Intervention de Laurent Somon

Réunion du 25 novembre 2023 à 21h30
Loi de finances pour 2024 — Après l'article 5 novodecies

Photo de Laurent SomonLaurent Somon :

Il ne fait aucun doute que le soutien du CNM à la filière musicale impose d’élaborer des sources de financement pérennes. Ce point avait d’ailleurs été identifié par le rapporteur Jean-Raymond Hugonet dès la création du CNM, en 2019.

Les enjeux financiers sont donc bien connus depuis longtemps. Il reviendrait, en toute logique, au Gouvernement de prendre ses responsabilités, comme le Président de la République s’y est engagé à l’occasion de la fête de la musique, le 21 juin dernier. Il déclarait alors que, à défaut d’accord entre les différents acteurs de la filière, le Gouvernement saisirait le Parlement d’une « contribution obligatoire des plateformes de streaming », comme envisagé par Julien Bargeton dans son rapport déjà évoqué.

Toutefois, les négociations piétinent. Le Gouvernement n’a pas retenu cette taxe comme solution dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité à l’Assemblée nationale, alors même que plusieurs amendements, dont certains étaient issus de sa majorité, l’y invitaient.

Je regrette que le Sénat soit finalement placé en situation d’arbitre. La commission des finances et la commission de la culture, dont le président a déposé un amendement identique à celui du rapporteur général, ont parfaitement identifié et analysé les diverses solutions possibles. Celle qui a été retenue dans ces amendements est une taxe sur l’écoute en ligne de musique gratuite ou payante, taxe dont les conditions de mise en œuvre devraient préserver les équilibres du secteur.

Il faut néanmoins veiller aux conséquences exactes de cette disposition. La taxe proposée vise les revenus publicitaires, mais aussi et surtout les offres d’abonnement des plateformes diffusant de la musique. Or les acteurs français et européens accusent déjà un certain retard en matière d’abonnement par rapport à la dynamique observée dans les autres grands marchés de la musique.

Le secteur n’est-il pas encore trop fragile pour supporter des coûts supplémentaires ? Les plateformes européennes, telles que Deezer ou Spotify, développent en France l’usage de l’abonnement, au bénéfice de la scène musicale française ; étant déficitaires ou à peine rentables, auront-elles la capacité d’absorber sur des marges inexistantes le montant de la taxe ? Ne désinvestiront-elles pas ou ne feront-elles pas supporter le coût du dispositif aux consommateurs ? Soyons donc vigilants : ne pénalisons pas les plateformes européennes !

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