Ce budget vert cache l’absence d’un cadre de financement pluriannuel qui permettrait de faire converger la trajectoire environnementale et la trajectoire des finances publiques. Les investissements que l’État, les ménages et les entreprises devront financer étant considérables, ils doivent être anticipés.
Les cinquante sites industriels les plus émetteurs de CO2 nécessiteront par exemple des investissements dont le montant s’établit entre 50 milliards et 70 milliards d’euros. Les collectivités devront pour leur part débourser 80 milliards d’euros en 2030, contre 55 milliards d’euros aujourd’hui.
Nous ne pouvons donc que saluer l’introduction, au cours de la navette parlementaire, d’un article dans la loi de programmation des finances publiques (LPFP) obligeant le Gouvernement à transmettre chaque année une stratégie pluriannuelle fixant les financements de la transition écologique et de la politique énergétique.
Il importe qu’une telle réflexion soit menée, car la transition énergétique aura des conséquences significatives sur nos équilibres financiers.
Prenons l’exemple du financement de la politique de l’eau. La sobriété a entraîné une baisse de 10 % de la consommation sur une année, mais, dans le même temps, les recettes ont reculé dans la même proportion. Or le besoin d’investissements pour adapter nos réseaux au changement climatique est estimé à près de 3 milliards d’euros pendant cinq ans.
Ce projet de loi de finances n’apporte, hélas ! aucune réponse.
Pour reprendre les mots du rapporteur général, l’article 49 undecies s’apparente – pardon de le dire, monsieur le ministre – à un simple coup de peinture.
La possibilité désormais offerte aux collectivités de joindre un « état des engagements financiers concourant à la transition écologique » à leur budget primitif ne changera rien ni au coût ni au poids de la dette sur leurs finances. Du reste, rien aujourd’hui n’interdit que les rapports budgétaires contiennent des graphiques permettant d’illustrer l’endettement des collectivités.
L’action des collectivités est d’autant plus difficile que le Gouvernement continue d’allouer des financements par à-coups. La communication sur la flexibilité du fonds vert et son adaptation aux réalités locales se heurte aux faits : les crédits pour 2024 sont en effet massivement réorientés, à hauteur de 500 millions d’euros, vers la rénovation du bâti scolaire, les dossiers devant de plus être déposés dans un délai très bref.
Dans ce contexte, pourquoi ne pas mettre en place, à l’instar de ce qui existe pour la politique du tourisme, une fiscalité affectée avec une obligation de budget dédié ? Comme chaque année, le Sénat vous fera des propositions en ce sens, monsieur le ministre.
Plus généralement, notre système de financement marche sur la tête. Près de 2 milliards d’euros d’aides de l’État visant à titre principal la transition écologique des entreprises ont été versées par cinq opérateurs au travers de 340 dispositifs différents. Ces aides ont été créées par stratification progressive, sans réelle réflexion sur la cohérence d’ensemble.
Alors que l’inspection générale des finances appelle dans son rapport en tout premier lieu à une discipline d’évaluation, demain, deux ministres dévoileront une plateforme dédiée à un accès simplifié des entreprises à ces aides, avant toute réflexion sur le fond.
Il est pourtant urgent d’agir pour la décarbonation de notre économie. À défaut, notre système financier pourrait en pâtir demain.
En effet, comme le souligne la Banque de France dans une note, les fonds d’investissement et, par là même les compagnies d’assurances, sont fortement exposés au risque associé au changement climatique, en particulier aux risques climatiques de transition.
Pour notre groupe, l’écologie ne doit pas rimer avec la décroissance. Nous estimons que l’écologie doit coïncider avec une meilleure croissance et une véritable souveraineté industrielle. Or non, ce PLF ne garantit pas la souveraineté de la France dans tous les domaines.
En la matière, nous commençons à peine à réagir. Les modalités d’attribution du bonus automobile évoluent certes en 2024 – je regrette que le ministre Bruno Le Maire ne soit plus présent pour m’entendre