Séance en hémicycle du 14 avril 2011 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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Sommaire

La séance

Source

La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de Mme Catherine Tasca.

(Texte de la commission)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L’ordre du jour appelle la discussion, en procédure accélérée, du projet de loi relatif à la répartition des contentieux et à l’allégement de certaines procédures juridictionnelles (projet n° 344, texte de la commission n° 395, rapports n° 394 et 367).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi qui vous est soumis s’inscrit pleinement dans un mouvement amorcé en 2009 et destiné à mettre en œuvre les propositions de la commission sur la répartition des contentieux présidée par le recteur Serge Guinchard, qui avait rendu ses excellentes conclusions en juin 2008.

Outre la loi du 22 décembre 2010 relative à l'exécution des décisions de justice, aux conditions d'exercice de certaines professions réglementées et aux experts judiciaires et la loi du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et de certaines professions réglementées, qui ont mis en œuvre nombre de ces préconisations, d’autres mesures significatives ont été adoptées dans différents textes. Je pense notamment aux dispositions insérées dans la loi du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures, qui a créé un « pôle famille » au sein des tribunaux de grande instance, ainsi qu’à la réforme du traitement du surendettement des particuliers, résultant de la loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation.

C’est donc à la lumière de l’ensemble de ces importantes réformes qui redessinent notre organisation judiciaire que le présent projet de loi doit être examiné.

Ce texte vise deux objectifs principaux : améliorer la répartition des contentieux, en procédant à une clarification de l’organisation judiciaire ; simplifier les procédures, en mettant en œuvre un allègement des règles en vue d’un traitement plus efficace des litiges.

Un effort de clarification et de simplification de la répartition des contentieux est donc au cœur du texte.

Cette clarification des compétences s’imposait comme une nécessité, après la réforme de la carte judiciaire, entrée en vigueur le 1er janvier dernier : la définition d’une carte judiciaire plus cohérente et mieux structurée constituait une première étape indispensable, mais elle devait s’accompagner d’une répartition plus claire et rationalisée des compétences.

Tel est bien l’objet de ce texte, qui offre une plus grande lisibilité aux juridictions de première instance, en clarifiant les compétences respectives des tribunaux d’instance et des tribunaux de grande instance.

Cette plus grande lisibilité supposait par ailleurs la suppression de la juridiction de proximité créée par la loi du 9 septembre 2002 d’orientation et de programmation pour la justice. En effet, la commission Guinchard a souligné la confusion et la complexité introduites, pour les justiciables et les praticiens, par l’existence de ce troisième ordre de juridiction.

Pour autant, à la lumière de l’expérience, l’apport des 672 juges de proximité dans la vie de nos tribunaux est indéniable. C’est pourquoi le Gouvernement a choisi de les maintenir et de les intégrer au sein des tribunaux de grande instance. Ce repositionnement contribuera à améliorer le dialogue et les échanges entre les juges professionnels et les juges de proximité.

Quelles seront les nouvelles missions des juges de proximité ?

Ils pourront participer aux audiences collégiales des tribunaux de grande instance, non plus seulement en matière pénale, mais aussi au civil, ce qui d’ailleurs leur permettra, dans ce domaine également, de procéder à des mesures d’instruction telles que transports sur les lieux ou auditions des parties ou des témoins.

Ils pourront en outre se voir confier la procédure non contradictoire d’injonction de payer, celle-ci relevant désormais du tribunal de grande instance au-delà du seuil de 10 000 euros.

Les juges de proximité conserveront enfin leur compétence s’agissant des contraventions des quatre premières classes.

La commission des lois du Sénat, sous l’impulsion de son rapporteur, dont je salue le travail de grande qualité, a approuvé les dispositions du texte sur ce point. Je sais qu’elle s’interroge encore sur certaines de leurs conséquences. Pour ma part, je suis très attaché à la cohérence de la réforme, mais nous en débattrons le moment venu.

Le texte tend aussi à un effort de spécialisation pour les contentieux les plus complexes et requérant un haut degré de technicité, afin d’améliorer l’efficacité des enquêtes et instructions et de réduire les délais de jugement.

Le projet de loi institue donc plusieurs pôles spécialisés en matière pénale. Je me réjouis que ces dispositions fassent l’objet d’un consensus, tant elles représentent une avancée d’importance pour les contentieux sensibles qui sont en cause.

Ainsi, un pôle national compétent pour les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre verra le jour au sein de la juridiction parisienne ; sur l’initiative de la commission des lois, il aura aussi compétence, et je m’en réjouis, pour les crimes de torture visés par la convention de New York du 10 décembre 1984.

Par cette spécialisation des magistrats et des enquêteurs, nous améliorerons le traitement des procédures en ce domaine.

En outre, à la suite de l’adoption d’un amendement du Gouvernement, le texte issu de la commission des lois prévoit des capacités d’enquête renforcées pour la recherche des auteurs de crime contre l’humanité et de crime de guerre.

L’ensemble de ces mesures, souhaitées par le Gouvernement, mais réclamées aussi par de nombreuses organisations non gouvernementales, constituent un signal fort de la volonté de la France de lutter contre les crimes les plus graves et de disposer des outils les plus efficaces pour assurer le respect de nos engagements internationaux.

Le projet de loi crée par ailleurs des pôles régionaux compétents pour les accidents collectifs.

L’expérience a en effet montré que la prise en charge « judiciaire » des grandes catastrophes pouvait s’avérer difficile. Par nature, ces événements peuvent survenir en tout lieu de notre territoire, parfois dans le ressort de petites juridictions ; je pense par exemple au dramatique incendie survenu dans le tunnel du Mont-Blanc ou à l’accident aérien du mont Sainte-Odile. Eu égard à leur ampleur et à la technicité des questions qu’elles soulèvent, ces affaires doivent pouvoir être instruites et jugées par des juridictions spécialisées. Les associations de victimes de ces accidents avaient d’ailleurs appelé de leurs vœux une telle évolution.

En matière d’organisation judiciaire, le texte procède à une modification importante de la justice militaire, en supprimant le tribunal aux armées de Paris et en attribuant à la juridiction parisienne la compétence pour les infractions commises en temps de paix hors du territoire de la République par les membres des forces armées ou à l’encontre de celles-ci.

La spécificité de ces infractions n’est pas niée, puisqu’elles seront jugées par les formations du tribunal de grande instance et de la cour d’appel de Paris spécialisées en matière militaire. Cette mesure de cohérence et de simplification est aussi importante symboliquement, car elle parachève l’intégration, en temps de paix, de la justice militaire dans la justice de droit commun.

Comme vous l’avez noté, monsieur le rapporteur pour avis, cette réforme est bien accueillie, tant par les magistrats et les auxiliaires de justice que par les militaires.

La commission de la défense a en outre saisi cette occasion pour procéder à quelques clarifications, qu’il s’agisse de déterminer la juridiction compétente pour les faits commis à bord des navires ou aéronefs ou de simplifier et d’harmoniser la définition de la désertion.

L’effort de clarification de notre organisation judiciaire se double d’un effort de clarification des procédures, qui constitue le second axe fort du projet de loi.

Les dispositions soumises à votre examen apportent des allégements de procédure tant en matière civile qu’en matière pénale. Elles ouvrent de nouvelles perspectives pour le règlement rapide et efficace des contentieux qui ne présentent pas de difficultés particulières.

Le texte permet ainsi de définir les juridictions compétentes pour connaître des demandes formées en application de deux règlements communautaires instaurant une procédure d’injonction de payer européenne et une procédure de règlement des petits litiges.

Par ailleurs, afin de prendre acte d’un récent arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne, je vous proposerai une adaptation de notre réglementation relative à l’inscription des experts sur les listes des juridictions.

Le texte étend également le champ des procédures pénales simplifiées : cette mesure de rationalisation permettra notamment de réduire les délais de jugement et par là même d’améliorer la pédagogie de la sanction pénale.

Comme l’a proposé la commission Guinchard, le projet de loi prévoit ainsi de développer le recours à l’ordonnance pénale, à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, à la procédure d’amende forfaitaire ou encore à la transaction pénale. Comme l’a souligné très justement M. le rapporteur Détraigne, le dispositif permet de réserver les audiences correctionnelles aux contentieux les plus complexes ou les plus sensibles.

Le texte du Gouvernement prévoyait que le recours à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité serait possible pour tous les délits, quelle que soit la peine encourue. J’ai cependant pris acte que la commission des lois du Sénat avait souhaité exclure du champ de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité les violences volontaires et involontaires contre les personnes, les menaces et les agressions sexuelles aggravées. La commission des lois du Sénat été bien inspirée, compte tenu du texte que je présenterai bientôt devant le Sénat.

L’ordonnance pénale pourra être utilisée pour de nombreux délits d’une gravité modérée, autres que ceux portant atteinte aux personnes.

L’amende forfaitaire sera étendue à certaines contraventions de cinquième classe et la transaction à certaines infractions en droit pénal de la santé publique, en droit de la consommation et en droit de la concurrence.

Je sais que ces procédures suscitent chez certains des réticences, mais je ne crois pas que celles-ci soient justifiées. Ces procédures ont en effet fait la preuve de leur efficacité et sont marquées par un souci constant du respect des droits des personnes et de la défense.

De plus, si ces procédures sont habituellement qualifiées de « simplifiées », je parlerai plutôt pour ma part de « procédures acceptées ». En effet, leur caractéristique commune est de ne pouvoir prospérer que si la personne poursuivie accepte la peine proposée par le procureur de la République dans le cas de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, décidée par le juge dans le cadre de l’ordonnance pénale ou prévue par la loi en cas d’amende forfaitaire. Or, quand elle est possible, il me semble qu’une peine acceptée est toujours préférable à une peine imposée.

Il n’y a donc pas lieu de craindre ces procédures qui sont entourées de nombreuses garanties, lesquelles sont sensiblement renforcées dans le présent projet de loi, notamment pour l’ordonnance pénale.

Le texte prévoit enfin deux modifications importantes en matière de divorce : la première concerne le divorce par consentement mutuel, la seconde l’expérimentation du recours préalable obligatoire à la médiation familiale.

Le texte du Gouvernement reprend tout d’abord une des recommandations phares du rapport de la commission Guinchard, qui avait été adoptée à l’unanimité de ses membres. Il prévoit en effet que la comparution personnelle des époux devant le juge aux affaires familiales ne sera plus obligatoire dans le seul cas du divorce par consentement mutuel de couples sans enfants mineurs en commun.

La commission des lois du Sénat a supprimé cette disposition. Aux yeux du Gouvernement, pourtant, elle est respectueuse des droits des parties.

À cet égard, je veux souligner que le contrôle du juge reste intact : il devra évidemment, dans tous les cas, s’assurer de l’intégrité du consentement de chacun des époux et du respect des intérêts de chacun d’entre eux dans la convention de divorce.

En outre, l’accès au juge pour les parties sera de droit dès lors que l’un des époux en fera la demande. Le juge, dès lors qu’il l’estimera nécessaire, pourra aussi organiser cette comparution de sa propre initiative. Enfin, la comparution des époux restera obligatoire lorsque le juge envisagera de refuser l’homologation de la convention.

Au fond, la mesure, soigneusement encadrée, aura la vertu de permettre aux juges aux affaires familiales de se concentrer davantage sur les cas les plus sensibles ou les plus complexes.

Le projet de loi tend également à prévoir une plus grande transparence des prix pratiqués en matière de divorce par consentement mutuel. La commission des lois du Sénat a souhaité aller plus loin en généralisant l’obligation, pour l’avocat, d’établir une convention d’honoraires obligatoire dans tous les cas de divorce. Par ailleurs, elle a souhaité maintenir, à juste titre, un barème indicatif établi par le garde des sceaux sur avis du Conseil national des barreaux. L’amendement que vous présentera M. le rapporteur viendra opportunément préciser ce dispositif.

Enfin, vous le savez, le Gouvernement s’attache à développer une véritable culture de la médiation et de la conciliation : c’est dans cette perspective que le projet de loi prévoit d’expérimenter, en matière familiale, un dispositif de médiation obligatoire avant toute saisine du juge, sous peine d’irrecevabilité de la demande.

En effet, la médiation, qui permet de renouer le dialogue entre parents séparés, facilite la conclusion d’accords équilibrés. La sensibilité du contentieux familial rend d’autant plus nécessaire la recherche de l’adhésion des parents, indispensable à la bonne exécution des engagements pris.

Ce dispositif, recommandé à l’unanimité par la commission Guinchard, ne s’appliquera que lorsque le juge aura déjà statué une première fois sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale ou sur la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant. Ainsi, l’accès direct au juge n’est pas remis en cause par l’expérimentation pour les cas où il n’a jamais eu à connaître de la situation d’une famille.

Par ailleurs, la médiation préalable obligatoire ne sera pas exigée lorsque les parents sont d’accord sur les modifications envisagées ou si un motif légitime est invoqué. Ce critère permettra de répondre à la diversité des situations qui pourraient se présenter, afin d’assurer l’accès effectif au juge.

La commission des lois du Sénat a souhaité étendre les dérogations à ce dispositif au cas où un parent déclare ne pas s’opposer à la demande de l’autre ou lorsque la médiation ne peut être mise en œuvre dans un délai raisonnable, mais ces rédactions me paraissent pouvoir être précisées.

En effet, si l’accord des parties justifie pleinement de leur éviter un recours à la médiation, ce n’est pas nécessairement vrai dans le cas d’une simple absence d’opposition de l’une d’elles, notamment si celle-ci n’est pas présente ou représentée lors de l’audience. C’est précisément le cadre de la médiation qui permettra de s’assurer de la réalité de l’absence d’opposition. Par ailleurs, la référence au délai raisonnable me semble pouvoir trouver sa place parmi les motifs légitimes permettant l’accès direct au juge. Je vous présenterai donc un amendement sur ces sujets.

Certains ont exprimé des craintes quant à ce nouveau dispositif, mais je le crois utile et équilibré : tout d’abord, nous connaissons tous les limites du « tout judiciaire », et les modes alternatifs de règlement des conflits ont fait la preuve de leur efficacité et de leur pertinence ; ensuite, l’expérimentation permettra de tester l’efficacité de cette nouvelle mesure et d’appréhender très précisément les besoins et les améliorations nécessaires à sa généralisation.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je serai également amené à vous présenter d’autres amendements.

En effet, le Gouvernement souhaite abroger la loi du 12 juillet 1909 relative aux biens de famille insaisissables.

Il entend également instaurer un nouveau dispositif permettant d’adapter, le moment venu, en accord avec la profession, le régime de la postulation des avocats devant les tribunaux de grande instance. En effet, la modification au cas par cas, au niveau de la loi, de l’étendue du monopole de postulation des différents barreaux ne satisfait personne, comme l’expérience récente l’a encore montré. Je vous proposerai donc, en lieu et place de ce qui a été voté il y a quelques semaines, un dispositif solide qui permettra de traiter ces questions dans la sérénité et la concertation.

Le Gouvernement souhaite enfin assouplir les exigences de domiciliation en matière de célébration du mariage, en permettant désormais que les unions de nos enfants puissent être célébrées dans les communes de résidence de leurs parents. Cet amendement répond à une demande forte des élus, notamment en milieu rural, et je suis heureux de vous le présenter.

La commission présidée par le recteur Guinchard appelait à l’ambition d’une « justice apaisée », apaisée pour le justiciable, apaisée pour tous les acteurs judiciaires. Par ses avancées nombreuses, le texte soumis à votre examen constitue, me semble-t-il, un pas significatif dans ce sens, vers une justice qui soit mieux comprise, plus accessible. Grâce aux allégements et aux clarifications que nous proposons, elle verra son fonctionnement substantiellement amélioré.

Cette ambition d’une justice efficace et de qualité est aussi la vôtre. Le présent texte nous donne des clés pour la réaliser, et je sais pouvoir compter sur la qualité de vos débats pour donner toute leur ampleur à ces évolutions.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le projet de loi relatif à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles trouve essentiellement son inspiration dans le rapport de la commission sur la répartition des contentieux, présidée par le recteur Guinchard, qui a été remis au garde des sceaux en juin 2008 et dont plusieurs propositions ont déjà été reprises par le Parlement.

Ce texte embrasse des sujets aussi divers que ceux dont connaît chaque jour la justice, et ce nouveau mouvement de simplification et d’allègement des procédures intervient au moment où l’institution judiciaire est confrontée à de profondes mutations.

La réforme de la carte judiciaire à peine achevée au début de cette année, nombre de juridictions doivent gérer une pénurie des moyens humains et matériels et sont notamment conduites à supprimer, dans les derniers mois de l’année, les audiences des juges de proximité ou leur participation, en tant qu’assesseurs, aux formations collégiales des tribunaux correctionnels, faute de crédits pour payer leurs vacations.

Cette situation doit être prise en considération lorsqu’il s’agit de modifier l’organisation judiciaire ou d’alléger les procédures, car il importe de vérifier que la mise en œuvre des mesures envisagées va bien se traduire par un meilleur fonctionnement de l’institution judiciaire.

Si l’objectif d’efficacité doit être pris en compte, cela ne doit pas pour autant conduire à négliger des exigences aussi fondamentales que l’accès de tous à la justice ou le droit à un jugement dans un délai raisonnable. C’est dans cet esprit que la commission des lois a examiné le présent texte.

J’évoquerai principalement, à cette tribune, quatre thèmes du projet de loi qui me paraissent essentiels : la suppression de la juridiction de proximité et la redéfinition des missions du juge de proximité ; la création de nouvelles juridictions spécialisées ; l’extension du recours aux procédures de jugement rapides, simplifiées ou « acceptées », pour reprendre le terme employé par le garde des sceaux ; enfin, l’allègement des règles de procédure en matière familiale.

S’agissant en premier lieu de la suppression de la juridiction de proximité et de la redéfinition des missions du juge de proximité, selon le rapport Guinchard, la juridiction de proximité, créée en 2002-2003, n’a pas atteint l’objectif ambitieux qui lui avait été assigné de réconcilier la justice avec les usagers. Aussi la commission Guinchard a-t-elle préconisé la suppression pure et simple de cette juridiction.

Tout en reprenant cette préconisation, le Gouvernement propose cependant de maintenir les juges de proximité en les rattachant au tribunal de grande instance, ce qui leur permettrait de travailler au contact des juges professionnels. Cette réforme tend donc à maintenir les fonctions des juges de proximité pour statuer en matière pénale, mais à supprimer leurs compétences en matière de contentieux civil.

Le projet de loi retire ainsi aux juges de proximité leur compétence en matière de contentieux civil relatif aux actions personnelles ou mobilières jusqu’à une valeur de 4 000 euros, mais pas leur compétence en matière pénale pour statuer sur les contraventions des quatre premières classes.

La commission a considéré que l’augmentation des moyens des tribunaux d’instance constituait une condition nécessaire de la suppression des fonctions des juges de proximité au contentieux civil.

En effet, cette réforme ne pourra être mise en œuvre sans que des moyens supplémentaires soient accordés aux tribunaux d’instance, qui vont subir, en raison du départ des juges de proximité, le transfert de plus de 100 000 affaires civiles nouvelles. On peut d’ailleurs estimer à une soixantaine d’emplois équivalent temps plein de magistrat les besoins des tribunaux d’instance de ce fait. J’aimerais donc, monsieur le garde des sceaux, vous entendre à ce sujet…

La commission des lois a également approuvé l’extension au tribunal de grande instance de la procédure d’injonction de payer, afin de simplifier l’exercice de l’opposition par le défendeur lorsque la requête en injonction de payer porte sur un montant supérieur à 10 000 euros. Elle souhaite toutefois compléter cette disposition, pour assurer une procédure uniforme dans ce domaine et ne pas exposer les justiciables à des dépenses supplémentaires dans la mesure où la présentation d’une requête devant le tribunal de grande instance nécessite le recours à un avocat.

En deuxième lieu, le projet de loi tend à créer de nouvelles juridictions spécialisées afin de renforcer l’efficacité de la justice pénale dans des contentieux qui se distinguent par leur complexité et leur technicité.

Seraient ainsi créés un pôle judiciaire spécialisé pour les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre au sein du tribunal de grande instance de Paris, d’une part, et des juridictions spécialisées pour les accidents collectifs, d’autre part.

La commission a souhaité étendre la compétence et les moyens du nouveau pôle judiciaire spécialisé pour les crimes contre l’humanité. Elle a, en effet, voulu lui attribuer compétence, d’une part, en matière de crimes et délits de guerre, qui ont été inscrits dans notre code pénal en 2010, et, d’autre part, en matière de crimes de torture, tels que visés par la convention de New York du 10 décembre 1984. Elle a également voulu lui permettre d’utiliser les mesures d’investigation prévues dans le code de procédure pénale pour le pôle spécialisé en matière de criminalité organisée et de terrorisme, telles que l’infiltration et la sonorisation.

La commission a par ailleurs adopté une disposition visant à faciliter les investigations à l’étranger des magistrats chargés de l’instruction de ces crimes et délits, afin de leur permettre de conduire eux-mêmes, dans le cadre d’une commission rogatoire internationale, l’audition de témoins dans un État étranger.

J’ajoute, monsieur le garde des sceaux, qu’il paraît indispensable à la commission qu’une équipe de magistrats puisse se consacrer exclusivement à ce type d’affaires et que des enquêteurs spécialement consacrés aux crimes contre l’humanité et aux crimes de guerre soient mis à sa disposition.

En outre, en complément à la création de juridictions spécialisées en matière d’accidents collectifs, la commission des lois a inséré deux articles additionnels précisant les dispositions permettant aux associations et aux fédérations d’associations de défense des victimes d’accidents collectifs d’obtenir des dommages et intérêts.

En troisième lieu, la commission a souhaité préciser l’extension du recours aux procédures simplifiées de jugement.

Le projet de loi prévoit d’étendre le champ de trois procédures pénales simplifiées : l’ordonnance pénale, la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, la CRPC, et les contraventions.

Si les procédures simplifiées de traitement des affaires pénales se sont bien développées et permettent de réserver les audiences correctionnelles aux contentieux les plus complexes ou les plus sensibles, elles doivent concilier droits de la défense et droits de la victime. À cet égard, la commission a approuvé les dispositions du projet de loi tendant à étendre, de façon limitée, le champ de ces procédures, sous réserve toutefois de plusieurs aménagements.

Dans un souci de pédagogie de la réponse pénale et afin de mieux prévenir la récidive, la commission a précisé que l’ordonnance pénale ne pourra pas être utilisée lorsque les faits auront été commis en état de récidive légale.

Par ailleurs, elle a souhaité que la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, qui est étendue pour certaines infractions punies de peines supérieures à cinq ans d’emprisonnement, en matière de trafic de stupéfiants ou d’escroquerie par exemple, ne puisse pas être utilisée dans les cas les plus graves d’atteintes aux personnes. En effet, le préjudice subi par la victime dans de telles affaires suppose que la culpabilité de la personne mise en cause puisse être systématiquement discutée contradictoirement devant le tribunal correctionnel.

La CRPC offrant un outil utile pour le règlement d’affaires dans lesquelles l’auteur des faits reconnaît sa responsabilité et accepte la sanction proposée, la commission a en outre souhaité autoriser sa mise en œuvre, sur l’initiative du juge d’instruction et avec l’accord de l’ensemble des parties, lorsque les faits reprochés à la personne mise en examen constituent un délit.

Sur la proposition d’extension de la procédure de forfaitisation aux contraventions de cinquième catégorie, la commission des lois a émis un avis favorable. Cependant, elle a souhaité exclure du champ de cette extension celles des contraventions qui deviennent un délit lorsqu’elles sont commises en état de récidive légale.

S’agissant de la transaction pénale, la commission a estimé que le recours à cette procédure dans certains contentieux techniques permettrait d’offrir à l’autorité administrative habilitée à engager des poursuites un outil de réponse efficace et dissuasif, sous le contrôle du parquet. C’est pourquoi elle a souhaité étendre le champ de cette procédure en matière de droit de la concurrence et de la consommation, d’une part, et en matière de lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme, d’autre part.

En quatrième lieu, je voudrais insister sur l’allègement des règles de procédure en matière familiale.

La commission des lois a rejeté la disposition tendant à dispenser de comparution devant le juge aux affaires familiales les couples sans enfant mineur dans le cadre du divorce par consentement mutuel. L’article 13 du projet de loi prévoyait en effet que ces derniers n’auraient plus à comparaître personnellement et systématiquement devant le juge.

La commission considère que la réforme de 2004 est déjà allée très loin en matière de simplification procédurale pour les parties. Ainsi, la durée moyenne de l’audience, toutes phases comprises, n’est-elle plus que de vingt à vingt-cinq minutes.

Il me paraît nécessaire que la séparation d’un couple marié soit entourée d’une certaine solennité, symétrique de celle du mariage, qui n’est ni l’union libre ni le PACS, quand bien même les parties se seraient entendues sur tous les aspects de leur divorce. Car le divorce, à l’instar du mariage, n’est pas un acte banal, et il ne doit pas en devenir un !

Par ailleurs, l’entrevue des époux avec le juge permet à celui-ci de s’assurer de la réalité du consentement de chacun des conjoints, de l’absence de contraintes plus ou moins directes s’exerçant sur lui et de sa compréhension des effets du divorce tels que la convention conclue avec l’autre partie les organise.

La commission a donc souhaité maintenir des procédures garantissant l’équilibre entre les parties et l’accès effectif à un juge dans le cadre du divorce par consentement mutuel.

En outre, à l’article 14, relatif à la régulation des honoraires d’avocat pour la procédure de divorce par consentement mutuel, la commission a voulu améliorer la prévisibilité des honoraires à acquitter. Elle a donc choisi un dispositif plus contraignant, mais conciliable avec la liberté de fixation des honoraires.

La convention d’honoraires serait obligatoire pour toutes les procédures de divorce, ce qui reste compatible avec la liberté contractuelle, mais les justiciables pourraient s’appuyer sur un barème indicatif élaboré par la Chancellerie en collaboration avec le Conseil national des barreaux à partir des usages observés. Ce point pourra être précisé lors de nos débats.

La commission a par ailleurs encadré l’expérimentation, proposée pour trois ans, de l’obligation de recourir à la médiation familiale pour les actions tendant à faire modifier les modalités d’exercice de l’autorité parentale fixées par une décision de justice.

Aux termes du projet de loi, la saisine du juge aux fins de modification de ces mesures devrait par conséquent être précédée, à peine d’irrecevabilité, par une tentative de médiation, sauf si les parents sont d’accord sur les modifications envisagées ou si un motif légitime justifie une saisine directe du juge.

Le développement de la médiation familiale est une bonne chose, mais il requiert des moyens importants qui n’existent pas aujourd’hui.

Dans le cadre de l’unique expérimentation, qui doit être menée dans cinq départements, 5 169 dossiers actuellement traités directement par les juges aux affaires familiales devraient faire l’objet d’une médiation préalable. L’expérimentation nécessiterait donc à elle seule 103 équivalents temps plein travaillé de médiateurs familiaux supplémentaires. Si celle-ci devait être généralisée à l’ensemble du territoire national, il serait nécessaire de recruter l’équivalent de plus de 1 700 équivalents temps plein travaillé de médiateurs familiaux, soit six fois l’effectif actuel.

La commission a donc souhaité éviter qu’un allongement des délais pour obtenir un rendez-vous dans un service de médiation familiale, faute de moyens suffisants pour répondre aux attentes, ne retarde excessivement le règlement d’un conflit qui risquerait de s’envenimer encore plus. C’est pourquoi elle a précisé que l’obligation de médiation préalable pourra être écartée si, compte tenu des délais dans lesquels cette médiation est susceptible d’intervenir, les parties courent le risque d’être privées de leur droit d’accéder au juge dans un délai raisonnable. Elle a en outre souhaité exempter les parents de l’obligation de médiation préalable lorsqu’ils déposent conjointement une demande de décision relative aux modalités d’exercice de l’autorité parentale ou lorsque l’un d’eux a déposé la demande et que l’autre ne s’y oppose pas.

Telles sont les principales modifications que la commission des lois a souhaité apporter à ce texte.

Ce projet de loi contient des mesures intéressantes et va certainement dans le sens d’une clarification et d’une amélioration du fonctionnement de notre justice. Encore faut-il veiller à sauvegarder l’équilibre entre les mesures proposées et les moyens qui seront consacrés à leur mise en œuvre, et faire en sorte que la simplification des procédures juridictionnelles ne se traduise pas par une banalisation de certaines d’entre elles, ce qui amoindrirait leur impact.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

M. Yves Détraigne, rapporteur. C’est ce à quoi la commission des lois s’est attachée tout au long de l’examen de ce projet de loi.

Applaudissementssur les travées de l’Union centriste et de l’UMP. – M. Robert Badinter applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel-Pierre Cléach

Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat a souhaité se saisir pour avis des articles 23, 24 et 26 du présent projet de loi, qui concernent la justice militaire.

En accord avec le président et le rapporteur de la commission des lois, que je tiens à remercier, notre commission a reçu une délégation au fond pour ces articles.

Le projet de loi prévoit de supprimer le tribunal aux armées de Paris, qui est compétent pour connaître des infractions commises par des militaires ou à leur encontre à l’étranger en temps de paix. Il s’inscrit ainsi dans le prolongement des précédentes réformes de la justice militaire, notamment la loi de 1982, qui avait été présentée par notre collègue Robert Badinter, alors garde des sceaux, et avait supprimé les tribunaux militaires sur le territoire de la République et transféré la compétence aux juridictions de droit commun spécialisées.

La suppression du tribunal aux armées de Paris et le transfert de ses attributions à la formation spécialisée du tribunal de grande instance de Paris marqueraient donc l’achèvement de l’intégration de la justice militaire dans la justice de droit commun en temps de paix.

Déjà, Napoléon considérait que l’« on est citoyen français avant d’être soldat », et Clemenceau estimait, un peu sévèrement, que « la justice militaire est à la justice ce que la musique militaire est à la musique » !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel-Pierre Cléach

Je précise que cette réforme ne vise que le temps de paix et que le code de justice militaire prévoit le rétablissement des tribunaux militaires en temps de guerre.

Je ne vous cacherai pas que j’étais au départ assez réservé sur cette réforme, par crainte d’une moindre prise en compte de la spécificité militaire devant les juridictions ordinaires. Toutefois, ma position a évolué au fur et à mesure des auditions auxquelles j’ai procédé, et je suis désormais rassuré sur ce point, pour trois raisons principales.

Tout d’abord, le tribunal aux armées de Paris n’a de militaire que le nom, puisqu’il est composé exclusivement de magistrats civils et qu’il applique le code de procédure pénale.

Ensuite, le tribunal aux armées de Paris reste une juridiction hybride, rattachée au ministère de la défense, et les magistrats du parquet sont nommés par le ministre de la défense sans avis préalable du Conseil supérieur de la magistrature.

Ces règles dérogatoires alimentent les suspicions de dépendance et de partialité de cette juridiction militaire. De plus, elles ne tiennent pas compte de l’évolution du statut de la magistrature, et surtout de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.

Enfin, le volume d’activité de cette juridiction est faible : le tribunal aux armées de Paris reçoit annuellement de 1 600 à 1 700 procédures et prononce entre 180 et 190 jugements.

La suppression de cette juridiction serait donc source de simplification et de rationalisation.

Comme j’ai pu le constater lors de mes auditions, cette réforme est accueillie très favorablement par les militaires. En effet, à leurs yeux, ce qui compte, c’est moins le maintien d’une juridiction spécialisée, dont la dimension militaire est surtout symbolique, que la prise en compte de la spécificité militaire.

Cette spécificité militaire tient en particulier à l’avis préalable du ministre de la défense avant l’engagement de poursuites à l’encontre d’un militaire et à l’impossibilité, pour la victime, de faire citer directement un militaire devant une juridiction de jugement. Or ces règles particulières seraient maintenues avec la réforme.

À titre anecdotique, je préciserai que le tribunal aux armées de Paris a son siège dans une caserne militaire, celle de Reuilly-Diderot, que je connais bien pour y avoir séjourné plusieurs mois pendant mon service militaire avant de partir en Algérie. Or le ministère de la défense s’est engagé à céder cette caserne à la Ville de Paris, afin qu’elle y construise des logements sociaux.

Tout en approuvant cette réforme, j’ai proposé, en m’inspirant de la proposition de loi que j’avais déposée, cinq amendements à notre commission, qui les a adoptés à l’unanimité.

Nous avons ainsi estimé indispensable de prévoir l’avis du ministre lorsqu’un militaire est susceptible d’être poursuivi à la suite d’une plainte contre X, d’une plainte avec constitution de partie civile ou à l’occasion d’un réquisitoire supplétif. Cet avis est un élément très important, car il permet d’apporter un éclairage sur des situations opérationnelles complexes, notamment en opérations extérieures, comme en Afghanistan, par exemple. Je rappelle que cet avis, assorti d’un délai d’un mois, est simplement consultatif. Il ne liera donc pas le procureur de la République.

Nous avons aussi clarifié les compétences concernant les infractions commises à bord des navires ou des aéronefs militaires.

En outre, nous avons souhaité simplifier la définition de la désertion. Contrairement à ce que l’on aurait pu penser, la professionnalisation des armées ne s’est pas traduite par une raréfaction des cas de désertion, bien au contraire. D’après les données du ministère de la défense, le nombre des désertions a augmenté de 500 % en dix ans. Les juridictions sont donc inondées de cas de désertion, qui, la plupart du temps, ne font pas l’objet de condamnations. Nous avons donc souhaité clarifier et harmoniser la définition de la désertion, que celle-ci intervienne sur le territoire français ou à l’étranger.

Enfin, nous avons souhaité formuler quelques observations.

Ainsi, nous pensons, monsieur le garde des sceaux, qu’il serait utile que le ministère de la justice lance une réflexion sur l’idée d’un regroupement des juridictions de droit commun spécialisées en deux ou trois pôles spécialisés en matière militaire. Ce regroupement aurait le mérite de renforcer la centralisation des affaires militaires et la spécialisation des magistrats.

Je voudrais également insister sur la formation des magistrats. En effet, compte tenu de la professionnalisation des armées, ainsi que de la féminisation de la magistrature, il me paraît indispensable de renforcer la formation des magistrats aux affaires militaires, à l’École nationale de la magistrature ou par des stages.

