Certes, quelques mesures sont prises pour lutter contre l’inflation. Elles ne sauraient cependant suffire à éviter la précarisation d’une part toujours plus importante de notre société ni réduire la fracture territoriale.
Dans un contexte économique et social dégradé, l’État a toujours pu compter sur les collectivités territoriales. Ces dernières doivent, elles aussi, pouvoir compter sur l’État.
Depuis 2017, le Gouvernement n’a cessé de souffler le chaud et le froid. Alors que les collectivités territoriales portent 70 % de l’investissement public en France, leur rôle est sans cesse sous-estimé et leur gestion remise en question.
Il convient de le rappeler : les élus locaux ne sont pas responsables de notre dette et de nos déficits publics. La dette des collectivités territoriales ne représente que 8 % de la dette publique totale, ce qui rend d’autant plus questionnable la contrainte budgétaire imposée par l’État.
Pourquoi cette méfiance envers nos collectivités locales et les élus locaux ? Rien ne la justifie. Pourtant, il semble que du côté de Bercy, il y ait méfiance. Contraindre les dépenses à un rythme inférieur à celui de l’inflation, c’est ce que j’appelle de la méfiance.
La mesure des 0, 5 %, cette règle d’airain, est tout aussi dure que les contrats de Cahors. Elle peut être perçue comme une externalisation de la rigueur budgétaire sur le dos des collectivités, les obligeant à adopter des politiques d’austérité.
La baisse des impôts de production, la suppression de la taxe d’habitation et d’autres réformes fiscales coupent les élus locaux de l’indispensable lien avec leur territoire.
Le processus de mitage fiscal engagé par le Gouvernement depuis 2017 transforme progressivement les impôts locaux en compensations et dotations. En conséquence, les collectivités locales sont éloignées de la gestion de leurs propres ressources et ne conservent qu’une marge de manœuvre réduite. Le projet de loi de finances pour 2024 s’inscrit parfaitement dans cette logique en plafonnant la progression des dépenses de fonctionnement, ce qui réduit la liberté d’action des collectivités.
Les 220 millions d’euros supplémentaires de DGF accordés pour 2024 représentent moins de 1 % de l’inflation, alors qu’une indexation sur l’inflation aurait conduit à une augmentation comprise entre 1 milliard d’euros et 1, 3 milliard d’euros.
Cette situation met en lumière le déséquilibre entre les attentes et les ressources disponibles pour les élus locaux. Ces derniers dénoncent d’ailleurs, à raison, une attaque contre l’autonomie financière des collectivités.
Le groupe socialiste du Sénat défendra par voie d’amendement l’indexation de la dotation globale de fonctionnement sur l’inflation, afin de rétablir une certaine équité financière.
Au total, nous pouvons estimer que ce PLF pour 2024 entraîne, pour les collectivités territoriales, une perte de ressources de plus de 2, 2 milliards d’euros.
Cette perte résulte de divers facteurs, dont la fin des dispositifs de protection contre la hausse des prix de l’énergie, la ponction de 67 millions d’euros sur diverses dotations et l’absence de compensation de la revalorisation, amplement justifiée, de 1, 5 % de la valeur du point d’indice de la fonction publique.
Ces chiffres mettent en évidence la nécessité de reconsidérer la trajectoire budgétaire actuelle, afin de préserver la capacité des collectivités à répondre aux besoins de leurs territoires.
Monsieur le ministre, le panier fiscal des collectivités est aujourd’hui quasiment nationalisé. En 2023, celles-ci devraient percevoir 53 milliards d’euros de fraction de TVA, soit près du quart de la TVA nette. Que se passera-t-il lorsque les recettes de TVA seront moins dynamiques ?