Intervention de Michel Guerry

Réunion du 12 mai 2005 à 15h00
Vote des français établis hors de france pour l'élection du président de la république assemblée des français de l'étranger — Adoption d'un projet de loi organique et d'un projet de loi

Photo de Michel GuerryMichel Guerry :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les deux projets de loi qui nous sont soumis aujourd'hui sont l'heureuse réponse à la demande déjà fort ancienne de nos compatriotes : simplifier le droit électoral qui leur est applicable. Cela pouvait paraître assez simple, et pourtant...

Les Français établis hors de France votent, à l'étranger, à trois occasions : l'élection du président de la République, les référendums et l'élection des conseillers qui les représentent à l'Assemblée des Français de l'étranger.

Depuis de trop nombreuses années, ces votations ne sont pas organisées sur la base du même support, ce qui est une source d'incompréhension. En effet, les listes de centre de vote servant à l'élection du président de la République et aux référendums sont distinctes de celles qui servent à l'élection des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger. De plus, les modalités d'inscription des électeurs et les procédures d'établissement et de mise à jour des listes obéissent à des règles propres. Enfin, les commissions administratives qui préparent les listes ne sont pas composées de la même façon et les dates de leurs travaux ne coïncident pas.

La complexité de cette situation rend celle-ci difficile à comprendre, tant par les électeurs que par les agents consulaires eux-mêmes, en raison de dispositions inutilement dissemblables, alors que, en pratique, elles se rapportent toutes au même objet.

Réclamée depuis très longtemps par les élus de l'Assemblée des Français de l'étranger, la fusion des deux listes électorales apporte une simplification attendue par nos compatriotes hors de France. Elle permet de se rapprocher du droit commun et d'améliorer ainsi les conditions d'expression du suffrage universel. Elle devrait également être un facteur d'augmentation de la participation de nos compatriotes de l'étranger aux élections.

Désormais, chaque ambassade pourvue d'une circonscription consulaire et chaque poste consulaire gérera une seule liste électorale consulaire.

Le régime des centres de vote - créé par la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 - disparaît : l'unité territoriale de base devient la circonscription consulaire.

Toutefois, si un poste se trouve, momentanément ou durablement, dans l'impossibilité matérielle d'assurer la gestion de la liste électorale consulaire pour le compte de sa circonscription, il sera possible, par décret, de délocaliser cette tâche vers un autre poste. Cette mesure est d'autant plus appréciable en ce qui concerne les pays dits « à risque ».

La liste électorale consulaire servira désormais de support unique à tous les scrutins qui ont lieu à l'étranger. Il s'agit de tout scrutin organisé à l'étranger pour lequel la France constitue une circonscription électorale unique - l'élection du président de la République et les référendums, c'est-à-dire les scrutins nationaux - et de l'élection des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger.

Les modalités d'inscription sont simplifiées par une réduction significative du nombre des situations dans lesquelles l'électeur pourra se trouver sans pour autant porter atteinte à ses droits ni à ses capacités de choix.

Le lien direct entre l'inscription au registre des Français établis hors de France - l'ancienne immatriculation - et l'inscription sur la liste électorale consulaire est un facteur de simplification très appréciable.

En premier lieu, tout Français demandant son inscription sur la liste électorale consulaire sera automatiquement inscrit au registre des Français établis hors de France.

En second lieu, tout Français, lors de son inscription au registre des Français établis hors de France, sera informé que, sauf opposition de sa part, il sera inscrit sur la liste électorale consulaire. Une fois inscrit sur cette liste, il pourra cependant demander à ne pas participer à l'étranger aux scrutins nationaux s'il est inscrit dans une commune de France.

Ainsi, deux situations incohérentes disparaissent : le cas où un Français était inscrit sur une liste électorale sans l'être au registre des Français établis hors de France ; le cas où il pouvait être inscrit à l'étranger uniquement pour participer aux scrutins nationaux sans l'être également pour participer à l'élection des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger.

Au regard du vote à l'étranger, nos compatriotes pouvaient se trouver, avant cette réforme, dans seize cas différents. Avec la fusion des listes électorales, ils ne pourront désormais se trouver que dans sept cas. Le détail de ces cas figure aux pages 109 et 110 du rapport de M. Cointat.