Par ailleurs, je voudrais vous faire part de mon inquiétude quant à l’avenir du corps des greffiers militaires. Ceux-ci, qui sont souvent d’anciens militaires, apportent en effet une expertise précieuse aux juges chargés de ces affaires. Il serait utile à mes yeux d’engager une réflexion sur l’avenir de ce corps en voie d’extinction.

Enfin, compte tenu des difficultés matérielles actuelles de la justice, il me semble que cette réforme devrait s’accompagner d’un transfert de personnels et de moyens du ministère de la défense au ministère de la justice.

Si les coûts de fonctionnement du tribunal sont relativement limités, les frais de justice peuvent représenter un montant assez élevé en matière militaire.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées recommande donc au Sénat l’adoption des articles 23, 24 et 26 du projet de loi, tels que modifiés et complétés par les amendements qu’elle a adoptés.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – M. Robert Badinter applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

C’est à nouveau un texte « fourre-tout » que vous nous présentez là, monsieur le garde des sceaux. Je le dis d’emblée, nous ne le voterons pas, et ce pour plusieurs raisons, la moindre n’étant pas le contexte dans lequel ce débat intervient.

Ce texte mêle, comme cela devient trop fréquent, des dispositions disparates quant à leur nature ou à l’enjeu qu’elles recouvrent. De ce fait, si nous pouvons accepter certaines d’entre elles, nous en rejetons d’autres.

Ce texte, comme d’autres avant lui, a surtout pour objet de décliner des propositions émises par la commission Guinchard. Nous craignons que cette façon de réformer la justice par « petits bouts » ne serve à masquer les enjeux actuels en matière de fonctionnement de la justice.

L’ambition du rapport Guinchard était d’ailleurs clairement affichée par son auteur : « C’est un rapport qui se veut global, en ce sens qu’il envisage la répartition des contentieux dans une cohérence totale avec la refonte de la carte judiciaire. »

Si les deux réformes n’ont pas été menées concomitamment, elles sont en effet largement cohérentes : il s’agit de gérer les moyens indigents du service public de la justice. Il suffit de lire l’exposé des motifs ou l’étude d’impact du présent projet de loi pour s’en convaincre : on y évoque la rationalisation, l’allègement, la spécialisation, la simplification des procédures – pourquoi pas –, mais on n’y trouve aucune trace d’une quelconque ambition pour l’institution judiciaire.

La réforme de la carte judiciaire avait pour objet de fermer un nombre important de tribunaux. L’objectif est atteint, puisque 178 tribunaux d’instance et 17 tribunaux de grande instance ont été supprimés. C’est donc une régression du service public de la justice que ce projet de loi accompagne.

Le dogme est encore la réduction des dépenses publiques et l’application de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, quelles qu’en soient les conséquences pour les justiciables.

Ce projet de loi a été déposé sur le bureau du Sénat voilà déjà plus d’un an. Une question se pose donc : pourquoi est-il soudain devenu nécessaire de recourir à la procédure accélérée ? Qu’est-ce que cela signifie, au moment même où l’institution judiciaire connaît une crise profonde ?

L’urgence réelle n’est-elle pas de répondre au cri d’alarme lancé par les professionnels de la justice ? Pour la première fois, 5 000 d’entre eux, dans la diversité de leurs statuts, sont descendus dans la rue, le 29 mars dernier. J’étais à leurs côtés, et je peux témoigner de leur détermination.

Vous le savez bien, monsieur le garde des sceaux, la situation de nombre de tribunaux est tout simplement catastrophique. Certains n’ont plus de moyens pour ouvrir le courrier, d’autres pour faire des photocopies…

Vous restez fermé à cette réalité, or je crois que l’on ne réglera rien sans prendre à bras-le-corps la question prégnante des moyens de la justice. On ne réglera rien en multipliant des réformes partielles destinées à masquer le fond du problème.

Vous entendez promouvoir une justice plus efficace, plus rapide, mais cela suppose des moyens, sauf à renoncer à l’ambition d’une justice égale pour tous. Égalité devant la justice et réduction des moyens ne sont pas conciliables.

Certes, vous avez annoncé la création de 485 postes. Non seulement c’est bien insuffisant pour répondre aux besoins, mais vous les avez immédiatement affectés à la mise en œuvre de vos futures réformes. De toute façon, ils ne sont pas prévus au budget…

Le présent projet de loi s’inscrit dans cette logique de pénurie, en mettant l’accent sur la déjudiciarisation, la centralisation et la spécialisation, qui devient un postulat. On a le sentiment que, peu à peu, le service public de la justice s’organise autour de quelques grands pôles d’expertise. Ce projet de loi s’apparente à une sorte de « jeu de dominos ».

Pour la deuxième fois depuis sa création en 2002, vous réformez la justice de proximité.

Il s’agissait, à l’époque, d’ajouter une troisième juridiction de première instance, à côté des tribunaux de grande instance et des tribunaux d’instance. Le groupe CRC-SPG s’y était opposé. Nous avions soulevé un risque de confusion avec l’installation d’un nouvel ordre judiciaire. Cette crainte, je le rappelle, était aussi celle de nos anciens collègues Jean-Pierre Schosteck et Pierre Fauchon, rapporteurs du texte.

Notre position était et demeure claire : la juridiction de proximité, c’est le tribunal d’instance ; les juges de proximité, ce sont les juges d’instance.

Plutôt que de doter les tribunaux d’instance des moyens nécessaires à leur fonctionnement, la majorité et le Gouvernement ont préféré leur retirer des compétences au profit des nouveaux juges de proximité, avant d’en supprimer avec la mise en œuvre de la nouvelle carte judiciaire.

En 2005, sans que le bilan promis ait été dressé, les juges de proximité ont vu leurs compétences élargies, ce qui a modifié leur rôle puisqu’ils doivent désormais traiter un contentieux de masse.

Aujourd’hui, vous voulez supprimer la juridiction de proximité et rattacher les juges de proximité au tribunal de grande instance. Il est clair que les difficultés actuelles ne seront pas résolues, puisqu’ils exerceront toujours des attributions au tribunal d’instance et au tribunal de grande instance, au civil et au pénal.

Vous dites qu’ils ne seront pas en situation de sujétion par rapport au président du TGI : c’est à voir ! C’est lui qui pourra décider de leur affectation en fonction des besoins de sa juridiction. De fait, ils compenseront pour une part l’insuffisance de l’effectif des juges professionnels.

Ce projet de loi procède à une nouvelle répartition des compétences dans des domaines très divers : voies ferrées, préjudices liés au classement des objets au titre des monuments historiques, objets laissés en gage par les voyageurs aux aubergistes ou hôteliers, et j’en passe… Quelle lisibilité le justiciable peut-il attendre de la loi avec un tel fatras de modifications opérées au coup par coup ?

Vous faites de la spécialisation une règle, là aussi dans des domaines disparates : départition prud’homale, sans prévoir de moyens supplémentaires pour les TGI, droit de la propriété industrielle en vue de donner une compétence nationale au TGI de Paris, contentieux douanier, que vous rattachez au TGI.

Quant à la création de juridictions spécialisées en matière d’accidents collectifs, je m’interroge sur sa pertinence. Certes, la complexité de ce contentieux exige des moyens d’investigation et de jugement importants, mais je ne suis pas certaine que la spécialisation à outrance soit la bonne réponse.

S'agissant de la création d’un pôle compétent en matière de crimes contre l’humanité, ne croyez-vous pas qu’une telle disposition aurait mérité mieux que d’être noyée au sein d’un texte fourre-tout ?

Dès la première heure, nous avons approuvé l’idée d’un tel dispositif, annoncé voilà plus d’un an à grand bruit dans la presse par Mme Alliot-Marie et M. Kouchner : « patrie des droits de l’homme, la France ne sera jamais un sanctuaire pour les auteurs de génocide, de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité », écrivaient-ils.

Nous partagions évidemment l’objectif affiché, mais on me permettra d’exprimer quelques réserves quant à la réalité de la détermination des auteurs de cette tribune. En effet, quand elle est parue dans Le Monde, le Gouvernement tergiversait encore sur le deuxième projet de loi portant adaptation du droit pénal à l’institution de la Cour pénale internationale. Ce texte, adopté définitivement le 13 juillet dernier, offre une quasi-impunité aux auteurs présumés de crimes internationaux présents sur le territoire français : il leur suffit de ne pas faire de la France leur résidence habituelle, d’autres verrous procéduraux pouvant également jouer.

J’éprouve donc une crainte : le nouveau pôle spécialisé sera-t-il en mesure de répondre aux intentions affichées ? Les dispositions juridiques seront-elles à la hauteur de ce que devrait être l’exigence de notre pays en matière de répression des crimes internationaux ?

Je note d’ailleurs que si l’article 16 du présent projet de loi évoquait les crimes de guerre, ceux-ci avaient été « oubliés » dans la suite du texte. Il est de ce point de vue très positif que notre amendement et ceux du rapporteur aient permis de viser clairement les crimes de guerre et de torture.

J’espère désormais, monsieur le ministre, que le Gouvernement s’attachera à doter ce pôle des ressources et des moyens nécessaires à l’accomplissement de sa mission.

Ce projet de loi porte aussi sur le droit de la famille.

Je rejoins la position de notre rapporteur, qui a proposé de supprimer l’article 13. Je pense en effet qu’il n’est pas prudent d’écarter l’intervention du juge en matière de divorce par consentement mutuel, même en l’absence d’enfants mineurs. Le consentement mutuel, hélas, cache quelquefois un faux consentement…

Quant à l’expérimentation de l’obligation de recourir, à peine de nullité de la procédure, à la médiation familiale en cas de saisine du juge en matière d’exercice de l’autorité familiale, elle pose des problèmes importants : celui du consentement, tout d’abord, pour les mêmes raisons que précédemment ; celui du financement, ensuite, qui pèsera lourdement, n’en doutons pas, sur les justiciables ; celui du manque de 1 700 médiateurs familiaux en cas de généralisation de la mesure, enfin, qui entraînera sans nul doute le développement d’un « marché privé » de la médiation.

Vous prévoyez également, dans ce texte, une extension très large du champ des procédures simplifiées, tout particulièrement de l’ordonnance pénale et de la comparution avec reconnaissance préalable de culpabilité – la dénomination « plaider-coupable » ayant été pudiquement écartée. Nous y sommes, cette fois encore, totalement opposés. Nous refusons cette démarche, qui vise à produire toujours plus de condamnations, dans un temps toujours plus réduit et avec toujours moins de garanties pour les justiciables.

Avec ces procédures, sont mis en cause plusieurs droits : le droit à un débat contradictoire, le droit à la publicité des audiences, le droit à l’impartialité du juge, le droit à l’individualisation de la peine.

Vous vous plaisez à dire qu’il faut tenir compte des victimes. Or, précisément, le droit au débat contradictoire, par exemple, est aussi un droit pour les victimes. En outre, vous continuez de ne rien prévoir pour assurer une meilleure prise en compte de leurs démarches. Mais, évidemment, cela demande beaucoup plus de moyens que la justice n’en a aujourd'hui.

Vous dites que les droits sont garantis puisque l’accusé acceptera la sanction proposée, mais, bien souvent, dans les faits, celui-ci n’aura guère d’autre choix.

Non, mes chers collègues, le justiciable n’a rien à gagner à une accélération de la procédure ! La justice a besoin de solennité, comme elle a besoin de temps pour garantir le respect des droits fondamentaux des justiciables et des victimes, sauf à ce qu’elle devienne illisible et inaccessible. S’il faut certes désengorger les tribunaux, on ne peut atteindre ce résultat qu’en produisant moins de textes sécuritaires et en prévoyant les moyens adéquats.

Le recours au juge ne saurait être considéré comme une simple source de coûts pour les finances publiques, coûts qu’il faudrait impérativement réduire. Le juge, de par son statut, est le garant d’une justice équitable, rendue au nom du peuple. Il ne peut intervenir dans la précipitation.

En ce qui concerne la justice militaire, le projet de loi prévoit la suppression d’une juridiction d’exception, le tribunal aux armées de Paris, et le transfert de ses compétences à une juridiction de droit commun. Nous y sommes bien entendu tout à fait favorables. Une telle disposition n’avait pu être adoptée en 1982 ; l’armée s’y était alors opposée.

Pour autant, le fait que nous soyons d’accord avec le Gouvernement sur ce point ne saurait compenser notre opposition aux dispositions que j’ai évoquées.

Ce projet de loi confirme l’appréciation formulée par le Médiateur de la République dans son dernier rapport : « des politiques brouillées par l’empilement législatif ». En effet, il constitue en soi un « empilement législatif », d’autant que, avec l’aval de la majorité de la commission des lois, le Gouvernement en rajoute en y introduisant une dizaine d’articles additionnels. Nous demandons leur suppression, car il n’est pas de bonne méthode de procéder ainsi.

Qui plus est, ce projet de loi sera suivi d’autres textes que vous avez présentés en conseil des ministres, monsieur le garde des sceaux, et que le Parlement est également censé adopter à la hâte avant la fin de la session, notamment celui qui est relatif à l’instauration de jurys populaires en correctionnelle. Ce texte ne manquera pas de brouiller un peu plus les choses : avez-vous par exemple réfléchi, monsieur le garde des sceaux, au fonctionnement d’audiences correctionnelles où se côtoieront juges professionnels, juges de proximité et assesseurs citoyens totalement ignorants des procédures correctionnelles ?

Réformer la justice doit avoir pour objectif d’améliorer le service rendu aux justiciables, en n’oubliant pas que les personnes les plus démunies, les plus modestes, doivent pouvoir elles aussi accéder au service public de la justice. Or nombre des dispositions de ce projet de loi ne vont pas dans ce sens, bien au contraire.

Nous sommes à mille lieues du débat qu’il conviendrait d’avoir sur les évolutions nécessaires de notre système judiciaire, sur l’indépendance des magistrats du parquet, sur la question du maintien d’une instruction indépendante, sur les conditions d’un rapprochement de la justice et des citoyens, sur le maintien d’une justice spécifique des mineurs, que vous entendez encore remettre en cause, ou encore sur les moyens qu’il serait urgent d’accorder au service public de la justice, tant civile que pénale, pour qu’il puisse fonctionner.

Examiner le présent projet de loi dans le contexte de crise profonde que connaît aujourd'hui notre institution judiciaire est, à nos yeux, tout à fait inacceptable. Nous voterons donc contre ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC -SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Monsieur le garde des sceaux, vous n’en êtes pas entièrement responsable, mais ce projet de loi constitue une véritable provocation à un triple titre.

La provocation tient d’abord aux conditions dans lesquelles nous examinons un texte complexe, comme tous ceux qui traitent de procédure pénale : une fois encore, il est recouru à la procédure accélérée, c’est-à-dire que l’on ne laisse pas le Parlement faire son travail. Or l’expérience montre pourtant que, sur de tels textes de procédure pénale, plusieurs lectures à l’Assemblée nationale et au Sénat sont parfois nécessaires, ne serait-ce que pour éviter des erreurs. J’ajoute que ce projet de loi a été déposé voilà plus d’un an : pourquoi vient-il en discussion aujourd'hui ? Y a-t-il une urgence particulière ? Personnellement, je n’en vois pas.

La provocation tient ensuite au contexte dans lequel s’inscrit l’examen de ce texte. En effet, vous avez déposé plusieurs autres projets de loi, monsieur le garde des sceaux : je pense que vous auriez été bien inspiré d’écouter le Conseil supérieur de la magistrature, qui recommande de ne pas accélérer la production législative, s’agissant notamment de la récidive, afin de permettre aux personnels de justice de « digérer » les réformes. De surcroît, alors que le projet de loi relatif à la garde à vue vient tout juste d’être voté, on dit déjà de ce texte qu’il est inabouti, qu’il ne pourra pas être appliqué et qu’il faudra peut-être le revoir… Le Premier ministre lui-même est de cet avis ! C’est absolument incroyable !

Je le répète, le recours à la procédure accélérée pour l’examen du présent projet de loi ne permettra pas au Parlement de faire son travail. Ce texte bouleverse pourtant totalement la procédure correctionnelle et la procédure d’assises. En outre, allant à l’encontre du dernier avis du Conseil constitutionnel, que nous ne manquerons pas de saisir sur ce point, il tend à rapprocher le droit des mineurs du droit des majeurs.

Par ailleurs, la discussion de ce texte intervient alors qu’un profond sentiment de malaise traverse l’institution judiciaire, même si vous essayez de calmer l’émotion des magistrats et des autres personnels. Peut-être vos qualités personnelles pourraient-elles vous permettre d’y parvenir, mais l’attitude du Gouvernement et de l’Élysée vous en empêche de toute façon.

La provocation tient enfin au fond du texte lui-même. C’est l’état actuel de la justice qui motive l’examen accéléré de ce projet de loi. À cet égard, je me contenterai de rappeler, monsieur le garde des sceaux, que vous avez dernièrement notifié aux cours d’appel une diminution très importante des crédits affectés aux rémunérations. En conséquence, les chefs de cour sont amenés à prendre des décisions drastiques et brutales : non-renouvellement des contrats des vacataires, suppression des emplois d’assistant de justice, réduction des vacations des juges de proximité, aboutissant, dans certaines régions, à leur quasi-disparition.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Je vous prouverai le contraire !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Très bien, monsieur le garde des sceaux !

On sait que certains tribunaux, tel celui de Nice, ne peuvent plus payer d’experts ; à Orléans, à Avesnes-sur-Helpe, à La Rochelle, à Amiens, à Tours, les juridictions sont bloquées : telle est la vérité !

Pis encore, la direction des services judiciaires a indiqué, le 17 février dernier, lors d’une réunion sur l’application pénale Cassiopée, que les vacataires devaient être affectés en priorité au déploiement de ce logiciel, ce qui aboutit évidemment à priver les autres services du renfort attendu. Les personnels des tutelles, des greffes correctionnels, notamment de celui de Paris, ne pourront toujours pas récupérer les milliers d’heures supplémentaires effectuées…

Vos annonces dans le quotidien Ouest France n’engagent que ceux qui y croient. On sait très bien qu’il ne s’agit que de promesses en l’air ! En effet, monsieur le garde des sceaux, les crédits que vous avez annoncés ne sont pas budgétés ou sont affectés au financement de l’introduction des jurys populaires en correctionnelle. Ils ne permettront pas de soulager les tribunaux.

J’ajoute que la création des jurys populaires en correctionnelle, la réforme de la garde à vue, le contrôle par les juges des hospitalisations d’office prévues par la loi de 1990, voulu par le Conseil constitutionnel, ne feront qu’accentuer le malaise de l’institution judiciaire.

On voit bien que les dispositions les plus contestables de ce projet de loi, sous couvert d’alléger les procédures, sont essentiellement destinées à pallier la pénurie de personnel, au mépris de quelques principes essentiels, comme le respect du contradictoire et la publicité de l’audience.

Les juridictions de proximité, créées en 2002 par la loi Perben, vont être supprimées. Pourtant, malgré ce qu’en dit M. Guinchard, qui n’est pas un orfèvre en la matière, elles n’ont pas tant démérité que cela. Certes, leur bilan est mitigé, mais tous les juges de proximité ne sont pas nuls. Certains d’entre eux font même du très bon travail !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Bien sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Les juges de proximité ont allégé la charge de travail des tribunaux d’instance, laquelle s’accroîtra d’ailleurs du contentieux des tutelles des majeurs et se trouvera également alourdie du fait des regroupements de tribunaux résultant de la mise en place de la nouvelle carte judiciaire, œuvre funeste de Mme Dati.

Cette réforme, purement utilitaire, ne permettra d’ailleurs pas de répondre aux critiques qu’avait suscitées – et que continue peut-être à susciter – la création des juges de proximité, à laquelle nous nous étions opposés. En effet, rien n’est prévu pour améliorer le statut précaire de ces juges, pour remédier à l’insuffisance de leur formation ou aux difficultés de recrutement. Alors que le dispositif s’était amélioré, on va supprimer les juridictions de proximité !

Bien entendu, les juges de proximité, eux, ne seront pas supprimés : on les garde, qu’ils soient bons ou mauvais, pour les mettre à la disposition du président du tribunal de grande instance, qui en fera des bouche-trous, pour ne pas dire, de façon plus vulgaire, des « bonniches » du tribunal ! Lorsqu’il manquera un assesseur en correctionnelle ou en juridiction collégiale au civil, on fera appel à un juge de proximité. C’est ainsi que cela se passera, tout le monde le sait !

Ensuite, sous couvert de simplification, le texte prévoit deux mesures totalement inacceptables de notre point de vue : l’extension du champ de l’ordonnance pénale et celle du champ de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

S’agissant de l’extension du champ de l’ordonnance pénale, nous estimons que le droit à l’audience, c'est-à-dire au contradictoire et à la publicité des débats, est un droit absolu. Certes, aujourd'hui, la mode est au recours à la visioconférence, comme on a pu le voir en matière de garde à vue et comme on le verra bientôt pour les hospitalisations d’office : le juge communique à distance, par écran interposé, avec la personne gardée à vue ou mise en examen ! Cela est, on en conviendra, absolument inacceptable ! C’est la négation de ce qu’est l’audience, à savoir l’instauration d’un dialogue direct entre le juge et son interlocuteur. Seul un tel face-à-face peut permettre au juge de se forger une opinion, car il importe de prendre en compte, outre les paroles prononcées, des attitudes, des non-dits qu’une visioconférence interdit de percevoir.

Vous proposez d’étendre largement le champ de l’ordonnance pénale, monsieur le garde des sceaux, or nous recevons fréquemment dans nos permanences des personnes qui, s’étant vu notifier une ordonnance pénale, viennent nous demander de les aider alors que le délai pour faire opposition est déjà échu et que la condamnation est de ce fait devenue définitive… Nombre de nos concitoyens, malheureusement, peinent à comprendre un tel document, et davantage encore à rédiger une lettre pour contester les faits. Voilà ce qu’il en est de l’ordonnance pénale ! Vous qui vous présentez volontiers comme un homme de terrain, monsieur le garde des sceaux, vous qui êtes un élu rural, comment pouvez-vous préconiser l’extension de cette mesure ? Vous savez très bien que la plupart des justiciables sont complètement désarmés devant de telles procédures. Ils n’y comprennent rien, et ils ont le sentiment que leur condamnation résulte de l’arbitraire d’un juge.

Plus grave encore, selon moi, y compris d’un point de vue constitutionnel, est l’extension du champ de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité –disons le « plaider-coupable », pour parler clairement – à l’ensemble des délits.

Lorsque cette disposition sera entrée en vigueur, c’en sera évidemment fini du procès Chirac, du procès Tapie, etc. Il suffira de plaider coupable pour éviter l’audience et la publicité afférente ! On négociera discrètement la peine, et tout sera terminé ! Voilà à quoi aboutira l’extension du champ du plaider-coupable ! Nul ne saurait me contredire sur ce point, sauf à être de mauvaise foi !

Certes, monsieur le garde des sceaux, les procureurs sont des magistrats, mais ils ne sont pas des juges.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Nous sommes d’accord.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Or, que font les procureurs aujourd'hui ? Vos propres statistiques montrent que, en 2009, sur près de 1, 5 million d’affaires pénales poursuivables, 854 000 ont été « jugées » par des procureurs de la République. Il faudrait ajouter à ce chiffre 180 000 classements sans suite. En revanche, on constate une baisse par rapport à 2008 du nombre des poursuites devant le juge d’instruction, le juge des enfants et le tribunal de police, à hauteur respectivement de 10, 7 %, de 0, 4 %, et de 4, 1 %. On observera une confirmation de cette évolution lorsque les chiffres de l’année 2010 seront connus.

Les procureurs deviennent donc des juges. Ce sont eux, d’ailleurs, qui connaissent la plus grande partie du contentieux pénal. Or cela contrevient aux recommandations de la Cour européenne des droits de l’homme et du Conseil constitutionnel. La tenue d’une audience deviendra l’exception, de même que l’intervention du juge ; la règle sera que le procureur de la République jugera. Nous n’acceptons pas cette dérive.

Il est vrai, néanmoins, que ce texte comporte quelques dispositions plus positives et que M. le rapporteur a minutieusement travaillé pour corriger un certain nombre d’excès par le biais d’amendements que nous avons approuvés.

Contrairement peut-être à Mme Borvo Cohen-Seat, je pense que la constitution de pôles spécialisés est plutôt une bonne chose, de même que l’attribution de la compétence au seul tribunal de grande instance de Paris pour le contentieux de la propriété industrielle.

Je me réjouis, bien entendu, de la suppression du tribunal aux armées de Paris. Elle fait aujourd’hui consensus, alors que, en 1982, cette mesure avait suscité une opposition passionnée à l’Assemblée nationale : on entendit alors des hurlements ! Certains, tel Jean Foyer, pour qui j’avais beaucoup d’estime, n’en pouvaient plus d’éructer contre ce qu’ils considéraient comme une atteinte à nos armées !

Cela étant, la suppression de cette juridiction va encore différer l’examen d’un certain nombre d’affaires, dont le tribunal de grande instance de Paris ne pourra se saisir immédiatement. Je pense notamment au rôle de l’armée française face au génocide rwandais, aux bombardements de Bouaké, en 2004, qui avaient causé la mort d’un certain nombre de militaires français et dont les pilotes responsables n’ont jamais été interrogés, ou à l’assassinat, toujours en Côte d’Ivoire, du coupeur de routes Firmin Mahé. Toutes ces affaires vont être de nouveau reportées, avant peut-être qu’une quelconque prescription ne vienne exonérer certains militaires des délits ou des crimes qu’ils auraient pu commettre dans l’exercice de leurs fonctions…

En conclusion, mon groupe votera contre ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC -SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Alfonsi

Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, cette discussion ne peut être isolée du contexte de crise aiguë que connaît notre justice depuis maintenant plusieurs années.

Les retards en moyens accumulés durant cette période sont tels que les mesures de rattrapage, à hauteur de quelque 4 %, votées en loi de finances sont loin de suffire à combler les manques qui affectent notre système judiciaire. Je rappellerai que le classement de quarante-trois pays d’Europe au regard de l’efficacité de la justice, établi en octobre dernier par la Commission européenne, place la France au trente-septième rang.

Dès lors, le présent projet de loi ne répond pas à l’urgence avérée qu’il y a à mettre enfin en œuvre une profonde réforme de notre justice. Le mouvement de protestation des personnels de justice du mois dernier n’est que la dernière illustration en date de l’état d’exaspération inquiétant qui accable notre monde judiciaire.

La priorité n’est certainement pas d’examiner des textes comme celui-ci selon la procédure accélérée. Pour dire clairement les choses, ce projet de loi est frappé au coin de l’incohérence.

Cette incohérence tient d’abord au fait qu’il comporte des dispositions hétérogènes formant un fourre-tout dont on peine à trouver la ligne directrice. Pourquoi proposer un texte ad hoc visant à transposer certaines recommandations du rapport Guinchard, dont il y aurait d’ailleurs beaucoup à dire, alors qu’un grand nombre de ces recommandations ont déjà été mises en œuvre dans d’autres textes législatifs ou réglementaires ?

L’incohérence tient, ensuite, au calendrier. Vous nous soumettez, monsieur le ministre, un texte qui tend à supprimer les juridictions de proximité, alors que vous venez de présenter un projet de loi sur les jurys populaires en correctionnelle qui ajoute au désordre législatif actuel. Les juges de proximité avaient pourtant été créés par votre majorité, en 2002, afin de « répondre aux besoins d’une justice plus accessible, plus simple et capable de mieux appréhender les litiges de la vie quotidienne », pour reprendre les termes de l’exposé des motifs qui, à l’époque, accompagnait le texte. Ce dessein n’était pas, en soi, critiquable, mais les moyens budgétaires et humains n’ont jamais été à la hauteur de l’ambition initiale, et l’on n’a pas donné à ces magistrats toutes leurs chances.

S’il faut avoir l’honnêteté de reconnaître que, depuis quelques années, le budget de la justice a régulièrement augmenté, les retards accumulés sont tels que les crédits ne sont toujours pas à la hauteur des besoins.

Certains exemples mettant en lumière la gravité de la situation confinent à l’absurde.

Ainsi, à Orléans, le budget du tribunal d’instance a été réduit de 30 %. Les juges de proximité n’assistent donc plus aux audiences correctionnelles, afin de permettre que des crédits puissent être conservés pour payer des vacataires.

Les vacations des juges de proximité du tribunal d’instance de Tours ont été divisées par deux en 2010, en raison d’une baisse brutale des moyens de 27 %.

La cour d’appel de Riom s’est même trouvée dans l’impossibilité de rémunérer des juges de proximité.

Dans certaines juridictions des Hauts-de-Seine, comme celle de Puteaux, la plus importante du département, il n’y a plus d’audiences depuis septembre 2010. Les juges sont au chômage forcé, si bien que l’une des juges en poste a proposé de n’être payée que sur le budget de 2011…

Au 1er janvier dernier, seules 276 juridictions sur 305 étaient pourvues d’au moins un juge de proximité. Dans les 29 autres, un juge d’instance est tenu d’assurer les audiences.

En substance, la Chancellerie a volontairement réduit l’activité de ces juridictions, en les asphyxiant financièrement, pour justifier ensuite leur suppression et le rattachement des juges de proximité aux tribunaux de grande instance.

Pourquoi, alors qu’il était clair, dans l’esprit du Gouvernement, que ces juridictions étaient condamnées, avoir poursuivi en 2010 le recrutement de juges de proximité ? Pourquoi entériner cette suppression, qui entraînera de nouvelles charges pour les tribunaux d’instance, ce dont ils n’ont certainement pas besoin ? Vous-même, monsieur le rapporteur, avez exprimé des doutes, puisque vous avez déclaré en commission que « donner, avec les contentieux jusqu’à 4 000 euros, une charge supplémentaire aux juges d’instance représente un vrai défi en termes de moyens ».

Les juges de proximité ont pourtant su démontrer leur utilité, malgré les conditions de travail difficiles qui leur ont été imposées. Rattacher ces magistrats au tribunal de grande instance reviendrait à les transformer en simples supplétifs mal payés et mal considérés des magistrats professionnels, ce que la majorité des membres de mon groupe ne peut accepter. C’est tout simplement aller au rebours de ce qu’est une justice à la portée de tous les justiciables.

Il est pour nous évident, et Jacques Mézard y reviendra en défendant notre motion tendant au renvoi du texte à la commission, qu’une vraie réforme de la justice de proximité aurait, par exemple, pu consister à réfléchir à la possibilité de confier aux juges de proximité la phase de conciliation obligatoire en matière de petits litiges.

En tout état de cause, nous n’entérinerons pas ce recul, pas plus que nous n’acceptons, en matière pénale, que soit encore étendu le champ d’application des procédures non contradictoires que sont l’ordonnance pénale et la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Il y aurait beaucoup à dire sur l’extension continue du champ de ces procédures, initialement conçues pour demeurer des dérogations contenues au droit commun. Ces deux dispositifs ont en commun de ne pas permettre au prévenu de faire entendre sa cause dans le cadre d’une procédure contradictoire, par exception aux principes généraux du droit pénal qui garantissent le respect des droits de la défense. On sait que l’opposition à une ordonnance pénale est, en pratique, une procédure longue et complexe, qui décourage le plus souvent le mis en cause, ce qui revient à le priver de la possibilité de se défendre dans une procédure plus équitable.

Dans le même esprit, il est inexact de dire que le prévenu faisant l’objet d’une CRPC est dans une position équilibrée face au parquet. La culture de l’aveu, le chantage à la peine plus sévère que prononcerait une juridiction et la pression de la convocation concomitante devant une formation de jugement ont pour seul effet d’amener le prévenu à accepter la peine proposée par le parquet, faute de pouvoir mieux se défendre.

L’engorgement des tribunaux est une réalité, mais ne saurait servir de prétexte au développement de procédures qui portent en elles-mêmes atteinte à l’équité et à l’équilibre du face-à-face entre le justiciable et les magistrats. Une nouvelle fois, monsieur le ministre, la solution proposée est sans doute pire que le mal que vous voulez traiter.

Ce nouveau recul des droits ouvre une brèche inacceptable dans le respect des principes généraux de notre droit. Il est heureux que la commission, réticente depuis longtemps devant ces extensions, ait expressément exclu du champ de l’ordonnance pénale les cas de récidive légale et de celui de la CRPC les faits de violence contre les personnes ou les agressions sexuelles aggravées.

Pour ce qui concerne les autres points du texte, j’étais, comme beaucoup de nos collègues, assez perplexe s’agissant de la dispense de comparution des époux devant le juge en cas de divorce par consentement mutuel en l’absence d’enfants mineurs, prévue à l’article 13 du projet de loi. Le divorce, quel qu’en soit le régime, demeure une épreuve psychologiquement marquante. Le passage devant un juge a d’abord le mérite d’assurer que le consentement des deux époux est réel et non vicié, et que la procédure est équilibrée.

Il est normal que les justiciables soient informés du montant des honoraires qu’ils devront régler dans le cadre d’une convention d’honoraires, en particulier si ceux-ci sont importants. En revanche, la liberté de fixation des honoraires de l’avocat doit demeurer le principe, et je ne suis pas convaincu de l’opportunité d’introduire des barèmes indicatifs, eu égard notamment au droit de la concurrence.

La réflexion devrait également se poursuivre s’agissant de la généralisation de la médiation familiale, qui ajouterait sans doute à la complexité de la procédure, sans d’ailleurs que nous connaissions aujourd’hui les modalités de financement d’un tel dispositif.

Des interrogations existent aussi, à nos yeux, quant à la pertinence d’étendre aux tribunaux de grande instance la procédure d’injonction de payer pour les litiges supérieurs à 10 000 euros, en l’état actuel du texte.

S’agissant de l’introduction d’une spécialisation en matière de départition prud'homale, le dispositif proposé permettra sans doute de rationaliser l’usage d’une procédure complexe, dans une matière sensible qui exige une maîtrise approfondie du droit du travail.

