Intervention de Thomas Cazenave

Réunion du 25 novembre 2023 à 21h30
Loi de finances pour 2024 — Article 5 duodecies

Thomas Cazenave :

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai bien entendu la présentation de vos amendements. Vous partez tous du constat partagé selon lequel, dans certains de nos territoires, nos compatriotes sont confrontés à de grandes difficultés d’accès au logement et à une concurrence entre logements temporaires touristiques et logements à l’année pour ceux qui travaillent et souhaitent se loger sur place.

Je vais essayer de partager avec vous deux convictions fortes.

La première est qu’il est très compliqué de retoucher la fiscalité du logement par voie d’amendement, comme le rapporteur général le soulignait en introduction, sans étude d’impact préalable et sans connaître les effets potentiels des mesures qui seraient adoptées.

La seconde est une conviction profonde : la fiscalité est un paramètre, mais elle ne résoudra en rien à elle seule les problématiques légitimes que vous avez décrites concernant les tensions dans l’accès au logement de longue durée dans nos territoires. Si c’était le cas, ce serait facile !

Rappelons quelques éléments, en veillant à ne pas rendre plus complexe encore la présentation d’une situation qui l’est déjà beaucoup en elle-même, ainsi que l’ont montré les défenses de vos différents amendements.

Les bailleurs qui optent pour le régime microfoncier peuvent bénéficier d’un abattement de 30 % jusqu’à 15 000 euros de revenus pour la location nue, d’un abattement de 50 % jusqu’à 77 000 euros de revenus pour la location de meublés – contrairement à ce que certains orateurs ont indiqué, cette catégorie inclut, en sus des logements loués sur la plateforme Airbnb, des logements étudiants et des logements de droit commun meublés – ou d’un abattement de 71 % jusqu’à 188 000 euros de revenus pour des locations de meublés touristiques classés. Et tout cela n’inclut pas les bailleurs, pourtant nombreux, qui optent pour le régime réel.

Je rappelle – c’est à mon sens ce qui explique la prudence du rapporteur général lors de son propos liminaire – que 4, 7 millions de foyers déclarent des revenus à la location nue, tandis que seulement 600 000 foyers déclarent des revenus au régime microfoncier. Chaque modification d’un paramètre aura donc des effets que nous ne pouvons pas nécessairement anticiper ni précisément cibler, par exemple sur les locations Airbnb que certains orateurs souhaitent viser.

J’ajoute, sans vouloir complexifier le paysage à l’excès, que les loueurs en meublé non professionnel bénéficient eux aussi des avantages fiscaux que j’ai précédemment rappelés.

L’assiette de l’imposition sur le foncier s’établit à 39 milliards d’euros et celle de l’imposition sur les locations meublées à 24 milliards d’euros. Il me paraît important de rappeler ces ordres de grandeur, car tout déplacement des curseurs emporte des effets de même échelle.

Porter l’abattement sur la location nue au régime microfoncier de 30 % à 40 % emporte un coût de 1 milliard d’euros de coûts pour les finances publiques. À l’inverse, porter l’abattement sur la location meublée au même régime de 50 % à 40 % a pour effet d’accroître la pression fiscale sur les contribuables qui déclarent des revenus locatifs.

Dans ce paysage complexe, la question de la fiscalité de la location temporaire s’inscrit dans un cadre bien plus large, si bien que toute modification risque d’entraîner des effets de transfert.

L’amendement qui a été adopté par l’Assemblée nationale vise à diminuer le taux d’abattement applicable aux revenus tirés de la location d’un meublé touristique – ce que l’on appelle le micro-BIC – de 71 % à 50 %. Nous supprimons donc ce que l’on pourrait qualifier de super avantage fiscal, en ciblant uniquement les meublés touristiques et en préservant les gîtes ruraux et les logements meublés classés, exclus du dispositif.

Par cet amendement, nous abaissons par ailleurs le plafond des revenus déductibles de 188 000 euros à 77 000 euros. L’avantage fiscal le plus important s’en trouve donc considérablement amoindri.

Il s’agit d’une première réponse, mais, comme le Gouvernement l’a indiqué clairement lors des échanges avec les parlementaires, ce dispositif ne résoudra pas toutes les difficultés que vous rencontrez dans vos territoires.

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