Intervention de David Assouline

Réunion du 13 avril 2011 à 21h45
Immigration intégration et nationalité — Article 37

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Je ne comprends pas que l’on perde autant de temps sur une mesure que le Conseil constitutionnel va probablement sanctionner, ce qui fragiliserait tout votre édifice.

Pis, ces dispositions contreviennent aussi à l’esprit de la directive Retour.

En effet, celle-ci exige que le contrôle juridictionnel de la légalité de la rétention intervienne dans les meilleurs délais. Vous nous dites sans cesse qu’il faut transposer la directive, que le projet de loi nous met en conformité avec le droit européen et que nous ne pourrions y trouver à redire. Mais sur ce point, vous sortez du cadre de la directive. Pourquoi ? Vous faites de la transposition à dimension variable…

Les meilleurs délais sont pratiqués actuellement – quarante-huit heures ; la justice fonctionne correctement. Tenons-nous-en là !

Dernier point, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales précise, dans le paragraphe 3 de son article 5, – vous pouvez aller vérifier – que « toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1.c du présent article, doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires […] ». Il ne s’agit donc pas des juridictions administratives. Nous sommes bien d’accord sur ce point, je l’espère !

Ce même paragraphe se poursuit ainsi : « [elle] a le droit d’être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure ». Il me semble aussi que cette formulation est assez claire.

Aussi, mes chers collègues, je vous demande de rester proches de ces textes fondamentaux et de ne pas autoriser cette mutation contraire à notre Constitution.

Nous en avons parfaitement conscience, si vous demandez cette modification, c’est parce que vous savez qu’elle aura pour principale conséquence de permettre au juge administratif de statuer sur la légalité de la mesure d’éloignement avant même que l’étranger ait comparu devant le juge des libertés et de la détention, ce dernier ayant, lui, pour mission de contrôler les conditions d’arrestation, de placement en garde à vue et de maintien en centre de rétention administrative.

Ainsi, les étrangers pourront être éloignés sans que le juge des libertés et de la détention ait pu exercer son contrôle sur la validité de l’interpellation. Il s’agit d’un contournement manifeste, que rien ne légitime. L’efficacité a ses limites. La première d’entre elles est notre droit et notre Constitution.

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