Enfin, le texte trouve grâce à nos yeux sur un autre point : la suppression du tribunal aux armées de Paris, dont la compétence sera transférée à la formation spécialisée du tribunal de grande instance de Paris. Cette mesure vient enfin achever l’intégration de la justice militaire en temps de paix dans la justice de droit commun. Elle mettra un point final au vaste mouvement de transformation de nos armées, qui a été marqué par la fin de la conscription et du maintien permanent de troupes en Allemagne. Il était temps de supprimer cette institution, qui était devenue peu compatible avec les principes d’un État républicain.

Toutefois, ces quelques aspects positifs ne sauraient réduire les extrêmes réserves de la majorité des membres du groupe du RDSE sur un texte qu’ils ne jugent ni opportun ni pertinent.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Madame la présidente, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, que de chemin parcouru depuis décembre 2007, depuis que le recteur Guinchard fut chargé, par la garde des sceaux de l’époque, de rédiger un rapport sur les moyens de simplifier les procédures contentieuses dans notre ordre judiciaire !

Entouré d’universitaires, de représentants des professionnels du droit, de la justice et des syndicats, le recteur Guinchard avait alors procédé à de nombreuses auditions, afin de recueillir l’avis de l’ensemble des acteurs sur les évolutions souhaitables de l’organisation et du périmètre de l’intervention judiciaire. Il avait ensuite formulé soixante-cinq grandes préconisations. Certaines d’entre elles ont d’ores et déjà été introduites dans la loi du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures, d’autres sont reprises dans la proposition de loi de notre collègue Laurent Béteille relative à l’exécution des décisions de justice.

Vous nous proposez donc aujourd’hui, monsieur le garde des sceaux, de poursuivre cette démarche de modernisation, que ce soit en matière civile ou en matière pénale, en simplifiant cette fois l’organisation judiciaire en première instance et en développant les allégements procéduraux.

À cet égard, nous nous devons d’envisager une justice rénovée, une justice porteuse de sens s’agissant de l’intervention du juge, une justice plus lisible et plus proche des justiciables.

Les Français nous disent depuis trop longtemps maintenant qu’ils comprennent mal le fonctionnement de la justice. Les critères de compétence des juridictions apparaissent flous ; le rôle même du juge est parfois incompris.

Force est de le reconnaître, l’organisation actuelle de la justice, telle qu’elle résulte des strates successives accumulées au fil des ans, est devenue peu lisible pour nos concitoyens. Or, une justice pour tous, c’est d’abord une justice que l’on comprend.

La répartition de principe des compétences civiles entre le tribunal de grande instance, le tribunal d’instance et, depuis 2002, le juge de proximité, fondée sur les critères de la collégialité ou du juge unique, ainsi que sur la nature des contentieux et la représentation obligatoire ou non par un avocat, a perdu de sa pertinence. Elle est devenue trop complexe et ne correspond plus à la situation actuelle.

La lisibilité se prolonge dans la proximité et l’accessibilité de la justice, objectifs qui doivent s’accompagner d’une prise en compte du développement des nouvelles technologies aux fins de simplification des procédures.

Penser une justice rénovée, c’est envisager une justice adaptée aux évolutions de la société.

La nature des contentieux et la manière dont le besoin de justice est ressenti ont profondément évolué. La justice accompagne les mouvements de société. Ainsi, les séparations et recompositions familiales font que la moitié des affaires dont sont saisis les tribunaux de grande instance concernent le contentieux familial ; la justice civile d’instance doit désormais faire face à la progression des impayés, du surendettement, des mesures de protection comme les tutelles, notamment pour les majeurs.

Des remèdes doivent être apportés à la croissance du nombre des affaires nouvelles, afin d’y répondre efficacement et d’apporter à chacun le droit que le juge doit dire dans un délai raisonnable.

Penser une justice rénovée, c’est aussi établir une justice porteuse de sens pour l’intervention du juge.

Remettre le juge au cœur de son activité juridictionnelle, c’est alléger ses fonctions d’un certain nombre de tâches n’entrant pas directement dans l’exercice de cette activité, afin qu’il puisse disposer de plus de temps pour se concentrer sur sa mission première, qui est de dire le droit, tant au contentieux qu’en matière gracieuse. Revoir le périmètre d’intervention du juge en le remettant au cœur de son activité juridictionnelle, c’est aussi l’aider et l’assister dans l’exercice de celle-ci.

Monsieur le garde des sceaux, en simplifiant l’organisation judiciaire et en allégeant les procédures, votre projet de loi va dans ce sens.

Le principal axe est centré sur une certaine forme de confusion, née de la création, en 2002, de la juridiction de proximité, laquelle aurait, selon certains – nous l’avons encore entendu tout à l’heure – contribué à amoindrir la lisibilité de notre organisation judiciaire.

Aujourd’hui, trois juridictions interviennent dans le contentieux civil de première instance. Les critères de répartition entre ces trois juridictions manquent à l’évidence de clarté. Je n’évoquerai que deux exemples.

Si des squatteurs occupent d’anciens logements, la juridiction compétente pour les expulser est le tribunal d’instance, mais s’ils occupent des bureaux désaffectés, la juridiction compétente est alors le tribunal de grande instance. Où est la logique ?

Si un défendeur forme une demande incidente supérieure à 4 000 euros devant le juge de proximité, son affaire est immédiatement transmise au tribunal d’instance. Il n’a pas à justifier du bien-fondé de sa demande. Il s’agit parfois, à l’évidence, d’un moyen détourné pour choisir tel juge ou éviter tel autre.

Je tiens à réaffirmer ici notre attachement aux juges de proximité. Si la juridiction ne paraît pas parfaitement adaptée à l’objectif initial, les juges qui y sont affectés ont su trouver une place légitime et singulière dans notre fonctionnement judiciaire. En effet, ils apportent une connaissance de terrain et un contact, ce qui est fondamental. C’est pourquoi le groupe UMP souhaite leur maintien.

Néanmoins, nous soutenons la proposition qui vise à rattacher cet ordre de juridiction aux tribunaux de grande instance, car elle permettrait aux juges de proximité d’avoir un meilleur contact avec les juges professionnels. Comme vous l’avez indiqué, monsieur le garde des sceaux, il s’agit d’un rattachement organique, dont l’objet est de définir précisément les attributions juridictionnelles des juges de proximité, tant au tribunal de grande instance qu’au tribunal d’instance. Il s’agit de maintenir les fonctions des juges de proximité pour statuer en matière pénale, sur les contraventions des quatre premières classes, mais de supprimer leurs compétences en matière de contentieux civil.

On nous affirme que la réforme proposée permettra d’effectuer des mesures d’instruction dans le cadre de la procédure civile et étendra la participation des juges de proximité en qualité d’assesseur à l’ensemble des formations collégiales du TGI, en matière tant civile que pénale.

Le groupe UMP sera très attentif au débat qui s’ouvrira sur ce sujet, en vue de maintenir les actuelles attributions des juges de proximité. À titre d’exemple, sachez que, en Alsace, ces juges traitent actuellement 20 % des affaires qui relèveraient sinon des tribunaux d’instance. En d’autres termes, leur suppression représenterait une charge de travail supplémentaire de 20 % pour les tribunaux d’instance.

Comme cela a été indiqué, il est indispensable de doter les tribunaux d’instance de moyens supplémentaires, que M. le rapporteur évalue à soixante équivalents temps plein travaillé.

Dans le même temps, il nous est proposé de rationaliser le traitement des contentieux et de spécialiser les juridictions dans les contentieux les plus complexes et les plus techniques, afin de renforcer l’efficacité de la justice pénale.

Ainsi, un pôle judiciaire spécialisé pour les crimes contre l’humanité et les crimes de guerres sera créé au sein du TGI de Paris. À cet égard, je ne reviendrai pas sur les propos de M. le rapporteur pour avis, que le groupe UMP soutient pleinement.

De même, les contentieux consécutifs à des accidents collectifs – catastrophes majeures en matière de transports, risques technologiques, dommages dus à une pollution en mer, qu’elle soit volontaire ou non – seront traités par une juridiction spécialisée, et l’on ne peut que s’en réjouir.

Le présent projet de loi a aussi pour objet d’alléger certaines procédures. L’essentiel des innovations concerne le civil et les procédures en matière familiale.

Monsieur le garde des sceaux, vous proposez deux modifications importantes à la procédure applicable devant le juge aux affaires familiales.

En premier lieu, vous prônez l’allégement de la procédure de divorce par consentement mutuel pour les couples qui n’ont pas d’enfant mineur en commun. Les parents n’auraient alors plus à comparaître personnellement et systématiquement devant le juge aux affaires familiales. Le juge n’ordonnerait cette comparution que s’il l’estime nécessaire ou si l’un des deux époux en fait la demande. J’avoue m’être longuement interrogé sur cette disposition.

La procédure actuelle, qui se divise en trois phases, permet au juge de s’assurer de la validité des consentements. Le juge ne prononce le divorce et n’homologue la convention que s’il a acquis la conviction que la volonté des époux est réelle et que le consentement est libre et éclairé.

Ainsi, là où certains estiment que l’entrevue des époux devant le juge, d’abord séparément, puis ensemble et, enfin, avec les avocats peut être vécue comme une formalité inutile, cette procédure offre au juge l’occasion de s’assurer de la réalité des consentements. C’est une situation que j’ai vécue à titre personnel, monsieur le garde des sceaux.

Comme l’a d’ailleurs rappelé notre collègue Jean-Pierre Michel en évoquant son expérience professionnelle en matière de divorce, le fait de recevoir le couple en comparution permet de mesurer l’acuité des crises et de décider, si cela se révèle nécessaire, un délai de réflexion. Nous devons penser aux situations les plus délicates, lorsque certaines parties sont parfois très faibles.

En second lieu, monsieur le garde des sceaux, vous prévoyez une expérimentation de l’obligation de recourir à la médiation familiale pour les actions tendant à faire modifier les modalités d’exercice de l’autorité parentale. La saisine du juge aux fins de modification de telles mesures devrait, par conséquent, être précédée, à peine d’irrecevabilité, d’une tentative de médiation, sauf si les parents sont d’accord sur les modifications envisagées ou si un motif légitime justifie une saisine directe du juge.

Mes chers collègues, une telle expérimentation constitue certes une approche pragmatique, qui peut permettre à terme de mieux définir un autre mode de résolution des conflits, toutefois, la seule mise en œuvre de cette expérimentation suppose la mobilisation de moyens importants dans les services de médiation familiale. Et je suis, je l’avoue, peu convaincu de l’opérationnalité immédiate d’une telle disposition.

La commission des lois a me semble-t-il trouvé une solution tout à fait raisonnable afin d’éviter que les délais de médiation familiale ne s’étendent de manière excessive, ce qui retarderait le règlement des litiges. Ainsi, l’obligation de médiation préalable pourra être écartée si, en raison des délais d’obtention d’un rendez-vous avec le médiateur, les parties courent le risque de se voir priver de leur droit d’accéder au juge dans un délai raisonnable. J’ai entendu, monsieur le garde des sceaux, vos interrogations sur la notion de « délai raisonnable » ; je ne doute pas que la discussion permettra de lever vos réserves. Toutes ces mesures, j’y insiste, ont pour finalité l’intérêt de l’enfant.

Toujours en matière familiale, je tiens à évoquer la régulation des honoraires d’avocat pour la procédure de divorce.

Vous le savez, le projet de loi prévoit que l’avocat ne pourra demander des honoraires supérieurs au montant fixé par un arrêté, sauf s’il a conclu une convention d’honoraires avec son client. Si le principe de la convention d’honoraires offre au client une plus grande prévisibilité sur les frais auxquels il s’expose, la question du barème d’honoraires mérite d’être discutée. C’est pourquoi la proposition de la commission des lois, qui consiste à fournir une information objective aux parties sur les prix moyens généralement pratiqués en matière de divorce, en prévoyant la publication par arrêté du garde des sceaux, pris après avis du Conseil national des barreaux, de barèmes indicatifs, semble être un équilibre intéressant.

L’allégement procédural concerne également le domaine pénal. Reprenant pour partie les préconisations formulées par le rapport Guinchard, le projet de loi étend le champ de trois procédures pénales simplifiées dans le souci d’améliorer l’efficacité du traitement des contentieux simples ou ne donnant pas lieu à contestation.

Néanmoins, comme l’a rappelé M. le rapporteur, si la procédure de l’ordonnance pénale a montré son utilité dans le traitement de contentieux simples, nous considérons qu’elle n’est pas nécessairement adaptée pour des contentieux plus complexes. Nous soutenons donc l’idée d’encadrer strictement l’extension du champ d’application de l’ordonnance pénale.

La procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, la CRPC, communément appelée le « plaider coupable », permet au procureur de la République de proposer à une personne reconnaissant avoir commis un délit une peine qui, en cas d’accord de l’intéressé, pourra être homologuée par le président du tribunal.

Il nous est proposé d’étendre la possibilité pour le parquet de recourir à la CRPC pour l’ensemble des délits, sous réserve d’un certain nombre d’exceptions limitativement énumérées. Cette procédure présente des avantages non négligeables, notamment une plus grande individualisation de la peine. Cependant, comme l’a rappelé à juste titre M. le rapporteur, les délits les plus graves portant atteinte aux personnes doivent également être exclus de cette procédure.

J’évoquerai enfin la procédure de l’injonction de payer. Introduite dans le droit français en 1937 pour les créances de nature commerciale, puis étendue aux créances de nature civile et à toutes les créances d’origine contractuelle, elle permet à un créancier d’obtenir la délivrance d’un titre exécutoire sans débat préalable. Elle est aujourd’hui organisée devant la juridiction de proximité, le tribunal d’instance et le tribunal de commerce. Il nous est proposé de l’étendre au TGI. Le tribunal d’instance resterait compétent pour connaître des requêtes en injonction de payer qui, même supérieures à 10 000 euros, relèvent de sa compétence exclusive, comme celles qui sont relatives au crédit à la consommation ou aux baux d’habitation.

J’ai souhaité déposer, sur l’article concerné, un amendement visant à permettre que la requête en injonction de payer puisse être déposée devant le TGI par le créancier ou par le mandataire, comme c’est aujourd'hui le cas devant le tribunal d’instance, et ce afin d’alléger les frais de justice pour les créanciers. Il ne faut naturellement pas alourdir le coût de la procédure par un tel transfert. Je me réjouis que M. le rapporteur présente une proposition identique.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe UMP votera ce texte, qui va dans le sens d’une justice plus simple, plus équitable et plus accessible. Mais, je le répète, nous souhaitons le maintien des juridictions de proximité dans des conditions acceptables tant pour les intéressés que, naturellement, pour les justiciables.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Je tiens tout d’abord à remercier les différents orateurs d’avoir, par leur contribution, enrichi notre discussion.

Mes remerciements vont également à MM. Yves Détraigne et Marcel-Pierre Cléach, qui ont souligné le bien-fondé de ce texte, même s’ils le jugent perfectible.

Je tiens tout d’abord revenir sur les raisons qui ont conduit le Gouvernement à déposer ce projet de loi et sur la place qu’occuperont les dispositions qui vous sont présentées au sein de notre organisation judiciaire. Ce faisant, je répondrai à tous ceux qui se sont étonnés de la diversité des mesures qui leur sont soumises, notamment Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Jean-Pierre Michel.

En ce qui concerne les moyens, soyons clairs : le Gouvernement a fait des efforts budgétaires sans précédent.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Je le reconnais bien volontiers, monsieur Badinter, mais c’était voilà bien longtemps, en 2001. Ensuite, ils se sont faits plus rares.

Quoi qu’il en soit, depuis 2007, le Premier ministre veille à ce que le budget de la justice progresse chaque année. Ce budget, qui était de 4, 5 milliards d’euros en 2002, a, pour la première fois, dépassé 7 milliards d’euros en 2011, soit une augmentation de 60 % en neuf ans, dont 14 % entre 2007 et 2011.

Plus important encore, et M. Hyest l’a souligné, en 2002, le budget de la justice représentait 1, 7 % du budget de l’État contre 2, 5 % en 2010. Cette progression, peut-être insuffisante, est néanmoins tout à fait significative.

Entre 2002 et 2011, le nombre des magistrats est passé de 6 952 à 8 197 et celui des fonctionnaires et greffiers a progressé de 20 461 à 21 091, dont 9 237 greffiers, soit une augmentation de 18 %. En 2011, 399 nouveaux emplois de greffiers seront créés.

La progression des moyens se poursuivra dans les prochaines années : 485 emplois seront créés, 315 en 2012 et 170 en 2013, dont 235 postes de magistrats et 160 postes de greffiers. Il s’agit donc d’une évolution continue, et je tenais à le souligner devant le Sénat.

Mais l’augmentation des moyens doit s’accompagner d’une réforme la justice. À cette fin, il faut, comme l’a souligné M. Reichardt, recentrer le juge sur son cœur de métier, car aujourd’hui, on lui en demande beaucoup trop. En fait, nous devons agir dans un double mouvement.

Lorsque le juge tranche avec une autorité particulière un conflit, se prononce sur une difficulté ou sanctionne la non-observation de la loi, sa décision doit apporter une vraie plus-value. Le juge n’est pas une assistante sociale. Les deux métiers sont nécessaires et respectables, mais chacun a son office. Nous devons opérer un double mouvement : d’une part, créer des moyens nouveaux ; d’autre part, recentrer le juge sur son cœur de métier, et c’est l’objet du présent projet de loi. Par ce double mouvement, nous donnerons au service public de la justice des moyens dont il a bien besoin.

Nous aurons l’occasion, au cours des débats, de revenir sur les nombreux points qui ont été soulevés. Mais permettez-moi en cet instant, sans allonger la discussion, d’apporter quelques précisions.

M. Détraigne a exprimé ses inquiétudes en ce qui concerne le mariage, le divorce et de la médiation. Aujourd'hui, le contentieux familial représente près de 60 % du volume des affaires des juridictions. Cette situation est-elle normale ? Il me semble que nous ne pouvons pas éviter d’engager la réflexion sur ce sujet. Faut-il vraiment faire appel au juge à la moindre difficulté ? La question mérite d’être posée.

Dans certaines situations, seul le juge peut trancher. Mais parfois, des professionnels autres que le juge peuvent aider les couples à surmonter les difficultés qu’ils rencontrent. C’est l’objet de la médiation, que nous souhaitons rendre obligatoire.

Comme l’ont souligné MM. Alfonsi et Détraigne, cette disposition induira des dépenses supplémentaires, mais c’est nécessaire si nous voulons de libérer le temps du juge.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la plupart d’entre vous, je l’ai bien compris, sont opposés à la mesure permettant de prononcer le divorce sans comparution des deux membres du couple. Il n’est pas question pour le Gouvernement d’ignorer la position que prendra le Sénat, mais nous considérons que cette mesure se justifie lorsque les seuls intérêts en jeu sont ceux des deux membres du couple. En revanche, lorsque qu’il y a des enfants, il est tout à fait normal que le juge puisse les protéger.

Monsieur le rapporteur, vous avez à juste titre insisté sur la solennité du mariage. Toutefois, je constate que ce n’est pas le juge qui officialise le mariage. Dès lors, pourquoi ne pas envisager d’autres voies que le recours au juge pour défaire une union.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Le maire peut « démarier » !

Sourires

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Il me semble que l’Association des maires de France est hostile à cette solution…

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Je l’ignore, mais ce n’est pas parce que le maire ne peut rompre une union que le juge doit obligatoirement intervenir ! Mais nous aurons l’occasion de revenir sur ce point lors de l’examen de l’article 13.

Les juges de proximité sont devenus une institution. Elle fonctionne plus ou moins bien selon les endroits, mais c’est tout à fait normal.

Rattacher les juges de proximité aux tribunaux de grande instance, c’est éviter la coexistence de trois juridictions de première instance.

Si je devais formuler un souhait, je préférerais qu’il n’y ait qu’une seule juridiction de première instance. Cela aurait le mérite de la clarté.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

C’est un peu tard pour le faire, mais ce pourrait être une solution.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Il ne s’agit pas de modifier la localisation géographique des tribunaux. Le maillage doit être le plus serré possible s’agissant des juges, mais il paraît souhaitable que le président du tribunal de grande instance puisse gérer l’ensemble de la juridiction de première instance de son territoire. Et c’est bien l’objet du présent projet de loi. Les juges de proximité seront rattachés au tribunal de grande instance. Le président les affectera dans les formations de jugement. Ils conserveront des compétences propres dans un certain nombre de domaines, participeront à la collégialité, qui est un aspect essentiel de notre système judiciaire.

Certes, les juges de proximité ne sont pas des magistrats professionnels. Conformément à une décision du Conseil constitutionnel de 2002, dans les juridictions correctionnelles, il ne pourra donc y avoir qu’un juge de proximité, les magistrats professionnels devant être majoritaires.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Cette question sera réglée par le président du tribunal.

Sourires

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Monsieur Cléach, je tiens en cet instant à vous remercier du soutien que vous apportez au Gouvernement dans domaine de la justice militaire. Je ne m’attarderai pas sur la suppression du tribunal aux armées de Paris, qui semble recueillir un accord unanime.

Vous souhaitez que le Gouvernement prête, à l’avenir, une attention particulière au corps des greffiers militaires. Ces derniers, je le rappelle, sont des militaires de carrière. Leur statut professionnel n’est donc pas remis en cause par la suppression du tribunal aux armées de Paris, qui n’emploie actuellement que sept militaires sur un total de cent vingt et un greffiers. Quoi qu’il en soit, nous serons très attentifs à cette question.

La formation des magistrats constitue, en effet, une question essentielle. Depuis 2009, le ministère de la défense organise, en lien avec l’École nationale de la magistrature, l’ENM, un stage d’une semaine à l’intention d’une vingtaine de magistrats.

La question du regroupement des juridictions de droit commun spécialisées dans les affaires pénales militaires sur le territoire français n’est pas taboue. Il m’apparaît souhaitable de ne pas centraliser toutes les instances à Paris.

M. Michel s’est inquiété des retards que pourrait prendre le traitement de certaines affaires du fait de la suppression du tribunal aux armées de Paris. Aujourd’hui, on ne constate aucun retard dans la tenue des audiences et le TGI ne récupérera donc pas un stock de dossiers en attente.

Dans l’affaire Mahé, le renvoi en cours d’assises vient d’être ordonné. Rien ne s’oppose à ce que le tribunal aux armées, qui ne disparaîtra qu’au 1er janvier 2012, prononce son jugement dans les six mois qui viennent. Dans les affaires Rwanda et Bouaké, des informations judicaires contre X sont ouvertes. Aucune mise en examen n’a eu lieu. Les enquêteurs continueront de travailler, quel que soit le juge compétent.

J’en viens aux interrogations de M. Michel sur les vacations d’assistants de justice et de juges de proximité.

En ce qui concerne les assistants de justice, les crédits ont été rétablis. Il y aura autant d’équivalents temps plein en 2011 qu’il n’y en avait en 2010 et en 2009. J’ai fait parvenir une dépêche en ce sens aux différentes juridictions.

Pour les juges de proximité, les vacations représentaient 217 équivalents temps plein travaillé en 2010. Elles s’élèveront à 300 en 2011. Ces exemples montrent bien qu’il n’y a aucune diminution des moyens alloués à la justice.

S’agissant de l’impossibilité pour les juridictions de payer des experts, je souhaite rappeler le rôle que le Sénat joue dans ce domaine grâce, notamment, aux compétences de M. du Luart en matière de frais de justice. Nous sommes passés de 290 millions d’euros en 2002 à 465 millions d’euros en 2011. Une mission d’inspection a été confiée à l’Inspection générale des services judiciaires et à l’Inspection générale des finances sur ce sujet.

Tels sont les quelques éléments de réponse que je souhaitais apporter en cet instant aux différents orateurs. Afin de ne pas allonger le débat, je reviendrai plus précisément sur leurs interrogations lors de l’examen des amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je suis saisie, par M. Badinter et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, d'une motion n°34.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi relatif à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles (395, 2010-2011) (Procédure accélérée).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à M. Robert Badinter, auteur de la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Madame la présidente, monsieur le garde de sceaux, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, chacun s’accordera sur la finalité du texte : mieux répartir les contentieux, mieux définir les compétences ne peut que satisfaire tous ceux qui sont intéressés par l’amélioration du fonctionnement de la justice dans notre pays.

J’exprimerai tout d’abord un motif de satisfaction rétrospective, fort lointaine puisqu’elle est relative à des événements qui remontent à trente ans : je veux parler du dernier acte de la suppression des tribunaux militaires, les tribunaux permanents des forces armées, revendication qui, depuis l’affaire Dreyfus, avait nourri, à gauche, des passions incendiaires. C’est à dessein que j’utilise cet adjectif, car je me souviens fort bien – pardonnez-moi d’évoquer ces moments qui sont restés gravés dans ma mémoire ! – de la férocité du débat sur la suppression des tribunaux militaires qui avait opposé la majorité et l’opposition, cette nuit-là, à l’Assemblée nationale.

J’ai moi-même été stupéfait, en relisant les débats de 1982, de constater que ce qui nous paraît aujourd’hui aller de soi – et qui allait alors déjà de soi, puisque quasi-totalité des forces armées était constituée de civils déguisés en militaires qui n’aspiraient qu’à retrouver leurs vêtements civils – avait, à l’époque, suscité des réactions aussi violentes.

J’ai ainsi entendu tonner un éminent ancien Premier ministre, homme très courageux, grand défenseur des valeurs militaires ; il m’accusait de commettre un crime de lèse-nation – rien de moins ! Un éminent collègue de la faculté de droit, civiliste qualifié entre tous et romaniste réputé, aux citations incomparables, déclarait que je poursuivais une entreprise systématique et désolante de destruction des défenses de la société française puisque, après l’abolition de la peine de mort et la disparition de la Cour de sûreté de l’État, je m’en prenais à la forteresse multiséculaire que constituaient les tribunaux militaires. Et puis, le temps s’est écoulé. Pouvoir prendre acte de cette évolution est un privilège de l’âge, mais un des seuls !

Je remercie M. le rapporteur – il le mérite – pour le travail remarquable qu’il a accompli. Les amendements déposés par la commission sont bienvenus et correspondent, je crois, à ce qui doit être fait.

Je souhaite formuler deux observations : l’une, de méthode, et l’autre, qui fonde la motion tendant à opposer la question préalable.

Ma première observation est relative au recours à la procédure accélérée. Non ! On ne déclare pas l’urgence quand il s’agit de mettre en œuvre un rapport, en l’occurrence le rapport Guinchard, qui, sauf erreur de ma part, a été publié voilà près de trois ans, en juin 2008. S’il y avait eu urgence, nous nous serions précipités pour légiférer. Le Gouvernement a préféré la méthode du salami : découpé en tranches, ce rapport a déjà nourri trois lois, dont l’une est issue de l’excellente proposition de loi déposée par notre collègue Laurent Béteille.

Mes chers collègues, vous le savez, lorsqu’un texte pose, dans le détail, des questions aussi complexes, on a tout à gagner à laisser se dérouler normalement les travaux parlementaires. Le ministre lui-même, écoutant les observations des uns et des autres, appuyé par des services toujours compétents, peut ainsi relever les points sur lesquels il a intérêt à modifier la copie. L’urgence est mauvaise en matière de procédure, et plus particulièrement dans le cas qui nous occupe.

Mais peut-on encore parler d’urgence ? En fait, la précipitation est devenue la règle. Ce n’est pas de votre fait, monsieur le ministre ! Vous êtes le troisième garde des sceaux de cette législature, ce qui vous assure la juvénilité, mais je souhaite que vous soyez le dernier, car nous ne gagnons rien à ces changements successifs, quels que soient les mérites de chacun.

Il est inouï de penser qu’une idée personnelle du Président de la République, idée que je n’ai jamais vu figurer à l’ordre du jour d’un quelconque colloque, donner lieu à un article scientifique ou à une réflexion de doctrine, puisse être soumise aussi rapidement au Parlement. Pourtant, c’est le cas de l’apparition des jurés populaires au niveau correctionnel, qui modifie un ordre établi depuis deux siècles. Cette idée est immédiatement mise en œuvre, et l’on nous annonce, sans perdre une seconde, que nous aurons à en connaître d’ici une quinzaine de jours, sauf erreur de ma part. Reconnaissons que cette idée, qui bouleverse un ordre biséculaire, aurait mérité que l’on y réfléchisse à deux fois !

Malgré la pénurie de moyens en personnels, magistrats ou greffiers, dont notre justice est affligée, quels que soient les efforts continus qui ont pu être faits – la progression de la demande est toujours plus forte que l’accroissement des moyens –, vous avez su trouver dans la seconde, cent magistrats et cent cinquante greffiers à affecter à cette « innovation présidentielle ». Dans l’instant, ils ont jailli, comme cela ! §Admirable promptitude, lorsque l’on songe aux doléances des juridictions… Nous aurons l’occasion d’y revenir, croyez-moi, avec une grande intensité !

Ma seconde observation porte sur la justification de la question préalable. Au travers des modalités de ce projet de loi, et de nombreux autres textes, on reconnaît un mouvement de fond qui s’inscrit dans une évolution de la procédure pénale que nous ne pouvons pas ne pas prendre en considération. Ce mouvement se caractérise par le passage d’une société dans laquelle la fonction juridictionnelle est assumée par et selon les principes du procès équitable, à une autre où la justice devient purement et simplement un service public administré. Ce qui domine, ce n’est plus le respect des principes du procès équitable – pourtant intangibles pour nous –, c’est la recherche de l’efficacité maximale à tout prix !

Le Gouvernement va jusqu’à l’extrême pour contourner ce qui constitue le cœur même de la justice. Est-il besoin de rappeler l’article préliminaire du code de procédure pénale, « la procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l’équilibre des droits des parties », et surtout, l’article 6, paragraphe 1 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, que chacun de nous connaît bien, « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement […] ».

On voit bien à quel type de contentieux appliquer les principes du procès équitable, mais qu’en restera-t-il dans l’ordonnance pénale ? Il est devenu nécessaire de tempérer, de limiter, de modérer autant que faire se peut le recours à ces procédures, où le procès pénal n’a presque plus sa place, puisque, nous le savons, en définitive, seuls quelques-uns le susciteront, généralement d’ailleurs à leur détriment ! Voilà ce que j’appelle « un autre type de justice », une justice administrée, ultrarapide, uniformisée pour épuiser le maximum d’affaires qui viennent peser sur elle.

J’approuve la commission des lois d’avoir au moins tempéré l’accroissement de compétences qu’il lui était demandé d’adopter, en excluant du champ de l’ordonnance pénale les faits commis en état de récidive. S’agissant des vols et des dégradations de biens privés ou publics, on pensera, à juste titre, que leur ajout à la liste des infractions pouvant faire l’objet d’une ordonnance pénale constitue un dépassement de la finalité de cette procédure.

Plus grave et plus préoccupante est la question du recours systématique et généralisé à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, la CRPC. Ce mouvement, qui s’est dessiné dans les dernières années, prend une ampleur croissante, et je m’en inquiète.

On conçoit l’avantage que présente le recours à cette procédure : elle est rapide ! Mais il faut en mesurer la signification : dans ce type de justice, le parquet, tout puissant, contrôle l’enquête. Aujourd’hui, seuls 4 % des affaires – les plus complexes, je le reconnais – font encore l’objet d’une instruction ! La masse du contentieux pénal est donc dans la main du parquet.

Après avoir contrôlé l’enquête, le parquet décide de l’orientation de la procédure, voire de son terme. Et lorsqu’il choisit la voie de la CRPC, que reste-t-il des pouvoirs réels du juge et de l’équilibre des droits des parties ? L’avocat qui, naguère, exerçait son métier ou son art avec tant de passion, peut simplement tenter, en suppliant, d’attirer la bienveillance du parquet sur son client. Soyons réalistes, ce que l’on demandera dorénavant à l’avocat, c’est moins la compétence et le talent que l’aptitude à entretenir des relations cordiales avec les membres du ministère public, de préférence au plus haut niveau, voire encore plus haut, si besoin en est ! Telle est l’évolution qui se dessine à l’horizon avec la CRPC.

Une telle procédure ne s’inspire même pas du plea bargaining américain, puisqu’il n’y a en réalité pas de marchandage. Le procureur définit la sanction qui lui paraît convenable et qui s’inscrit dans un barème discuté avec les magistrats du siège. L’avocat doit ensuite choisir entre deux options : prendre le risque, considérable, d’une audience où son client peut être condamné à une peine plus grave, ou bien accepter la reconnaissance préalable de culpabilité. Dans ce dernier cas, le travail est réduit, le risque limité : tout est au mieux pour certains ! Le juge, jouant alors le rôle de contrôleur de légalité, assure l’estampillage de la sanction en vérifiant que la décision n’est pas trop en deçà ou au-delà de ce que l’on considère comme la norme pour cette catégorie de délit.

Quand on en arrive à ce degré, non pas d’omnipotence, mais de maîtrise sans cesse croissante du parquet sur la réalité de la procédure pénale, une exigence s’impose – et c’est elle qui fonde cette question préalable – : les pouvoirs immenses que l’on reconnaît aux magistrats du parquet ne leur sont reconnus que parce qu’ils sont magistrats. Et en tant que tels, selon la Constitution même, ils ont à veiller au respect des libertés individuelles. Mais, dès l’instant où on leur reconnaît cette qualité, il faut aussi leur accorder les garanties qui y sont attachées. On ne peut pas, à la fois, accroître, comme on le fait, les pouvoirs du parquet, et permettre que l’exécutif conserve en main leur carrière et leur tienne la bride serrée, n’hésitant pas – je pourrais reprendre, à cet égard, l’évolution observée dans les quatre dernières années – à tenir pour négligeables les avis du Conseil supérieur de la magistrature. De toute manière, on ne saurait admettre que l’avancement des membres du parquet soit laissé à la discrétion ou à l’humeur du pouvoir politique.

Les magistrats forment un seul corps, il ne peut donc pas y avoir deux catégories de magistrats en France : ceux qui bénéficient de garanties d’indépendance en ce qui concerne l’évolution de leur carrière, leur promotion et leur responsabilité disciplinaire, et les autres. Ce n’est pas possible ! Il faut enfin que le pouvoir politique se résigne. Puisqu’on ne cesse d’accroître les pouvoirs du parquet, il faut parallèlement renforcer les garanties nécessaires pour que chacun ait confiance en ces magistrats et soit sûr qu’ils exercent des fonctions juridictionnelles, même si l’on peut s’interroger, au regard de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, mais je laisse cette question de côté !

