Le pacte Dutreil n'est ni un marronnier ni une obsession du groupe communiste, mais les épisodes récents nous conduisent à nous interroger de nouveau sur l'efficacité, l'utilité et le coût de ce dispositif.
L'ancien ministre qui lui a donné son nom s'est livré récemment à une explication quelque peu hasardeuse sur les raisons du maintien du fameux abattement de 75 % sur la cession de titres d'entreprise, véritable machine à produire des inégalités.
Il a mis en avant « l'intérêt très fort » qu'il y aurait à garder les familles de milliardaires en France. Les qualifiant de « meilleurs gardiens des entreprises », il soulignait le risque de voir ces familles partir à l'étranger, ajoutant même que 75 % des entreprises en France étaient vendues à des acquéreurs étrangers. Ce n'est pas rien !
Interrogé sur le fond par la journaliste, M. Dutreil a avoué ne pas disposer de statistiques, pour la simple et bonne raison qu'elles n'existent pas. Il se contentait donc de donner un ordre de grandeur. Voilà qui est tout de même surprenant et pas très sérieux !
Ce qui n'est pas sérieux non plus, c'est que cette niche fiscale soit évaluée chaque année depuis dix ans à 500 millions d'euros tout ronds dans les documents budgétaires. Étonnante régularité ! Et pour cause, elle n'a pas été évaluée depuis toutes ces années.
Le Gouvernement reconduit donc une niche fiscale dont il ignore le coût. Monsieur le ministre, mes chers collègues, vous êtes pourtant si soucieux des deniers publics !
Permettez-moi d'ailleurs de penser que ce montant de 500 millions d'euros est largement sous-estimé au regard de l'explosion du nombre de pactes : de 872 en 2013, nous sommes passés à 2 682 pactes en 2022.
Interrogé à ce sujet, le directeur général des finances publiques nous a indiqué qu'une évaluation était en cours. Qu'en est-il, monsieur le ministre ? Nous espérons de votre part une réponse précise.