Par ailleurs, les jeunes Françaises et les jeunes Français atteignant dix-huit ans et inscrits au registre des Français établis hors de France ne peuvent, aujourd'hui, s'inscrire sur les listes électorales qu'au prix d'une démarche volontaire et souvent décourageante.

Désormais, ils seront inscrits d'office au terme d'une procédure simple et facile, proche du droit commun, semblable à celle qui est appliquée dans les communes de France depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 97-1027 du 10 novembre 1997.

La fusion des listes entraîne un alignement des dispositions relatives à l'établissement et à la mise à jour de la liste électorale consulaire sur des règles unifiées proches du droit commun du code électoral.

Désormais, la liste électorale consulaire sera préparée par une commission administrative unique siégeant au poste diplomatique ou consulaire, sur la base des informations disponibles au 31 décembre. Le mode de désignation et la durée du mandat de ses membres, qui est fixée à trois ans, assureront l'équilibre entre renouvellement et continuité. Chaque mandat prendra désormais effet au 1er janvier de l'année qui suit chaque renouvellement triennal de l'Assemblée des Français de l'étranger.

La liste électorale consulaire sera arrêtée annuellement par une commission siégeant au ministère des affaires étrangères.

Lorsqu'une ambassade ou un poste consulaire sera chargé de tenir la liste d'autres circonscriptions, la commission administrative qui en dépend aura également compétence pour préparer les listes électorales consulaires de ces autres circonscriptions.

Le fait d'être inscrit sur la liste électorale consulaire attestera que l'électeur peut participer à l'élection des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger

En outre, la possibilité pour un Français inscrit sur la liste électorale consulaire de choisir de ne pas participer à l'étranger aux scrutins nationaux apparaît clairement.

La liste électorale consulaire pourra être scindée non plus seulement par ordre alphabétique, mais également selon le critère géographique de résidence de l'électeur, pour faciliter la création de bureaux de vote. Cette mesure est très importante.

En conclusion, je souhaite mettre l'accent sur les règles applicables à l'étranger en matière de propagande électorale.

Aujourd'hui, nos compatriotes - surtout ceux qui vivent dans l'Union européenne - se trouvent pénalisés, aux termes de la législation actuellement en vigueur, par une interdiction de propagande électorale dans leur pays de résidence.

Or le droit européen résultant des traités sur la Communauté européenne et sur l'Union européenne consacre la liberté d'expression politique dans les États de l'Union. Cette liberté d'expression a également été consacrée par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, avec l'arrêt Piermont contre la France, du 20 mars 1995.

L'article 10 de la loi organique du 31 janvier 1976 et l'article 5 de la loi du 7 juin 1982 ne respectent donc pas les dispositions actuelles du droit européen et des traités qui garantissent les libertés fondamentales. Rétablir cette liberté d'expression politique est le sens même des amendements que j'ai déposés avec mes collègues Paulette Brisepierre et Christiane Kammermann. Ces amendements rappellent les exigences de la liberté d'expression électorale sur le territoire de l'Union et des États membres.

Seraient ainsi autorisés les réunions, l'affichage, l'usage des moyens de communication, la liberté des correspondances, et ce dans le respect de la législation du pays hôte, l'interdiction de toute injure ou diffamation demeurant opposable.

Par ailleurs, ces amendements respectent les conclusions de la Commission de la réforme du Conseil supérieur des Français de l'étranger qui avait opté pour une distinction du régime qui est applicable dans l'Union européenne de celui qui est applicable dans les autres Etats.

Enfin, dans un souci d'harmonisation de la loi organique du 31 janvier 1976 et de la loi du 7 juin 1982, nous proposons de transposer dans cette dernière les termes de l'article 11 de la loi organique qui rendent applicables à l'étranger trois articles du code électoral - les articles L. 49, L. 50 et L. 52-1 - qui réglementent certaines formes de propagande.

Pour l'ensemble des raisons que je viens d'évoquer, et après le brillant rapport que nous a présenté notre collègue Christian Cointat, je voterai ces deux projets de loi, me réjouissant, en qualité de législateur que, pour une fois, la loi simplifie la compréhension du droit au lieu de la rendre plus complexe.

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