En effet, rappelez-vous que l’un des mérites – dit-on – de la CRPC, est d’éviter la comparution devant un tribunal correctionnel, et l’opprobre qui l’accompagne. À présent, cette procédure devient applicable à quasiment tous les délits, à l’exception de ceux qui ont été retirés in fine. Elle s’applique notamment aux délits financiers, aux affaires de corruption – je pourrais continuer, l’énumération serait longue ! De fait, 80 % des affaires correctionnelles qui donnent actuellement lieu au prononcé d’une condamnation à une peine inférieure à un an pourront demain relever de la CRPC.

Lorsque la CPRC aura été généralisée, si l’on ne prend pas les mesures qui sont nécessaires et qui sont réclamées par tout le corps judiciaire et par la Cour européenne des droits de l’homme, nous rappelant au principe de garantie d’indépendance des magistrats, je crois pouvoir affirmer que l’on ne verra plus telle ou telle haute personnalité de l’État comparaître devant un tribunal correctionnel. Non pas que nous souhaitions ces comparutions… Mais l’égalité devant la loi et devant la justice est un principe fondamental. Que telle personnalité proche du pouvoir préfère ne pas comparaître, … une discrète CRPC permettra de résoudre la difficulté aisément, dans le respect de la loi !

Monsieur le garde des sceaux, soyons clairs : ce qui est actuellement au cœur du débat en matière judiciaire, c’est la question majeure, première, de l’indépendance et des garanties statutaires qui doivent être données aux magistrats du parquet s’agissant de leur nomination, de leur promotion et de leurs responsabilités. C’est la question clé !

Souvenez-vous, monsieur Hyest : lorsque, à la suite des travaux de la commission de réflexion sur la justice présidée par Pierre Truche, un texte a été voté dans les mêmes termes par le Sénat et par l’Assemblée nationale, il aurait alors suffi de réunir le Congrès pour régler la question. Hélas ! cela n’a pas été fait.

Monsieur le garde des sceaux, tant que nous n’aurons pas satisfait à cette exigence, vous ne devez pas aller plus loin dans l’extension, toujours accrue, des pouvoirs d’une institution dont les membres, je le sais pour bien les connaître, ont le goût de l’indépendance, mais sont considérés, par l’opinion publique, comme de simples pions dans la main du Gouvernement.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Jacques Mézard applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Monsieur Badinter, permettez-moi de rappeler quelle était la conclusion de mon intervention liminaire.

J’indiquais que le projet de loi contenait des mesures très intéressantes et allait dans le sens d’une clarification et d’une amélioration du fonctionnement de notre justice. J’y mettais néanmoins une double condition : que l’on veille à sauvegarder l’équilibre entre les mesures proposées et les moyens consacrés à leur mise en œuvre – c’est un des points que vous venez d’aborder – et que l’on s’attache à ce que la simplification des procédures juridictionnelles ne se traduise pas par une banalisation de certaines d’entre elles, banalisation qui entraînerait un amoindrissement de leur impact – votre intervention allait également dans ce sens.

La commission des lois partage donc votre préoccupation, monsieur Badinter, et c’est dans cet esprit qu’elle a examiné le projet de loi.

La commission a tout fait pour éviter que le développement des procédures simplifiées de jugement ne dépasse les limites de l’acceptable, nous entraînant ainsi sur des terrains sur lesquels l’équilibre des parties et des intérêts en jeu n’aurait pas été sauvegardé. Vous pouvez donc être rassuré, mon cher collègue, par les travaux de la commission.

Je vous rappelle par ailleurs que, voilà quelques années – vous étiez alors membre de la commission des lois –, une mission d’information tout à fait pluraliste a été constituée pour évaluer la mise en œuvre des procédures simplifiées, notamment l’ordonnance pénale et la CRPC.

À l’issue des travaux de la mission, nous avons établi un constat similaire à celui que je peux faire en qualité de rapporteur pour avis d’un certain nombre de programmes de la mission « Justice », dans les différentes juridictions au sein desquelles je me rends tout au long de l’année : les chefs de juridiction ne fixent pas de limite pour justifier l’usage de la procédure simplifiée ou de la procédure traditionnelle. Le recours à la procédure simplifiée est déterminé par la nature du contentieux, mais aussi par la compréhension des parties en présence et par leur réceptivité à la mise en œuvre de cette procédure.

M. Badinter a insisté sur la très grande place du parquet dans le déroulement des procédures. Je précise que, lors de la CRPC, le parquet propose certes la peine, mais celle-ci doit être homologuée par un juge du siège.

La commission est attentive au respect des limites que je viens de rappeler. Elle a d’ailleurs adopté un certain nombre d’amendements allant dans ce sens lors de ses travaux, et nous pourrons revenir sur ces sujets au cours de la discussion.

Nous pouvons considérer, me semble-t-il, que la commission partage votre préoccupation. Elle veille à ce que les procédures nouvelles, qui permettent d’apporter des réponses pénales, en plus grand nombre et plus rapidement, à certaines affaires aujourd’hui traitées avec lenteur, ne nuisent pas à l’équilibre et à la sérénité nécessaires à la justice pénale.

Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur la motion tendant à opposer la question préalable.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Je tiens d’emblée à rappeler à M. Robert Badinter, que l’on écoute toujours avec un grand intérêt, que je ne suis pas un fanatique de l’urgence. Mais les délais sont là. Mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes en avril et, compte tenu de qui attend certains d’entre vous, je pense que le Sénat apprécierait peu d’être convoqué en session extraordinaire trop longtemps en juillet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Retirez le texte sur les jurys populaires ! Nous gagnerons du temps !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Tout ce qui n’est pas fait reste à faire. Cette ancienne règle s’impose à tous !

Sourires

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Monsieur Badinter, j’ai bien compris le sens de votre intervention pour ce qui concerne les procédures simplifiées en matière pénale. Permettez-moi de rappeler que, lors de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, l’homologation par le juge est toujours prononcée en audience publique, comme le prévoit expressément l’article 495-9 du code de procédure pénale.

M. Badinter nous dit que, dans la CPRC, le rôle du parquet est prépondérant. C’est vrai ! Il nous dit aussi les membres du parquet sont des magistrats. C’est encore vrai ! L’autorité judiciaire est composée des magistrats du siège et du parquet. Et il ajoute que, pour pouvoir agir comme des « quasi-juges », ces magistrats devraient être indépendants.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Il faut apporter des garanties d’indépendance : nominations, promotions, responsabilités !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Monsieur Badinter, on ne peut pas apprécier une situation sur un temps trop court. Vous avez-vous-même rappelé combien, après trente ou quarante ans, la perception de certaines situations avait changé, les esprits avaient mûri.

J’observe que ceux qui ont permis de faire évoluer les choses ne sont pas tous d’un même bord ! En 1993, l’avis conforme du CSM est instauré pour la nomination des magistrats du siège. La même année, me semble-t-il, on prévoit également la remise d’un avis simple pour la nomination des magistrats du parquet. Enfin, en 2010, l’avis simple est étendu à la nomination des procureurs généraux.

Le CSM, modifié, renouvelé, intervient donc de plus en plus dans la nomination des procureurs, ce qui, je crois, constitue un progrès évident.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Personne n’a empêché l’opposition d’aller plus vite. Vous êtes restés au pouvoir pendant plusieurs années et ce n’est pas vous, me semble-t-il, qui avez fait avancer les choses le plus rapidement. Mais je ne jette la pierre à personne, car le sujet est difficile. Je rappelle simplement – vous m’y forcez – que ce sont les gouvernements qualifiés de droite – j’ajoute « et du centre » – qui ont fait progresser le respect de l’indépendance des magistrats du siège et du parquet.

Mesdames, messieurs les sénateurs, pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet, comme la commission, un avis défavorable sur la motion tendant à opposer la question préalable.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

J’ai écouté avec une grande attention les propos de M. le garde des sceaux et de M. le rapporteur.

Monsieur le rapporteur, je constate que vous avez, en toute honnêteté, je n’en doute pas, exprimé dans votre rapport vos souhaits et vos bonnes intentions.

Mais je constate aussi tout ce qui sépare vos propos, vos écrits, du mouvement qui est en marche, et que Robert Badinter a décrit avec son éloquence habituelle : la multiplication et la banalisation des CRPC, le règlement des dans le cabinet du représentant du parquet pour les puissants, ceux qui voudraient que les choses ne se sachent pas ; la régression inévitable du procès équitable. Les magistrats du parquet, nonobstant vos affirmations, monsieur le garde des sceaux, voient toujours leurs conditions de nomination et de carrière dépendre du pouvoir exécutif, et ce malgré la position des instances européennes ; des nominations sont entérinées qu’il ait été tenu compte de l’avis du CSM ; …

Monsieur le rapporteur, je respecte vos intentions, mais je ne peux que constater qu’un autre mouvement est en marche. En vous écoutant tout à l’heure, avec toute la considération amicale que je vous porte, je me remémorais ce que l’on disait naguère de la philosophie d’Emmanuel Kant : elle a les mains pures, mais elle n’a pas de mains.

MM. Jean-Pierre Michel et Jacques Mézard applaudissent

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je mets aux voix la motion n° 34, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.

La motion n'est pas adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je suis saisie, par MM. Mézard, Collin, Alfonsi, Baylet et Chevènement, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, d'une motion n°1.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l'article 44, alinéa 5, du Règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, le projet de loi relatif à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles (395, 2010-2011).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

Aucune explication de vote n’est admise.

La parole est à M. Jacques Mézard, auteur de la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, je commencerai par un constat : ce texte ne vous ressemble pas, monsieur le garde des sceaux, et l’appréciation que vous avez portée sur le recours à l’urgence n’a fait que renforcer cette conviction.

Ce projet de loi justifie pleinement, à défaut de succès pour la précédente motion, la demande de renvoi à la commission.

Vous supprimez la juridiction de proximité tout en magnifiant le juge de proximité : voilà une bien curieuse clarification !

Je salue le travail accompli par le rapporteur de la commission des lois et par le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Toutefois, il ne me paraît pas raisonnable de considérer que ce texte améliorera le fonctionnement de notre justice, tant au civil qu’au pénal, alors que l’on refuse – cela vient d’être rappelé – d’aborder les vraies questions, notamment le rôle du parquet.

Et pourquoi le Gouvernement a-t-il engagé la procédure accélérée sur ce projet de loi, alors même que l’on nous annonce une série d’autres textes dits « de fond », dans des matières tout aussi importantes, si ne c’est plus.

Alors que vous nous avez habitués à utiliser la force de frappe médiatique pour annoncer vos multiples projets en matière de justice et de sécurité, cette fois-ce, c’est le « silence radio », comme se ce texte ne comprenait que des micromesures de peu d’importance.

Pourquoi donc, je le répète, avoir engagé la procédure accélérée ? Y a-t-il le feu à la maison justice ? Oui ! Mais ce projet de loi l’éteindra-t-il ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Ce projet nous est présenté comme la transposition du rapport Guinchard, dont la commande fut passée par votre prédécesseur, Mme Dati. M. Guinchard, avec optimisme, avait repris dans l’avant-propos de son document, cette belle phrase du bâtonnier André Damien : « La justice idéale doit être, à la fois, appliquée à son temps et intemporelle, sous peine de devenir esclave de l’opinion. » On ne pouvait qu’applaudir ! Le rapport Guinchard voulait « penser global et agir local ! » Dans le présent projet de loi, la question est de savoir « comment faire un peu moins avec encore moins » ? Mais cela, c’est du Mézard.

Sourires

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Je vous avais reconnu !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Je note d’ailleurs que vous vous êtes contenté de piocher dans les soixante-cinq propositions formulées dans le rapport, en retenant certaines pour en écarter d’autres, et vous en avez fait un pâté d’alouettes.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

En tout état de cause, nous ne partageons pas la philosophie du rapport Guinchard, dont l’objectif fondamental est la déjudiciarisation de tous les secteurs de la justice, ce qui est aussi aberrant que de mener une politique de santé en diminuant le nombre de praticiens et d’établissements de santé. Quant à la seconde partie du rapport, son thème, « Remettre le justiciable au cœur du système judiciaire », nous semble constituer l’aveu d’un terrible échec. D’ailleurs, monsieur le garde des sceaux, vous avez-vous-même déclaré – propos révélateur – que c’était le magistrat, et non le justiciable, qu’il convenait de remettre au cœur du système judiciaire.

En réalité, ce moignon du rapport Guinchard que vous nous présentez aujourd’hui n’est pas un pas vers la modernité, c’est un cautère sur une jambe de bois. C’est une nouvelle marque de méfiance envers la magistrature et une étape supplémentaire, Robert Badinter l’a fort bien rappelé, vers la toute puissance du parquet.

Pourtant, ce texte examiné en procédure accélérée et quasiment en catimini intervient au moment où la justice française est en plus mauvais état que jamais, où l’exaspération justifiée des magistrats, des auxiliaires de justice et des justiciables est à son comble.

En neuf ans, la situation s’est aggravée, avec la conjugaison d’une absence chronique de moyens, malgré de réels efforts, et d’une insécurité juridique dénoncée de toutes parts et découlant d’une véritable frénésie législative et réglementaire.

La justice est devenue un organe malade dans notre corps républicain. Cette pathologie redoutable, vous la traitez par des amputations, une série de placebos, en refusant de lire le diagnostic et d’utiliser les thérapies adéquates. On cherche une politique cohérente, on trouve une accumulation de mesures disparates, de la suppression des avoués près les cours d’appel – quelle curieuse urgence ! – à la carte judiciaire, en passant par le mouvement perpétuel des textes sécuritaires... Tout cela a pour conséquence première et gravissime de compliquer l’action des professionnels.

Quand les textes vont dans le bon sens – je pense à la loi pénitentiaire –, le manque de moyens pour les appliquer fait naître une insatisfaction compréhensible.

L’urgence, aujourd’hui, monsieur le garde des sceaux – je sais que vous en êtes conscient –, est de dire : « Halte au feu ! » La réforme ne saurait s’assimiler à la danse de Saint-Guy. Il est devenu impérieux de nous accorder un temps de réflexion pour dresser un bilan, dégager des axes de bon sens, élaborer une programmation. Vous évoquiez tout à l’heure l’idée d’une juridiction unique qui maillerait l’ensemble du territoire. Pour remettre la justice sur les rails, pour redonner confiance à tous ses acteurs, il faudra du temps !

La méfiance chronique à l’égard des juges devient dangereuse, d’autant qu’elle est parfois ressentie de façon presque épidermique. Ce projet de loi nous paraît inopportun. S’il est mené dans une discrétion exceptionnelle, il n’en aura pas moins des effets néfastes sur une justice déjà très fragilisée.

Monsieur le garde des sceaux, vous assumez un héritage. À défaut d’y renoncer, acceptez-le au moins sous bénéfice d’inventaire.

M. le garde des sceaux sourit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Et qu’en est-il de la proximité ? Un mot et des actes contraires ! Nous touchons là à l’incohérence absolue. En 2002, la loi d’orientation et de programmation pour la justice créait la juridiction de proximité. La lecture des débats qui se sont déroulés à l’époque – je n’étais pas encore sénateur – nous instruit sur la véritable finalité du texte, puisqu’il y est déjà question de « supplétifs ». La proximité consiste à rapprocher la justice du citoyen. L’intention est louable, mais alors même que les juges de proximité étaient loin d’être présents dans tous les tribunaux d’instance – il n’y en a aucun dans mon département ! –, vous avez réformé la carte judiciaire, détruisant ainsi, dans nos territoires, des centaines de tribunaux, en priorité ceux qui répondaient aux vrais besoins de proximité, les tribunaux d’instance, et remettant en cause le juge des tutelles.

Aujourd’hui, vous voulez détruire la juridiction de proximité, qualifiée par le garde des sceaux de l’époque, le 25 juillet 2002, d’« engagement majeur du Président Chirac ». M. Dominique Perben affirmait notamment : « Ce choix clair m’apparaît comme le plus lisible pour nos concitoyens, qui pourront s’adresser à une juridiction individualisée ».

Aujourd’hui, vous faites volte-face. Vous supprimez cette juridiction de proximité, sans aucun égard pour l’avis de l’Association nationale des juges de proximité ! L’objectif, c’est purement et simplement de transformer ces derniers en juges supplétifs, en petites mains de la justice à frais minimums. C’est grave à tous points de vue. Imaginons les futurs tribunaux correctionnels, siégeant avec un président – un magistrat professionnel – deux assesseurs – des juges de proximité – et vos fameux jurés populaires. C’est déraisonnable !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je ne noircis pas le tableau, monsieur le président de la commission des lois, je fais un constat.

Je vous rappelle simplement que les articles 830 et suivants du code de procédure civile organisent la procédure de conciliation devant les tribunaux d’instance, qu’il convient de conforter, car le taux de réussite de ces procédures est toujours élevé. Pourtant, alors que ces tribunaux ont besoin de moyens, vous les fragilisez.

Concernant l’aménagement des règles relatives à la procédure en matière familiale, je salue de nouveau la sagesse de M. le rapporteur. Il s’agit en effet d’un bel exemple d’un texte d’opportunité élaboré par la haute technocratie, bien loin des réalités du terrain.

Sur la dispense de comparution des époux devant le juge en cas de divorce par consentement mutuel en l’absence d’enfant mineur, M. le rapporteur est fort opportunément intervenu, car la liberté du consentement et la vérification de son exercice sont fondamentales. Pour nous, l’écoute d’un magistrat est indispensable. Nous reviendrons lors de l’examen des amendements sur le barème des honoraires des avocats.

Quant à l’obligation de médiation préalable lors de la saisine du juge aux affaires familiales sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, elle est purement et simplement aberrante, tant sur le fond qu’en ce que concerne ses modalités d’application techniques ou financières. Il n’existe pas un nombre suffisant de médiateurs compétents et formés. Il n’y a pas les moyens de les rémunérer, si ce n’est à la charge du justiciable. L’obligation de passer devant le médiateur avant de saisir le juge est incongrue. En effet, la saisine du juge aux affaires familiales implique qu’il y a urgence à décider, même provisoirement.

Vouloir déjudiciariser à tout prix pour confier des responsabilités aussi graves à des intervenants extérieurs est contraire à l’intérêt de nos concitoyens. Le magistrat ne saurait être remplacé par le travailleur social. M. le rapporteur lui-même a rappelé le nombre d’affaires soumises aux juges aux affaires familiales et celui des mesures judiciaires de médiation.

Un autre sujet important justifie le renvoi de ce texte à la commission : le développement des procédures pénales dites simplifiées. Il faut y avoir été confronté pour se rendre vraiment compte du problème. Le but est toujours le même : pallier le manque de moyens et le délabrement de l’institution par des moyens relevant de ce que l’on peut appeler la justice expéditive.

L’ordonnance pénale, c’est la grande distribution en matière de justice pénale. En 1972, elle concernait une partie du domaine contraventionnel. Depuis 2002, ce virus, dont vous avez permis le développement, a atteint le tissu délictuel, alors qu’il s’agit d’une procédure écrite et non contradictoire. Le rapport Guinchard préconisait de l’appliquer à tous les délits, ce qui est effrayant ! Par l’article 20, vous proposez d’étendre largement le champ de cette procédure, en particulier aux délits de vol, recel, destruction, fuite, et même, ce qui est étonnant par rapport à vos objectifs généraux, au port d’arme de sixième catégorie, avec ticket de réduction de moitié de l’amende encourue. On peut lire, à la page 111 du rapport, qu’une telle disposition est « de nature à réduire davantage l’incitation du prévenu à former opposition ». Est-ce là votre politique pénale ? Certes, si la « pochette surprise pénale », c’est « tout à un euro », même les innocents en redemanderont !

Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Aux mêmes fins, vous proposez l’extension du champ de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité : « Avouez, c’est moins cher ! » Le projet de loi prévoyait d’étendre cette procédure à tous les délits. Heureusement la commission a joué un rôle de modérateur, en l’excluant pour certaines atteintes graves aux personnes.

Monsieur le garde des sceaux, vous n’appliquez pas les directives du Président de la République ! Celui-ci se réjouissait, lors de la réforme de la garde à vue, de la fin de la culture de l’aveu. Or, nous y revenons en courant !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Cela me rappelle l’adage romain : « On ne doit pas entendre celui qui veut mourir ».

L’extension du champ de la CRPC présente selon moi de multiples inconvénients. Avec mes collègues du RDSE, nous avons d’ailleurs déposé voilà quelques semaines une proposition de loi portant réforme de cette procédure.

Mes chers collègues, nous ne sommes pas dans un pays anglo-saxon. La CRPC élargie écartera des prétoires la quasi-totalité des délits financiers, ce qui n’est pas un hasard !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Mais si ! Ils avoueront pour éviter toute publicité, et ils feront le chèque.

Quant à nos concitoyens les plus démunis, ils ne seront pas les mieux protégés.

L’extension du champ de la transaction pénale au droit de la consommation constitue, nous le savons par expérience un moyen de pression dont abusent déjà les autorités administratives habilitées. La justice sans magistrat n’est plus une justice. C’est d’autant plus vrai en matière pénale, car le parquet, comme en bien d’autres secteurs, n’a pas les moyens pratiques d’exercer son contrôle.

Vous avez compris combien ce texte nous apparaît comme un mauvais moyen de replâtrer un édifice judiciaire branlant. On ne renforce pas des fondations ou des murs porteurs par du bricolage. Or, il s’agit bien de bricolage, comment en témoigne le dépôt inopiné d’amendements par le Gouvernement. Impréparation ou stratégie ? Quoi qu’il en soit, je remercie la commission d’avoir sauvé, pour l’instant, les actions possessoires : action en réintégration, dénonciation de nouvel œuvre et complainte ne disparaîtront pas du code civil. Il est bien d’autres véritables urgences.

Ce texte, c’est moins de proximité, moins de procédure contradictoire. La modernisation de notre système judiciaire passe inéluctablement par d’autres moyens que ceux que vous proposez, monsieur le garde des sceaux. C’est donc avec conviction que nous vous demandons, mes chers collègues, d’adopter cette motion tendant au renvoi à la commission.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Il est vrai, monsieur Mézard, que le présent projet de loi n’est pas la grande réforme de la justice que vous réclamez, comme nombre d’entre nous. « Halte au feu », disiez-vous, ajoutant que la réforme ne pouvait pas s’assimiler à la danse de Saint-Guy.

Ce projet de loi, en effet, ne constitue pas une panacée, une solution miracle à tous les problèmes de la justice ? D’ailleurs pourrait-on, dans un seul texte, régler tous les problèmes de la justice ? Néanmoins, il répond à un certain nombre de demandes.

La commission a ainsi supprimé l’article 13 du projet de loi, qui modifiait le régime de la comparution des époux lors du divorce par consentement mutuel.

Elle a également décidé d’étendre aux crimes et délits de guerre les compétences du pôle spécialisé créé par le projet de loi pour traiter des crimes contre l’humanité.

La commission a bien travaillé. Elle a su faire de ce projet de loi une réforme équilibrée de la justice. Elle n’agirait autrement si elle devait être saisie de nouveau. Je ne peux donc qu’être défavorable à la motion de renvoi à la commission.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Le Gouvernement partage l’avis du rapporteur. M. Mézard, pour qui j’ai beaucoup d’estime, a été quelque peu excessif. Mais l’excès même de sa critique démontre la qualité du travail de la commission, sans lequel il n’aurait pas pu présenter une démonstration aussi brillante, même si j’en conteste les tenants et aboutissants.

M. Mézard a omis de mentionner tous les points avec lesquels il est d’accord. Mais je le conçois, c’est le jeu même de la procédure.

Sourires

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Monsieur Mézard, en ce qui concerne la conciliation devant le tribunal d’instance, le Gouvernement est allé dans votre sens en renforçant la place de la conciliation et des conciliateurs de justice devant les tribunaux, notamment devant le tribunal d’instance, par le décret du 1er octobre 2010.

C’est notamment la raison pour laquelle je suis défavorable à la motion tendant au renvoi à la commission. Nous aurons sans doute l’occasion de revenir sur les autres points soulevés par M. Mézard lors de la discussion des articles.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je mets aux voix la motion n° 1, tendant au renvoi à la commission.

La motion n'est pas adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

En conséquence, nous passons à la discussion des articles.

chapitre Ier

Suppression de la juridiction de proximité et maintien des juges de proximité

I. – Le code de l’organisation judiciaire est ainsi modifié :

1° Après le chapitre 1er du titre II du livre Ier, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :

« Chapitre I er bis

« Les juges de proximité

« Art. L. 121-5. – Le service des juges de proximité mentionnés à l’article 41-17 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, appelés à exercer des fonctions de juge d’un tribunal de grande instance et à être chargés de fonctions juridictionnelles dans un tribunal d’instance, est fixé conformément aux dispositions du présent chapitre.

« Art. L. 121-6. – Chaque année, le président du tribunal de grande instance répartit les juges de proximité dans les différents services de la juridiction auxquels ils peuvent participer en tenant compte de leurs fonctions au tribunal d’instance à l’activité duquel ils concourent.

« Art. L. 121-7. – Chaque année, le magistrat chargé de la direction et de l’administration du tribunal d’instance organise par ordonnance le service dont les juges de proximité sont chargés au sein de ce tribunal, en tenant compte de celui auquel ils sont astreints au tribunal de grande instance.

« Art. L. 121-8. – Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent chapitre. Il précise les conditions dans lesquelles la répartition des juges de proximité peut être modifiée en cours d'année. » ;

2° L’article L. 212-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 212-3. – La formation collégiale du tribunal se compose d’un président et de plusieurs assesseurs.

« Les juges de proximité peuvent être appelés à siéger dans cette formation.

« Ils peuvent également :

« 1° Statuer sur requête en injonction de payer, sauf sur opposition ;

« 2° Procéder, dans les cas et conditions prévus par le sous-titre II du titre VII du livre Ier du code de procédure civile, aux mesures d’instruction suivantes :

« a) Se transporter sur les lieux à l’occasion des vérifications personnelles du juge ;

« b) Entendre les parties à l’occasion de leur comparution personnelle ;

« c) Entendre les témoins à l’occasion d’une enquête. » ;

3° Au second alinéa de l’article L. 212-4, les mots : «, en matière pénale, » sont supprimés ;

4° À l’article L. 221-10, les mots : « de la cinquième classe » sont supprimés ;

5° Après l’article L. 222-1, il est inséré un article L. 222-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 222-1-1. – Le juge de proximité peut statuer sur requête en injonction de payer, sauf sur opposition. » ;

6° L’article L. 223-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « matière patrimoniale » sont remplacés par les mots : « matières patrimoniale et commerciale, » ;

b) Les deuxième et dernier alinéas sont supprimés ;

7° Après l’article L. 532-15-1, il est inséré un article L. 532-15-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 532-15-2. – L’article L. 222-1-1 est applicable à Wallis-et-Futuna. » ;

8° L’article L. 552-8 est ainsi rédigé :

« Art. L. 552-8. – Les articles L. 212-4 et L. 222-1-1 sont applicables en Polynésie française. » ;

9° L’article L. 562-8 est ainsi rédigé :

« Art. L. 562-8. – Les articles L. 212-4 et L. 222-1-1 sont applicables en Nouvelle-Calédonie. »

II. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 521 est ainsi rédigé :

« Art. 521. – Le tribunal de police connaît des contraventions. » ;

2° L’article 523 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’il connaît des contraventions des quatre premières classes, à l’exception de celles déterminées par un décret en Conseil d’État, le tribunal de police est constitué par un juge de proximité et, à défaut, par un juge du tribunal d’instance. »

III. – Le titre III du livre II du code de l’organisation judiciaire, au livre V du même code, la section 2 du chapitre II du titre III, la section 3 du chapitre II du titre V et la section 3 du chapitre II du titre VI, les articles 522-1, 522-2 et 523-1 du code de procédure pénale et l’article 41-18 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature sont abrogés.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

J’ai souligné dans mon intervention liminaire l’incohérence qui consiste à supprimer la justice de proximité tout en maintenant les juges de proximité. Nous n’avons jamais eu, contrairement à ce qui était prévu, un vrai bilan sur la justice de proximité.

La contradiction est patente : vous supprimez la justice de proximité et, dans le même temps, vous demandez aux juges de proximité de pallier le manque de magistrats professionnels. Envisagez-vous des recrutements ? Je l’ignore. En tout état de cause, le ministère n’a pas les moyens de les financer.

Les tribunaux de grande instance pourront donc disposer des juges de proximité au détriment du contentieux civil au tribunal d’instance. La suppression de compétences de première instance des juges de proximité se traduira par un transfert de 100 000 affaires civiles nouvelles vers les tribunaux d’instance. Cela s’ajoute aux effets de la réforme de la protection des majeurs, qui conduit les juges des tutelles à réviser leurs décisions pour tous les dossiers de protection en cours d’ici à 2014.

Quant aux juges de proximité eux-mêmes, leurs heures de vacations ont été diminuées de moitié en 2010, lorsqu’elles n’ont pas été purement et simplement supprimées. Je suis contre le juge de proximité, mais de là à ne plus payer ses vacations…

Il faut également mentionner le non-renouvellement des contrats des assistants de justice arrivés à échéance, la réduction du nombre de vacataires, la non-récupération, par les greffiers, de leurs heures supplémentaires. La RGPP est toujours à l’œuvre, avec les conséquences que l’on connaît ! Ce n’est pas en déplaçant les 600 juges de proximité d’une juridiction à une autre que l’on parviendra à remédier aux problèmes de la justice.

Monsieur le garde des sceaux, quels sont vos objectifs concrets concernant les tribunaux d’instance. Ne vont-ils pas être supprimés ? Par quoi allez-vous remplacer les vacations des juges de proximité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 19 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jacques Mézard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Cet amendement de suppression de l’article 1er s’inscrit dans le droit fil de la motion que j’ai présentée. La juridiction de proximité, qui a été créée par la loi du 9 septembre 2002, devait rapprocher les citoyens de la justice. Je n’ai, pour ma part, jamais été un chaud partisan de la juridiction de proximité.

Il faudrait savoir ce que l’on veut. Le 25 juillet 2002, le garde des sceaux de l’époque s’exprimait en ces termes : « Avec le juge de proximité, nous créons une véritable juridiction. C’est un engagement majeur du président de la République. Les Français attendent qu’une véritable justice de proximité soit entièrement consacrée en matière civile comme en matière pénale au traitement des petits litiges du quotidien qui restent trop souvent sans réponse. […] Le Gouvernement a choisi de créer une juridiction autonome nouvelle. Ce choix clair m’apparaît comme le plus lisible pour nos concitoyens qui pourront s’adresser à une juridiction individualisée. »

Tel était donc le programme du gouvernement de 2002. On a depuis, avec la carte judiciaire, opéré une destruction massive des véritables juridictions de proximité que constituent les tribunaux d’instance. Au Sénat ou Place Vendôme, on se soucie assez peu de ce qui se passe dans des territoires situés à plusieurs heures de train ou de voiture de la capitale ! Nous, nous le vivons au quotidien !

Que vont faire les juges de proximité ? Ils vont participer aux audiences collégiales du tribunal de grande instance, assister les juges professionnels et accomplir les tâches que ceux-ci ne peuvent plus remplir.

Cette démarche est incohérente. Nos concitoyens réclament, à juste titre, une justice lisible et compréhensible. Depuis neuf ans, on avance puis on recule, les volte-face se multiplient, la proximité est mise à toutes les sauces. Mais pour nos concitoyens, il y a toujours moins de proximité.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

La commission a adopté l’article 1er, qui supprime la juridiction de proximité mais qui maintient les juges de proximité. Ces derniers seront désormais rattachés au tribunal de grande instance et leurs missions seront redéfinies.

La suppression d’un ordre de juridiction de première instance constitue une mesure de simplification. Le garde des sceaux s’en est félicité voilà quelques instants et il m’a semblé qu’il en allait de même sur toutes les travées de notre assemblée.

Au début des années 2000, je le rappelle, la commission des lois s’était plutôt prononcée pour un juge de paix délégué rattaché au juge d’instance et non pour la création d’un nouvel ordre de juridiction.

On peut certes débattre des missions des juges de proximité. D’ailleurs, un amendement a été déposé afin de maintenir leurs fonctions au civil.

L’intervention des juges de proximité en qualité d’assesseur au niveau correctionnel est très appréciée et pourrait être utilement étendue. Par ailleurs, les juges de proximité resteront en charge d’un contentieux de masse en matière de contraventions.

Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Le Gouvernement émet le même avis que la commission, pour les raisons que j’ai précédemment expliquées.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 36, présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery, est ainsi libellé :

Alinéas 11 et 12

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Les juges de proximité peuvent :

La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Nous avons pour notre part choisi une autre option que celle de notre collègue Jacques Mézard, en proposant que les juges de proximité ne puissent pas participer aux audiences collégiales du tribunal de grande instance.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 28 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa :

Un juge de proximité peut être appelé à siéger dans cette formation.

La parole est à M. Jacques Mézard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Bien que j’aie obtenu des éléments de réponse sur les interrogations qui ont suscité le dépôt de cet amendement, permettez-moi d’en rappeler les motivations.

Nous considérions que, la formation collégiale du tribunal étant composée de trois magistrats, il convenait de limiter à un seul le nombre de juge de proximité pouvant être appelé à y siéger.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

La participation des juges de proximité en qualité d’assesseur aux audiences du tribunal correctionnel est appréciée. Le projet de loi étend cette participation aux formations civiles du TGI afin de permettre aux juges de proximité de côtoyer davantage les juges professionnels et de s’intégrer véritablement dans une équipe.

La participation aux formations collégiales en matière civile suppose en outre que les crédits nécessaires aux paiements des vacations des juges de proximité soient sanctuarisés. La disposition serait sans grand effet si les crédits étaient utilisés pour financer le fonctionnement général du tribunal.

