Intervention de Michel Mercier

Réunion du 14 avril 2011 à 15h00
Contentieux et procédures juridictionnelles — Adoption d'un projet de loi en procédure accélérée

Michel Mercier, garde des sceaux :

Je le reconnais bien volontiers, monsieur Badinter, mais c’était voilà bien longtemps, en 2001. Ensuite, ils se sont faits plus rares.

Quoi qu’il en soit, depuis 2007, le Premier ministre veille à ce que le budget de la justice progresse chaque année. Ce budget, qui était de 4, 5 milliards d’euros en 2002, a, pour la première fois, dépassé 7 milliards d’euros en 2011, soit une augmentation de 60 % en neuf ans, dont 14 % entre 2007 et 2011.

Plus important encore, et M. Hyest l’a souligné, en 2002, le budget de la justice représentait 1, 7 % du budget de l’État contre 2, 5 % en 2010. Cette progression, peut-être insuffisante, est néanmoins tout à fait significative.

Entre 2002 et 2011, le nombre des magistrats est passé de 6 952 à 8 197 et celui des fonctionnaires et greffiers a progressé de 20 461 à 21 091, dont 9 237 greffiers, soit une augmentation de 18 %. En 2011, 399 nouveaux emplois de greffiers seront créés.

La progression des moyens se poursuivra dans les prochaines années : 485 emplois seront créés, 315 en 2012 et 170 en 2013, dont 235 postes de magistrats et 160 postes de greffiers. Il s’agit donc d’une évolution continue, et je tenais à le souligner devant le Sénat.

Mais l’augmentation des moyens doit s’accompagner d’une réforme la justice. À cette fin, il faut, comme l’a souligné M. Reichardt, recentrer le juge sur son cœur de métier, car aujourd’hui, on lui en demande beaucoup trop. En fait, nous devons agir dans un double mouvement.

Lorsque le juge tranche avec une autorité particulière un conflit, se prononce sur une difficulté ou sanctionne la non-observation de la loi, sa décision doit apporter une vraie plus-value. Le juge n’est pas une assistante sociale. Les deux métiers sont nécessaires et respectables, mais chacun a son office. Nous devons opérer un double mouvement : d’une part, créer des moyens nouveaux ; d’autre part, recentrer le juge sur son cœur de métier, et c’est l’objet du présent projet de loi. Par ce double mouvement, nous donnerons au service public de la justice des moyens dont il a bien besoin.

Nous aurons l’occasion, au cours des débats, de revenir sur les nombreux points qui ont été soulevés. Mais permettez-moi en cet instant, sans allonger la discussion, d’apporter quelques précisions.

M. Détraigne a exprimé ses inquiétudes en ce qui concerne le mariage, le divorce et de la médiation. Aujourd'hui, le contentieux familial représente près de 60 % du volume des affaires des juridictions. Cette situation est-elle normale ? Il me semble que nous ne pouvons pas éviter d’engager la réflexion sur ce sujet. Faut-il vraiment faire appel au juge à la moindre difficulté ? La question mérite d’être posée.

Dans certaines situations, seul le juge peut trancher. Mais parfois, des professionnels autres que le juge peuvent aider les couples à surmonter les difficultés qu’ils rencontrent. C’est l’objet de la médiation, que nous souhaitons rendre obligatoire.

Comme l’ont souligné MM. Alfonsi et Détraigne, cette disposition induira des dépenses supplémentaires, mais c’est nécessaire si nous voulons de libérer le temps du juge.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la plupart d’entre vous, je l’ai bien compris, sont opposés à la mesure permettant de prononcer le divorce sans comparution des deux membres du couple. Il n’est pas question pour le Gouvernement d’ignorer la position que prendra le Sénat, mais nous considérons que cette mesure se justifie lorsque les seuls intérêts en jeu sont ceux des deux membres du couple. En revanche, lorsque qu’il y a des enfants, il est tout à fait normal que le juge puisse les protéger.

Monsieur le rapporteur, vous avez à juste titre insisté sur la solennité du mariage. Toutefois, je constate que ce n’est pas le juge qui officialise le mariage. Dès lors, pourquoi ne pas envisager d’autres voies que le recours au juge pour défaire une union.

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