Il me semble que nous nous trompons complètement de débat.
La question n'est pas de savoir si la fraude au prix de transfert doit être traquée : évidemment qu'elle doit l'être ; je vous rejoins à 100 % sur ce point, monsieur le ministre. Mais il se trouve que c'est déjà le cas.
Le seuil de 400 millions d'euros permet déjà de « taper » les plus grosses entreprises qui pratiquent la fraude aux prix de transfert grâce à l'internationalisation.
La baisse du seuil à 150 millions d'euros fait entrer dans le champ d'application de la mesure nombre d'entreprises dont les filiales sont françaises et ne pratiquent pas spécialement la fraude.
Le plus dommageable, c'est l'état d'esprit dans lequel tout cela est fait. Les services du contrôle fiscal – disons les choses franchement, monsieur le ministre – n'ont qu'un seul objectif : faire du chiffre. (Et il est demandé aux entreprises de payer pour que l'administration y parvienne.
Nous savons comment les choses se passent. Les critères pour les prix de transfert ne sont pas très clairs. C'est comme pour la holding animatrice dont nous parlions précédemment.
Un contrôle fiscal est lancé. Il aboutit à un redressement et à une pénalité de 2 millions d'euros. Certaines entreprises paient, mais d'autres annoncent aller devant un tribunal. Un arrangement est proposé, et la pénalité est réduite à 1, 2 million d'euros. Certaines entreprises paient, mais d'autres veulent quand même aller devant le tribunal. La veille de l'audience, une proposition de pénalité à 650 000 euros est soumise à l'entreprise. Là encore, certaines paient, mais d'autres vont au bout de la procédure. Et, parmi ces dernières, 90 % gagnent contre l'administration fiscale.
En d'autres termes, le dispositif qui nous est proposé relève ni plus ni moins de l'opération destinée à « taper » de l'argent aux entreprises en se servant des prix de transfert.