J’ajoute que les amendements sont satisfaits par l’alinéa 18 de l’article 1er, qui prévoit que la formation collégiale du TGI, en matière civile comme en matière pénale, ne peut comprendre une majorité de juges non professionnels.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Le Gouvernement est défavorable à l’amendement de M. Michel pour les raisons que j’ai indiquées tout à l’heure.

Quant à l’amendement n° 28 rectifié, il est satisfait. Je demande donc à M. Mézard de bien vouloir le retirer.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je suis saisie de trois amendements identiques.

L'amendement n° 16 rectifié ter est présenté par M. Lecerf, Mme Sittler, M. Houpert et Mmes Henneron et Troendle.

L'amendement n° 27 rectifié est présenté par MM. Bockel, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Mézard, Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

L'amendement n° 35 est présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l'alinéa 18

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° L'article L. 221–4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’il connaît des actions personnelles ou mobilières jusqu’à la valeur de 4 000 euros ou des demandes indéterminées qui ont pour origine l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas 4 000 euros, sous réserve des dispositions légales ou réglementaires fixant la compétence des autres juridictions et à l’exception des compétences particulières visées par l’article L. 221–5, le tribunal d’instance est constitué par un juge de proximité et à défaut par un juge du tribunal d’instance. »

L’amendement n° 16 rectifié ter n’est pas défendu.

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 27 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Jean-Marie Bockel, qui ne pouvait être présent cet après-midi, m’avait prié de défendre cet amendement, que j’avais cosigné à sa demande. Or, sans doute sensible aux excellents arguments de M. le garde des sceaux, notre collègue m’a indiqué qu’il avait finalement décidé de le retirer. Je n’aurai donc pas la cruauté de le maintenir.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L’amendement n° 27 rectifié est retiré.

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour présenter l’amendement n° 35.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Nous prenons acte de la suppression de la juridiction de proximité ; nous prenons acte, également, du fait que les juges de proximité peuvent participer aux audiences collégiales du TGI et que, en matière pénale, ils demeurent compétents pour juger des contraventions des quatre premières classes, lesquelles relèvent des tribunaux de police.

En revanche, nous demandons, comme M. Lecerf et certains de nos collègues du groupe UMP, qui avaient déposé un amendement identique au nôtre, que les juges de proximité conservent leurs actuelles attributions civiles afin de ne pas alourdir la charge de travail des tribunaux d’instance.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Les auteurs de cet amendement proposent que les juges de proximité conservent, dans le cadre du tribunal d’instance, leurs compétences pour connaître des actions personnelles mobilières jusqu’à une valeur de 4 000 euros.

Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors de la discussion générale, compte tenu de la charge de travail qui pèse sur les tribunaux d’instance, il serait regrettable de se passer des juges de proximité pour le traitement des petits litiges. Si tel devait être le cas, il serait alors nécessaire de recruter 60 équivalents temps plein travaillé au sein de ces juridictions.

Aussi, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 35.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Je me réjouis que certains, qui étaient hostiles aux juges de proximité, s’en fassent aujourd’hui les défenseurs. Mais seuls les imbéciles ne changent pas d’avis…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Ne voyez aucune provocation dans mes propos, mon cher collègue !

Monsieur le garde des sceaux, vous vous souvenez que, voilà déjà bien longtemps, la commission des lois du Sénat avait publié un rapport intitulé Quels métiers pour quelle justice ?

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Nous y expliquions que, tout en étant favorables aux juges de proximité, nous les concevions comme des juges placés auprès des juges d’instance pour traiter les petits contentieux. De la sorte, ces magistrats professionnels disposaient à leur côté de personnes formées dont ils pouvaient utiliser les compétences en fonction des situations.

Le bilan s’est révélé plutôt positif et les juges de proximité ont ainsi déchargé les juridictions d’un certain nombre de petits contentieux, non seulement civils, mais aussi contraventionnels en matière pénale, dont le nombre est loin d’être négligeable.

Nous sommes tous d’accord pour supprimer les juridictions de proximité. Moi-même, j’y étais défavorable dès l’origine, estimant que leur création était une erreur, qu’il fallait non pas un ordre de juridiction spécialisé, mais des juges de proximité. Que ceux-ci deviennent assesseurs dans les formations collégiales du tribunal de grande instance, soit, mais pourquoi donc supprimer leurs fonctions en matière civile ? Nous ne le comprenons pas.

Si leur suppression est maintenue, ce sont les tribunaux d’instance qui reprendront leurs attributions.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Exactement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Or, monsieur le garde des sceaux, vous savez bien que ces juridictions sont surchargées, notamment par les procédures de surendettement, qui, après avoir été « déjudiciarisées », ont été « rejudiciarisées ». C’est ce qui explique ce phénomène de saturation. Et je n’évoquerai même pas l’impact sur l’activité des tribunaux d’instance de la réforme de la protection des majeurs, qui oblige à réviser les mesures de tutelles.

L’amendement de notre collègue vise à maintenir les attributions actuelles des juges de proximité pour statuer sur les petits contentieux civils. La commission, fidèle à la position de fond qu’elle a adoptée sur cette question, y est favorable. Je conviens que les enjeux ne sont pas essentiels, mais il y va néanmoins du fonctionnement de la justice au quotidien.

M. André Reichardt applaudit.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Je suis défavorable à cet amendement pour une raison simple qui tient au principe d’organisation des juridictions.

L’argument des emplois ne tient pas : si le juge de proximité devient assesseur, il permettra au magistrat qu’il remplacera de siéger au tribunal d’instance. C’est un jeu à somme nulle, si je puis dire.

Si l’on suit les auteurs de cet amendement, et conformément aux décisions du Conseil constitutionnel en la matière, seuls les juges de proximité, dès lors qu’ils existeront, pourront connaître de ce contentieux, ce qui introduira de la rigidité.

Je note avec intérêt que l’ensemble du Sénat s’accorde pour confier la résolution de contentieux importants – 4 000 euros, cela fait plus 26 000 francs – à un magistrat non professionnel.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

C’est un constat !

C’est pourquoi je ne doute pas que chacun, ici, accueille avec joie notre projet d’étendre la participation des juges de proximité en qualité d’assesseur à l’ensemble des formations collégiales du TGI.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Monsieur le garde des sceaux, vous voulez, nous dites-vous, conforter la collégialité. Nous prenons cela comme une bonne nouvelle tant, jusqu’à présent, la volonté qui s’était systématiquement manifestée était de privilégier le juge unique, les ordonnances pénales, ...

Mais, puisque nous sommes dans la culture de l’aveu, vous avez en réalité avoué quel est le véritable objet de ce texte.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Mieux gérer les moyens !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

À défaut de pouvoir donner aux magistrats professionnels les moyens d’exercer leur métier, vous placez des supplétifs à leurs côtés.

Sur le terrain, la situation est assez surréaliste. J’ai exercé dans un département qui ne compte toujours pas le moindre juge de proximité. C’est le même homme, en l’occurrence le président du tribunal d’instance, qui, selon l’heure, remplit les missions de juge de proximité ou de président du tribunal d’instance. Votre projet consiste ni plus ni moins à faire passer les juges de proximité, quand il y en a, du niveau du tribunal d’instance au niveau du tribunal correctionnel.

Expliquez-nous, monsieur le garde des sceaux, quel serait le rôle d’un juge de proximité qui deviendrait assesseur dans un tribunal correctionnel. Est-ce cela, la proximité ? Cette question appelle une réponse.

L'amendement est adopté.

L'article 1 er est adopté.

I. –

Non modifié

II. – §(Non modifié) À l’article L. 533-1 du code de l’organisation judiciaire et dans l’intitulé des chapitres Ier et III du titre III du livre II du code de procédure pénale, les mots : « et de la juridiction de proximité » sont supprimés.

III. – §(Non modifié) Au dernier alinéa de l’article 39, à la première phrase du premier alinéa de l’article 528 et au second alinéa de l’article 549 du code de procédure pénale, les mots : « ou de la juridiction de proximité » sont supprimés.

IV. – §(Non modifié) Au dernier alinéa du II de l’article 80 et à la première phrase de l’article 179-1 du code de procédure pénale, les mots : « la juridiction de proximité, » sont supprimés.

V. – §(Non modifié) À la première phrase du premier alinéa de l’article 45, à la fin du premier alinéa de l’article 178, aux premier et dernier alinéas de l’article 213, au premier alinéa de l’article 528-2 et au troisième alinéa de l’article 706-71 du code de procédure pénale, les mots : « ou devant la juridiction de proximité » sont supprimés.

VI. – §(Non modifié) À la première phrase de l’article 44 du code de procédure pénale, les mots : « et les juridictions de proximité » sont supprimés.

VII. – §(Non modifié) À la première phrase du premier alinéa de l’article 180 du code de procédure pénale, les mots : «, soit devant la juridiction de proximité, » sont supprimés.

VIII. – §(Non modifié) À l’intitulé de la section 4 du chapitre II du titre Ier du livre Ier et du chapitre IV du titre III du livre II et au premier alinéa de l’article 546 du code de procédure pénale, les mots : « et la juridiction de proximité » sont supprimés.

IX. – §(Non modifié) Au second alinéa de l’article 45 du code de procédure pénale, les mots : « ou aux juridictions de proximité » sont supprimés.

X. – §(Non modifié) Au deuxième alinéa de l’article 528-2, à l’article 531, au premier alinéa de l’article 539, à la première phrase de l’article 540, au premier alinéa de l’article 541, à la première phrase de l’article 542, au second alinéa de l’article 706-134, à la deuxième phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article 708 du code de procédure pénale et à la deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article L. 121-3 du code de la route, les mots : « ou la juridiction de proximité » sont supprimés.

XI. – §(Non modifié) À l’article 533 et au premier alinéa des articles 535, 543 et 544 du code de procédure pénale, les mots : « et devant la juridiction de proximité » sont supprimés.

XII. – §(Non modifié) Au second alinéa de l’article 535 et au premier alinéa de l’article 538 du code de procédure pénale, les mots : « ou par le juge de proximité » sont supprimés.

XIII. – §(Non modifié) Au deuxième alinéa de l’article 677 du code de procédure pénale, les mots : « ou d’une juridiction de proximité » sont supprimés.

XIV. – §(Non modifié) À la première phrase du dernier alinéa de l’article 677 du code de procédure pénale, les mots : « d’une juridiction de proximité, » sont supprimés.

XV. – §(Non modifié) À la seconde phrase du dernier alinéa des articles 705, 706-76 et 706-109 du code de procédure pénale, les mots : « ou devant la juridiction de proximité compétente en application de l’article 522-1 » sont supprimés.

XVI. – §(Non modifié) Au premier alinéa de l’article 549 du code de procédure pénale, les mots : « ou les juridictions de proximité » sont supprimés.

XVII. –

Supprimé

XVIII. – §(Non modifié) Le dernier alinéa de l’article 21 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante est supprimé.

XIX. – §(Non modifié) Au 2° de l’article 1018 A du code général des impôts, les mots : « et des juridictions de proximité » sont supprimés.

XIX bis (nouveau). – Au I de l’article 2 de la loi n° 2007-1787 du 20 décembre 2007 relative à la simplification du droit, les mots : «, la juridiction de proximité » sont supprimés.

XX. – 1. Aux articles L. 553-1 et L. 563-1 du code de l’organisation judiciaire, les mots : «, du tribunal de première instance et de la juridiction de proximité » sont remplacés par les mots : « et du tribunal de première instance » ;

2. Au second alinéa de l’article 46, aux articles 47 et 48 et à la deuxième phrase de l’article 529-11 du code de procédure pénale, les mots : « la juridiction de proximité » sont remplacés par les mots : « le tribunal de police » ;

3. Au dernier alinéa de l’article 41-3 du code de procédure pénale, les mots : « devant le juge du tribunal de police ou devant la juridiction de proximité » sont remplacés par les mots : « devant le juge compétent du tribunal de police » ;

4. À la seconde phrase du cinquième alinéa de l’article 44-1 du code de procédure pénale, les mots : « juge du tribunal de police ou par le juge de la juridiction de proximité » sont remplacés par les mots : « juge compétent du tribunal de police » ;

5. Au premier alinéa de l’article 525 du code de procédure pénale, les mots : « juge du tribunal de police ou de la juridiction de proximité » sont remplacés par les mots : « juge compétent du tribunal de police » ;

5. bis (nouveau) L’article 529-5-1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « d’une ou plusieurs juridictions de proximité » sont remplacés par les mots : « d’un ou plusieurs tribunaux de police » ;

b) L’avant-dernière phrase est supprimée ;

c) À la dernière phrase, les mots : « de la juridiction de proximité » sont remplacés par les mots : « du tribunal de police » ;

6. À l’article 530-2 du code de procédure pénale, les mots : « à la juridiction de proximité » sont remplacés par les mots : « au tribunal de police » ;

6. bis (nouveau) À la première phrase de l’article 658 du code de procédure pénale, les mots : «, deux tribunaux de police ou deux juridictions de proximité » sont remplacés par les mots : « ou deux tribunaux de police » ;

7. À l’article 678 du code de procédure pénale, les mots : «, le tribunal de police, le tribunal correctionnel ou la juridiction de proximité » sont remplacés par les mots : « ou le tribunal, ».

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 20 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jacques Mézard.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

M. Yves Détraigne, rapporteur. Par coordination, la commission émet un avis défavorable.

Sourires

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Avis défavorable !

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 2 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

chapitre II

Extension au tribunal de grande instance de la procédure d’injonction de payer et institution d’une procédure européenne d’injonction de payer et d’une procédure européenne de règlement des petits litiges

(Non modifié)

I. – Le code de l’organisation judiciaire est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 221-4, il est inséré un article L. 221-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 221-4-1. – Le tribunal d’instance connaît des demandes formées en application du règlement (CE) n° 861/2007 du Parlement européen et du Conseil, du 11 juillet 2007, instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges » ;

2° L’article L. 221-7 est ainsi rédigé :

« Art. L. 221-7. – Le juge du tribunal d’instance connaît des demandes formées en application du règlement (CE) n° 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, instituant une procédure européenne d’injonction de payer. »

II. – Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 721-3, il est inséré un article L. 721-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 721-3-1. – Les tribunaux de commerce connaissent, dans les limites de leur compétence d’attribution, des demandes formées en application du règlement (CE) n° 861/2007 du Parlement européen et du Conseil, du 11 juillet 2007, instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges. » ;

2° Après l’article L. 722-3, il est inséré un article L. 722-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 722-3-1. – Le président du tribunal de commerce connaît, dans les limites de la compétence d’attribution du tribunal de commerce, des demandes formées en application du règlement (CE) n° 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, instituant une procédure européenne d’injonction de payer. »

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 21 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jacques Mézard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

J’ai été convaincu par le rapport de la commission et les propos du rapporteur. Malgré tout, je présenterai cet amendement pour vous expliquer, mes chers collègues, les raisons pour lesquelles nous l’avions déposé.

L'article 3 étend aux TGI la procédure d'injonction de payer pour les litiges portant sur une somme supérieure à 10 000 euros.

Cette extension se veut une simplification et la traduction dans la loi d'une pratique courante ; elle soulève néanmoins une difficulté majeure qui se heurte à l'objectif de clarification.

Conformément au droit commun, le ministère de l'avocat sera obligatoire pour le créancier, ce qui engendrera un coût constitutif d'un frein à l'accès à la justice.

La situation actuelle, marquée par un taux extrêmement faible d’opposition aux ordonnances d’injonction de payer – environ 5 % –, ne justifie pas un tel transfert de compétences.

L'article 3 reste muet sur cette question pourtant essentielle et laisse toute latitude au pouvoir réglementaire pour préciser ou non cette question.

Si l’on ouvre la possibilité de recourir à une saisine par requête sans avocat devant le TGI, on crée une atteinte au principe du monopole de la représentation par avocat ; d’autant que cela n’éviterait pas l’obligation de recourir à ce professionnel du droit en cas d’opposition.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandions la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Afin de résoudre le problème soulevé par les auteurs de cet amendement, la commission présentera un amendement n° 60 visant à préciser que « la requête en injonction de payer peut être présentée par le requérant ou par tout mandataire de ce dernier ».

Aussi, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable sur cet amendement, pour des motifs quelque peu différents.

L’article 3 a pour objet de mettre en œuvre les règlements communautaires ayant institué les procédures européennes d’injonction de payer et de règlement des petits litiges. Sa suppression sans aucun motif empêcherait la France de satisfaire à ses engagements européens.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 17 rectifié, présenté par MM. Reichardt et Lecerf, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° après l'article L. 211–4, il est inséré un article L. 211–4–1 ainsi rédigé :

« Art. L. 211–4–1. - Le tribunal de grande instance connaît, dans les limites de sa compétence, les requêtes en injonction de payer formées par le créancier ou par tout mandataire. »

La parole est à M. André Reichardt.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

L'article 3 du projet de loi vise à transférer au TGI la compétence en matière d'injonction de payer lorsque la requête porte sur un montant supérieur à 10 000 euros.

Dans sa rédaction actuelle, ce texte contribuera à alourdir les frais de justice pour les créanciers. Il est donc proposé de permettre que la requête en injonction de payer devant le tribunal de grande instance puisse être déposée par le créancier ou par tout mandataire.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Madame la présidente, me permettez-vous de présenter l’amendement n° 60, dont l’argumentaire vaudra avis de la commission sur l’amendement n° 17 rectifié ?

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Pour la clarté du débat, j’appelle donc en discussion l’amendement n° 60, présenté par M. Détraigne, au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La requête en injonction de payer peut être présentée par le requérant ou par tout mandataire de ce dernier.

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Cet amendement vient compléter l'extension au TGI de la procédure d'injonction de payer. Il prévoit que la requête en injonction de payer pourra être présentée par le requérant ou par tout mandataire de ce dernier. La question du recours obligatoire à un avocat lorsqu’un tribunal de grande instance est saisi est donc résolue.

Monsieur Reichardt, votre amendement étant satisfait, je vous demande de bien vouloir retirer son amendement.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Compte tenu des arguments de M. le rapporteur, je le retire.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L’amendement n° 17 rectifié est retiré.

La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote sur l'amendement n° 60.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Sans me coiffer d’une casquette corporatiste, j’attire l’attention du Sénat sur les difficultés qu’entraînerait cette mesure, difficultés qui n’ont d’ailleurs pas échappé au rapporteur lui-même.

Comme on peut le lire dans l’objet de l’amendement n° 60, « une disposition législative est nécessaire pour permettre à un mandataire – huissier de justice, société de recouvrement – de présenter la requête, car il s’agit d’une dérogation au monopole de représentation des avocats ».

Mes chers collègues, nous devons réfléchir aux difficultés que soulèvera l’adoption de cet amendement. La procédure proposée, utile lorsqu’il s’agit d’une injonction de payer, peut se révéler très dangereuse, notamment au travers des officines de recouvrement.

Monsieur le garde des sceaux, il faut y réfléchir à deux fois. Je peux concevoir une sortie du monopole de la représentation. Mais si c’est pour y introduire les sociétés et les officines de recouvrement, je vous mets en garde.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Je soutiens l’amendement de M. le rapporteur, même si les arguments de M. Mézard, paraissent recevables, et je retire d’ores et déjà l’amendement n° 49.

Aujourd’hui, c’est un mandataire ou un huissier qui présente la requête devant le tribunal d’instance. Nous ne voulons pas que, avec le transfert la compétence, le justiciable paie les honoraires de l’avocat !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Ces arguments sont valables, mais le fait que le montant de la requête en injonction de payer soit inférieur ou supérieur à 10 000 euros ne change pas vraiment les données du problème. Il ne s’agit pas d’une question de somme.

J’ajoute, et M. le garde des sceaux l’a indiqué tout à l’heure, que nous devons respecter nos engagements européens.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 32 est présenté par M. Lecerf.

L'amendement n° 49 est présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 221-4-1. - Le tribunal de grande instance connaît, dans les limites de sa compétence, les requêtes en injonction de payer formées par les créanciers ou par tout mandataire » ;

L’amendement n° 32 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 49 a été retiré par son auteur.

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 30 rectifié est présenté par M. Lecerf.

L'amendement n° 48 est présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery.

Tous deux sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 5

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 221-7. - Lorsqu'il statue selon la procédure d'injonction de payer, sous réserve de la compétence de la juridiction de proximité, le juge d'instance est compétent à quelque valeur que la demande puisse s'élever.

« Le juge du tribunal d'instance connaît des demandes formées en application du règlement (CE) n° 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, instituant une procédure européenne d'injonction de payer. »

II. - En conséquence, rédiger ainsi l'intitulé du chapitre II :

Institution d'une procédure européenne d'injonction de payer et d'une procédure européenne de règlement des petits litiges.

L’amendement n° 30 rectifié n'est pas soutenu.

L’amendement n° 48 n’a plus d’objet, du fait de l’adoption de l’amendement n° 60.

Je mets aux voix l'article 3, modifié.

L'article 3 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 18 rectifié est présenté par MM. Reichardt et Lecerf.

L'amendement n° 50 est présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1° de l'article 3 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution est complété par les mots : «, ainsi que les ordonnances en injonction de payer, revêtues de la formule exécutoire par l'huissier de justice ».

La parole est à M. André Reichardt.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Comme M. le garde des sceaux l’indiquait tout à l’heure, il convient de recentrer le juge sur son cœur de métier : juger et dire le droit.

Afin de débarrasser le juge et son greffe de tâches qui sont de nature à retarder la procédure d’injonction de payer, le présent amendement vise à confier aux huissiers de justice l'apposition de la formule exécutoire sur l’ordonnance du juge, lorsque celle-ci ne fait l'objet d'aucune opposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour présenter l'amendement n° 50.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

M. Yves Détraigne, rapporteur. Permettez-moi de rappeler les premiers termes de la formule de l’apposition exécutoire : « En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, … ». Reconnaissez que l’on peut difficilement demander aux huissiers de justice de se requérir eux-mêmes !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Je précise par ailleurs que l’original de l’acte reste au tribunal. Il me paraît délicat d’imposer à un huissier de justice de se rendre au tribunal pour apposer la formule exécutoire sur l’ordonnance du juge.

C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Le Gouvernement est, comme la commission, défavorable à ces deux amendements, dont il souhaite le retrait.

L’opposition à une ordonnance d’injonction de payer peut être faite, sans aucun formalisme, auprès du greffe du tribunal d’instance. En l’absence d’opposition, le greffe appose la formule exécutoire nécessaire pour permettre l’exécution de l’ordonnance à exécution et, en cas d’opposition reçue au greffe, le tribunal met à néant l’ordonnance et statue à nouveau sur la demande, après débat entre les partis.

Pour toutes ces raisons, il est bien évident que l’autorité chargée d’apposer la formule ne peut être que celle auprès de laquelle doit être formée l’opposition.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Non, je le retire volontiers, madame la présidente.

Mon objectif était d’accélérer la procédure. Je me rends aux arguments de M. le rapporteur et de M. le garde des sceaux, mais il me semblait plus simple que le juge délègue aux huissiers le droit d’apposer la formule exécutoire !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 18 rectifié est retiré.

Monsieur Michel, l'amendement n° 50 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Non, je le retire également, madame la présidente.

Je considère que la procédure de l’injonction de payer aurait mérité un vrai débat. Nous aurions pu, par exemple, observer les dispositions qui sont appliquées en Alsace-Lorraine. Sans doute aurons-nous l’occasion de revenir sur cette question.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 50 est retiré.

chapitre III

Spécialisation des juges départiteurs

(Non modifié)

L’article L. 1454-2 du code du travail est ainsi modifié :

1° La première phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « ou le juge d’instance désigné par le premier président en application du troisième alinéa » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de pluralité de conseils de prud’hommes dans le ressort d’un tribunal de grande instance, le premier président de la cour d’appel peut, si l’activité le justifie, désigner les juges du tribunal d’instance dans le ressort duquel est situé le siège du tribunal de grande instance. » –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 33, présenté par M. Reichardt, est ainsi libellé :

Après l’article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article L. 3252-10 du code du travail, après le mot : « mensuellement », sont insérés les mots : «, entre les mains de l’huissier de justice qui a procédé à la signification, ».

La parole est à M. André Reichardt.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Le présent amendement a pour objet d’accélérer le traitement des saisies des rémunérations, notamment dans la phase relative au paiement par le tiers saisi, des sommes dues par le débiteur au créancier saisissant.

Actuellement, la décision portant saisie est notifiée, dans un délai de huit jours, par le greffe qui procède à la saisie ; l’employeur verse entre les mains du greffe les sommes dues par lui à son salarié. Ces sommes sont ensuite affectées aux régisseurs installés auprès du greffe du tribunal d’instance et versées par ce dernier au créancier saisissant, dans un délai de six mois.

Cet amendement vise à déléguer les missions de notification, d’encaissement et de répartition aux huissiers de justice, ce qui permettra d’obtenir une accélération du recouvrement des sommes dues, au profit du justiciable.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Cet amendement tend à modifier la procédure applicable aux saisies sur rémunération. Il permet à l’huissier de justice de procéder à la notification de la décision portant saisie, à l’encaissement des sommes dues et à leur répartition entre les créanciers.

Cette réforme peut se révéler intéressante pour réduire les délais de mise en œuvre des saisies sur rémunération. Il s’agit toutefois d’un sujet très particulier qui exige un minimum d’analyse. C’est pourquoi la commission souhaite entendre l’avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Je remercie M. le rapporteur de s’en remettre à l’avis du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

M. Yves Détraigne, rapporteur. C’est un gage de notre confiance !

Sourires

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Cela ne m’étonne pas de votre part, monsieur le rapporteur.

Nouveaux sourires.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Monsieur Reichardt, cet amendement, certes intéressant, soulève néanmoins un certain nombre d’interrogations.

Il est intéressant pour trois raisons. D’abord, les huissiers de justice sont des professionnels des mesures d’exécution. Ensuite, les huissiers sont tenus de procéder à la répartition des sommes qu’ils perçoivent dans de brefs délais, ce qui est dans l’intérêt commun du créancier comme du débiteur. Enfin, la répartition des retenues sur salaires est une tâche qui, bien que non juridictionnelle, pèse lourdement sur les greffes.

Toutefois, si cet amendement était adopté, il en résulterait une modification radicale de la procédure de saisie sur rémunération. À ce titre, il suscite des interrogations.

Des interrogations de principes, d’abord : dans le cadre de cette procédure d’exécution, l’huissier de justice est le mandataire du créancier alors que la répartition des fonds est faite dans l’intérêt commun de l’ensemble des créanciers et du débiteur.

Des interrogations d’ordre économique, ensuite : le succès de la procédure d’exécution tient à sa simplicité et à sa gratuité pour les créanciers comme pour les débiteurs. Le dispositif proposé dans l’amendement aurait des conséquences sur la rémunération de l’huissier de justice chargé de procéder à la répartition des fonds. Il s’agit là d’une question clé. Le Gouvernement est opposé à tout renchérissement substantiel de la procédure d’exécution.

Enfin, l’amendement suscite des interrogations pratiques : le nouveau dispositif remet entièrement en cause le fonctionnement des saisies sur rémunérations. Une telle réforme ne peut être envisagée sans un examen approfondi de sa faisabilité.

Pour toutes ces raisons, je demande à M. Reichardt de retirer son amendement ; à défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.

En revanche, je m’engage à ce que cette réforme soit expertisée très rapidement par la Chancellerie, en concertation avec les professionnels. Je rendrai compte de cette expertise au Sénat et à sa commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. M. le garde des sceaux, dont je partage les arguments, a qualifié cet amendement d’ « intéressant » ; je considère pour ma part qu’il est surtout « intéressé » !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Notre service public fait son travail et nous devons lui donner les moyens de continuer. Des évolutions sont certes possibles, mais elles ne doivent pas être décidées au débotté d’un amendement. Nous ne pouvons pas, sans une expertise préalable sérieuse, modifier des procédures qui s’appliquent chaque année à des dizaines, voire à des centaines de milliers d’actes ! Nous devons faire preuve d’une grande vigilance.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Compte tenu de l’engagement pris de M. le garde des sceaux, je le retire bien volontiers, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 33 est retiré.

chapitre iv

Spécialisation des tribunaux de grande instance en matière de propriété intellectuelle

(Non modifié)

À l’article L. 211-10 du code de l’organisation judiciaire, après les mots : « d’obtentions végétales » sont insérés les mots : «, d’indications géographiques ». –

Adopté.

(Non modifié)

Au dernier alinéa de l’article L. 623-31 du code de la propriété intellectuelle, les mots : «, dont le nombre ne pourra être inférieur à dix, » sont supprimés. –

Adopté.

chapitre v

Transfert de compétences entre le tribunal de grande instance et le tribunal d’instance

(Non modifié)

Le code des douanes est ainsi modifié :

1° Au 2 de l’article 103, à l’article 344 et au deuxième alinéa de l’article 468, les mots : « tribunal d’instance » sont remplacés par les mots : « président du tribunal de grande instance » ;

2° À l’article 185, à la fin du 2 de l’article 186, à la seconde phrase du 3 de l’article 188, aux 1 et 3 de l’article 389 et au dernier alinéa du 1 et au 3 de l’article 389 bis, les mots : « juge d’instance » sont remplacés par les mots : « président du tribunal de grande instance » ;

3° Au 2 de l’article 341 bis, les mots : « juge d’instance » sont remplacés par les mots : « juge de l’exécution » ;

4° À l’article 347, à l’article 357 bis, au 2 de l’article 358 et au 1 de l’article 375, les mots : « d’instance » sont remplacés par les mots : « de grande instance » ;

5° L’article 349 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, à la première phrase, les mots : « juge d’instance » sont remplacés par les mots : « président du tribunal de grande instance » et, aux deuxième et dernière phrases, le mot : « juge » est remplacé par le mot : « président » ;

b) Au deuxième alinéa, les mots : « juge d’instance » sont remplacés, deux fois, par les mots : « président du tribunal de grande instance » et, à la seconde phrase, les mots : « du juge d’appel » sont remplacés par les mots : « de la cour d’appel » ;

6° Le paragraphe 3 de la section 2 du chapitre III du titre XII et son intitulé sont abrogés ;

7° Au 2 de l’article 390, les mots : « de l’auditoire du juge d’instance » sont remplacés par les mots : « du tribunal de grande instance ».

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

L’article 7 procède à une spécialisation du tribunal de grande instance, cette fois en matière de contentieux douanier, pour l’aligner sur le contentieux fiscal.

Je souhaite saisir cette occasion pour attirer l’attention sur l’ample démarche de spécialisation de la justice qui jalonne ce texte. Cette démarche n’est pas nouvelle, mais s’ajoute à celle qui a déjà été engagée, tout particulièrement dans les autres textes qui déclinent les propositions de la commission Guinchard.

La création de pôles ou de tribunaux spécialisés constitue des entorses au principe du juge naturel. Nous sommes en train de passer d’une conception du juge représentant du peuple, à celle du juge expert, exerçant au sein de grands pôles spécialisés. Ne prenons-nous pas le chemin d’une justice en quelque sorte organisée sur la base de ces pôles spécialisés, au détriment de la proximité avec le justiciable, qui devrait demeurer la règle ? On nous promet de rapprocher la justice des citoyens, mais c’est tout le contraire qui se produit !

Mes interrogations ne constituent pas une opposition de principe à la spécialisation. Qu’il y ait des exceptions pour des contentieux complexes, peu communs et importants, soit ! Mais je crains la spécialisation à outrance qui se profile projet de loi après projet de loi. On va vite en besogne, sans réfléchir suffisamment – c’est le problème de ces réformes menées par petits bouts –, à ce que signifie globalement aller vers une justice de plus en plus spécialisée et de moins en moins de proximité.

L'article 7 est adopté.

(Non modifié)

Au troisième alinéa de l’article L. 322-8 du code forestier, les mots : « en dernier ressort, devant le juge chargé du tribunal d’instance » sont remplacés par les mots : « selon la nature et le montant de la demande, devant le tribunal d’instance ou de grande instance ».

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 37, présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Madame la présidente, je défendrai à la fois les amendements n° 37, 38 et 39.

Nous voulons supprimer trois articles qui complexifient encore la procédure.

En effet, jusqu’à présent, trois contentieux extrêmement réduits, concernant les indemnités dues au propriétaire d’un bien classé au titre des monuments historiques, le débroussaillage et les indemnités en matière de servitude ferroviaire, ainsi que la vente des objets abandonnés ou laissés en gage par les voyageurs et les aubergistes ou hôteliers, relevaient de la compétence du tribunal d’instance. Or l’article 8 prévoit que, selon le montant de l’indemnité concernée, ces contentieux ressortiront soit au tribunal de grande instance soit au tribunal d’instance.

Franchement, comme simplification, il n’y a pas mieux !

C’est pourquoi nous demandons la suppression de ces trois articles, pour les mêmes motifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Comme vient de le dire M. Michel, ces trois amendements portent sur le même sujet et visent à supprimer la répartition prévue de certains contentieux entre tribunal d’instance et tribunal de grande instance, contentieux qui, il faut le dire, sont relativement résiduels et dont la répartition ne bouleversera pas énormément le fonctionnement de la justice.

Il n’y a donc pas lieu de créer des exceptions en la matière. Tenons-nous-en à la répartition classique entre tribunal d’instance et tribunal de grande instance.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Même avis.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 8 est adopté.

(Non modifié)

À la dernière phrase du troisième alinéa de l’article L. 622-4 du code du patrimoine, les mots : « par le tribunal d’instance » sont remplacés par les mots : «, selon le montant de la demande, par le tribunal d’instance ou de grande instance ».

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 38, présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a été défendu.

La commission et le Gouvernement y sont défavorables.

Je le mets aux voix.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 9 est adopté.

(Non modifié)

La loi du 31 mars 1896 relative à la vente des objets abandonnés ou laissés en gage par les voyageurs aux aubergistes ou hôteliers est ainsi modifiée :

1° Le premier alinéa de l’article 2 est ainsi rédigé :

« Le dépositaire pourra présenter au juge du tribunal d’instance ou au président du tribunal de grande instance, selon la valeur des effets mobiliers laissés en gage ou abandonnés, une requête qui énoncera les faits, désignera les objets et en donnera une évaluation approximative. La demande est portée devant la juridiction dans le ressort de laquelle sont situés les biens. » ;

2° Au quatrième alinéa du même article, les mots : « du tribunal d’instance » sont supprimés ;

3° À la deuxième phrase de l’article 5, les mots : « du juge du tribunal d’instance » sont remplacés par les mots : « de la juridiction » et la dernière phrase est supprimée.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 39, présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a été défendu.

