qui est la sienne et qui, en vérité, est celle de tous les démocrates de notre pays. Oui, bien sûr, la lutte contre la barbarie terroriste doit passer par les seules voies légitimes, qui sont les voies du droit. La double exigence que vous avez soulignée, celle de la constitutionnalité de la loi et celle de la nécessité, est aussi la nôtre.
Je tiens à rappeler que la préparation minutieuse de ce projet de loi nous a permis d'entretenir un dialogue fructueux avec le Conseil d'État, dont l'assemblée générale a adopté le projet du Gouvernement, à quelques modifications de rédaction près.
Je tiens également à rappeler que la nécessité de ce texte est exprimée en tout premier lieu par les acteurs de la lutte antiterroriste : magistrats ou policiers.
Vous avez insisté sur la nécessaire stabilité de la loi, je vous en donne acte. Mais je dois souligner que si, depuis 2001, les démocraties ont choisi de moderniser leurs instruments juridiques de lutte contre le terrorisme, c'est précisément pour les adapter aux nécessités du temps. Le terrorisme change de nature et d'intensité. Nous devons garder un temps d'avance, sans rien renier de nos principes. C'est toute l'ambition de ce projet de loi qui vous est proposé.
Vous avez beaucoup fait référence à l'Espagne, en matière de défense des libertés individuelles et, surtout, s'agissant des défis lancés à la démocratie. Permettez-moi, à mon tour, de m'y référer, car, dans ce grand débat qui s'inscrit dans le cadre de l'Union européenne aujourd'hui, aux côtés du gouvernement français, le gouvernement espagnol est l'un de ceux qui est le plus en pointe.
Notamment dans l'exploitation du système d'information Schengen II, qui, avec dix nouveaux entrants, doit prolonger le système d'information de Schengen I, le ministre de l'intérieur espagnol était l'un des plus offensifs sur la possibilité d'exploitation du fichier au-delà des seules polices aux frontières par nos polices de l'intérieur dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Pour nous aussi, l'Espagne est une bonne référence et je remercie M. Badinter de l'avoir souligné.
Monsieur Goujon, je vous remercie de votre entier soutien. J'en retiens un certain nombre points, essentiellement deux.
Vous avez souhaité rendre hommage aux fonctionnaires des services de police antiterroriste. C'est un hommage mérité, auquel ces serviteurs dévoués des Français seront particulièrement sensibles.
En outre, je soulignerai votre expérience d'élu parisien attentif aux moyens dont disposent les forces de police dans la capitale, qui donne beaucoup de poids à votre analyse favorable à un développement de la vidéosurveillance dans les lieux publics. J'aurai l'occasion d'y revenir.
Monsieur Sueur, finalement, nous sommes d'accord sur l'essentiel ! De vos propos je retiens, en effet, que vous souhaitez le respect de l'état de droit, nous aussi, le respect des prérogatives de l'autorité judiciaire, nous aussi, et des dispositions temporaires dans toute la mesure du possible, nous aussi !