La commission et le Gouvernement y sont défavorables.

Je le mets aux voix.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 10 est adopté.

(Non modifié)

À la deuxième phrase de l’article 11, à l’article 12, à l’avant-dernier alinéa de l’article 18 et à la première phrase du dernier alinéa de l’article 19 de la loi du 12 juillet 1909 sur la constitution d’un bien de famille insaisissable, les mots : « juge du tribunal d’instance » sont remplacés par les mots : « président du tribunal de grande instance ».

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 40, présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Madame la présidente, je souhaiterais que soit d’abord mis en discussion l’amendement du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

J’appelle donc en discussion l'amendement n° 55, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

La loi du 12 juillet 1909 sur la constitution d’un bien de famille insaisissable est abrogée.

Elle demeure applicable aux biens de famille ayant fait l’objet de la publication prévue par l’article 10 de ladite loi, avant la publication de la présente loi.

La parole est à M. le garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Par cet amendement, le Gouvernement propose l’abrogation de la loi du 12 juillet 1909 sur la constitution d’un bien de famille insaisissable, qui est tombée en désuétude. Cette loi n’étant plus utilisée, elle ne sert plus à rien.

Elle n’est plus utilisée en raison, d’une part, du faible montant du bien qui peut être protégé, alors même que les prix de l’immobilier ont amplement augmenté depuis 1953, date de la dernière réévaluation.

D’autre part, cette loi est tombée en désuétude du fait de la lourdeur de la procédure qui est prévue, mais également et surtout des nombreux autres dispositifs récents qui permettent à un entrepreneur de protéger plus efficacement une partie de ses biens. Je pense notamment aux textes sur l’EURL – entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée – ou l’EIRL – entrepreneur individuel à responsabilité limitée – permettant de placer une partie du patrimoine en dehors de l’aléa économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Monsieur Jean-Pierre Michel, vous avez maintenant la parole, pour présenter l’amendement n° 40.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Si l’amendement du Gouvernement est adopté, mon amendement sera satisfait. Dans ces conditions, je le retire.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 40 est retiré.

Quel est l’avis de la commission sur l'amendement n° 55 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Compte tenu de ce qui vient d’être dit, j’émets un avis favorable.

L'amendement est adopté.

(Non modifié)

La loi du 31 décembre 1903 relative à la vente de certains objets abandonnés est ainsi modifiée :

1° Au premier alinéa de l’article 2, les mots : « du canton de son domicile » sont remplacés par les mots : « ou au président du tribunal de grande instance, selon la valeur des objets mobiliers abandonnés, » et il est ajouté une phrase ainsi rédigée :

« La demande est portée devant la juridiction dans le ressort de laquelle est situé le domicile du professionnel. » ;

2° À l’article 4, les mots : « du juge du tribunal d’instance » sont remplacés par les mots : « de la juridiction » et la dernière phrase est supprimée.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 41, présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Cet amendement s’inscrit dans la même logique que ceux qui portaient sur les articles 8, 9 et 10. Il concerne la vente par un professionnel d’objets mobiliers qui lui ont été confiés et qui n’ont pas été retirés dans un certain délai.

Là encore, le contentieux est séparé entre le tribunal de grande instance et le tribunal d’instance. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article, bien que nous nous doutions de l’avis de M. le rapporteur…

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Je suis désolé pour M. Michel, mais la commission émet le même avis défavorable que sur les amendements de suppression des articles 8, 9 et 10.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Même avis.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 12 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

chapitre vi

Aménagement des règles régissant la procédure en matière familiale

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 58, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le code civil est ainsi modifié :

1° L’article 250 est ainsi rédigé :

« Art. 250. – La demande en divorce est présentée par les avocats respectifs des parties ou par un avocat choisi d’un commun accord.

« Si les époux ont un ou plusieurs enfants mineurs communs, le juge examine la demande avec chacun des époux, puis les réunit. Il appelle ensuite le ou les avocats.

« En l’absence d’enfant mineur commun, le juge ordonne la comparution des époux s’il l’estime nécessaire. La comparution est de droit à la demande de l’un ou l’autre des époux. » ;

2° L’article 250-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le refus d’homologation ne peut intervenir qu’après comparution des époux. »

La parole est à M. le garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Cet amendement a pour objet de rétablir la possibilité, pour le juge, de dispenser les époux de comparaître en cas de divorce par consentement mutuel et en l’absence d’enfant mineur.

Cet amendement vise à revenir sur la suppression de l’article 13, que la commission a décidée au motif que la comparution devant le juge permettait de vérifier l’absence de toute contrainte sur une partie et que le divorce devait conserver une certaine solennité.

J’estime au contraire que, en l’absence d’enfant mineur, il serait opportun d’éviter tout formalisme excessif. C’est la raison pour laquelle je vous propose, mesdames, messieurs les sénateurs, de rétablir le texte du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

J’ai déjà donné l’avis de la commission au cours de la discussion générale, et il me semble que deux de nos collègues au moins, appartenant à des groupes politiques différents, sont allés dans ce sens.

J’entends bien ce que dit M. le garde des sceaux, mais je ne suis pas certain que Michel Mercier en tant que personne privée n’aurait pas adopté la position que nous avons retenue en commission…

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

En tout cas, j’émets un avis défavorable sur l’amendement présenté par le Gouvernement, pour les diverses raisons qui ont déjà été évoquées.

L'amendement n'est pas adopté.

L’article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L’avocat est tenu de conclure avec son client une convention d’honoraires pour les procédures de divorce. Des barèmes indicatifs des honoraires pratiqués par les avocats pour ces procédures, établis à partir des usages observés dans la profession, sont publiés par arrêté du garde des sceaux, pris après avis du Conseil national des barreaux. »

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 22 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet, Bockel et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 2, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Jacques Mézard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Cet article concerne la fixation des honoraires d’avocat dans le cadre du divorce par consentement mutuel.

Nous sommes tout à fait favorables à l’obligation de conclusion d’une convention d’honoraires. Il est normal, et même légitime, que nos concitoyens qui ne bénéficient pas de l’aide juridictionnelle sachent de manière très précise, dans le cadre de l’engagement contractuel que constitue une convention, quels sont les frais qu’ils auront à assumer.

En revanche, s’engager sur un système de barèmes, même indicatifs, serait à mon sens une erreur. Seule la convention d’honoraires est indispensable.

J’ai souvenance d’avoir assisté voilà quelques années à la visite, dans certains barreaux, de représentants de la Commission de la concurrence, et que les barreaux qui avaient établi des barèmes ont été financièrement sanctionnés. Cela signifie que ces barreaux ont dû payer des amendes pour avoir suivi – c’est tout de même un comble ! – les préconisations des magistrats et des premiers présidents de cours d’appel les ayant incités à mettre en place un système de barèmes indicatifs.

Mes chers collègues, soyons sérieux, raisonnables, et n’entrons pas dans ce qui m’apparaît comme le résultat d’un marchandage qui a dû avoir lieu il y a quelques mois ou quelques années entre la Chancellerie et le Conseil national des barreaux : pour que les divorces demeurent dans le champ de la compétence juridictionnelle, les barreaux devaient accepter un barème. Pour ma part, je ne saurais y souscrire.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 61, présenté par M. Détraigne, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ces barèmes sont révisés au minimum tous les deux ans.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 22 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

L’amendement n° 61 prévoit que les barèmes indicatifs que nous proposons soient révisés au minimum tous les deux ans.

Permettez-moi de revenir quelques instants sur la problématique générale de la convention d’honoraires et des barèmes indicatifs.

Comme vient lui-même de le dire M. Mézard, tout le monde est plutôt favorable à l’existence d’une convention d’honoraires, qui permet effectivement aux parties de savoir à quoi elles s’engagent.

La question qui est posée est celle des barèmes indicatifs.

Je voudrais tout d’abord rappeler que ces barèmes sont purement indicatifs et que la convention d’honoraires pourra y déroger. Certes, notre collègue Mézard vient de rappeler que des barreaux avaient, voilà quelques années, tenté l’opération « barèmes indicatifs » et qu’elle avait ensuite été annulée au motif que ces barèmes ne s’appuyaient sur aucune étude sérieuse et s’avéraient nettement supérieurs aux honoraires habituellement pratiqués par la profession.

En l’espèce, il s’agit de barèmes indicatifs qui seraient publiés par la Chancellerie, après avoir été établis en liaison avec le Conseil national des barreaux. Ce dernier a donné un accord de principe il y a huit jours, à condition que ces barèmes soient régulièrement révisés.

C’est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement n° 61, qui vise à ce que les barèmes soient révisés au minimum tous les deux ans.

J’ajoute que les barèmes indicatifs présentent un grand intérêt dans la mesure où le conjoint ou le couple qui consulte un avocat pour divorcer, dans la plupart des cas, et heureusement, ne connaît pas encore le montant des frais qu’il aura à supporter. Ces barèmes indicatifs rétabliront une sorte d’équilibre entre les parties, si je puis utiliser ce terme, entre l’avocat d’un côté, et le conjoint ou le couple de l’autre.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 61 et, par conséquent, un avis défavorable sur l’amendement n° 22 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je ne voudrais pas que ces barèmes dits « indicatifs » subissent le même sort que les émoluments, qui remontent à 1971, avec une dernière révision en 1973.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

En effet, mais quelles garanties avons-nous qu’il y aura une révision ? Il n’y en aura strictement aucune !

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

L'article 14 est adopté.

À titre expérimental et jusqu’au 31 décembre de la troisième année suivant celle de la publication de la présente loi, dans les tribunaux de grande instance déterminés par un arrêté du garde des sceaux, les dispositions suivantes sont applicables, par dérogation à l’article 373-2-13 du code civil.

Les décisions fixant les modalités de l’exercice de l’autorité parentale ou la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant ainsi que les dispositions contenues dans la convention homologuée peuvent être modifiées à tout moment par le juge, à la demande du ou des parents ou du ministère public, qui peut lui-même être saisi par un tiers, parent ou non.

Toutefois, à peine d’irrecevabilité que le juge peut soulever d’office, la saisine du juge par le ou les parents doit être précédée d’une tentative de médiation familiale, sauf :

1° Si la demande émane conjointement des deux parents ou, lorsqu’elle émane d’un seul, si l’autre parent déclare ne pas s’y opposer ;

2° Si l’absence de recours à la médiation est justifiée par un motif légitime ;

Six mois au moins avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport procédant à son évaluation en vue de décider de sa généralisation, de son adaptation ou de son abandon.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 2 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 23 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet, Bockel et Fortassin, Mme Laborde, MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi et Mme Klès.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l’amendement n° 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

L’article 15 impose aux parties – pour l’heure à titre expérimental – une obligation de médiation familiale avant la saisine du juge aux affaires familiales, et ce concernant l’exercice de l’autorité familiale.

Je ne doute pas de l’utilité de ce type de mesures ; le travail d’accompagnement des couples en séparation doit être favorisé.

Mais j’attire votre attention, mes chers collègues, sur le fait que leur efficacité dépend pour une large part de l’adhésion des personnes concernées et, me semble-t-il, du caractère facultatif. La crainte de la sanction du juge amènera, bien évidemment, les deux parties devant le médiateur. Mais pour quel résultat si l’une y va contrainte et non pas convaincue ? Le rapport donne des chiffres : 57 % des médiations débouchent sur la résolution du conflit et 18 % permettent des avancées significatives. Soit ! Mais il ne s’agit pas d’une médiation contrainte.

Selon le rapport, 6 271 mesures judiciaires de médiation familiale ont été ordonnées en 2009. Comment comptez-vous étendre cette mesure aux 360 000 affaires soumises chaque année au juge des affaires familiales ?

Ce ne sera évidemment pas sans poser un certain nombre de problèmes, le problème financier n’étant pas des moindres.

En 2009, 266 services conventionnés employaient 629 médiateurs, auxquels s’ajoutaient une centaine de praticiens libéraux, avec une inégale répartition géographique et un éparpillement des financements.

Comme le note notre rapporteur, l’expérimentation sera incertaine dans sa réalisation et donc dans ses conséquences sur les droits des parties.

Il a très bien perçu le problème : sur sa proposition, la commission a ajouté un amendement destiné à garantir les délais d’accès au juge... mais précisément en se passant de la médiation.

Si cette disposition est généralisée, il faudra multiplier par cinq ou six l’activité des associations de médiation et recruter plus de 1 700 équivalents temps plein de médiateurs familiaux.

Comment les finances publiques, que vous voulez à toute force réduire, pourront-elles y faire face ? Vous ne nous donnez aucune précision à ce sujet.

Nul doute que, dans le contexte actuel, se profile une externalisation dans ce domaine comme dans d’autres, puisqu’il faudra faire appel à des « entreprises » de médiation pour faire face à la « demande ».

Nul doute que ce sont les justiciables qui devront en faire les frais. En effet, je crois savoir que vous n’entendez pas faire des efforts importants en matière d’aide judiciaire !

Il n’est donc pas concevable que vous nous demandiez de voter une loi sans les moyens budgétaires qui en découlent.

J’ajoute que nous sommes opposés à toute médiation quand il y a eu des violences au sein du couple, exercées par un conjoint sur l’autre. La médiation tendant à devenir obligatoire, sans qu’il soit précisé qu’elle n’est pas possible en cas de violence, nous sommes opposés à cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 23 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

J’ai déjà défendu cet amendement lors de la présentation de la motion tendant au renvoi à la commission. Je trouve que prévoir une médiation préalable systématique est déraisonnable, voire absurde, dans la mesure où feront certainement défaut les moyens nécessaires.

La médiation n’est pas un objectif en soi.

Pour divorcer, il faut déjà au moins un avocat. Bientôt, à écouter plusieurs intervenants, il faudra un psychologue, un psychiatre et un travailleur social. En la matière également, il faut rester raisonnable et voir comment les choses se passent sur le terrain.

Certes, il y a un nombre considérable de divorces, c’est un phénomène de société, mais il est absolument aberrant de recourir à une médiation systématique et de décider que l’on ne pourrait déclencher le système judiciaire, c’est-à-dire faire appel au juge aux affaires familiales, que dans la mesure où la médiation aurait échoué.

Je ne sais pas qui a pu avoir cette idée, qui n’a rien de lumineux, et qui est, je le répète, strictement aberrante.

Nous serons dans l’incapacité de mettre en place un tel système. Qui paiera et dans quelles conditions ? Une médiation a un coût, et l’aide juridictionnelle, comme cela a été dit, sera strictement impossible.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Promouvoir la médiation pour permettre au justiciable de sortir d’une logique conflictuelle est une bonne chose. Encore faut-il, comme viennent de le dire les deux orateurs précédents, y mettre les moyens.

J’ai eu l’occasion de préciser tout à l’heure, lors de la discussion générale, quels moyens financiers devraient être engagés en cas de généralisation et qu’il fallait donc y aller avec prudence. Cela dit, le dispositif proposé est expérimental.

Par ailleurs, la commission a prévu que les parents puissent être dispensés du recours préalable à la médiation lorsque l’absence du médiateur disponible leur interdirait l’accès au juge dans un délai raisonnable, pour éviter que le temps ne s’écoule et que le contentieux ne s’envenime.

Par conséquent, compte tenu de cette précaution prise par la commission et en raison du caractère expérimental du dispositif, la commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques n° 2 et 23 rectifié.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Le Gouvernement partage l’avis défavorable de la commission.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 57, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 4

Remplacer les mots :

ou, lorsqu’elle émane d’un seul, si l’autre parent déclare ne pas s’y opposer

par les mots :

afin de solliciter l'homologation d'une convention selon les modalités fixées à l'article 373-2-7 du code civil

II - Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Cet amendement vise à modifier les possibilités de dispense de médiation préalable obligatoire telles qu’elles ressortent du texte de la commission.

Le Gouvernement et la commission partagent, me semble-t-il, la même ambition et le même souci de permettre que la médiation ait lieu, qu’elle puisse conduire à éviter de saisir le juge chaque fois que possible et, en tout cas, de préserver l’accès au juge si l’une des parties le souhaite ou s’il est impossible d’avoir rapidement recours à la médiation. Ce sont donc essentiellement des questions de rédaction qui peuvent poser problème.

Le I de l'amendement vise à modifier l’alinéa 4 de l'article. En effet, le texte issu de la commission prévoit que la tentative de médiation peut être écartée si la demande est formée par l’une des parties, l’autre déclarant ne pas s’y opposer.

Je crains que la situation ne soit un peu difficile à appréhender et que l’expérimentation ne soit vaine. Un parent, sans s’opposer, peut ne pas être d’accord. Or c’est précisément dans les cas où les parents ne sont pas en rupture de dialogue que la médiation a tout son sens. Il me paraît donc préférable de supprimer cette possibilité de dispense sous peine de trop affaiblir le dispositif.

La seconde modification est d’une autre nature, c’est la suppression de l’alinéa 6, qui prévoit la possibilité de dispense de tentative de médiation si elle risque, compte tenu du délai dans lequel elle est susceptible d’intervenir, de porter atteinte au droit d’accès au juge dans un délai raisonnable.

Je le redis, ce principe de l’accès au juge est essentiel, il doit être garanti. C’est précisément ce que souhaite le Gouvernement lorsqu’il prévoit une possibilité de dispense de médiation en cas de motif légitime. Le motif légitime n’est pas défini, il sera apprécié par le juge au vu, d’une part, de l’urgence de la demande et, d’autre part, de la possibilité d’obtenir ou non un rendez-vous avec un médiateur dans un délai raisonnable.

Par conséquent, nous partageons pleinement les objectifs de la commission, mais nous l’exprimons autrement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Bien des parlementaires sont partagés sur la médiation familiale. Ce n’est pas un débat nouveau. Avoir recours à la médiation, la conciliation, excusez-moi, c’est s’en remettre à des spécialistes qui n’apporteront pas les mêmes garanties que des magistrats, qui auront une idée précise de comment doivent fonctionner les familles, en tout cas, c’est s’en remettre à d’autres… Dans notre société – c’est un vrai problème et nous n’y pouvons rien –, on demande à la justice de tout régler !

Monsieur le garde des sceaux, si le contentieux familial représente 60 % du contentieux civil, c’est parce que la société est ce qu’elle est.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Bien sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Auparavant, ce pourcentage était inférieur parce qu’il y avait plus de problèmes de servitude de passage ou de conflits de voisinage entre les agriculteurs. Aujourd’hui, cela devient marginal, …

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Parce qu’ils ont de grandes exploitations maintenant !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

… certes, parce qu’ils ont réglé le problème en procédant à des remembrements. Mais, si le contentieux familial a pris toute cette place, c’est surtout parce qu’on demande tout au juge, …

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Exactement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

… par exemple, de statuer sur le refus de vacciner son enfant : l’un des conjoints veut, l’autre non ; on n’en sort plus ! Ce n’est pas vraiment le rôle du juge de régler des problèmes de mésentente… Cette dérive reflète l’état de notre société.

Cela dit, pourquoi pas la médiation familiale ? En tout cas, pourquoi ne pas l’expérimenter ? Toutefois, monsieur le garde des sceaux, quand la médiation ne peut intervenir, il faut bien avoir accès au juge.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

À cet égard, il me semble que le motif légitime ne recouvre pas le délai raisonnable. Le délai raisonnable, on peut l’appréhender ; le juge pourra l’apprécier.

C’est pourquoi, si la commission est favorable au I, elle est défavorable au II, parce qu’il nous paraît important de préserver la possibilité de saisir le juge lorsque le délai d’obtention d’une médiation est trop long. En effet, certaines personnes n’auront pas le droit d’aller devant le juge tout en n’ayant pas la possibilité d’obtenir une médiation. Il me semble que c’est aller un peu loin…

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Monsieur le président de la commission, un tel pas en direction du Gouvernement ne peut me laisser insensible. J’accepte donc de rectifier l’amendement dans le sens que vous souhaitez.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je suis donc saisie d’un amendement n° 57 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

ou, lorsqu’elle émane d’un seul, si l’autre parent déclare ne pas s’y opposer

par les mots :

afin de solliciter l'homologation d'une convention selon les modalités fixées à l'article 373-2-7 du code civil

Je le mets aux voix.

L'amendement est adopté.

L'article 15 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 29 rectifié, présenté par M. Reichardt et Mme Troendle, est ainsi libellé :

Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au titre VII du livre VI du code de commerce, après l'article L. 670-1, il est inséré un article L. 670-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 670-1-1. - Les dispositions du présent titre sont également applicables aux personnes mentionnées à l’article L. 670-1 ayant procédé à une déclaration de constitution de patrimoine affecté conformément à l’article L. 526-7 et dont l’activité agricole, commerciale, artisanale ou indépendante est exclusivement exercée avec affectation de patrimoine.

En ce cas, sauf dispositions contraires, les références faites à la personne, au débiteur, au contrat, au cocontractant s'entendent, respectivement :

- de la personne en tant que titulaire d'un patrimoine non affecté ;

- du débiteur en tant que titulaire d'un patrimoine non affecté ;

- du contrat passé par le débiteur ainsi défini ;

- du cocontractant ayant conclu avec lui un tel contrat.

Les dispositions qui intéressent les biens, droits ou obligations de cette personne doivent, sauf dispositions contraires, être comprises comme visant les éléments du seul patrimoine non affecté. Les dispositions qui intéressent les droits ou obligations des créanciers de cette personne s’appliquent, sauf dispositions contraires, dans les limites du seul patrimoine non affecté. »

La parole est à M. André Reichardt.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

L’ordonnance n° 2010-1512 du 9 décembre 2010 a adapté la procédure du surendettement à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée, l’EIRL.

Sur le modèle de ces dispositions, permettez à l’Alsacien que je suis de proposer de permettre l’adaptation de la procédure de faillite civile, applicable dans les seuls départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, à ce même statut de l’EIRL.

Cet amendement a reçu l’avis favorable de l’Institut du droit local alsacien-mosellan.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Devant l’aval de l’Institut du droit local, la commission des lois ne peut que s’incliner : elle émet donc un avis favorable.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Favorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 15.

Le deuxième alinéa de l’article 55 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le nom de l’enfant est déterminé en application des règles énoncées aux articles 311-21 et 311-23. »

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 3, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Mon intervention vaudra aussi pour l’amendement n° 4 à l’article 15 ter et l’amendement n° 5 à l’article 15 quater.

L’article 15 bis est le premier de toute une série d’articles nouveaux adoptés par la majorité en commission des lois sur l’initiative du Gouvernement.

Le texte que nous examinons est un projet de loi : il émane donc du Gouvernement. Aussi est-il difficilement concevable que le Gouvernement fasse en permanence irruption – cela devient en effet une habitude ! – dans le débat parlementaire pour modifier son propre texte, qui plus est en proposant des dispositions nouvelles sur des sujets disparates, et alors que ce projet de loi a été déposé sur le bureau du Sénat voilà un an !

Il n’est pas normal que le Gouvernement profite du débat parlementaire pour imposer des dispositions qu’il n’a pas prévues dans des projets de loi plus adéquats. Ce projet de loi est un « fourre-tout » : inutile d’en rajouter !

C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article, comme des articles 15 ter et 15 quater, qui sont de même facture.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

On peut effectivement contester la manière de faire. Cela dit, ces trois articles, qui portent sur des questions importantes, apportent de bonnes solutions.

En conséquence, la commission est défavorable à ces amendements de suppression.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Le Gouvernement est également défavorable à ces amendements.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 15 bis est adopté.

À la fin du quatrième alinéa de l’article 58 du même code, les mots : « ou pour lesquels le secret de la naissance a été réclamé » sont supprimés.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 4, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a déjà été défendu.

La commission et le Gouvernement y sont défavorables.

Je le mets aux voix.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 15 ter est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 56, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 15 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article 74 du code civil, après les mots : « l'un des deux époux », sont insérés les mots : «, ou le père ou la mère de l'un des deux époux, ».

La parole est à M. le garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

J’ai déjà évoqué tout à l'heure cet amendement, qui est très attendu. Le Gouvernement propose de laisser aux futurs époux une plus grande liberté dans le choix du lieu de célébration de leur union, tout en l’encadrant dans des critères précis.

Cet amendement prévoit donc d’élargir les lieux possibles de célébration du mariage au domicile ou à la résidence du père ou de la mère de l’un des deux époux.

Cette disposition est attendue par nombre de futurs mariés et de parents de futurs mariés. En effet, un certain nombre de difficultés sont nées, ces derniers temps, de l’interprétation trop stricte qu’ont pu faire certains procureurs de la République. Il convient donc de fixer des règles claires.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Cet amendement répond non seulement à une demande exprimée par de nombreux futurs époux et parents de futurs époux, mais également de nombreux maires, qui sont souvent obligés d’ajouter dans l’acte de mariage une formule, qui vaut ce qu’elle vaut, justifiant que le mariage est célébré dans la commune où sont domiciliés les parents mais où ne sont plus domiciliés les enfants.

Il s’agit là d’un excellent amendement, qui réglera bien des problèmes.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 15 ter.

L'amendement n° 59, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 15 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article 317 du code civil, après les mots : « au juge » sont insérés les mots : « du tribunal d’instance du lieu de naissance ou de leur domicile ».

La parole est à M. le garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Il s’agit d’un amendement de précision visant à indiquer que le juge d’instance est et demeure compétent pour l’établissement des actes de notoriété en matière de filiation.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 15 ter.

Au premier alinéa de l’article 365 et au dernier alinéa de l’article 372 du même code, les mots : « devant le » sont remplacés par les mots : « adressée au ».

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 5, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a déjà été défendu.

La commission et le Gouvernement y sont défavorables.

Je le mets aux voix.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 15 quater est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

chapitre vii

Regroupement de certains contentieux en matière pénale au sein de juridictions spécialisées

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’intitulé du titre Ier du livre IV est ainsi rédigé :

« Titre I er

« DES RÈGLES DE PROCÉDURE APPLICABLES AUX CRIMES « CONTRE L’HUMANITÉ ET AUX CRIMES DE GUERRE » ;

2° Avant le chapitre Ier du titre Ier du livre IV, il est inséré un sous-titre Ier intitulé : « De la coopération avec la Cour pénale internationale » ;

3° Après l’article 627-20, il est inséré un sous-titre II ainsi rédigé :

« Sous-titre II

« Des juridictions compétentes pour la poursuite, l’instruction et le jugement des crimes contre l’humanité et des crimes et délits de guerre

« Art. 628. – Les crimes contre l’humanité et les crimes et délits de guerre sont poursuivis, instruits et jugés selon les règles du présent code sous réserve des dispositions du présent sous-titre.

« Art. 628-1. – Pour la poursuite, l’instruction et le jugement des infractions entrant dans le champ d’application de l’article 628, le procureur de la République, le juge d’instruction et la cour d’assises de Paris exercent une compétence concurrente à celle qui résulte de l’application des articles 43 et 52.

« En ce qui concerne les mineurs, le procureur de la République, le juge d’instruction, le tribunal pour enfants et la cour d’assises des mineurs de Paris exercent une compétence concurrente à celle qui résulte de l’application de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante.

« Lorsqu’ils sont compétents pour la poursuite et l’instruction des infractions entrant dans le champ d’application de l’article 628, le procureur de la République et le juge d’instruction de Paris exercent leurs attributions sur toute l’étendue du territoire national.

« Art. 628-2. – Le procureur de la République près un tribunal de grande instance autre que celui de Paris peut, pour les infractions entrant dans le champ d’application de l’article 628, requérir le juge d’instruction de se dessaisir au profit de la juridiction d’instruction de Paris. Les parties sont préalablement avisées et invitées à faire connaître leurs observations par le juge d’instruction ; l’ordonnance est rendue huit jours au plus tôt et un mois au plus tard à compter de cet avis.

« L’ordonnance par laquelle le juge d’instruction se dessaisit ne prend effet qu’à compter du délai de cinq jours prévu par l’article 628-6 ; lorsqu’un recours est exercé en application de cet article, le juge d’instruction demeure saisi jusqu’à ce que l’arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation soit porté à sa connaissance.

« Dès que l’ordonnance est devenue définitive, le procureur de la République adresse le dossier de la procédure au procureur de la République de Paris.

« Le présent article est applicable devant la chambre de l’instruction.

« Art. 628-3. – Lorsqu’il apparaît au juge d’instruction de Paris que les faits dont il a été saisi ne constituent pas une des infractions entrant dans le champ d’application de l’article 628 et ne relèvent pas de sa compétence à un autre titre, ce magistrat se déclare incompétent, soit sur requête du procureur de la République, soit, après avis de ce dernier, d’office ou sur requête des parties. Celles des parties qui n’ont pas présenté une requête sont préalablement avisées et invitées à faire connaître leurs observations ; l’ordonnance est rendue au plus tôt huit jours après cet avis.

« Le deuxième alinéa de l’article 628-2 est applicable à l’ordonnance par laquelle le juge d’instruction de Paris se déclare incompétent.

« Dès que l’ordonnance est devenue définitive, le procureur de la République de Paris adresse le dossier de la procédure au procureur de la République territorialement compétent.

« Le présent article est applicable lorsque la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris statue sur sa compétence.

« Art. 628-4. – Lorsque le tribunal correctionnel ou le tribunal pour enfants de Paris se déclare incompétent pour les motifs prévus par l’article 628-3, il renvoie le ministère public à se pourvoir ainsi qu’il avisera ; il peut, le ministère public entendu, décerner, par la même décision, mandat de dépôt ou d’arrêt contre le prévenu.

« Art. 628-5. – Dans les cas prévus par les articles 628-2 à 628-4, le mandat de dépôt ou d’arrêt conserve sa force exécutoire ; les actes de poursuite ou d’instruction et les formalités intervenus avant que la décision de dessaisissement ou d’incompétence soit devenue définitive n’ont pas à être renouvelés.

« Art. 628-6. – Toute ordonnance rendue sur le fondement de l’article 628-2 ou de l’article 628-3 par laquelle un juge d’instruction statue sur son dessaisissement ou le juge d’instruction de Paris statue sur sa compétence peut, à l’exclusion de toute autre voie de recours, être déférée dans les cinq jours de sa notification, à la requête du ministère public ou des parties, à la chambre criminelle de la Cour de cassation qui désigne, dans les huit jours suivant la date de réception du dossier, la juridiction chargée de poursuivre l’information. Le ministère public peut également saisir directement la chambre criminelle de la Cour de cassation lorsque le juge d’instruction n’a pas rendu son ordonnance dans le délai d’un mois prévu au premier alinéa de l’article 628-2.

« La chambre criminelle qui constate que le juge d’instruction du tribunal de grande instance de Paris n’est pas compétent peut néanmoins, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, décider que l’information sera poursuivie à ce tribunal.

« L’arrêt de la chambre criminelle est porté à la connaissance du juge d’instruction ainsi qu’à celle du ministère public et signifié aux parties.

« Le présent article est applicable à l’arrêt rendu sur le fondement du dernier alinéa des articles 628-2 et 628-3 par lequel une chambre de l’instruction statue sur son dessaisissement ou sa compétence.

« Art. 628-7. – Par dérogation à l’article 712-10, sont seuls compétents le juge de l’application des peines du tribunal de grande instance de Paris, le tribunal de l’application des peines de Paris et la chambre de l’application des peines de la cour d’appel de Paris pour prendre les décisions concernant les personnes condamnées pour une infraction entrant dans le champ d’application de l’article 628, quel que soit le lieu de détention ou de résidence du condamné.

« Ces décisions sont prises après avis du juge de l’application des peines compétent en application de l’article 712-10.

« Pour l’exercice de leurs attributions, les magistrats des juridictions mentionnées au premier alinéa peuvent se déplacer sur l’ensemble du territoire national, sans préjudice de l’application de l’article 706-71 sur l’utilisation de moyens de télécommunication.

« Art. 628-8 (nouveau). – Les articles 706-80 à 706-106, à l'exception des articles 706-88-1 et 706-88-2, sont applicables à l'enquête, la poursuite et l'instruction des crimes entrant dans le champ d'application de l'article 628.

« Pour l'application du sixième alinéa de l'article 706-88, l'intervention de l'avocat peut être différée pendant une durée maximale de soixante-douze heures.

« Art. 628-9 (nouveau). – Le présent sous-titre est également applicable aux crimes de torture pour lesquels les juridictions françaises sont compétentes en application de l’article 689-2. » ;

« Agissant dans le cadre d’une commission rogatoire internationale adressée à un État étranger, il peut, avec l’accord des autorités compétentes de l’État concerné, procéder à des auditions sur le territoire de cet État. »

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, je me félicite que l’amendement que j’avais déposé sur cet article ait été satisfait en commission par un amendement, présenté par le rapporteur, visant à étendre la compétence du nouveau pôle spécialisé aux crimes de guerre et aux actes de torture. Cela va dans le bon sens. Car, à l’instar du projet de loi portant adaptation du droit pénal à l’institution de la Cour pénale internationale, les dispositions du projet de loi que nous examinons aujourd'hui marquaient, une nouvelle fois, une certaine frilosité de la part du Gouvernement. Mais la cause est entendue.

La création du pôle spécialisé doté de compétences et de moyens à la hauteur nécessaire aura d’autant plus d’importance que la loi du 9 août 2010 comporte des dispositions particulièrement restrictives.

J’ai rappelé, dans mon intervention liminaire, la limite sérieuse tenant à la condition de résidence habituelle de la personne poursuivie. Par ailleurs, le monopole des poursuites a été confié au parquet, les victimes étant donc exclues de l’action publique. Ce problème est d’autant plus important que vous vous arc-boutez sur le refus de conférer aux magistrats du parquet leur indépendance. Or le pôle sera nécessairement concerné par des affaires à teneur non seulement juridique, mais éminemment politique et diplomatique. Quelle considération l’emportera ? Les priorités politiques ? Les priorités juridiques ? Je ne sais.

Malgré ces quelques interrogations, le groupe CRC-SPG votera cet article. La création d’un outil de nature à juger les crimes internationaux les plus graves nous permet d’avancer dans la consolidation de la justice pénale internationale. Elle participe aussi de la paix.

Je demeure, pour ma part, convaincue que ce chemin est le bon, à plus forte raison quand l’actualité se fait, en la matière, très inquiétante.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 15, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 30

Après les mots :

des articles

insérer la référence :

II. - En conséquence, alinéa 31

Supprimer cet alinéa.

Cet amendement a déjà été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Le texte qui a été adopté par la commission s’inscrit dans le dispositif prévu à l’article 706-88 du code de procédure pénale, qui définit les modalités de garde à vue applicables en matière de terrorisme et de criminalité organisée, des modalités qui n’ont pas été modifiées par l’adoption récente du projet de loi relatif à la garde à vue.

Dans ces conditions, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Le Gouvernement partage l’avis de la commission.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 16 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures cinq, est reprise à dix-neuf heures dix.

Après l’article 706-175 du code de procédure pénale, il est créé un titre XXXIII ainsi rédigé :

« TITRE XXXIII

« DE LA PROCÉDURE APPLICABLE EN CAS « D’ACCIDENT COLLECTIF

« Art. 706-176. – La compétence territoriale d’un tribunal de grande instance peut être étendue au ressort d’une ou plusieurs cours d’appel pour l’enquête, la poursuite, l’instruction et le jugement des délits prévus par les articles 221-6, 221-6-1, 222-19, 222-19-1, 222-20 et 222-20-1 du code pénal, dans les affaires qui comportent une pluralité de victimes et sont ou apparaîtraient d’une grande complexité.

« Cette compétence s’étend aux infractions connexes.

« Un décret fixe la liste et le ressort de ces juridictions, qui comprennent une section du parquet et des formations d’instruction et de jugement spécialisées pour connaître de ces infractions.

« Art. 706-177. – Au sein de chaque tribunal de grande instance dont la compétence territoriale est étendue au ressort d’une ou plusieurs cours d’appel, le procureur général et le premier président, après avis du procureur de la République et du président du tribunal de grande instance, désignent respectivement un ou plusieurs magistrats du parquet, juges d’instruction et magistrats du siège chargés spécialement de l’enquête, de la poursuite, de l’instruction et du jugement des infractions entrant dans le champ d’application de l’article 706-176.

« Au sein de chaque cour d’appel dont la compétence territoriale est étendue au ressort d’une ou plusieurs cours d’appel, le premier président et le procureur général désignent respectivement des magistrats du siège et du parquet général chargés spécialement du jugement des délits et du traitement des affaires entrant dans le champ d’application de l’article 706-176.

« Art. 706-178. – Le procureur de la République, le juge d’instruction et la formation correctionnelle spécialisée du tribunal de grande instance visés à l’article 706-176 exercent, sur toute l’étendue du ressort fixé en application de cet article, une compétence concurrente à celle qui résulte de l’application des articles 43, 52, 382 et 706-42.

« La juridiction saisie demeure compétente, quelles que soient les incriminations retenues lors du règlement ou du jugement de l’affaire. Toutefois, si les faits constituent une contravention, le juge d’instruction prononce le renvoi de l’affaire devant le tribunal de police compétent en application de l’article 522.

« Art. 706-179. – Le procureur de la République près un tribunal de grande instance autre que ceux visés à l’article 706-176 peut, pour les infractions entrant dans le champ d’application de l’article 706-176, requérir le juge d’instruction de se dessaisir au profit de la juridiction d’instruction compétente en application de l’article 706-176. Les parties sont préalablement avisées et invitées à faire connaître leurs observations par le juge d’instruction. L’ordonnance est rendue huit jours au plus tôt et un mois au plus tard à compter de cet avis.

« Lorsque le juge d’instruction décide de se dessaisir, son ordonnance ne prend effet qu’à compter du délai de cinq jours prévu par l’article 706-180 ; lorsqu’un recours est exercé en application de cet article, le juge d’instruction demeure saisi jusqu’à ce que soit porté à sa connaissance l’arrêt de la chambre de l’instruction passé en force de chose jugée ou celui de la chambre criminelle de la Cour de cassation.

« Dès que l’ordonnance est passée en force de chose jugée, le procureur de la République adresse le dossier de la procédure au procureur de la République près le tribunal de grande instance compétent en application de l’article 706-178.

« Le présent article est applicable devant la chambre de l’instruction.

« Art. 706-180. – L’ordonnance rendue en application de l’article 706-179 peut, à l’exclusion de toute autre voie de recours, être déférée dans les cinq jours de sa notification, à la requête du ministère public ou des parties, soit à la chambre de l’instruction si la juridiction spécialisée au profit de laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé se trouve dans le ressort de la cour d’appel dans lequel se situe la juridiction initialement saisie, soit, dans le cas contraire, à la chambre criminelle de la Cour de cassation. La chambre de l’instruction ou la chambre criminelle désigne, dans les huit jours suivant la date de réception du dossier, le juge d’instruction chargé de poursuivre l’information. Le ministère public peut également saisir directement la chambre de l’instruction ou la chambre criminelle de la Cour de cassation lorsque le juge d’instruction n’a pas rendu son ordonnance dans le délai d’un mois prévu au premier alinéa de l’article 706-179.

« L’arrêt de la chambre de l’instruction ou de la chambre criminelle est porté à la connaissance du juge d’instruction ainsi qu’à celle du ministère public et notifié aux parties.

« Le présent article est applicable à l’arrêt de la chambre de l’instruction rendu sur le fondement du quatrième alinéa de l’article 706-179, le recours étant alors porté devant la chambre criminelle.

« Art. 706-181. – Les magistrats mentionnés à l’article 706-178 ainsi que le procureur général près la cour d’appel compétente peuvent demander à des assistants spécialisés, désignés dans les conditions prévues par l’article 706, de participer, selon les modalités prévues par cet article, aux procédures concernant les délits entrant dans le champ d’application de l’article 706-176.

« Art. 706-182. – Le procureur général près la cour d’appel, dans le ressort de laquelle se trouve une juridiction compétente en application de l’article 706-176, anime et coordonne, en concertation avec les autres procureurs généraux du ressort interrégional, la conduite de la politique d’action publique pour l’application de cet article. » –

Adopté.

(Non modifié)

I. – Au deuxième alinéa de l’article 706-107 du code de procédure pénale, les mots : «, à l’exception de celle visée à l’article L. 218-19 du code de l’environnement, » sont supprimés.

II. – Le second alinéa de l’article 706-108 du même code est supprimé. –

Adopté.

L’article 693 du même code est ainsi modifié :

1° À la fin de la seconde phrase du premier alinéa, les références : « les articles 697-3, 705, 706-1 et 706-17 » sont remplacées par les références : « les articles 628-1, 697-3, 705, 706-1, 706-17, 706-75, 706-107, 706-108 et 706-176 » ;

2° Le second alinéa est ainsi rédigé :

« La juridiction de Paris exerce une compétence concurrente à celle qui résulte du premier alinéa. Lorsque le procureur de la République près un tribunal de grande instance autre que celui de Paris requiert le juge d’instruction saisi d’une infraction entrant dans le champ d’application du chapitre Ier du présent titre de se dessaisir au profit de la juridiction d’instruction de Paris, les articles 628-2 et 628-6 sont applicables. » –

Adopté.

chapitre viii

Développement des procédures pénales simplifiées

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 495 est ainsi rédigé :

« Art. 495. – I.Le procureur de la République peut décider de recourir à la procédure simplifiée de l’ordonnance pénale pour les délits mentionnés au II lorsqu’il résulte de l’enquête de police judiciaire que les faits reprochés au prévenu sont simples et établis, que les renseignements concernant la personnalité de celui-ci, et notamment ses charges et ses ressources, sont suffisants pour permettre la détermination de la peine, qu’il n’apparaît pas nécessaire, compte tenu de la faible gravité des faits, de prononcer une peine d’emprisonnement ou une peine d’amende d’un montant supérieur à celui fixé par l’article 495-1 et que le recours à cette procédure n’est pas de nature à porter atteinte aux droits de la victime.

« II. – La procédure simplifiée de l’ordonnance pénale est applicable aux délits suivants, ainsi qu’aux contraventions connexes :

« 1° Le délit de vol prévu par l’article 311-3 du code pénal ainsi que le recel de ce délit prévu par l’article 321-1 du même code ;

« 2° Le délit de filouterie prévu par l’article 313-5 du même code ;

« 3° Les délits de détournement de gage ou d’objet saisi prévus par les articles 314-5 et 314-6 du même code ;

« 4° Les délits de destructions, dégradations et détériorations d’un bien privé ou public prévus par l’article 322-1 et le premier alinéa et le 2° de l’article 322-2 du même code ;

« 5° Le délit de fuite prévu par l’article 434-10 du même code, lorsqu’il est commis à l’occasion de la conduite d’un véhicule ;

« 5° bis (nouveau) Le délit de vente à la sauvette prévu par les articles 446-1 et 446-2 du même code ;

« 6° Les délits prévus par le code de la route ;

« 7° Les délits en matière de réglementations relatives aux transports terrestres ;

« 8° Les délits prévus au titre IV du livre IV du code de commerce pour lesquels une peine d’emprisonnement n’est pas encourue ;

« 9° Le délit d’usage de produits stupéfiants prévu par le premier alinéa de l’article L. 3421-1 du code de la santé publique ;

« 10° Le délit d’occupation de hall d’immeuble prévu par l’article L. 126-3 du code de la construction et de l’habitation ;

« 11° Les délits de contrefaçon prévus aux articles L. 335-2, L. 335-3 et L. 335-4 du code de la propriété intellectuelle, lorsqu’ils sont commis au moyen d’un service de communication au public en ligne ;

« 12° Les délits en matière de chèques et de cartes de paiement prévus par les articles L. 163-2 et L. 163-7 du code monétaire et financier ;

« 13° Les délits de port ou transport d’armes de la 6e catégorie prévus par l’article L. 2339-9 du code de la défense.

« III. – La procédure simplifiée de l’ordonnance pénale n’est pas applicable :

« 1° Si le prévenu était âgé de moins de dix-huit ans au jour de l’infraction ;

« 2° Si la victime a fait directement citer le prévenu avant qu’ait été rendue l’ordonnance prévue à l’article 495-1 du présent code ;

« 3° Si le délit a été commis en même temps qu’un délit ou qu’une contravention pour lequel la procédure d’ordonnance pénale n’est pas prévue ;

« 4°

2° Le deuxième alinéa de l’article 495-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le montant maximum de l’amende pouvant être prononcée est de la moitié de celui de l’amende encourue sans pouvoir excéder 5 000 €. » ;

3° Après l’article 495-2, il est inséré un article 495-2-1 ainsi rédigé :

« Art. 495-2-1. – Lorsque la victime des faits a formulé au cours de l’enquête de police une demande de dommages et intérêts ou de restitution valant constitution de partie civile conformément au deuxième alinéa de l’article 420-1, le président statue sur cette demande dans l’ordonnance pénale. S’il ne peut statuer sur cette demande pour l’une des raisons mentionnées au dernier alinéa du même article 420-1, il renvoie le dossier au ministère public aux fins de saisir le tribunal sur les intérêts civils. L’article 495-5-1 est alors applicable. » ;

4° Au troisième alinéa de l’article 495-3, les mots : « et que cette opposition permettra » sont remplacés par les mots : «, que cette opposition peut être limitée aux dispositions civiles ou pénales de l’ordonnance lorsqu’il a été statué sur une demande présentée par la victime et qu’elle permettra » ;

5° Après l’article 495-3, il est inséré un article 495-3-1 ainsi rédigé :

« Art. 495-3-1. – Lorsqu’il est statué sur les intérêts civils, l’ordonnance pénale est portée à la connaissance de la partie civile selon l’une des modalités prévues au deuxième alinéa de l’article 495-3. La partie civile est informée qu’elle dispose d’un délai de quarante-cinq jours à compter de cette notification pour former opposition aux dispositions civiles de l’ordonnance. » ;

6° Après la première phrase du premier alinéa de l’article 495-4, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« En cas d’opposition formée par le prévenu sur les seules dispositions civiles ou par la partie civile, le tribunal statue conformément au quatrième alinéa de l’article 464. » ;

7° Le second alinéa de l’article 495-5 est ainsi rédigé :

« Cependant, l’ordonnance pénale statuant uniquement sur l’action publique n’a pas l’autorité de la chose jugée à l’égard de l’action civile en réparation des dommages causés par l’infraction. » ;

8° Après l’article 495-5, il est inséré un article 495-5-1 ainsi rédigé :

« Art. 495-5-1. – Lorsque la victime de l’infraction est identifiée et qu’elle n’a pu se constituer partie civile dans les conditions prévues par l’article 495-2-1 ou lorsqu’il n’a pas été statué sur sa demande formulée conformément à l’article 420-1, le procureur de la République doit l’informer de son droit de lui demander de citer l’auteur des faits à une audience du tribunal correctionnel statuant conformément au quatrième alinéa de l’article 464, dont elle sera avisée de la date, pour lui permettre de se constituer partie civile. Le tribunal statue alors sur les seuls intérêts civils, au vu du dossier de la procédure qui est versé au débat. » ;

9° §(nouveau) Les articles 495-6-1 et 495-6-2 sont abrogés.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le garde des sceaux, je le répète, vous avez profité de ce projet de loi pour inscrire encore et encore dans la loi des procédures simplifiées. C’est inacceptable, tant sur la forme que sur le fond.

Notre collègue François Zocchetto a souligné, lors de la réunion de la commission des lois, que les procédures accélérées de jugement ont ceci de positif qu’elles permettent de réduire le délai entre la commission des faits et le prononcé de la peine.

Certes, je vous l’accorde, les délais de jugement sont souvent trop longs, bien trop longs. Mais faut-il ne considérer la question que sous l’angle de l’accélération des procédures ? La véritable question n’est-elle pas celle des véritables moyens de la justice, celle qui est aujourd’hui au premier plan de l’actualité judiciaire ? Ne faut-il pas en finir avec cette inflation pénale, que cet article comme le suivant contribuent d’ailleurs à favoriser ?

Si la majorité cessait enfin d’augmenter en permanence les incriminations, les audiences seraient moins nombreuses et les tribunaux moins encombrés. Voilà des questions qui méritent réflexion.

Les chefs de juridiction, dites-vous, emploient ces procédures simplifiées ; les juges les valident. Mais il faut bien qu’ils s’en sortent d’une manière ou d’une autre, compte tenu de l’indigence des moyens qui leur sont alloués !

Il n’est plus possible de contourner la question des moyens au mépris du respect des droits fondamentaux, qui est au cœur des missions de la justice. Les procédures expéditives mettent à mal le principe du débat contradictoire, le droit à l’audience comme l’individualisation de la peine ou le sens de celle-ci. C'est la raison pour laquelle nous les refusons totalement.

On entend régulièrement le Président de la République asséner l’idée que l’opinion publique veut une justice rapide. Mais la justice de la République ne doit pas avoir pour fondement une opinion publique dont les peurs sont montées en épingle par médias interposés. Son fondement, c’est d’être équitable, et nos concitoyens veulent une justice équitable !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Mais oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

C’est ce qu’exige le respect des droits des prévenus, comme celui des victimes.

Je m’inquiète d’ailleurs de constater que notre justice pénale est en train de changer de nature, devenant progressivement, insidieusement même, puisqu’il n’y a pas eu débat, accusatoire. Les procédures simplifiées, expéditives, y participent largement. C’est donc bien la question du sens que nous voulons donner à notre justice qui est posée. Et le danger nous guette, avec ces dispositions qui, insidieusement, petit à petit, modifient l’économie globale du dispositif judiciaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je suis saisie de trois amendements identiques.

L'amendement n° 6 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 24 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

L'amendement n° 42 est présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour défendre l’amendement n° 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 24 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je l’ai dit, nous sommes hostiles à un tel élargissement du champ d’application de l’ordonnance pénale.

J’ai rappelé qu’il s’agissait d’une procédure écrite non contradictoire : il n’y a donc jamais aucun entretien avec l’auteur des faits. La décision du parquet s’impose sans qu’il y ait accord ou reconnaissance des faits ; on n’est donc pas là, monsieur le garde des sceaux, dans le cadre d’un aveu. Il y a simplement une enquête, avec les risques d’erreur qui peuvent bien entendu s’y attacher et les conséquences qui, le cas échéant, en découlent. Certes, il ne faut pas toujours chercher le mal là où il n’existe pas, mais un certain nombre d’erreurs sont tout de même régulièrement commises au cours des enquêtes.

Ce qui a été dit par M. Badinter au sujet de l’ordonnance pénale, lors de la présentation de la question préalable, correspond parfaitement à la réalité.

On nous répond toujours en invoquant la faculté d’opposition. Mais nous qui recevons tous un certain nombre de nos concitoyens le savons bien : la notification de la décision qu’ils ont entre les mains est rédigée dans un jargon très peu compréhensible !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Sans même parler du délai, ils ne comprennent pas ce que signifie le terme « opposition ».

Par conséquent, on peut tout à fait concevoir qu’une telle procédure existe, mais à condition de ne pas sortir de l’épure. Or l’élargissement qui nous est proposé nous paraît excessif et dangereux.

Force est d’ailleurs de constater que cet élargissement s’inscrit dans une tendance générale de la Chancellerie, et l’on voit quels sont les inspirateurs de la philosophie qui la sous-tend !

Je terminerai en citant un extrait de la page 109 du rapport : « Plus récemment, notre collègue Bernard Saugey, rapporteur de la loi du 12 mai 2009 précitée, a observé que, si la procédure de l’ordonnance pénale a montré son utilité dans le traitement de contentieux extrêmement simples (tels que les infractions au code de la route notamment), votre commission considère qu’elle n’est pas nécessairement adaptée pour des contentieux plus complexes, en particulier dans le cadre du traitement en temps réel des affaires pénales où l’analyse du parquet se fonde exclusivement sur les éléments recueillis au cours de l’enquête de police. »

Bien sûr, on veut toujours désengorger les tribunaux, mais il y a tout de même là un problème bien réel, un vrai danger, et ce n’est pas une question de clivage entre la droite et la gauche.

C’est pourquoi je souhaite qu’on n’aille pas dans ce sens-là.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour défendre l’amendement n° 42.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Je me suis déjà expliqué dans la discussion générale et Robert Badinter l’a également souligné : nous sommes hostiles à l’extension du champ de ces procédures, qui font de l’audience un luxe, un élément résiduel dans la justice pénale.

Dans ma permanence, je vois depuis des années de nombreuses personnes qui ont reçu des ordonnances pénales, notamment pour des infractions en matière de chasse et de pêche. Or, comme le disait mon collègue Mézard, l’ordonnance pénale reflète la position des gendarmes, en tout cas de ceux qui relèvent les infractions ; il n’y a donc aucune contestation possible, alors que les amendes sont parfois très élevées et les conséquences, assez graves. Mais il n’y a, en pratique, aucun moyen de discuter l’ordonnance : on ne peut faire autrement que d’admettre la version des gendarmes !

Par conséquent, restons-en à ce qui existe aujourd’hui. N’étendons pas encore l’ordonnance pénale, ni le plaider-coupable, ni les possibilités de transaction pénale. C’est le sens de cet amendement et de ceux qui portent sur les articles suivants.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

L’article 20 du projet de loi a en effet pour objet d’élargir le champ des infractions permettant de recourir à l’ordonnance pénale. Sans entrer dans les détails, je rappelle que la commission a bien encadré cette extension.

Ainsi, le champ des infractions concernées est élargi à un petit nombre d’infractions relativement simples à établir et à caractériser : vols simples, dégradations de biens publics ou privés, port d’arme de sixième catégorie, etc.

Le parquet ne pourrait avoir recours à cette procédure que pour des faits « simples et établis » et « de faible gravité ».

Enfin, le montant de l’amende susceptible d’être prononcée serait limité à 5 000 euros.

En outre, cela a été dit au cours de la discussion générale, la commission des lois a souhaité qu’il ne puisse pas être recouru à cette procédure lorsque les faits sont commis en état de récidive légale.

Par conséquent, la rédaction actuelle de l’article 20 permet vraiment de bien encadrer l’extension du champ d’utilisation de l’ordonnance pénale.

En réalité, la question posée par les auteurs de ces amendements et des suivants porte sur l’existence même de ces procédures simplifiées dans notre droit pénal. Mais l’objet de cet article n’étant pas de refondre totalement le droit pénal, la commission est défavorable à ces amendements.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Non, monsieur Mézard, vous qui avez défendu les juges du siège tout au long du débat, vous ne pouvez pas dire ça !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Absolument !

L’ordonnance pénale provient non du parquet, mais du président du tribunal. Si ce dernier accepte d’y recourir, c’est bien parce qu’il a jugé que, les faits étant suffisamment établis par l’enquête et la personnalité de la personne mise en cause suffisamment bien définie, un débat contradictoire n’était pas nécessaire.

Je rappelle qu’il n’est pas possible de prononcer une peine privative de liberté par le biais de l’ordonnance pénale ; seule une amende peut être infligée.

Je peux tout entendre, mais, pendant tout le débat sur la garde à vue, on m’a dit qu’il fallait un juge du siège ! Eh bien, là, il y en a un, et ce n’est pas le procureur qui fixe la quotité de l’amende !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

M. le garde des sceaux a raison : c’est le juge du siège qui décide. Mais, il le sait très bien, en matière pénale, il y a plusieurs trains et, compte tenu de leur nombre, il faut un triage, avec un aiguillage. L’aiguillage, c’est le parquet ! Qui trie ? Le parquet ! Qui choisit la procédure à suivre ? Le parquet !

En pratique, c’est au substitut de permanence, celui qui reçoit les dossiers, qu’il revient de décider que tel dossier doit aller à l’instruction, que tel autre relève de la comparution immédiate, tel autre de l’audience à jour fixe, etc. Lorsque c’est l’ordonnance pénale qui est retenue par le substitut, il transmet le dossier au juge, mais en fait c’est le parquet qui décide.

Voilà comment les choses se passent dans les tribunaux !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Je n’avais rien dit, monsieur le ministre. Vous m’avez fait un procès d’intention, alors que je n’avais rien avoué !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Nous sommes là au cœur de l’un des problèmes fondamentaux que pose ce texte, car il s’agit d’une extension considérable du champ de l’ordonnance pénale.

Cela a été rappelé, on peut concevoir une telle procédure pour des infractions simples. Or, y compris dans le texte de la commission, on va jusqu’au délit de vol. Certes, le procureur y recourt sous le contrôle du juge, mais on sait sous quelles contraintes la justice fonctionne actuellement ! On peut parfaitement imaginer qu’un procureur décide que toutes les affaires de vol sans circonstances aggravantes relève de l’ordonnance pénale : cela montre bien qu’il y a tout de même là quelque chose de nouveau dans notre droit !

Pour un vol ou même pour un délit de fuite, l’audience présidée par un juge, en présence du public, était justifiée ; cela avait un sens ! Le fait de considérer que le port d’arme de la sixième catégorie ne relève pas d’une décision en audience n’est pas neutre du tout ; c’est même un changement considérable, et vous le faites passer en catimini. Or, selon moi, c’est grave !

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'article 20 est adopté.

Le même code est ainsi modifié :

1° §(nouveau) Après l’article 180, il est inséré un article 180-1 ainsi rédigé :

« Art. 180-1. – Si le juge d’instruction estime que les faits constituent un délit, que la personne mise en examen reconnaît les faits et qu’elle accepte la qualification pénale retenue, il peut, à la demande ou avec l’accord du procureur de la République, du mis en examen et de la partie civile, prononcer par ordonnance le renvoi de l’affaire au procureur de la République aux fins de mise en œuvre d’une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité conformément aux articles 495-7 et suivants.

« La détention provisoire, l’assignation à résidence sous surveillance électronique ou le contrôle judiciaire de la personne prend fin sauf s’il est fait application du troisième alinéa de l’article 179.

« L’ordonnance de renvoi indique qu’en cas d’échec de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ou si, dans un délai de trois mois ou, lorsque la détention a été maintenue, dans un délai d’un mois à compter de celle-ci, aucune décision d’homologation n’est intervenue, le prévenu est de plein droit renvoyé devant le tribunal correctionnel. Si le prévenu a été maintenu en détention, les quatrième et cinquième alinéas de l’article 179 sont applicables.

« Le procureur de la République peut, tout en mettant en œuvre la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, assigner le prévenu devant le tribunal correctionnel ; cette assignation est caduque si une ordonnance d’homologation intervient avant l’expiration du délai de trois mois ou d’un mois.

« La demande ou l’accord du ministère public et des parties prévus au premier alinéa, qui doivent faire l’objet d’un écrit ou être mentionnés par procès-verbal, peuvent être recueillis au cours de l’information ou à l’occasion de la procédure de règlement prévue par l’article 175 ; si ces demandes ou accords ont été recueillis au cours de l’information, le présent article peut être mis en œuvre sans qu’il soit nécessaire de faire application de l’article 175. » ;

2° À l’article 495-7, les mots : « Pour les délits punis à titre principal d’une peine d’amende ou d’une peine d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à cinq ans » sont remplacés par les mots : « Pour tous les délits, à l’exception de ceux mentionnés à l’article 495-16 et des délits de violences volontaires et involontaires contre les personnes, de menaces et d’agressions sexuelles prévus aux articles 222-9 à 222-31-2 du code pénal lorsqu’ils sont punis d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure à cinq ans ».

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 7 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 25 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

L'amendement n° 43 est présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l'amendement n° 7.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

L’article 21 prévoit une extension générale de ce que j’appellerai le « plaider coupable » ; c’est en tout cas ce que signifie la formidable formule de « procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ».

Le rapporteur a apporté des limites au texte du Gouvernement...

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

... et nous ne pouvons que lui en être reconnaissants. Il n’en reste pas moins que la démarche qui consiste à toujours ouvrir le champ de cette procédure est en marche !

À quand le plaider coupable pour les crimes passibles de la cour d’assises, comme le prônait la commission Léger ? La question se pose d’autant plus que l’on s’achemine insidieusement vers la généralisation de cette procédure, ce qui est très préjudiciable. Et, encore une fois, cela se fait sans qu’on en ait débattu sérieusement au préalable.

Peut-être entend-on régler ainsi les problèmes liés à l’incapacité des professionnels de la justice à faire face à toutes les affaires qu’ils ont à traiter. Eh bien, il est inadmissible de profiter de circonstances dépendant du pouvoir politique pour modifier les règles de fonctionnement de la justice.

Parmi vous, certains y sont peut-être favorables, mais cela aurait en tout cas mérité autre chose qu’un débat en catimini sur un texte fourre-tout, où l’on trouve tout et son contraire !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 25 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Cela a été très bien rappelé par le président Badinter : le recentrage du procès pénal autour du parquet constitue un des points fondamentaux de ce texte. Or il faut quand même se souvenir de l’arrêt Moulin/France de la Cour européenne des droits de l’homme en date du 23 novembre 2010 !

La négociation qui a lieu dans le cas d’une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité – la CRPC – se déroule en deux temps. Dans un premier temps, siège et parquet établissent des accords-cadres visant à rentabiliser l’utilisation de cette procédure, dans le souci d’éviter le plus possible les refus d’homologation. Dans un second temps, le représentant du parquet et la personne suspectée s’entendent sur la peine.

Avec l’extension du champ de la CRPC, pratiquement tous les délits financiers relèveront désormais de cette procédure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Mais oui, monsieur le président de la commission des lois, l’immense majorité des délits financiers donneront lieu à une CRPC ! Or je ne pense pas que ce soit une bonne chose, car le législateur de 2004 – c’est pourquoi, à l’époque, nous nous y sommes totalement opposés – est revenu, de fait, sur le principe de la présomption d’innocence.

Il s’agit d’une accommodation du système américain du plea bargaining, ainsi qu’on nous le rappelle souvent. Mais des études extrêmement intéressantes sur ce système ont démontré que la peur de l’aléa qui s’attache aux décisions de justice poussait nombre de personnes suspectées à tort à avouer. Le pourcentage des personnes innocentes condamnées dans le cadre d’une telle procédure est tout de même de 11 % !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Dans le milieu professionnel des auxiliaires de justice, nous connaissons tous des personnes qui, pour avoir la paix, préfèrent effectivement se voir infliger une amende de 1 000 euros plutôt que de se retrouver face à des difficultés judiciaires considérables. Ce n’est pas une bonne chose.

Rien ne prouve d’ailleurs – en tout cas, je n’ai vu aucun élément sur ce point dans le rapport – que, depuis 2004, l’augmentation du taux de réponse pénale soit due à cela. Je ne pense pas non plus que les délais d’audiencement aient enregistré une réelle amélioration.

Par conséquent, nous sommes totalement défavorables à l’extension du champ de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour présenter l’amendement n° 43.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Je fais miens les propos de Mme Borvo Cohen-Seat et de M. Mézard.

Pour ma part, je suis farouchement opposé à cette procédure pour une raison très simple : la sanction n’a pas à être négociée, car cela l’affaiblit. Ce marchandage entre le parquet et la personne coupable a quelque chose de profondément indécent.

Certes, monsieur le garde des sceaux, par ce moyen, vous épargnerez à Mme Lagarde, votre collègue en charge de l’économie, d’avoir à constituer des commissions d’arbitrage…

M. le ministre s’exclame !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La peine n’est ni un compromis, ni une concession, encore moins une compromission entre l’autorité qui poursuit et la personne qui est coupable. C’est une sanction qui est infligée et qui doit être acceptée. Elle n’a pas à être refusée.

Étant totalement hostile à cette procédure, je suis évidemment hostile à l’extension de son champ.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

La commission a examiné l’extension du champ du recours à la CRPC avec une prudence égale à celle avec laquelle elle a abordé l’extension du champ du recours à l’ordonnance pénale.

Nous avons notamment évité que les violences les plus graves faites aux personnes, comme les agressions sexuelles aggravées, relèvent de la CRPC, ce qui aurait constitué une dérive de l’utilisation de celle-ci.

Pour cette raison, la commission est défavorable à ces amendements.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Défavorable.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'article 21 est adopté.

L’article 529 du même code est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « des quatre premières classes » sont supprimés ;

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 44, présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'amendement n° 8, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Même avis.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 22 est adopté.

M. Roger Romani remplace Mme Catherine Tasca au fauteuil de la présidence.

I. – Au premier alinéa de l’article L. 141-2 du code de la consommation, après les mots : « contraventions prévues » sont insérés les mots : « et les délits qui ne sont pas punis d’une peine d’emprisonnement prévus ».

II. – Après l’article L. 310-6 du code de commerce, il est inséré un article L. 310-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 310-6-1. – Pour les infractions prévues au présent titre ou par les textes pris pour son application, l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation peut, tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement, transiger, après accord du procureur de la République, dans les conditions prévues à l'article L. 470-4-1. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 9 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 45 est présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat pour présenter l'amendement n° 9.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Cet amendement a été défendu précédemment puisque j’ai déjà dit que la pratique qui consiste, pour le Gouvernement, à amender largement en commission son propre projet de loi est préjudiciable au débat parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour présenter l'amendement n° 45.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Nous nous opposons à l’extension de la transaction pénale en matière d’infractions au code de la consommation et au code de commerce.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Défavorable.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'article 22 bis est adopté.

I. – L’article 529-10 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « deuxième et troisième » sont remplacés par les mots : « deuxième, troisième et quatrième » ;

2° Après le quatrième alinéa, il est inséré un c) ainsi rédigé :

« c) Copies de la déclaration de cession du véhicule et de son accusé d’enregistrement dans le système d’immatriculation des véhicules. »

II. – Le code de la route est ainsi modifié :

1° Après le deuxième alinéa de l’article L. 121-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cas où le véhicule a été cédé, cette responsabilité pèse, avec les mêmes réserves, sur l’acquéreur du véhicule. » ;

2° L’article L. 121-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cas où le véhicule a été cédé, la responsabilité pécuniaire prévue au premier alinéa incombe, sous les réserves prévues au premier alinéa de l’article L. 121-2, à l’acquéreur du véhicule. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 10, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Le Gouvernement est tout à fait défavorable à cet amendement puisque l’article 22 ter vise à protéger les acheteurs de véhicules d’occasion, c'est-à-dire des personnes souvent assez démunies.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 22 ter est adopté.

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Le chapitre V du titre V du livre III de la troisième partie est complété par un article L. 3355-9 ainsi rédigé :

« Art. L. 3355-9. – I. – L'autorité administrative peut, tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement et après avoir recueilli l'accord du procureur de la République, transiger sur la poursuite des délits prévus et réprimés par les articles L. 3351-1 à L. 3351-7, L. 3352-1 à L. 3352-9.

« Elle peut également transiger sur la poursuite des infractions relatives à l’établissement, à l'occasion d'une foire, d'une vente ou d'une fête ouvertes au public, d’un débit de boissons, sans avoir obtenu l'autorisation de l'autorité municipale, ou à l’établissement d’un débit de boisson à consommer sur place des 2ème, 3ème et 4ème catégories sans respecter les distances déterminées par arrêté préfectoral avec les débits des mêmes catégories déjà existants.

« II. – Cette faculté n'est pas applicable aux contraventions pour lesquelles l'action publique est éteinte par le paiement d'une amende forfaitaire en application de l'article 529 du code de procédure pénale.

« III. – La proposition de transaction est déterminée en fonction des circonstances et de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur ainsi que de ses ressources et de ses charges.

« Elle précise l'amende transactionnelle que l'auteur de l'infraction devra payer, dont le montant ne peut excéder le tiers du montant de l'amende encourue ainsi que, le cas échéant, les obligations qui lui seront imposées, tendant à faire cesser l'infraction, à éviter son renouvellement, à réparer le dommage ou à remettre en conformité les lieux. Elle fixe également les délais impartis pour le paiement et, s'il y a lieu, l'exécution des obligations.

« IV. – L'acte par lequel le procureur de la République donne son accord à la proposition de transaction est interruptif de la prescription de l'action publique.

« L'action publique est éteinte lorsque l'auteur de l'infraction a exécuté dans les délais impartis l'intégralité des obligations résultant pour lui de l'acceptation de la transaction.

« V. – Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. » ;

2° Le chapitre II du titre Ier du livre V de la troisième partie est complété par un article L. 3512-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 3512-5. – L'autorité administrative peut, tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement et après avoir recueilli l'accord du procureur de la République, transiger selon les modalités définies à l'article L. 3355-9, sur la poursuite des délits prévus et réprimés par l’article L. 3512-2.

« Elle peut également transiger sur la poursuite des infractions commises en violation de la réglementation en vigueur et relatives au fait de fumer dans un lieu à usage collectif hors de l'emplacement prévu à cet effet, ainsi qu’au fait, pour le responsable des lieux où s'applique l'interdiction, de ne pas mettre en place la signalisation prévue ou de mettre à la disposition de fumeurs un emplacement non conforme. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 11 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 46 est présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Badinter et Sueur et Mme Boumediene-Thiery.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l'amendement n° 11.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour présenter l'amendement n° 46.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Pour des raisons de fond, nous nous opposons à la transaction pénale en matière de lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme, qui fait déjà l’objet, me semble-t-il, de campagnes nationales.

Si les infractions commises en cette matière peuvent donner lieu à une transaction pénale, que se passera-t-il ? Les « mauvais alcooliques » seront sanctionnés lourdement, tandis que, pour les « bons alcooliques », ceux des beaux quartiers, la transaction proposée sera une amende d’un faible montant, et il en ira de même pour le tabagisme.

Bientôt, ce sera le cas pour les autres substances qui, on le sait, sont aujourd'hui consommées par tous. Simplement, il y a les très mauvais délinquants, ceux qui fréquentent les quartiers périphériques des villes, et les moins mauvais délinquants, ceux qui fréquentent les boîtes de nuit, les clubs des quartiers chics, notamment ceux de Paris.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Il s’agit en fait ici des infractions en matière de publicité contre le tabagisme et l’alcoolisme. Le recours à la transaction pénale dans ce domaine sera très utile, car il permettra de poursuivre effectivement les auteurs de ces infractions. La commission est donc défavorable à ces deux amendements.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Défavorable.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'article 22 quater est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

chapitre ix

Aménagement des compétences juridictionnelles en matière militaire

I. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° À l’intitulé du titre XI du livre IV, les mots : « des crimes et des délits en matière militaire » et à l’intitulé du chapitre Ier de ce même titre, les mots : « des crimes et délits en matière militaire » sont remplacés par les mots : « des infractions en matière militaire » ;

2° Le même chapitre Ier est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa de l’article 697-1 est ainsi rédigé :

« Les juridictions mentionnées à l’article 697 connaissent des crimes et des délits commis sur le territoire de la République par les militaires dans l’exercice du service. » ;

b) La section 1 est complétée par deux articles 697-4 et 697-5 ainsi rédigés :

« Art. 697-4. – Les juridictions mentionnées à l’article 697 ayant leur siège à Paris sont également compétentes pour connaître des crimes et des délits commis hors du territoire de la République par les membres des forces armées françaises ou à l’encontre de celles-ci dans les cas prévus par les articles L. 121-1 à L. 121-8 du code de justice militaire. En outre, un ou plusieurs magistrats affectés aux formations du tribunal correctionnel de Paris spécialisées en matière militaire sont chargés par ordonnance du président du tribunal de grande instance du jugement des contraventions commises dans ces circonstances.

« Le président du tribunal de grande instance de Paris et le procureur de la République près ce tribunal désignent respectivement un ou plusieurs juges d’instruction et magistrats du parquet chargés spécialement de l’enquête, de la poursuite et de l’instruction des infractions mentionnées au premier alinéa.

« Art. 697-5. – Pour le jugement des délits et des contraventions mentionnées à l’article 697-4, une chambre détachée du tribunal de grande instance de Paris spécialisée en matière militaire peut être instituée à titre temporaire hors du territoire de la République par décret en Conseil d’État dans les conditions prévues par les traités et accords internationaux. » ;

c) Le premier alinéa de l’article 698 est ainsi rédigé :

« Les infractions relevant de la compétence des juridictions mentionnées aux articles 697 et 697-4 sont poursuivies, instruites et jugées selon les règles du présent code sous réserve des dispositions particulières des articles 698-1 à 698-9 et, s’agissant des infractions commises hors du territoire de la République, des dispositions particulières du code de justice militaire » ;

d) (nouveau) À la première phrase du premier alinéa de l’article 698-6, la référence : « l’article 697 » est remplacée par les références : « les articles 697 et 697-4 » ;

e) (nouveau) L’article 706-16 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Elles sont également applicables à la poursuite, à l’instruction et au jugement des actes de terrorisme commis hors du territoire de la République par les membres des forces armées françaises ou à l’encontre de celles-ci dans les cas prévus par les articles L. 121-1 à L. 121-8 du code de justice militaire. »

II. – Le code de justice militaire est ainsi modifié :

1° Le 1° de l’article L. 1 est abrogé et les 2° et 3° du même article deviennent respectivement les 1° et 2° ;

2° L’article L. 2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 2. – En temps de paix, les infractions commises par les membres des forces armées ou à l’encontre de celles-ci relèvent des juridictions de droit commun spécialisées en matière militaire dans les cas prévus à l’article L. 111-1. Hors ces cas, elles relèvent des juridictions de droit commun.

« Les infractions relevant de la compétence des juridictions de droit commun spécialisées en matière militaire sont poursuivies, instruites et jugées selon les règles du code de procédure pénale, sous réserve des dispositions particulières des articles 698-1 à 698-9 de ce code et, lorsqu’elles sont commises hors du territoire de la République, des dispositions particulières du présent code. » ;

3° Les trois premiers alinéas de l’article L. 3 sont supprimés ;

4° Le chapitre Ier du titre Ier du livre Ier est ainsi rédigé :

« Chapitre I er

« Des juridictions compétentes en matière militaire « en temps de paix

« Art. L. 111-1. – Les juridictions de droit commun spécialisées en matière militaire mentionnées à l’article 697 du code de procédure pénale sont compétentes pour le jugement des crimes et des délits commis en temps de paix sur le territoire de la République par des militaires dans l’exercice du service.

« Conformément à l’article 697-4 du même code, les juridictions mentionnées au premier alinéa ayant leur siège à Paris sont également compétentes pour le jugement des crimes, délits et contraventions commis en temps de paix hors du territoire de la République par les membres des forces armées françaises ou à l’encontre de celles-ci, conformément aux articles L. 121-1 à L. 121-8 du présent code.

« Les règles relatives à l’institution, à l’organisation et au fonctionnement des juridictions mentionnées au présent article sont définies par le code de procédure pénale. » ;

5° Les articles L. 111-10 à L. 111-17 deviennent respectivement les articles L. 112-22-1 à L. 112-22-8 et sont ainsi modifiés :

a) Le deuxième alinéa de l’article L. 112-22-2 est supprimé ;

b) Au premier alinéa de l’article L. 112-22-1, aux premier et second alinéas de l’article L. 112-22-3, au second alinéa de l’article L. 112-22-4, aux premier et dernier alinéas de l’article L. 112-22-6, à la seconde phrase du second alinéa de l’article L. 112-22-7 et à l’article L. 112-22-8, les mots : « tribunal aux armées » sont remplacés par les mots : « tribunal territorial des forces armées » ;

c) (nouveau) Aux premier et second alinéas de l’article L. 112-22-3, au second alinéa de l’article L. 112-22-4 et à la seconde phrase du second alinéa de l’article L. 112-22-7, les mots : « procureur de la République » sont remplacés par les mots : « commissaire du Gouvernement » ;

6° Les deux premiers alinéas de l’article L. 112-22 sont supprimés ;

7° À l’article L. 121-1, les mots : « le tribunal aux armées connaît » sont remplacés par les mots : « les juridictions de Paris spécialisées en matière militaire connaissent » ;

8° À la première phrase de l’article L. 121-6, les mots : « le tribunal aux armées est incompétent » sont remplacés par les mots : « les juridictions mentionnées à l’article L. 121-1 sont incompétentes » et à la seconde phrase du même article, les mots : « Ce même tribunal est compétent » sont remplacés par les mots : « Ces mêmes juridictions sont compétentes » ;

9° À l’article L. 123-1, les mots : « les juridictions des forces armées sont compétentes » sont remplacés par les mots : « la juridiction saisie est compétente » ;

10° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 123-4, les mots : « une juridiction des forces armées » sont remplacés par les mots : « la juridiction de Paris spécialisée en matière militaire » ;

11° Les deuxième, troisième et quatrième alinéas de l’article L. 211-1 sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« Le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris reçoit les plaintes et les dénonciations. Il dirige l’activité des officiers de police judiciaire des forces armées conformément aux dispositions du code de procédure pénale. » ;

12° L’article L. 211-8 est ainsi rédigé :

« Art. L. 211-8. – Pour l’application des articles 63 à 65, 77 à 78 et 154 du code de procédure pénale, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris ou le juge d’instruction de ce tribunal spécialisé en matière militaire peuvent, le cas échéant, déléguer leurs pouvoirs respectivement au procureur de la République ou au juge d’instruction du tribunal de grande instance dans le ressort duquel la garde à vue est mise en œuvre. » ;

13° À l’article L. 211-10, les mots : « à laquelle il est attaché » sont remplacés par les mots : « spécialisée en matière militaire » ;

14° À l’article L. 211-12, les mots : « devant les juridictions des forces armées » sont supprimés ;

15° Le chapitre Ier du titre Ier du livre II est complété par une section 5 ainsi rédigée :

« Section 5

« De la défense

« Art. L. 211-25. – Les personnes mentionnées aux articles L. 121-1 à L. 121-8 peuvent faire assurer leur défense par un avocat ou, si l’éloignement y fait obstacle, par un militaire qu’elles choisissent sur une liste établie par le président du tribunal de grande instance de Paris. » ;

16° Aux articles L. 121-7, L. 121-8, L. 211-11, L. 211-14 et L. 211-15, les mots : « du tribunal aux armées » sont remplacés par les mots : « des juridictions de Paris spécialisées en matière militaire » ;

17° À l’article L. 211-17, le mot : « militaires » est supprimé ;

18° Aux sixième et huitième alinéas de l’article L. 211-3, au premier alinéa de l’article L. 211-4, aux articles L. 211-7 et L. 211-10 et au premier alinéa et à la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 211-24, les mots : « le tribunal aux armées » sont remplacés par les mots : « le tribunal de grande instance de Paris » ;

19° Les articles L. 221-1, L. 221-2, L. 221-4, L. 231-1 et L. 233-1 sont abrogés ;

20° Au premier alinéa de l’article L. 241-1, les mots : « le tribunal aux armées » sont remplacés par les mots : « les juridictions de Paris spécialisées en matière militaire » ;

21° Le premier alinéa de l’article L. 261-1 est supprimé ;

22° À l’article L. 262-1, après les mots : « juridictions des forces armées » sont insérés les mots : « et des juridictions de Paris spécialisées en matière militaire » ;

23° L’article L. 262-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « tant par le tribunal aux armées que par les tribunaux de droit commun » sont supprimés ;

b) Le second alinéa est supprimé ;

24° Au premier alinéa de l’article L. 265-1, les mots : « la juridiction des forces armées » sont remplacés par les mots : « la juridiction saisie » ;

25° Au début du second alinéa de l’article L. 265-3, les mots : « les juridictions des forces armées appliquent » sont remplacés par les mots : « la juridiction saisie applique » ;

26° L’article L. 271-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 271-1. – En temps de guerre, seuls les premier et deuxième alinéas de l’article 11 du code de procédure pénale sont applicables. » –

Adopté.

L’article 697-2 du code de procédure pénale est ainsi rétabli :

« Art. 697-2. – Les juridictions spécialisées en matière militaire mentionnées à l’article 697, dans le ressort desquelles est situé soit le port d’attache d’un navire de la marine nationale, soit l’aérodrome de rattachement d’un aéronef militaire, sont compétentes pour connaître de toute infraction commise à bord ou à l’encontre de ce navire ou de cet aéronef, en quelque lieu qu’il se trouve. » –

Adopté.

À la deuxième phrase du premier alinéa de l’article 698-1 du même code, après les mots : « tout acte de poursuite, » sont insérés les mots : « y compris en cas de réquisitoire contre personne non dénommée, de réquisitoire supplétif ou de réquisitions faisant suite à une plainte avec constitution de partie civile, ». –

Adopté.

(Non modifié)

I. – L’article L. 311-7 du code de justice militaire est ainsi rédigé :

« Art. L. 311-7. – Toute condamnation à une peine d’interdiction des droits civiques ou d’interdiction d’exercer une fonction publique, prononcée par quelque juridiction que ce soit contre tout militaire, entraîne perte du grade.

Lorsque ces mêmes militaires sont commissionnés, elle entraîne la révocation. »

II. – Les articles L. 311-8 et L. 311-11 du même code sont abrogés. –

Adopté.

Le code de justice militaire est ainsi modifié :

1° Les cinq premiers alinéas de l’article L. 321-2 sont remplacés par huit alinéas ainsi rédigés :

« Est déclaré déserteur à l’intérieur, en temps de paix, tout militaire dont la formation de rattachement est située sur le territoire de la République et qui :

« 1° S’évade, s’absente sans autorisation, refuse de rejoindre sa formation de rattachement ou ne s’y présente pas à l’issue d’une mission, d’une permission ou d’un congé ;

« 2° Mis en route pour rejoindre une formation de rattachement située hors du territoire national, ne s’y présente pas ;

« 3° Se trouve absent sans autorisation au moment du départ pour une destination hors du territoire du bâtiment ou de l’aéronef auquel il appartient ou à bord duquel il est embarqué.

« Constitue une formation de rattachement : un corps, un détachement, une base, une formation, un bâtiment ou aéronef militaire, un établissement civil ou militaire de santé, un établissement pénitentiaire.

« Est compétente pour connaître des faits de désertion à l’intérieur la juridiction dans le ressort de laquelle est située la formation de rattachement de départ.

« Dans les cas prévus au 1°, le militaire est déclaré déserteur à l’expiration d’un délai de six jours à compter du lendemain du jour où l’absence sans autorisation est constatée ou du lendemain du terme prévu de la mission, de la permission ou du congé.

« Aucun délai de grâce ne bénéficie au militaire se trouvant dans les circonstances des 2° et 3°. » ;

2° L’article L. 321-3 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Le fait pour tout militaire de déserter à l’intérieur, en temps de paix, est puni de trois ans d’emprisonnement.

« Le fait de déserter à l’intérieur et de franchir les limites du territoire de la République ou de rester hors de ces limites est puni de cinq ans d’emprisonnement. » ;

b) Au dernier alinéa, le mot : « destitution » est remplacé par les mots : « perte du grade » ;

3° À la seconde phrase du 1° de l’article L. 321-4, le mot : « destitution » est remplacé par les mots : « perte du grade » ;

4° Les articles L. 321-5 à L. 321-7 sont ainsi rédigés :

« Art. L. 321-5. – Est déclaré déserteur à l’étranger, en temps de paix, tout militaire qui, affecté dans une formation de rattachement située hors du territoire de la République :

« 1° S’évade, s’absente sans autorisation, refuse de rejoindre sa formation de rattachement ou ne s’y présente pas à l’issue d’une mission, d’une permission ou d’un congé ;

« 2° Mis en route pour rejoindre une autre formation de rattachement située sur tout territoire, y compris le territoire national, ne s’y présente pas ;

« 3° Se trouve absent sans autorisation au moment du départ du bâtiment ou de l’aéronef auquel il appartient ou à bord duquel il est embarqué.

« Constitue une formation de rattachement : un corps, un détachement, une base, une formation, un bâtiment ou aéronef militaire, un établissement civil ou militaire de santé en cas d’hospitalisation, un établissement pénitentiaire en cas de détention.

« Est compétente pour connaître des faits de désertion à l’étranger la juridiction prévue à l’article 697-4 du code de procédure pénale.

« Dans les cas prévus au 1°, le militaire est déclaré déserteur à l’expiration d’un délai de trois jours à compter du lendemain du jour où l’absence sans autorisation est constatée ou du lendemain du terme prévu de la mission, de la permission ou du congé. Ce délai est réduit à un jour en temps de guerre.

« Aucun délai de grâce ne bénéficie au militaire se trouvant dans les circonstances des 2° et 3°.

« Art. L. 321-6. – Le fait pour tout militaire de déserter à l’étranger en temps de paix est puni de cinq ans d’emprisonnement. S’il est officier, il encourt une peine de dix ans d’emprisonnement.

« Toutefois, lorsque le militaire déserte à l’étranger et se maintient ou revient sur le territoire de la République, la peine d’emprisonnement encourue est réduite à trois ans.

« Art. L. 321-7. – La peine d’emprisonnement encourue peut être portée à dix ans contre tout militaire qui a déserté à l’étranger :

« 1° En emportant une arme ou du matériel de l’État ;

« 2° En étant de service ;

« 3° Avec complot.

« Est réputée désertion avec complot toute désertion à l’étranger effectuée de concert par plus de deux individus. » ;

5° Les articles L. 321-8 à L. 321-10 sont abrogés. –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 54, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Après l’article 24 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au IV de l’article 2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires, après les mots : « de refus », sont insérés les mots : « d’inscription ou ».

II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigés :

« Chapitre IX bis « Dispositions relatives aux experts judiciaires »

La parole est à M. le garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Cet amendement vise à introduire une obligation de motivation des décisions de refus d’inscription initiale sur une liste d’experts judiciaires.

Cette disposition est nécessaire pour mettre la législation française en conformité avec le droit de l’Union européenne, plus précisément avec les exigences posées par la jurisprudence récente de la Cour de justice de l’Union européenne consacrée par l’arrêt Penarroja, rendu le 17 mars dernier.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

C’est une bonne mesure, à laquelle la commission est favorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 24 bis.

chapitre x

Dispositions diverses

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 51, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Avant l'article 25, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.- Les IV, V et VI de l’article 1er de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques sont remplacés par un IV ainsi rédigé :

« IV.- Dans le ressort d’une même cour d'appel, lorsque la bonne administration de la justice le justifie, les avocats inscrits aux barreaux des tribunaux de grande instance dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État après consultation du Conseil national des barreaux, peuvent postuler devant chacun de ces tribunaux.

« Les deuxième et troisième alinéas du III leur sont applicables. »

II.- Le I entre en vigueur un mois après la publication du décret en Conseil d'État prévu au même paragraphe et au plus tard le 1er janvier 2012.

La parole est à M. le garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Cet amendement est relatif à la multipostulation devant les tribunaux de grande instance.

Cette affaire, qui est née de la réforme de la carte judiciaire, concernait initialement deux secteurs : d’une part, celui des barreaux de Bordeaux et Libourne, d’autre part, celui des barreaux de Nîmes et d’Alès.

La multipostulation, qui se fait en fonction d’un monopole territorial de la postulation, fait naturellement débat. Je rappelle que le rapport Darrois envisageait même sa suppression à l’horizon 2014. Mais il importe d’abord de savoir si cela est utile.

Des dérogations existent déjà dans notre droit. Ainsi, la région parisienne jouit d’un régime spécial à la suite du démembrement du tribunal de grande instance de Paris, avec la création des tribunaux périphériques de Bobigny, Nanterre et Créteil ; ce régime, qui devait être transitoire, s’est pérennisé.

La loi de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées a étendu cette multipostulation à la Gironde et au Gard, dans les ressorts des cours d’appel de Bordeaux et de Nîmes.

Comme j’ai eu l’occasion de le souligner au cours d’un précédent débat, la multipostulation dans le Gard et la Gironde, qui est liée à une modification de la carte judiciaire, devait s’accompagner de l’accord des barreaux concernés. Or ceux-ci n’ont pas tous donné leur accord : le barreau de Libourne, après avoir pris une autre position, du moins son bâtonnier, s’y est opposé, et le barreau d’Alès s’est opposé de façon constante à la multipostulation avec Nîmes.

Au nom du Gouvernement, j’ai pris l’engagement, en séance publique, de poursuivre la concertation avec les intéressés, afin de trouver une solution qui satisfasse toutes les parties et qui pourrait être discutée à l’occasion de l’examen du présent projet de loi. C’est l’objet de cet amendement, qui prévoit un dispositif global, ne stigmatisant aucun barreau et permettant une évolution du monopole territorial de la postulation de nature à garantir l’accord de la profession trouvé dans la sérénité et la concertation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Monsieur le garde des sceaux, une loi qui a suscité bien des débats est entrée en vigueur tout récemment : à la fin du mois dernier.

Elle concernait la situation des barreaux de Bordeaux et de Libourne, d’une part, de Nîmes et d’Alès, d’autre part. Dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire, les juridictions de Libourne et d’Alès ont été maintenues, grâce au rattachement de tribunaux d’instance qui étaient dans le ressort des juridictions de Bordeaux et de Nîmes. Le Parlement a ensuite décidé de permettre une multipostulation des avocats inscrits à Bordeaux et Libourne et de ceux inscrits à Nîmes et Alès.

Alors, accord ou pas au moment de la réforme ? Toujours est-il que le résultat était une diminution du ressort de postulation des avocats de Bordeaux et de Nîmes.

Il s’est passé la même chose lorsqu’ont été créés les tribunaux de grande instance de la petite couronne : on a souhaité permettre la multipostulation aux avocats de Paris, à Bobigny, à Nanterre et à Créteil. C’est donc bien le même système qui a été adopté.

Monsieur le garde des sceaux, vous nous dites qu’une concertation va être engagée, qui doit permettre d’avancer. Cela implique une remise en cause de ce qui a été voté par le Parlement voilà peu.

Sur le fond, je vous rappelle que les avoués, qui étaient en fin de compte en cour d’appel des postulants obligatoires, ont été supprimés. Aujourd'hui, tous les avocats du ressort peuvent…

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Postuler !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Non, ils peuvent aller défendre en appel sans avoir à recourir à un avoué pour postuler. Par contre, ils ont l’obligation de faire appel à un confrère pour postuler dans le tribunal de grande instance d’à côté.

Honnêtement, avec le développement des nouveaux moyens technologiques, je pense que la postulation finira par disparaître.

Nous souhaitons, quant à nous, qu’il y ait une concertation approfondie. Le rapport Darrois, c’est vrai, avait préconisé la fin de la postulation, mais je ne suis pas sûr que les membres du groupe de travail présidé par cet éminent avocat, d’une grande compétence, représentent l’ensemble de la profession d’avocat de Paris et de la province.

Il est évident – et vous le savez bien, monsieur le garde des sceaux, car vous êtes proche du terrain – que, pour certains avocats des barreaux de province, la postulation représente une part non négligeable de leur activité et que des évolutions sont nécessaires. Je crois que le Conseil national des barreaux réfléchit à cette question, à laquelle il est souhaitable que les conférences des bâtonniers s’intéressent également.

Mais procéder de cette manière, en disant que cette démarche sera d’ordre réglementaire et que l’on pourra modifier les règles ne me paraît pas judicieux. Je crois qu’il faudra des règles générales, peut-être pour permettre la postulation devant tous les tribunaux du ressort d’une cour d’appel ; on peut tout imaginer !

La commission des lois a estimé que votre idée était intéressante, monsieur le garde des sceaux, mais qu’il fallait prolonger la réflexion. C'est pourquoi, à notre grand regret, nous n’avons pas donné un avis favorable sur votre amendement.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Monsieur le président Hyest, je comprends très bien la critique que vous formulez à l’encontre de l’amendement du Gouvernement.

Nous avons essayé de trouver une solution sans rien imposer aux barreaux de Libourne et d’Alès, qui se sentent maltraités. Il faut être clair : j’ai très vivement souhaité que les professionnels s’entendent entre eux ; or j’ai dû constater qu’ils n’avaient pas fait beaucoup d’efforts de négociation.

C'est la raison pour laquelle nous avons essayé de trouver une solution. J’avais promis de déposer un amendement. Je maintiens donc ma position. Il appartient maintenant au Sénat de se prononcer.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Monsieur le ministre, je pense que le président de la commission des lois a émis un avis tout à fait sage.

La postulation est inéluctablement amenée à disparaître, mais nous devons veiller à ce que cette évolution se fasse dans de bonnes conditions, afin de ne pas mettre en péril les petits et moyens barreaux de notre tissu local. Nous avons besoin de compétences, tant intellectuelles que strictement juridiques. Or, à force d’affaiblir ces petits et moyens barreaux, nous allons aboutir à un déséquilibre territorial considérable.

Monsieur le ministre, votre amendement présente un gros inconvénient : en l’état, il signe la mort de la postulation puisqu’il permet, dans le ressort de chaque cour d’appel, de la supprimer. Dire que cela va se faire petit à petit, de cour d’appel en cour d’appel, ça n’a aucun sens !

J’exerçais à Paris quand les barreaux périphériques ont été créés : je peux vous assurer que la situation de la région parisienne et des grandes métropoles est très différente de celle du reste du pays.

Pour ce qui est du rapport Darrois, je ne voudrais pas être désagréable, mais il me semble qu’il aurait pu être utilement fait appel à d’autres compétences qu’à celles de l’excellent Me Darrois sur les questions de la postulation dans les petits et moyens barreaux et de l’aide juridictionnelle...

Mes chers collègues, nous devons procéder d’une façon différente et trouver d’autres méthodes pour accompagner la marche de l’histoire.

L'amendement n'est pas adopté.

(Supprimé)

L’article 2-15 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les associations et fédérations d’associations prévues par le présent article peuvent demander réparation des frais exposés en lien avec l’accident et qui sont la conséquence directe ou indirecte de l’infraction pour laquelle elles ont exercé les droits reconnus à la partie civile. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 12, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

En vérité, monsieur le président, j’ai déjà défendu les amendements n° 12, 13 et 14 rectifié.

Si certaines dispositions du texte ne me gênent pas, d’autres, comme l’article 25 ter, suscitent de ma part une opposition totale.

En tout cas, je suis par principe hostile au dépôt en commission de multiples amendements par le Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

L’article 25 bis est effectivement issu d’un amendement du Gouvernement. Il s’agit néanmoins d’une excellente mesure ! La commission est donc défavorable à l’amendement n° 12.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Compte tenu du grand esprit d’ouverture dont a fait preuve M. le rapporteur, je suis du même avis que lui !

Sourires

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 25 bis est adopté.

I. – Au huitième alinéa de l’article 56 du même code, après les mots : « Banque de France » sont insérés les mots : «, ou sur un compte ouvert auprès d’un établissement bancaire par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués. »

II. – Le huitième alinéa de l’article 97 du même code est ainsi modifié :

1° Les mots : « le greffier à en faire le » sont remplacés par le mot : « leur » ;

2° Après les mots : « Banque de France » sont insérés les mots : «, ou sur un compte ouvert auprès d’un établissement bancaire par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 13 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 26 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

L'amendement n° 13 a déjà été défendu.

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 26 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Nous sommes pour la suppression de cet article, qui est issu d’un amendement du Gouvernement et qui tend à permettre que les fonds saisis dans le cadre d’une procédure pénale soient déposés dans un établissement bancaire autre que la Banque de France ou la Caisse des dépôts.

Il s’agit d’une question de principe : il ne nous paraît pas normal qu’un établissement bancaire privé puisse tirer des bénéfices à partir du dépôt d’avoirs par l’effet d’une procédure pénale, donc d’une prérogative de puissance publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Il n’y a pas d’établissements de la Caisse des dépôts et consignations ou de la Banque de France partout dans notre pays ; il y en a même de moins en moins ! La commission est donc défavorable à ces amendements.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Même avis.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'article 25 ter est adopté.

À la première phrase du premier alinéa de l’article 475-1 du même code, après les mots : « l’auteur de l’infraction » sont insérés les mots : « ou la personne condamnée civilement en application de l’article 470-1 ».

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 14 rectifié, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a déjà été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

La commission est défavorable à la suppression de ce qui lui apparaît comme une bonne mesure.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 25 quater est adopté.

I. –

Non modifié

II. – L’article 23 entre en vigueur au 1er janvier 2012. À cette date, les procédures en cours devant le tribunal aux armées sont transférées en l’état aux juridictions de droit commun spécialisées en matière militaire ayant leur siège à Paris sans qu’il y ait lieu de renouveler les actes, formalités et jugements régulièrement intervenus antérieurement à la date de sa suppression, à l’exception des convocations et citations données aux parties et aux témoins qui n’auraient pas été suivies d’une comparution devant la juridiction supprimée.

Les citations et convocations peuvent être délivrées avant l’entrée en vigueur de l’article 23 pour une comparution, devant les juridictions de droit commun spécialisées en matière militaire ayant leur siège à Paris, à une date postérieure à cette entrée en vigueur.

Les parties ayant comparu devant la juridiction supprimée sont informées par l’une ou l’autre des juridictions qu’il leur appartient d’accomplir les actes de la procédure devant les juridictions de droit commun spécialisées en matière militaire ayant leur siège à Paris auxquelles les procédures sont transférées.

Les archives et les minutes du greffe du tribunal aux armées supprimé sont transférées au greffe des juridictions de droit commun spécialisées en matière militaire ayant leur siège à Paris. Les frais de transfert de ces archives et minutes sont pris sur le crédit ouvert à cet effet au budget du ministère de la justice.

III. – Les articles 1er et 2 sont applicables aux procédures en cours dans les conditions suivantes :

En matière civile, la juridiction de proximité demeure compétente pour connaître des procédures en cours jusqu’au premier jour du septième mois suivant la date fixée au I, date à compter de laquelle ces procédures sont transférées en l’état au tribunal d’instance. Dans les matières dont la connaissance est transférée par l’effet de la présente loi au tribunal d’instance, les convocations et assignations données aux parties peuvent être délivrées avant la date fixée au I pour une comparution postérieure à cette date devant le tribunal d’instance.

En matière pénale, les procédures en cours sont transférées en l’état au tribunal de police. Pour les contraventions relevant du tribunal de police en vertu de la présente loi, les convocations et citations données aux parties et aux témoins peuvent être délivrées avant la date fixée au I pour une comparution postérieure à cette date devant le tribunal de police.

Il n’y a pas lieu de renouveler les actes, formalités et jugements régulièrement intervenus antérieurement au transfert des procédures civiles ou pénales, à l’exception des convocations, citations et assignations données aux parties et aux témoins qui n’auraient pas été suivies d’une comparution devant la juridiction supprimée.

Les parties ayant comparu devant la juridiction supprimée sont informées par l’une ou l’autre des juridictions qu’il leur appartient d’accomplir les actes de la procédure devant le tribunal auquel les procédures sont transférées.

Les archives et les minutes du greffe de la juridiction de proximité sont transférées au greffe du tribunal d’instance ou du tribunal de police selon la nature de la procédure. Les frais de transfert de ces archives et minutes sont pris sur le crédit ouvert à cet effet au budget du ministère de la justice.

IV. –

Non modifié

V §(nouveau). – À compter de la date prévue à la première phrase du premier alinéa du II de l’article 30 de la loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 tendant à renforcer l’équilibre de la procédure pénale, le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° À l’article 628-1, les mots : « juge d’instruction » sont remplacés par les mots : « pôle de l’instruction » ;

2° Aux articles 628-2 à 628-6, les mots : « juge d’instruction » sont remplacés par les mots : « collège de l’instruction ».

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 53, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Après les mots :

à l’exception de ses articles 15 à 24

insérer le mot :

ter

La parole est à M. le garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Il s’agit d’un amendement de conséquence.

L'amendement est adopté.

L'article 26 est adopté.

Les articles 1er, 2, 5, 6, 14, 16 à 24 et 26 sont applicables dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 52, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après les mots :

insérer le mot :

ter

La parole est à M. le garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, garde des sceaux

Il s’agit encore d’un amendement de conséquence.

L'amendement est adopté.

L'article 27 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

Le projet de loi est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

M. le président du Sénat a été informé par M. le président du Conseil constitutionnel que celui-ci a été saisi ce jour d’une demande d’examen de la conformité à la Constitution par plus de soixante sénateurs de la loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit.

Acte est donné de cette communication.

Le texte de cette saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de la distribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité.

Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l’article 12 du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 26 avril 2011 :

À neuf heures trente :

1. Questions orales.

À quatorze heures trente :

2. Débat sur la désindustrialisation des territoires.

3. Question orale avec débat n° 5 de Mme Brigitte Gonthier-Maurin à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, sur la réforme de la formation des enseignants

Mme Brigitte Gonthier-Maurin interroge M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative sur la réforme de la formation des enseignants.

Plusieurs rapports émanant du ministère pointent de réelles difficultés dans la mise en place de la masterisation.

En juillet dernier, un rapport de l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale alertait le ministère sur l’insuffisance des moyens prévus pour financer la formation des professeurs débutants et soulignait le risque de recours juridictionnel des stagiaires au motif d’une rupture d’égalité de traitement. Ce rapport montrait en effet comment la situation sur le terrain se traduisait par une extrême hétérogénéité des situations pour les enseignants stagiaires, se retrouvant sans aucune formation devant les élèves, pour certains dès la rentrée de septembre.

Une étude, datée de novembre, relative au dispositif d’accueil, d’accompagnement et de formation des enseignants stagiaires des premier et second degrés émanant de la direction générale des ressources humaines du ministère, fait état des difficultés rencontrées par les enseignants stagiaires : fatigue, difficulté à concilier dans l’urgence organisation des classes et formation, manque de méthode, manque de recul, retard dans la nomination de tuteur… Les jeunes enseignants se trouvent ainsi dépourvus des outils pour remplir leurs missions auprès de leurs élèves.

Le 19 janvier dernier, lors de ses vœux au monde la culture et de la connaissance, le président de la République a déclaré qu’il fallait remettre « sur le chantier certains éléments de cette formation », afin « de mettre devant nos enfants des professeurs mieux formés, connaissant mieux leurs matières et mieux préparés à l’enseignement d’une classe d’âge ». Aussi, elle demande au ministre comment et dans quels délais le Gouvernement compte revenir sur cette réforme afin de satisfaire pleinement à ce triple objectif.

Le soir et, éventuellement, la nuit :

4. Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, de libéralisation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques (254 rectifié, 2010-2011).

Rapport de M. Jean-Jacques Hyest, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale (430, 2010-2011).

Texte de la commission (n° 431, 2010-2011).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.